Sortie du Point de Vue Images du Monde spécial art et patrimoine qui revient en détails sur la vente des derniers trésors du comte et de la comtesse de Paris.
Ouvrir N et R et tomber le matin sur cette superbe photo illumine la journée voire la semaine. Quelle grâce, quelle majesté. Elle fut la dernière à jamais à avoir ce train de vie royal.
Sur cette couverture, la comtesse de Paris est vraiment royale.
Quels beaux bijoux, rien à voir avec certaines « breloques » d’aujourd’hui.
La vente des objets du patrimoine Famille de France s’inscrit comme un évènement exceptionnel.
Hélas, chez les grands comme chez les autres communs, le partage, la conservation patrimoniale se révèle difficile voire impossible.
Et bien souvent, le fruit de la vente met tous les héritiers d’accord.
Justement, la vente de la semaine prochaine ne contient pas que des trésors. Quand on feuillette le catalogue, on voit de nombreux objets artistiquement assez quelconques et dont la seule éventuelle valeur provient de l’identité de leurs propriétaires. De quoi relativiser la frustration qu’on pourrait ressentir à les voir garnir des patrimoines étrangers.
La Comtesse de Paris, Royale, comme nous l’aimions.
Elle demeure aujourd’hui encore un modèle pour ses nombreux descendants disséminés à travers l’Europe…
Un modèle dans sa futilité et son-bon- goût pour les mondanités….mais ce que je lui préférai et ce dont je lui suis proche c’est son amour pour les réunions familiales!!!!
Madame adorait la culture, les voyages, l’histoire et sa famille.
Aujourd’hui les « 39 » se réunissent tous les 2 ans pour de grandes réunions de famille et pour des pélèrinages en souvenir de leur grand-mère.
La princesse a transmis sa foi à ses petits-enfants et cela à été sa grande fierté.
Mais pourquoi nous ne voyons jamais une seule photo des fameux « 39 » (qui sont d’ailleurs ces 39 ?) en pèlerinage ou lors d’une de leur grande réunion de famille ?
La Comtesse de Paris a posé pour ce portrait au milieu des années 1950, à l’époque de ses noces d’argent, dans sa vaste chambre située au premier étage du Manoir de Coeur-Volant.
Sauf erreur de ma part, la contesse de Paris porte ici la fameuse parure de saphirs de la reine Amélie, femme de Louis-Philippe.
Comme chacun le sait, feu le comte de Paris s’était fait intercepter en pleine nuit à la douane en possession de ces fabuleux bijoux qu’il tentait d’aller vendre en Suisse (et en douce).
Le site officiel du « Louvre » (qui mentionne au passage que le musée l’acquit en 1985 … ) fournit une note très intéressante où il apparait que « le commanditaire comme l’auteur sont inconnus ».
La note de Muriel Barbier précise que la parure est « composée d’un diadème, d’un collier, d’une paire de boucles d’oreilles, de deux petites broches et d’une grande. Tous ces bijoux sont ornés de saphirs de Ceylan dans leur état naturel, c’est-à-dire non chauffés. » (fin de citation)
La banque de France aurait acheté deux tableaux classés trésors nationaux et donc invendables a l’étranger pendant au moins 3 ans , le Louis XIII de Champaigne et le tableau de la duchesse d’Orleans par Mme Vigée-Lebrun.
J’aime cette photo , elle est royale avec cette magnifique parure qui je crois, a été acheté par un musé français. Si je dis une bêtise, que Charles puisse m’éclairer sur cette parure. Merci
La Derniere a porter cette parure royale. La derniere aussi a avoir le droit et la classe pour la porter. Quelle émotion devait on avoir a cette faste époque, lorsqu’on annonçait Madame, Comtesse de Paris ! Elle gardait jusqu’à son grand départ, l’allure, la noblesse et l’élégance de sa naissance, avec la simplicité et la gentillesse d’une Grande Dame. La derniere Reine de France.
Physiquement plutôt quelconque,à mon avis,mais elle avait une réelle prestance et un art de porter toilettes et bijoux dont n’a hérité aucune de ses filles.
Pour le reste,personnage frivole et mondain .
Je suis de votre avis Marc le Régent j’ajouterais et sens du devoir quant à sa simplicité j’ai pu le constater devant la sépulture de François d’Orléans , Madame la Comtesse de Paris m’avait précédée d’une heure et avait déposé un petit pot de cyclamen blanc tout simple .
« Des ventes aux enchères royales », c’est le titre d’un article du quotidien français « Le Monde » du mardi 22 septembre 2015 à propos des ventes « Orléans » chez Sotheby’s et « Marie-Antoinette » chez Christie’s (qui aura lieu le 3 novembre prochain).
L’article se prononce moins sur l’intérêt artistique des objets mis en vente que sur leur provenance royale qui en fait augmenter le prix.
Il donne l’exemple d’une bergère provenant du pavillon du Belvédère (à Versailles) qui était estimée trois cent mille livres sterling et qui est partie à un million sept cent mille !
Nous verrons sur la vente « Orléans » réalise les mêmes performances.
« Pourquoi pleurez-vous? » ai-je demandé. « De joie, m’ont-elles répondu, car le cauchemar est terminé » (1918 fin de la guerre)
Par la suite, j’ai souvent pensé à toutes ces larmes d’êtres chers. Larmes qui tombaient comme rosée sur mon âme d’enfant heureuse et gaie. Je pense qu’elles ont bien aidé à faire mûrir la petite plante sauvage que j’étais alors…
Dans une petite maison étroite en brique donnant sur le Champs-de-Mars d’Eu, habitait Mme Corbeille, notre couturière. Lorsque j’allais essayer une robe, elle me disait : tournez, petite princesse! Comme elle avait des épingles plein la bouche, cela donnait : « Chournez, chetite chrincheche » et j’avais envie de rire. Elle était toujours vêtue de noir et elle pleurait souvent quand elle parlait avec maman. Elle avait perdu un fils à la guerre et quand nous nous présentions chez elle, on nous disait souvent : « Mme Corbeille est partie à Péronne, ou à Mondidier, chercher son fils. Quand je m’étonnais, Maman m’expliquait que son fils avait disparu à la guerre et que mme Corbeille le cherchait, avec l’espoir de le retrouver sur les champs de bataille.
Un jour avec notre bonne, je suis allée essayer une robe que Maman m’avait commandée. Elle me plaisait beaucoup cette robe, toute claire avec un joli petit bouquet de roses minuscules à la taille.
