Au château de Versailles, une très belle exposition retrace les étapes allant du trépas de Louis XIV, le 1er septembre 1715, à ses funérailles, le 23 octobre suivant à St Denis.
L’exposition s’attache à décrire les rites funéraires, autopsie, embaumement, exposition du corps, étiquette de cour, cérémonial des funérailles, et mausolée. Elle évoque aussi la façon dont ces rites se sont perpétués jusqu’aux grandes funérailles nationales organisées par la République.
Bénéficiant d’une scénographie spectaculaire de Pier Luigi Pizzi, l’exposition est conçue comme une sorte de représentation opératique, un parcours en plusieurs actes, symbolisant le grand théâtre public qu’étaient la vie du souverain et également sa mort.
L’exposition se tient jusqu’au 21 février 2016. (Merci à Pierre-Yves pour ce reportage)
Maquette du lit où fut exposé le corps du roi dans le salon de Mercure, du 3 au 8 septembre 1715.
Itinéraire suivi par le cortège funèbre, dans la nuit du 8 au 9 septembre. Trajet nocturne non pas pour éviter la foule et les manifestations d’hostilité, mais pour respecter la symbolique de l’arrivée au jour naissant à St Denis, comme un écho à la Résurrection.
Le cénotaphe royal.
La statue mortuaire du Roi.
neoclassique
18 janvier 2016 @ 08:46
L’ exposition est effectivement spectaculaire et rend dignement hommage à ce grand roi. Elle mérite d’être vue et admirée car la scénographie rend dignement hommage à la pompe royale qui a entouré la mort de ce grand monarque.
Et dans une France, oublieuse de son passé, qui ne cesse de se proclamer républicaine et laïque, il est bon de se rappeler qu’elle fut avant tout une monarchie, sans doute la plus prestigieuse d’Europe, et surtout » la Fille aînée de l’Eglise ».
Juste une erreur dans la légende de la dernière photo: cette statue de Coysevox agenouillée n’est nullement la statue mortuaire du roi, il n’eut d’ailleurs ni gisant , ni orant, les cercueils des rois Bourbon étant simplement déposés sur des tréteaux dans la crypte de la basilique St Denis.
La statue en question figure dans le chœur de la cathédrale Notre Dame de Paris. Elle représente Louis XIV en prière devant la Vierge Marie et fait pendant à celle de son père, le roi Louis XIII présentant sa couronne et son sceptre à Notre Dame. Il s’agit là de la réalisation par Louis XIV au tout début du XVIIIe siècle du grand « Vœu de Louis XII » que fit le roi en 1638 de consacrer son royaume à la Vierge Marie pour le remercier de la naissance du dauphin ‘ futur Louis XIV) né après 23 ans de stérilité de la reine Anne d’Autriche.
Pierre-Yves
18 janvier 2016 @ 12:36
Vous avez raison néoclassique, cette exposition est vraiment très belle, et je vous remercie de corriger cette erreur de légende.
Philibert
18 janvier 2016 @ 22:13
Moi aussi, j’ai vu cette exposition et je ne peux que joindre ma voix à celles de Neoclassique et de Pierre-Yves pour encourager les lecteurs de N & R.
Comme il est dit dans l’article (« Elle évoque aussi la façon dont ces rites se sont perpétués jusqu’aux grandes funérailles nationales organisées par la République. »), il ne faut pas être étonné de voir évoquées en fin de parcours les funérailles de Napoléon et celles de Sadi Carnot, président de la troisième république assassiné en 1894.
framboiz07
18 janvier 2016 @ 14:06
J’en profite pour Vous recommander la visite de la basilique de Liesse (02-Aisne) , près du Chemin des Dames ( filles de Louis XV ) ,où ce vœu est évoqué, non loin du château de Marchais des Monaco & de la belle cathédrale de Laon, à 45 km de Reims , de sa cathédrale des sacres & de la basilique St Rémi avec les reliques du Saint .
Intéressant l’enterrement de nuit & sa symbolique .
JAusten
18 janvier 2016 @ 18:40
la première photo fiche vraiment le cafard !
Jakob van Rijsel
18 janvier 2016 @ 22:34
Cette exposition bénéficie d’une scénographie exceptionnelle.
Et, sur le fond, passionnante et riche d’informations.
A ne pas manquer si on le peut.
