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Né en exil à Londres, le prince Alexandre se rend pour la première fois dans sa patrie en 1991. Il y retournera ensuite en 1992, 1995 et 2000 au Kosovo, au Monténégro et en Bosnie ainsi qu’en 1999 et 2000 en Serbie.  Quels sont les souvenirs du prince de cette première visite ? « Lors de mon premier séjour, la situation était encore très difficile et délicate. Le régime était, si l’on peut dire, encore « très en forme ». J’avais reçu un fax, à l’époque c’était le grand moyen de communication (le prince en rit) de la part de l’opposition au régime. Il souhaitait que je vienne pour les rencontrer et parler avec eux du futur du pays. Ce fut pour moi un moment très émouvant et extraordinaire. Trois jours très intenses au cours desquels j’ai aussi pu me rendre au mausolée royal d’Oplenac pour me recueillir sur la tombe de mes ancêtres. Au cours de ce séjour, j’ai aussi rencontré des représentants étudiants de l’université de Belgrade et des trois autres universités du pays qui étaient contre la politique du régime en place ».

Nous évoquons avec le prince la guerre qui a déchiré son pays. Le prince que l’on sent très ému, déclare « 10 années de folie, beaucoup de pertes humaines et des réfugiés par milliers. Un véritable drame, un désastre total ».

Le prince Alexandre explique qu’en 1986 dans un club de réunion en Californie, il croise Henry Kissinger qui lui fait part de ses inquiétudes et qui lui expose que la Bosnie sera à moyen terme un problème au sein de la fédération yougoslave et que cela conduira à un désastre humanitaire. Comme le dit le prince, Henry Kissinger, avait malheureusement vu bien juste.

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La guerre au Kosovo et les bombardements de l’OTAN sur la Serbie (il en reste encore aujourd’hui des traces sur certains immeubles de Belgrade) commencent à changer la donne. La population se montre de plus en plus ouvertement critique au régime de Slobodan Milosevic qui les a poussés dans l’isolement total face à la communauté internationale. L’opposition politique prend aussi de l’importance.

Le prince Alexandre a servi pendant 7 ans dans l’armée britannique. Lorsqu’on lui demande si cette formation a eu une influence sur sa manière de conduire ensuite ses affaires, il répond par l’affirmative : « C’était une très bonne formation. Cela m’a appris à diriger des personnes et surtout les complications que certaines situations peuvent engendrer ».

Sentant le vent qui tourne, Slobodan Milosevic annonce la tenue d’élections pour le mois de septembre 2000. Le prince que l’on perçoit très fin stratège, saisit l’importance de ce moment. Il habite alors avec sa famille à Londres. Pour lui, il est primordial de fédérer les partis d’opposition. L’objectif étant clairement de parvenir à l’élaboration d’un programme politique commun porté par un seul candidat face à Milosevic. Mais le contexte est encore très difficile surtout que les moyens de communication sont sous l’emprise du régime.

« C’était le début d’internet et pour entrer en contact avec les 18 fractions de l’opposition, j’ai pensé qu’il fallait essayer d’utiliser l’envoi des mails. J’en ai envoyé des dizaines pour être certains et cela a parfaitement fonctionné ! Le message a pu circuler parmi les partis d’opposition en Serbie » nous explique le prince.

« J’ai fait la rencontre de Zoran Dindic (NDLR : homme politique, philosophe, maire de Belgrade et opposant déclaré à Milosevic, ce qui lui valut d’être menacé de mort et de s’exiler), nos contacts ont été très fructueux et nous sommes devenus de très bons amis. »

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« Nous avons alors organisé trois conférences successives pour élaborer le programme. La première a eu lieu à Budapest en Hongrie. Le gouvernement hongrois s’est montré absolument charmant avec nous et nous a beaucoup aidés pour la logistique. Ensuite, fort du succès de cette première rencontre, nous souhaitions l’organiser à Banja Luka en Bosnie mais le régime de Milosevic l’a appris et a commencé à faire des difficultés. »

Entre temps, le prince Alexandre rencontre lors d’une réunion à Jérusalem le ministre grec des Affaires étrangères Papandreou qui lui confie de manière très directe qu’il faut se débarrasser du régime de Milosevic. Le prince est bien du même avis mais sollicite alors de l’aide pour organiser une nouvelle réunion. Le gouvernement grec propose alors de prendre en charge le transfert des participants, leur sécurité et la logistique de cette réunion en avril 2000.