Arrivée au Champs-de-Mars, nous voyons Mme Corbeille qui ferme la grille de son jardinet. Oh, quel curieux chapeau, grand comme un faitout, tout en crêpe avec des voiles noirs immenses qui faisaient comme une tente autour d’elle!
Je lui dit bonjour, et puis : « Ma robe, s’il vous plaît, est-elle finie? » « Non, petite princesse, non…je pars chercher mon fils. »
Tout cela m’attristait! je n’aurai pas ma jolie robe neuve pour aller aux courses du Tréport et de plus, Mme Corbeille partait chercher son fils et elle n’avait même pas de bêche. Jamais elle ne retrouverait son fils sur tous ces champs de bataille. Pauvre Mme Corbeille, me disais-je, sans pelle, ni pioche, avec tous ses voiles noirs!
Comme l’on peut-être snob et vaniteuse aussi lorsqu’on est enfant!
Sur la route d’Eu au Tréport, il y avait un immense pâturage qui appartenait à mon grand-père, le comte d’Eu : une fois par an s’y déroulaient des courses. C’était le grand événement de la région…Sur cette pâture s’élevaient deux tribunes de bois peintes en gris; une grande, pour le public, et une plus petite pour mes grands-parents et leurs invités. Tout le pays venait à ces courses; Maman bavardait avec ses amis et papa discutait chevaux sur la prairie avec M. de Chezelles; mon frère Pedro, nos trois cousins germains, Pierre-Henri, Louis-Gaston et Pia d’Orléans-Bragance, enfants de mon oncle paternel Louis, mon cousin Jenda Dobrzensky et moi-même étions figés dans nos plus beaux atours sur les gradins supérieurs de la tribune du château, sous l’oeil sévère de Mme pelletier. Les grands-parents prenaient place au premier rang…
L’impression singulière que j’éprouvais alors m’étonne à présent; j’étais tellement fière et imbue de ma petite personne, exposée ainsi à tous les regards! Cela flattait sans doute ma vanité, mais j’étais ravie surtout d’appartenir à mes grands-parents et à mes parents.
Mon frère et mes cousins jouaient les acrobates sur les balustrades et cela me choquait. J’aurai voulu leur expliquer l’importance et la dignité du lieu car j’avais le sentiment qu’ils étaient en train de défaire le superbe tableau dont mes grand-parents étaient le centre.
Je n’avais encore aucun sens de l’importance exacte des choses et cette tribune efflanquée et vaguement disproportionnée m’était montée à la tête.
Je n’ai d’ailleurs jamais pu arborer ma jolie robe avec les petites roses aux courses du Tréport car l’année suivante, elle était devenue trop courte!
Nous allions aussi à la journée des drags à Dieppe, occasion d’être très fière de mes parents. Ils allaient d’abord aux courses avec leurs amis et après, toutes les dames avec leurs beaux chapeaux et les messieurs bien habillés, montaient dans les drags.
Tout au long de cette fameuse journée, nous autres enfants attendions dans la grande maison des Ladoucette sur la route de Rouen. Nous jouions dans le jardin avec une foule de petits amis et on avait bien soin de ne pas nous faire entrer dans les salons où d’immenses tables toutes blanches, avec des chandeliers d’argent et des quantités de plats garnis de merveilleux gâteaux, attendaient les invités des Ladoucette.
Soudain, on criait : voilà les drags! Voilà les drags!
Nous courions sur le perron pour voir l’arrivée de ces immenses voitures, compromis de breaks et de chars à banc, tirées par quatre ou six chevaux magnifiques qui prenaient au grand trot le tournant de la pelouse. Mes parents prenaient place dans le drags du vicomte et de la vicomtesse de Chazelles, mais toute cette belle mise en scène ne me faisait nullement oublier les gâteaux, car j’ai toujours été très gourmande.
C’est aussi chez les Ladoucette que j’ai goûté pour la première fois ce qui est devenu mon gâteau préféré, grâce à melle marie de Waziers, qui était un peu plus âgée que moi, et dévolue à notre surveillance. « C’est ce petit gâteau carré, là, qu’il faut goûter! » me glissa-t-elle en me désignant une pâtisserie qui ne m’inspirait pas du tout. C’est ce qu’il y a de meilleur, c’est un moka! »
Dans notre famille, nous avons toujours vécu au milieu des chevaux. Un jour, cela pouvait être en 1915, nous avons été atterrés d’apprendre qu’on allait réquisitionner tous les chevaux. Avec notre père, nous sommes allés au Champs-de-Mars d’Eu pour voir comment cela allait se passer.
Mon frère Pedro pleurait à chaudes larmes, ce qui faisait dire aux bonne gens : « Oh comme le petit prince est ému de voir les soldats partir pour le front » « Mais non, disait-il à notre père, si je suis triste, c’est parce que nos pauvres chevaux vont partir sur les champs de bataille ».
Finalement, on nous a tout de même laissé Marron, un cheval trop vieux pour tirer les canons, et deux poneys de Shetland parce qu’ils étaient trop petits. Ces petits poneys étaient vifs et même assez vicieux. Nous les montions souvent seuls, heureusement sans étriers, car combien de fois ne m’ont-ils pas jetée à terre! J’avais alors juste le temps de filer à quatre pattes pour éviter d’être piétinée. Ces petits chevaux de pure race servaient surtout à traîner un break. Tous les après-midi de mon enfance, nous partions en promenade dans cet attelage. A l’arrière, sur la banquette, il y avait on frère, ma soeur Françoise et moi et sur la banquette avant prenaient place la nurse, Miss Scott, et notre bonne, qui tenait les rênes. Plus tard, notre petit frère Joao se joignit à nous. Nous étions emmitouflés dans des fourrures et des couvertures et lorsqu’il pleuvait, on levait la capote. Nous étions alors bien couverts et j’avais l’impression d’être dans une petite cabane, bien à l’abris des intempéries. Nous regardions par la petite fenêtre de mica le paysage détrempé ou enneigé qui défilait au petit trot de nos chevaux, tout fumants. Je pense que ce sont ces petites promenades qui m’ont appris le mieux à observer la nature et à aimer tout particulièrement les collines, les bois et les champs de chez nous, de ma petite patrie de « Seine-inférieure », comme on disait alors.