JvR
Germain
18 janvier 2016 @ 22:53
Dans la salle dédiée au « traitement » du corps mort, à côté des outils chirurgicaux se trouve sur une table un grand drap blanc sous lequel on devine la silhouette d’un homme allongé. Un couple de touristes indiens en s’approchant à demandé au gardien de la salle s’il s’agissait du vrai corps de Louis XIV… J’ai trouvé cela assez drole, en voyant le calme imperturbable du gardien devant une telle question !! Cela révèle aussi le fossé culturel parfois entre les visiteurs et le chateau de Versailles… :-)
Léonor
19 janvier 2016 @ 17:02
Merci Pierre-Yves.
Notre civilisation actuelle fuit l’idée de la mort.
Il est très intéressant que quelqu’un ait eu l’audace de monter une exposition sur le cérémonial de la mort du roi.
Savez-vous s’il en a été fait un catalogue ?
… j’ai toute une documentation sur les rites funéraires…… !
Pierre-Yves
22 janvier 2016 @ 10:19
Pardonnez-moi de répondre avec retard et imprécision à votre question, Leonor:
Je suppose qu’un catalogue de l’expo a été édité, mais je ne l’ai pas vu, n’étant pas passé par la boutique en sortant. J’ai préféré aller voir, au rez de chaussée du château, les appartements de Mesdames, filles de Louis XV, qui viennent d’être magnifiquement remeublés.
Corsica
21 janvier 2016 @ 07:52
Pierre-Yves, merci pour cette information. Je suis sûre que cette exposition sera passionnante.
Deux rois seulement n’ont pas été embaumés : Louis XVI et son prédécesseur. Le premier pour cause de révolution et le second pour cause de variole. En effet, alors qu’un gentilhomme demandait au chirurgien du roi de procéder à l’embaumement, celui-ci craignant la contagion répondit « Je suis prêt à le faire, mais pendant que j’opèrerai, vous tiendrez la tête ». Ce fut tellement dissuasif que le roi ne fut pas embaumé !
J’ai toujours été intéressée par les rites funéraires des différentes cultures ,et plus particulièrement, ceux qui entourent les dépouilles royales. Il y a quelques années j’avais lu un très bon article sur les effigies royales, je le retranscris pour ceux que cela pourrait intéresser.
Pendant deux siècles, les rois de France ont continué à vivre grâce à leurs « effigies vivantes » qui étaient conservées dans la basilique Saint Denis. Ces mannequins de bois, dont les mains et la tête étaient en cire, eurent cours de 1422 (funérailles de Charles VI) à 1610 (funérailles d’Henri IV). QUn mannequin de bois dont seules la tête et les mains étaient en cire, représentait le roi mort. Le visage était très ressemblant puisque réalisé d’après le masque mortuaire du défunt roi.
Cette tradition des effigies funéraires commença en 1327 quand le roi Edouard II d’Angleterre ne pût être exposé le couvercle ouvert pour cause d’assassinat. Un siècle plus tard, elle fut adoptée en France après les funérailles d’Henri IV d’Angleterre qui, en 1427, mourut à Vincennes. En 1498 le Parlement déclara que c’était une ancienne coutume (un summa vetustate) de traiter le roi mort comme s’il était vivant jusqu’au jour où son corps serait mis en terre. À partir de 1515, le corps et l’effigie sont portés séparément dans le convoi funèbre, le corps est transporté sur un chariot à l’avant du cortège, l’effigie -revêtue de tous les attributs royaux- est portée sur une litière et entourée des Présidents de Parlement en robe rouge.
En 1547, une autre étape fut franchie quand l’effigie de François Ier, réalisée par François Clouet, fut exposée seule dans l’apparat d’une salle d’honneur tendue de pourpre et d’or et que pendant huit jours, on lui présenta ses repas royaux jusqu’à ce qu’elle soit remplacée par le cercueil. Cette coutume des repas servis aux morts remontait au Moyen Age où, pendant un mois, un repas était servi à la place d’un mort. L’effigie royale disparaissait quand le cercueil était exposé dans la même salle alors tendue de noir. Le corps embaumé restait exposé une seule nuit.