A nouveau l’utilisation du mail fait des merveilles. Quelques années plus tard, lors d’une rencontre avec Bill Gates, fondateur de Microsoft, le prince Alexandre expliquera l’utilisation du mail pour parvenir à ses fins de réunion. Très impressionné, Bill Gates conviera le prince à venir visiter Microsoft à Seattle. Il proposera ensuite son aide pour le financement de campagne de vaccination en Serbie par le biais de la fondation créée avec son épouse Melinda et offrira du matériel software.

La deuxième conférence à Athènes continue à souder les membres des différentes fractions de l’opposition. Une troisième rencontre se déroule à Harvard. « Les gens étaient libres de parler entre eux, nous avancions positivement » se souvient le prince. Le but est là : un seul candidat et gagner les élections.

Les urnes donnent au premier tour la victoire au candidat de l’opposition Vojislav Kostunica mais Milosevic conteste et refuse de l’affronter au deuxième tour. Pendant 3 semaines, l’opposition unie est dans les rues. Milosevic doit s’effacer.

Zoran Dindic appelle le prince le 5 octobre 2000, au moment de la « capitulation » de Milosevic et lui propose de venir au plus vite. « Il m’a dit qu’il m’attendait et m’a remercié pour toute mon aide tout au long de ces années. Je suis arrivé le 8 octobre. Nous avons eu des conversations intenses et j’ai fait un tour du pays. Zoran Dindic m’avait invité à me rendre au complexe royal mais j’ai préféré attendre et aller auparavant à la rencontre de la population à travers le pays. »

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« Dès le mois de décembre 2000, la discussion s’entame pour que je vienne m’installer avec ma famille. Cela n’a pas été difficile de prendre cette décision car c’était planifié. Nous savions avec ma femme et mes fils qu’un jour nous viendrions nous installer mais nous ne savions pas quand ».

Le 17  juillet 2001, le prince Alexandre, la princesse Katherine, le prince Pierre, le prince Philip et le prince Alexandre s’installent au Palais royal de Belgrade qui est resté un bien de l’Etat mais qui est mis à leur disposition.

Dans l’ombre depuis la mort de son père le roi Pierre II de Yougoslavie en 1970, le prince Alexandre a continué à entretenir des contacts avec la diaspora de son pays mais aussi avec les leaders des partis démocratiques qui ont progressivement émergé. C’est sous son impulsion que les différentes fractions hostiles à Milosevic ont pu se mettre autour de la table et composer un programme commun pour l’avenir de la Serbie meurtrie par une décennie de guerres et ses répercussions.

Assurément, la vision et l’esprit de stratège du prince Alexandre ont permis la victoire des forces démocratiques et une nouvelle ère pour la Serbie.  Un nouveau souffle dans un pays où les vieux démons du passé ne sont toutefois jamais loin. Zoran Dindic, l’ami du prince Alexandre, devenu Premier Ministre en 2001, est assassiné en mars 2003. Il avait échappé à plusieurs attentats et sa vie était mise à prix depuis qu’il avait facilité le transfert de Slobodan Milosevic vers le tribunal pénal international de La Haye. Dindic était âgé de 50 ans, marié et père de deux enfants. Une disparition qui a terriblement marqué le prince Alexandre et la princesse Katherine. Le couple princier ne manque jamais de rappeler son souvenir et les actes qu’il avait commencé à poser pour une nouvelle Serbie.

Demain : l’engagement humanitaire de la princesse Katherine de Serbie