De mai à septembre nous allions à la plage du Tréport. Les poneys étaient attachés à la grille d’une villa de nos amis et nous passions l’après-midi entière à jouer sur la plage, avec nos cousins et des petits amis qui venaient nous rejoindre. Pêcher des crevettes, ramasser des bigorneaux, dans les rochers, et surtout, bâtir de hautes forteresses de sable où nous nous réfugiions lorsque la marée montait, occupait tout notre temps.Les parents venaient souvent nous retrouver. papa nous apprenait à nager; à plonger dans les vagues, et à l’heure de goûter, nous allions rejoindre les nurses bien installées sur des plaids, car nos galets sont plutôt malcommodes. On nous servait alors des tartines beurrées avec du miel ou accompagnées de tablettes de chocolat Meunier que nous préférions à celles de Félix Potin, nettement plus minces. Mais à ces délices, s’ajoutait toujours le supplice des timbales d’argent : du thermos, on nous versait un lait bouillant et la timbale devenait rapidement si chaude, que je ne savais plus comment la tenir sans me brûler…
Plus tard, nous avons émigré de la plage du Tréport à celle de Mers, moins poluleuse. Mais nous avions toujours la même cabine de bains, une cabine sur roue qui passait tout l’hiver dans les écuries du château. Dès le printemps, on la réinstallait sur le haut des galets près de la promenade de la plage. Cette cabine, qui nous a abrités durant toute notre enfance, avait servi un jour à abriter la reine Victoria. lors d’une des premières visites de la reine au roi Louis-Philippe à Eu, les marins anglais manquèrent la marée haute et on dut faire débarquer la reine Victoria dans une chaloupe, qui l’amena sur la plage. Pendant que des rameurs et des pêcheurs gardent l’embarcation en équilibre, des chevaux traînent la cabine montée sur roue dans les dernières vagues. On hisse ensuite Sa Majesté britannique et ses énormes jupes dans l’étroit réduit qui reprend la route jusqu’au sommet de la montagne de galets, vers l’esplanade, où l’attend Louis-Philippe. Je conserve une belle esquisse d’Isabey, qui représente cette scène. C’est tout ce qui nous reste de la « cabine de la reine Victoria », comme nous l’appelions, car durant la guerre de 1940, elle a disparu.
Une après-midi, pendant la guerre de 1914, nous revenions du Tréport avec notre petit attelage. En arrivant à Eu par la route qui longe le parc et qui descend sur la place Carnot, Pedro et moi-même avons eu la stupide idée de chanter à tue-tête pour entendre nos voix chevroter aux trépidations de la voiture. Nous devions hurler vraiment fort, car les poneys se sont emballés dans la descente et en arrivant sur la grand-place devant l’église, notre bonne a manqué son virage. Nous avons versé, et pêle-mêle, nous nous sommes tous retrouvés par terre, au pied de l’estrade dressée au milieu de la place noire de monde. Un orchestre militaire y donnait justement un concert. Tous les soldats qui étaient là, en spectateurs, les Belges, les Anglais et tous les autres, se sont précipités pour nous ramasser et maintenir les poneys au bout du timon cassé. Ebahis par cette pelleté d’enfants projetés à leurs pieds, les gens restèrent d’abord tout saisis. Puis ils se montrèrent compatissants et nous cajolèrent longuement en nous bourrant de friandises. Nous avions eu heureusement plus de peur que de mal, sauf notre bonne, dont la jambe était profondément entaillée. Ma soeur Françoise, qui était encore très petite, continuait à pleure à chaudes larmes. Un gentil anglais l’a prise dans ses bras pour la ramener au château avec nous tous. Pour la consoler, il lui donna un sou. Accepter de l’argent d’un étranger et sans la moindre hésitation! Pedro et moi-même en avons été profondément scandalisés.
La guerre de 1914 m’a appris beaucoup de choses. Tout d’abord j’ai appris à lire avec une institutrice que nous appelions la « demoiselle sans âge » . C’était une réfugiée belge comme il y en avait beaucoup dans notre petite ville et elle s’appelait en fait Melle Richard, elle portait tout le temps un châle vieillot sur les épaules et j’ignore si elle avait des jambes car je n’ai jamais vu que son buste. Soit à la fenêtre lorsqu’elle m’attendait, ou alors posé sur la table dont il semblait faire partie avec la nappe de feutre violine, le gros encrier rond, l’essuie-plume, et un cochon en métal nanti d’une crête de poils sur le dos. Melle Richard a disparu de ma vie un peu comme une vieille fée; sans doute a-t-elle dû s’envoler un beau jour par la fenêtre. A la même époque, j’ai appris aussi à aimer la beauté.
Melle Crabe était une jeune fille belge réfugiée à Eu avec ses parents. Elle pouvait avoir dix-sept ans, mais je n’en suis pas sûre car je n’ai jamais pu donner un âge à qui que ce soit. C’était une bien gracieuse personne aux magnifiques cheveux blonds, liés dans la nuque par un gros noeud noir à coque, presqu’aussi grand que celui d’une alsacienne. Sa taille était fort mince et ses jupes demi-longues laissaient voir des petits pieds pris dans des bottines noires à mille boutons. A quoi donc rapporter son charme inextricable? Je l’ignore, mais je pense que ses traits, sa voix, sa silhouette même, dont je n’ai plus un souvenir très précis, me fascinaient tant, parce que, au delà de son apparence physique, il émanait d’elle une sagesse douce et discrète. Elle y joignait aussi la gentillesse : pour ma première communion, elle m’a fait cadeau d’un bénitier en bois peint décoré d’un ange de Murillo. Ces réfugiés belge m’ont été décidément d’une grande aide pour mon éducation. parmi eux, il y avait la famille Tilleule, forte de sept garçons, dont trois avaient à peu près mon âge. L’aîné m’a appris à monter à bcicyclette, et un auttre à danser la valse. Un été, les régiments cantonnés dans la région organisent dans les champs, au dessus des falaises de Mers, une kermesse de charité. C’est une belle et chaude journée tempérée par la brise de mer. Entre les tentes, les baraques et les comptoirs, les grandes personne s’affairent. Il y a là les officiers, les infirmiers et toutes les personnalités civiles de la ville. Au centre de cette fête, on a monté une estrade en bois, sur laquelle un orchestre militaire joue sans jamais s’interrompre. Livrés à eux-même les enfants batifolent au milieu de cette grande foule, où il y a les Anglais, des Canadiens et même des Australiens, avec leur grand chapeau kaki plié du côté droit. Entièrement accaparées par leurs occupations, les grandes personnes n’ont pas eu l’idée de danser. Est-ce l’herbe verte, ou une entraînante musique à trois temps? C’est en tout cas là que j’ai appris à valser. me saisissant soudain par la main, un des petit Tilleule m’entraîne. D’abord très intimidée, je suis vite prise par le rythme et je valse, valse, avec ravissement sur le gazon odorant.