Ce cérémonial eut cours jusqu’à Henri IV, dernier roi à voir son effigie funéraire exposée dans la salle d’honneur du Louvre. D’après le Mercure de France, « la salle était tapissée des plus riches tapisseries du Roi. Tout au bout était le tribunal de 4 marches. Dessus, une estrade de 3 marches sur laquelle était le lit. Au dessus un riche dais violet semé de fleurs de lys d’or. Sur une couverture de drap d’or semé de fleurs de lys d’or à parement d’hermine était l’effigie. L’Henri IV de cire était revêtu d’une chemise de toile de hollande, puis par-dessus d’une camisole de satin cramoisi doublée de taffetas rouge et bordée d’un passement d’or. Par-dessus, la grande tunique de satin azurée, semée de fleurs de lys d’or avec passement d’argent sur les manches. Par-dessus était le lourd manteau royal violet à fleurs de lys, doublé d’hermine. L’effigie porte le collier du Saint-Esprit. La tête porte un bonnet de velours rouge ; par-dessus est la couronne de pierres précieuses. Les jambes sont chaussées de bottines de velours rouge semées de fleurs de lys d’or (…). L’effigie a les mains jointes. De chaque côté de l’oreiller principal se trouvent deux coussins fleurdelisés supportant chacun sceptre et main de justice. De chaque côté du lit, des chapelles avec autel. Une chaire est même installée à droite du lit pour les prêches. En face, on place le fauteuil du Roi et la table où on le servira. »Du 10 juin jusqu’au 21, les courtisans assistèrent ainsi à un lever, à un diner et un souper fictif servis à l’effigie. Les repas sont ensuite distribués aux pauvres. A Notre-Dame comme à saint-Denis, l’effigie et le cercueil royal étaient placés côte à côte sous une chapelle ardente L’effigie ne reste que la première nuit ; elle est ensuite retirée, laissant seul le catafalque. Elle est ensuite portée au trésor où elle rejoint les autres effigies royales .
Francine du Canada
21 janvier 2016 @ 21:47
Merci beaucoup Corsica; c’est vraiment intéressant. FdC
Pierre-Yves
22 janvier 2016 @ 10:23
Vous déjà très calée sur le sujet, Corsica, par conséquent , l’expo de Versailles ne vous en apprendra pas forcément beaucoup. Mais elle montre des oeuvres et des documents qu’on n’a guère l’habitude de voir, et qui, pour certains d’entre eux, n’avaient jamais été montrés (rapports d’autopsie, par exemple).
Je ne sais pas si vos pas vous mèneront à Paris d’ici le 21 février, mais si c’est le cas, ne manquez pas cette expo, je pense que vous n’en regretterez pas la visite.
Léonor
22 janvier 2016 @ 21:57
Merci, Corsica, pour tous ces détails.
Je suis moi aussi très intéressée par tout ce qui est rites funéraires , et en ai beaucoup étudiés, mais pas ceux des royaux dont vous parlez .
On sait bien que les paléontologues estiment que l’humain est devenu véritablement humain du jour où il a commencé à inhumer les dépouilles de ses compagnons, puis à accompagner ces inhumations de rites, et de fleurs par exemple.
On oublie trop souvent que l’histoire de l’art est en grande partie faite d’oeuvres d’art funéraire. : les pyramides, les tombes mycéniennes, les sépultures étrusques, les kourghanes d’Asie centrale, les soldats de l’empereur de Chine, Galla Placidia, le Taj Mahal, les soldats de l’empereur de Chine, la sculpture bourguignonne, pour n’en citer que quelques-unes parmi les plus connues.
L’escamotage des rites, de nos jours, fait des dégâts dans l’accomplissement des deuils.
Corsica
24 janvier 2016 @ 09:37
Leonor, je partage votre point de vue, notamment sur le fait que les rites funèraires de diffèrentes cultures nous ont laissé des réalisations magnifiques qui font partie du patrimoine mondial de l’humanité. D’autres rites, nettement plus barbares, nous font apprécier de vivre ici et maintenant. Je pense au sati qui obligeait les épouses d’un radjah mais aussi d’un simple indien à accompagner l’époux sur son bûcher funérair, mais Austin aux quatre esclaves qui étaient enterrés vivants avec leur maître, un puissant Nkani ( chef gabonais). En effet, le corps de ce dernier ne pouvant être en contact avec la terre, on brisait les membres de deux esclaves allongés dans la tombe, on déposait le corps et on recouvrait avec deux autres esclaves qui avaient subi le même traitement cruel et on recouvrait de terre. Bon dimanche.
Corsica
24 janvier 2016 @ 09:39
Désolée, la correction automatique a fait des siennes. Il fallait lire bûcher funérairE et auSSI aux quatre esclaves.