Ce n’est qu’au bout d’un bon moment que je vois Maman et ses amies cachées parmi la foule qui nous regardent en souriant. C’était dans l’été de 1917.
En regardant une tasse sordide dans des lieux perdus qui ne sont certes ni l’hôtel Ritz ni le palais de mes parents au Brésil, il arrive parfois que cette tasse exhale pour moi une odeur de café si subtile qu’elle me fait ressouvenir de mes sept ans. C’est un bon parfum, c’est un bon café, mais c’est le type de bon café que l’on ne fait qu’en France : il est peut-être considéré par les experts et les étrangers comme exécrable, mais je l’aime ainsi. Pourtant je suis amateur de grand café et j’en apprécie souvent d’excellent, au parfum évocateur et si consolant.
Je le fais pour ceux à qui cela convient, et encore, ce n’est pas tous les jours…Cela me permet aussi d’avoir, avec mes autres lectures, un peu de distraction et un petit travail afin de ne pas me sentir inutile. Parce qu’il m’arrive souvent d’avoir le cafard, en tant que personne handicapée, de me sentir être un poids pour ma famille et la société. Et j’ai décidé de me battre aussi pour les autres handicapés, en ce qui concerne les assurances qui confondent les personnes qui ont mon type de handicap avec l’handicap mental complet. J’ai souscrit des assurances et j’ai peur de ne pouvoir en fait bénéficier de rien, ni ma famille. Voilà, j’ai interpellé mon médecin (bac plus quinze) à ce sujet, pour le cas où il s’ennuierait à la retraite!!
Claude-Patricia
Continuez à nous divertir avec ces passages des mémoires de Madame la Comtesse de Paris.
Cela est un bonheur pour moi et pour bien d’autres.
Bien amicalement,
Charles
Un très grand merci à vous Claude Patricia, grâce à vous ce sont de purs moments de bonheur que vous nous donnez là !…et quelle leçon de courage aussi ! Très cordialement, Bianca !
Mary
30 septembre 2015 @
10:07
Vous avez beaucoup de courage Claude-Patricia et bien raison de faire ce qui vous intéresse !
Je ne sais pas pourquoi, mais le comte et la comtesse de Paris m’ont toujours été très antipathiques, sans doute parce qu’ils ont loupé l’éducation de leurs enfants.
C’est un simple avis personnel, qui n’est pas destiné à susciter la polémique.
La vente « Marie Antoinette » qui regroupe des objets provenant de la collection de L. de Rotchild est d’une autre importance que celle « Orléans » par la qualité des objets présentés….la vente « Orléans » beneficiera certainement d’une plus-value « nostalgique » comme cela a été lors de la précédente vente
Je continue donc avec vos encouragements qui me sont allés droit au coeur!
Je souhaiterai tous vous réunir au cours d’une fête, vers chez moi, sous l’égide du roi Henri IV, je réfléchis à quelque chose de sympathique, qui pourrait nous rassembler et parler de nos têtes couronnées préférées!!
Suite des mémoires de Madame.
…Ce café-là, toutefois, à l’arôme très spécial qui soudain me transporte si loin dans mes souvenirs, ne m’est servi chez les uns et les autres, ou encore à l’auberge, que très rarement.
Tout au long de notre enfance, nous avons eu une kyrielle d’institutrices. Entre autres, une certaine Melle Dubois, petite, mince, trottinante, bien prise dans sa jupe grise avec ses corsages à manchettes empesées. Elle me faisait penser à Miss Alice dans le livre où j’apprenais l’anglais. Melle Dubois était très pâle, sa coiffure était haute, blondasse et poussiéreuse, elle n’avait pas de voix et la parole plutôt rare. Elle m’aimait beaucoup, mais je la considérais dans ma sagesse d’enfant comme une personne bizarre, et je n’étais absolument pas été impressionnée lorsqu’elle me disait notamment que j’allais mourir à quinze ans! Elle m’assurait en effet que j’avais tous les symptômes de la phtisie galopante…je trouvais cette maladie tout à fait ravissante, et je me voyais finir mes jours galopant à vive allure sur un poney blanc. Parfois Melle Dubois changeait le nom de ma maladie, et la baptisait « poitrinaire ». Là, je m’imaginais que je deviendrais un peu comme une chambre à air de pneumatique, comme le bonhomme michelin qui figurait déjà dans des guides automobiles.
Je pense que melle Dubois était vraiment folle, mais cela ne me gênait pas, car considérant mes jours comptés, elle me gâtait beaucoup. Seule chose désagréable, elle me couvrait comme un oignon avec deux ou trois paires de culottes superposées. J’avais toujours trop chaud et j’allais les enlever subrepticement pour les cacher dans les bahuts à bois. Nous étions en effet de robustes enfants campagnards et nous étonnions d’être traités comme de petits citadins douillets. Elle prétendait aussi que nous devions nous promener avec un parapluie les jours de trombes d’eau. Pour son anniversaire, le 19 février, Pedro en reçut un grand. Beaucoup moins joli que le mien, mais détail essentiel, il avait un manche recourbé. Ces promenades dans le parc avec un parapluie nous assommaient tellement, qu’il a bien fallu inventer un jeu pour nous distraire. Nous fixions donc nos parapluies ouvert bien calés à même nos têtes, avec le manche enfilé dans le décolleté du manteau, le tout ligoté par nos ceintures. Ainsi nous avions nos mains libres et pendant toute la promenade nous pouvions laver nos mouchoirs aux gouttes de pluies qui dégoulinaient de nos pépins.
Pedro avait l’avantage de pouvoir accrocher au manche de son parapluie une casserole de poupée qui lui servait à recueillir l’eau , tandis que le mien, qui était terminé par une ravissante petite tête de perruche en argent, ne pouvait servir à rien…
A cette époque, mes grands-parents étaient encore en vie, et habitaient le château. Nous logions donc en face, dans le « Pavillon des ministres », qui donnait sur la cour d’honneur du château et comprenait les appartements de mes parents, les chambres des bébés, les salons et le bureau de mon père, enfin les services. Château, écuries et Pavillon dominent la ville basse et les collines lointaines.
En contrebas, et en surplomb de la Bresle, il y avait un très grand bâtiment qui communiquait par un escalier avec le Pavillon. Tout cet ensemble servait jadis de logement aux ministres du roi Louis-Philippe, lorsque celui-ci passait l’été à Eu. D’où son nom de « Pavillon des ministres ». Les logements en contrebas se composaient de vingt-deux chambres, onze de part et d’autre d’un grand corridor. Chaque ministre avait sa chambre avec la vue noble sur la rivière, son domestique logeant en face. En dessous de ces vingt-deux chambres, se trouvait la grande salle du Conseil des ministres que mon père a louée à la ville pour y installer le cinéma, qui y est toujours. C’est du reste le seul de la ville. Après la mort de nos grands-parents, nous avons déménagé au grand château. Le samedi soir, nous allions au cinéma avec nos parents, et c’était une véritable expédition; nous nous y rendions en passant d’abord par les souterrains du château. Du temps de Louis-Philippe, ils servaient à transporter les repas qui étaient préparés dans d’immenses cuisines sous la salle du Conseil des ministres; celui-ci était de plein-pied avec une petite ferme et la ville basse. C’est par là que le public accède encore au cinéma. On parvenait dans ces souterrains aux murs de brique et pavés de pierre par les caves du château. Ils longeaient d’abord sur une centaine de mètre le parapet extérieur délimitant la cour d’honneur; -le jour pénétrait dans cette partie par des oeils-de-boeufs. Ensuite on risquait fort de se perdre car c’était tout un enchevêtrement d’escaliers et un dédale de couloirs dans toutes les directions. De telle sorte que la colline était creusée comme un gruyère. Papa, portant une lanterne, précédait notre cortège, et c’est finalement un très bel escalier de marbre qui nous conduisait devant une porte dont il avait la clé. Cette porte donnait sur un large corridor qui desservait la salle du Conseil des ministres transformée en cinéma. Nous y avions notre loge. La vendeuse de sucettes et de caramels, toujours si aimable était particulièrement ravie les jours de notre venue: elle repartait alors avec son panier presque vide.
Avant de vivre au grand château, mon frère et moi étions installés avec l’institutrice et la gouvernante dans le grans corridor aux vingt-deux chambres. Nous avions celles des ministres avec la belle vue sur la rivière. Ces chambres, en enfilade, communiquaient entre elles. La première était la salle d’études, donnant sur une tourelle où Jeanne d’Arc, prisonnière des Anglais, passa une nuit. Ensuite venait la chambre de l’institutrice, puis ma chambre et celle de mon frère, enfin, celle de la gouvernante. Toutes semblables, ces chambres étaient ravissantes avec leur papier peint orné de petits oiseaux et de bambous. Les rideaux, les dessus-de-lit, la toile recouvrant les chaises longues et les fauteuils étaient décorés des mêmes dessins que le papier du mur. Il y avait la chambre bleue, la chambre rouge, la chambre lilas et la chambre jaune, et cela recommençait ainsi jusqu’au bout du corridor. Ces chambres à alcôve, au charme désuet, étaient assez éloignées du pavillon principal où logeaient nos parents. Elles me donnaient pourtant un agréable sentiment de sécurité. De part et d’autre de leurs fenêtres, les murs étaient tapissé de papier. Longtemps, je me suis demandé qui chantait dans mes placards. J’ai compris à la fin que c’était le vent du nord qui se faufilait entre les pièces disjointes, et faisait vibrer le papier.
Mon père avait son atelier dans la chambre numéro 12, tout au bout de l’enfilade. Depuis son enfance, c’était un ébéniste très habile, car son grand-père, l’empereur Pedro II, tenait à ce que ses petits-fils connaissent un métier manuel. De temps en temps, le père Asselin, un menuisier que Papa appelait « Maître Asselin », qui avait son atelier en ville, venait travailler avec lui. nous avions quantité de meubles, de poupées et de petites boîtes en bois du Brésil, que Papa fabriquait. Il a même fait une bicyclette en bois pour mon frère Jean et qui roulait parfaitement. Les soirs d’hiver, après le goûter, lorsque nous étions au Pavillon à jouer à des jeux sages dans le bureau de papa, il m’envoyait parfois chercher des choses dans son atelier. C’était une très grande épreuve, car cet immense corridor sombre me faisait très peur.
De ma vie, je n’ai jamais dit à personne que j’avais peur; quand j’étais une petite fille, cela m’arrivait souvent. Peut-être papa l’avait-il deviné et tait-ce pour m’aguerrir qu’il m’envoyait faire des commissions au loin, dans le noir. Je me revois encore toute petite dans cette longue enfilade faiblement éclairée. Tout au bout, il y avait une porte. La plaque de cuivre de la serrure émettait une lueur, qui me faisait croire à une tête de monstre. Ce grand couloir était garni de coffres à bois. Je courais de l’un à l’autre. Je soulevais le couvercle pour voir s’il n’y avais pas un voleur caché dedans, et je poursuivais, un peu rassurée de savoir qu’au moins aucun danger ne pouvait plus survenir par-derrière. Le retour vers la maison haute, pleine de lumière, où je retrouvais mes parents, me semblait être l’entrée du paradis.
De notre petit royaume des « vingt-deux chambres » comme nous disions, nous entendions jour et nuit le chant de la chute d’eau. Sur la colline, au loin, on apercevait la petite chapelle votive dédiée à sait Laurent O’Toole, archevêque de Dublin, mort à Eu en 1181 et patron de notre bonne ville. « Ici sera le lieu de mon repos jusqu’à la fin des temps », a dit le saint en arrivant en Normandie pour plaider la cause de son peuple auprès du roi d’Angleterre.
Dans ma famille, on me taquine depuis toujours à propos de mes dévotions à quantité de saints. mais il faut savoir que depuis ma plus tendre enfance, j’ai si souvent vécu en leur compagnie! Mes premières années ont été jalonnées de pèlerinages, de processions, de dévotions spéciales à plusieurs saints. Saint Laurent et sainte Jeanne à Eu tout d’abord, à Paris ensuite-sainte Geneviève, sa patronne. Le jour de sa fête, le 3 janvier, nous allions à Saint-Etienne-du-Mont prier sur sa tombe. J’avais atrocement froid aux pieds mais pour rien au monde, je n’aurais voulu rentrer sans un tour aux baraques foraines, installées sur l’esplanade du Panthéon…
Au Brésil, nous vénérons Saint Jean bosco; il apparaît que ce saint, lors d’une visite à mes grands parents, avait tenu mon père sur ses genoux. Grand voyageur, il s’était même rendu dans la région de l’actuelle Brasilia, qui n’était alors qu’une vaste savane. Il y prophétisa la fondation d’une très grande cité.
Je ne suis pas bigote, loin de là, mais je crois à la protection de ceux que j’aime, et qui sont arrivés déjà au bout de leur voyage. Je suis persuadée que certains personnages du passé, saints ou pas, et aussi mes ancêtres m’accordent leur protection quand je leur demande gentiment. C’est à cause de cette croyance que, toute petite déjà, je me sentais prise en faute, lorsqu’en absence de témoin je faisais une bêtise…sous le regard d’un de mes ancêtres accroché au mur.
Mais revenons à la tasse de café. Lorsque le soir, vers huit heures, j’étais bien installée dans mon lit, au fond de l’alcôve, que le poêle dit « canadien » ronflait dans la cheminée, commençait le « rite du café ». Melle Dubois avait en effet décidé en grand secret que le café m’était nécessaire avant de dormir! Alors, avec des gestes mystérieux, elle sortait du placard dissimulé dans le mur près de la cheminée tout un arsenal de cuisine et se mettait à faire le café sur le poêle chauffé à blanc; lorsque le breuvage était prêt, je sortais en grande pompe de mon lit, et emmitouflée dans un châle, me dirigeais solennellement vers ma petite vitrine aux trésors. J’allais choisir dans ma petite vaisselle de poupée une tasse différente tous les soirs et je m’installais dans un fauteuil près du poêle et Melle Dubois me servait du café très sucré dont le bon parfum s’élevait dans la chambre froide, en volutes, comme les images de contes de fées illustrées par Dulac. Toute cette petite mise en scène avait une allure tellement silencieuse, mimée et précieuse! J’allais ensuite laver ma tasse dans le broc d’eau froide préparé pour mon tub du lendemain matin. Je rangeais ma petite tasse, je refermais ma vitrine tout doucement et je retournais me faufiler dans mon joli lit au fond de mon alcôve pour sombrer enfin dans un sommeil sans histoire. Pauvre Melle Dubois! Elle disparut de mon horizon d’enfant aussi silencieusement que les volutes de son singulier café nocturne. J’ai su bien plus tard qu’elle était partie sur un coup de tête. Un matin, elle vien trouver mon père, tout excitée, en assurant que des grossiers personnages en avaient à sa vertu; devant l’air étonné de mon père, elle précise que sous ses fenêtres, dans le boulevard hélène, qui passe très en contrebas, elle entend chanter tous les soirs une abominable chanson. « Mais enfin, qu’elle sorte de chanson? » lui demande mon père. Offusquée, elle se met à déclamer : « viens Poupoule, viens Poupoule, viens.. » Papa éclate de rire, et la pauvre demoiselle, horrifiée, tourne les talons pour ne plus revenir. Peut-être ignora-t-elle toujours que cette chanson populaire, chantée par les joyeux lurons de la ville, ne lui était nullement destinée…
Aramis
21 septembre 2015 @ 07:18
Ouvrir N et R et tomber le matin sur cette superbe photo illumine la journée voire la semaine. Quelle grâce, quelle majesté. Elle fut la dernière à jamais à avoir ce train de vie royal.
l'Alsacienne
21 septembre 2015 @ 07:49
Sur cette couverture, la comtesse de Paris est vraiment royale.
Quels beaux bijoux, rien à voir avec certaines « breloques » d’aujourd’hui.
La vente des objets du patrimoine Famille de France s’inscrit comme un évènement exceptionnel.
Hélas, chez les grands comme chez les autres communs, le partage, la conservation patrimoniale se révèle difficile voire impossible.
Et bien souvent, le fruit de la vente met tous les héritiers d’accord.
jo de st vic
21 septembre 2015 @ 08:22
Quelle femme magnifique, aucune de ses filles n’a herité de cette élégance, de cette beauté
qiou
21 septembre 2015 @ 12:20
Femme magnifique et quelle dignité! Madame, je me demande ce que vous penseriez des bimbos couronnés qui nous servent de reines ou de princesses.
Pierre-Yves
21 septembre 2015 @ 08:29
Justement, la vente de la semaine prochaine ne contient pas que des trésors. Quand on feuillette le catalogue, on voit de nombreux objets artistiquement assez quelconques et dont la seule éventuelle valeur provient de l’identité de leurs propriétaires. De quoi relativiser la frustration qu’on pourrait ressentir à les voir garnir des patrimoines étrangers.
Jean Pierre
21 septembre 2015 @ 10:20
Sur cette photo, la comtesse de Paris est royale.
Charles
21 septembre 2015 @ 11:48
La Comtesse de Paris, Royale, comme nous l’aimions.
Elle demeure aujourd’hui encore un modèle pour ses nombreux descendants disséminés à travers l’Europe…
marielouise
21 septembre 2015 @ 12:08
Un modèle dans sa futilité et son-bon- goût pour les mondanités….mais ce que je lui préférai et ce dont je lui suis proche c’est son amour pour les réunions familiales!!!!
Radotage de ml!
Antoine
21 septembre 2015 @ 20:49
Modèle de classe et d’élégance, certainement. Modèle de gestion, jetons un voile pudique…
Charles
22 septembre 2015 @ 10:06
Madame adorait la culture, les voyages, l’histoire et sa famille.
Aujourd’hui les « 39 » se réunissent tous les 2 ans pour de grandes réunions de famille et pour des pélèrinages en souvenir de leur grand-mère.
La princesse a transmis sa foi à ses petits-enfants et cela à été sa grande fierté.
Baia
23 septembre 2015 @ 07:41
Mais pourquoi nous ne voyons jamais une seule photo des fameux « 39 » (qui sont d’ailleurs ces 39 ?) en pèlerinage ou lors d’une de leur grande réunion de famille ?
Francine du Canada
21 septembre 2015 @ 15:36
Merci Régine; quelqu’un sait-il qui avait pris cette photo de la comtesse de Paris et à quelle occasion? Elle est tellement belle sur cette photo! FdC
Charles
22 septembre 2015 @ 10:09
La Comtesse de Paris a posé pour ce portrait au milieu des années 1950, à l’époque de ses noces d’argent, dans sa vaste chambre située au premier étage du Manoir de Coeur-Volant.
Francine du Canada
23 septembre 2015 @ 22:11
Merci Charles, j’apprécie votre réponse! FdC
Zeugma
21 septembre 2015 @ 15:42
Sauf erreur de ma part, la contesse de Paris porte ici la fameuse parure de saphirs de la reine Amélie, femme de Louis-Philippe.
Comme chacun le sait, feu le comte de Paris s’était fait intercepter en pleine nuit à la douane en possession de ces fabuleux bijoux qu’il tentait d’aller vendre en Suisse (et en douce).
Le site officiel du « Louvre » (qui mentionne au passage que le musée l’acquit en 1985 … ) fournit une note très intéressante où il apparait que « le commanditaire comme l’auteur sont inconnus ».
La note de Muriel Barbier précise que la parure est « composée d’un diadème, d’un collier, d’une paire de boucles d’oreilles, de deux petites broches et d’une grande. Tous ces bijoux sont ornés de saphirs de Ceylan dans leur état naturel, c’est-à-dire non chauffés. » (fin de citation)
Laurent F
22 septembre 2015 @ 08:02
Le diadème est composé des broches que l’on peut voir sur le portrait de la reine Marie-Amélie par Winterhalter.
Charles
22 septembre 2015 @ 11:51
oui c’est exact, chaque année Louis-Philippe offrait à son épouse de très beaux saphirs afin de compléter ses parures.
Gérard
24 septembre 2015 @ 12:02
Voir notamment au sujet de la légende du passage en Suisse de la parure les précisions ici même de Vincent Meylan qui connaît bien le sujet :
http://www.noblesseetroyautes.com/2009/10/les-saphirs-de-la-famille-de-france/
Laurent F
21 septembre 2015 @ 17:05
La banque de France aurait acheté deux tableaux classés trésors nationaux et donc invendables a l’étranger pendant au moins 3 ans , le Louis XIII de Champaigne et le tableau de la duchesse d’Orleans par Mme Vigée-Lebrun.
Charles
22 septembre 2015 @ 11:50
Cette grande institution a fait son devoir sur ordre de l’état français qui n’avait pas le budget.
Augustine
21 septembre 2015 @ 19:14
J’aime cette photo , elle est royale avec cette magnifique parure qui je crois, a été acheté par un musé français. Si je dis une bêtise, que Charles puisse m’éclairer sur cette parure. Merci
Danielle
21 septembre 2015 @ 19:36
Quel chic, quelle élégance !
Marc Le Regent
21 septembre 2015 @ 19:44
La Derniere a porter cette parure royale. La derniere aussi a avoir le droit et la classe pour la porter. Quelle émotion devait on avoir a cette faste époque, lorsqu’on annonçait Madame, Comtesse de Paris ! Elle gardait jusqu’à son grand départ, l’allure, la noblesse et l’élégance de sa naissance, avec la simplicité et la gentillesse d’une Grande Dame. La derniere Reine de France.
chicarde
22 septembre 2015 @ 07:12
Élégance raffinée, doux charme, luxe somptueux et néanmoins discret – voilà la vraie noblesse !
Milena K
22 septembre 2015 @ 07:21
Physiquement plutôt quelconque,à mon avis,mais elle avait une réelle prestance et un art de porter toilettes et bijoux dont n’a hérité aucune de ses filles.
Pour le reste,personnage frivole et mondain .
Ghislaine
22 septembre 2015 @ 08:41
Je suis de votre avis Marc le Régent j’ajouterais et sens du devoir quant à sa simplicité j’ai pu le constater devant la sépulture de François d’Orléans , Madame la Comtesse de Paris m’avait précédée d’une heure et avait déposé un petit pot de cyclamen blanc tout simple .
Zeugma
22 septembre 2015 @ 08:45
« Des ventes aux enchères royales », c’est le titre d’un article du quotidien français « Le Monde » du mardi 22 septembre 2015 à propos des ventes « Orléans » chez Sotheby’s et « Marie-Antoinette » chez Christie’s (qui aura lieu le 3 novembre prochain).
L’article se prononce moins sur l’intérêt artistique des objets mis en vente que sur leur provenance royale qui en fait augmenter le prix.
Il donne l’exemple d’une bergère provenant du pavillon du Belvédère (à Versailles) qui était estimée trois cent mille livres sterling et qui est partie à un million sept cent mille !
Nous verrons sur la vente « Orléans » réalise les mêmes performances.
Claude-Patricia
22 septembre 2015 @ 09:40
Bonjour à tous,
Suite des mémoires de Madame.
« Pourquoi pleurez-vous? » ai-je demandé. « De joie, m’ont-elles répondu, car le cauchemar est terminé » (1918 fin de la guerre)
Par la suite, j’ai souvent pensé à toutes ces larmes d’êtres chers. Larmes qui tombaient comme rosée sur mon âme d’enfant heureuse et gaie. Je pense qu’elles ont bien aidé à faire mûrir la petite plante sauvage que j’étais alors…
Dans une petite maison étroite en brique donnant sur le Champs-de-Mars d’Eu, habitait Mme Corbeille, notre couturière. Lorsque j’allais essayer une robe, elle me disait : tournez, petite princesse! Comme elle avait des épingles plein la bouche, cela donnait : « Chournez, chetite chrincheche » et j’avais envie de rire. Elle était toujours vêtue de noir et elle pleurait souvent quand elle parlait avec maman. Elle avait perdu un fils à la guerre et quand nous nous présentions chez elle, on nous disait souvent : « Mme Corbeille est partie à Péronne, ou à Mondidier, chercher son fils. Quand je m’étonnais, Maman m’expliquait que son fils avait disparu à la guerre et que mme Corbeille le cherchait, avec l’espoir de le retrouver sur les champs de bataille.
Un jour avec notre bonne, je suis allée essayer une robe que Maman m’avait commandée. Elle me plaisait beaucoup cette robe, toute claire avec un joli petit bouquet de roses minuscules à la taille.
Arrivée au Champs-de-Mars, nous voyons Mme Corbeille qui ferme la grille de son jardinet. Oh, quel curieux chapeau, grand comme un faitout, tout en crêpe avec des voiles noirs immenses qui faisaient comme une tente autour d’elle!
Je lui dit bonjour, et puis : « Ma robe, s’il vous plaît, est-elle finie? » « Non, petite princesse, non…je pars chercher mon fils. »
Tout cela m’attristait! je n’aurai pas ma jolie robe neuve pour aller aux courses du Tréport et de plus, Mme Corbeille partait chercher son fils et elle n’avait même pas de bêche. Jamais elle ne retrouverait son fils sur tous ces champs de bataille. Pauvre Mme Corbeille, me disais-je, sans pelle, ni pioche, avec tous ses voiles noirs!
Comme l’on peut-être snob et vaniteuse aussi lorsqu’on est enfant!
Sur la route d’Eu au Tréport, il y avait un immense pâturage qui appartenait à mon grand-père, le comte d’Eu : une fois par an s’y déroulaient des courses. C’était le grand événement de la région…Sur cette pâture s’élevaient deux tribunes de bois peintes en gris; une grande, pour le public, et une plus petite pour mes grands-parents et leurs invités. Tout le pays venait à ces courses; Maman bavardait avec ses amis et papa discutait chevaux sur la prairie avec M. de Chezelles; mon frère Pedro, nos trois cousins germains, Pierre-Henri, Louis-Gaston et Pia d’Orléans-Bragance, enfants de mon oncle paternel Louis, mon cousin Jenda Dobrzensky et moi-même étions figés dans nos plus beaux atours sur les gradins supérieurs de la tribune du château, sous l’oeil sévère de Mme pelletier. Les grands-parents prenaient place au premier rang…
L’impression singulière que j’éprouvais alors m’étonne à présent; j’étais tellement fière et imbue de ma petite personne, exposée ainsi à tous les regards! Cela flattait sans doute ma vanité, mais j’étais ravie surtout d’appartenir à mes grands-parents et à mes parents.
Mon frère et mes cousins jouaient les acrobates sur les balustrades et cela me choquait. J’aurai voulu leur expliquer l’importance et la dignité du lieu car j’avais le sentiment qu’ils étaient en train de défaire le superbe tableau dont mes grand-parents étaient le centre.
Je n’avais encore aucun sens de l’importance exacte des choses et cette tribune efflanquée et vaguement disproportionnée m’était montée à la tête.
Je n’ai d’ailleurs jamais pu arborer ma jolie robe avec les petites roses aux courses du Tréport car l’année suivante, elle était devenue trop courte!
Nous allions aussi à la journée des drags à Dieppe, occasion d’être très fière de mes parents. Ils allaient d’abord aux courses avec leurs amis et après, toutes les dames avec leurs beaux chapeaux et les messieurs bien habillés, montaient dans les drags.
Tout au long de cette fameuse journée, nous autres enfants attendions dans la grande maison des Ladoucette sur la route de Rouen. Nous jouions dans le jardin avec une foule de petits amis et on avait bien soin de ne pas nous faire entrer dans les salons où d’immenses tables toutes blanches, avec des chandeliers d’argent et des quantités de plats garnis de merveilleux gâteaux, attendaient les invités des Ladoucette.
Soudain, on criait : voilà les drags! Voilà les drags!
Claude-Patricia
22 septembre 2015 @ 10:10
Nous courions sur le perron pour voir l’arrivée de ces immenses voitures, compromis de breaks et de chars à banc, tirées par quatre ou six chevaux magnifiques qui prenaient au grand trot le tournant de la pelouse. Mes parents prenaient place dans le drags du vicomte et de la vicomtesse de Chazelles, mais toute cette belle mise en scène ne me faisait nullement oublier les gâteaux, car j’ai toujours été très gourmande.
C’est aussi chez les Ladoucette que j’ai goûté pour la première fois ce qui est devenu mon gâteau préféré, grâce à melle marie de Waziers, qui était un peu plus âgée que moi, et dévolue à notre surveillance. « C’est ce petit gâteau carré, là, qu’il faut goûter! » me glissa-t-elle en me désignant une pâtisserie qui ne m’inspirait pas du tout. C’est ce qu’il y a de meilleur, c’est un moka! »
Dans notre famille, nous avons toujours vécu au milieu des chevaux. Un jour, cela pouvait être en 1915, nous avons été atterrés d’apprendre qu’on allait réquisitionner tous les chevaux. Avec notre père, nous sommes allés au Champs-de-Mars d’Eu pour voir comment cela allait se passer.
Mon frère Pedro pleurait à chaudes larmes, ce qui faisait dire aux bonne gens : « Oh comme le petit prince est ému de voir les soldats partir pour le front » « Mais non, disait-il à notre père, si je suis triste, c’est parce que nos pauvres chevaux vont partir sur les champs de bataille ».
Finalement, on nous a tout de même laissé Marron, un cheval trop vieux pour tirer les canons, et deux poneys de Shetland parce qu’ils étaient trop petits. Ces petits poneys étaient vifs et même assez vicieux. Nous les montions souvent seuls, heureusement sans étriers, car combien de fois ne m’ont-ils pas jetée à terre! J’avais alors juste le temps de filer à quatre pattes pour éviter d’être piétinée. Ces petits chevaux de pure race servaient surtout à traîner un break. Tous les après-midi de mon enfance, nous partions en promenade dans cet attelage. A l’arrière, sur la banquette, il y avait on frère, ma soeur Françoise et moi et sur la banquette avant prenaient place la nurse, Miss Scott, et notre bonne, qui tenait les rênes. Plus tard, notre petit frère Joao se joignit à nous. Nous étions emmitouflés dans des fourrures et des couvertures et lorsqu’il pleuvait, on levait la capote. Nous étions alors bien couverts et j’avais l’impression d’être dans une petite cabane, bien à l’abris des intempéries. Nous regardions par la petite fenêtre de mica le paysage détrempé ou enneigé qui défilait au petit trot de nos chevaux, tout fumants. Je pense que ce sont ces petites promenades qui m’ont appris le mieux à observer la nature et à aimer tout particulièrement les collines, les bois et les champs de chez nous, de ma petite patrie de « Seine-inférieure », comme on disait alors.
JAusten
22 septembre 2015 @ 18:20
merci Claude Patricia
Claude-Patricia
22 septembre 2015 @ 16:04
De mai à septembre nous allions à la plage du Tréport. Les poneys étaient attachés à la grille d’une villa de nos amis et nous passions l’après-midi entière à jouer sur la plage, avec nos cousins et des petits amis qui venaient nous rejoindre. Pêcher des crevettes, ramasser des bigorneaux, dans les rochers, et surtout, bâtir de hautes forteresses de sable où nous nous réfugiions lorsque la marée montait, occupait tout notre temps.Les parents venaient souvent nous retrouver. papa nous apprenait à nager; à plonger dans les vagues, et à l’heure de goûter, nous allions rejoindre les nurses bien installées sur des plaids, car nos galets sont plutôt malcommodes. On nous servait alors des tartines beurrées avec du miel ou accompagnées de tablettes de chocolat Meunier que nous préférions à celles de Félix Potin, nettement plus minces. Mais à ces délices, s’ajoutait toujours le supplice des timbales d’argent : du thermos, on nous versait un lait bouillant et la timbale devenait rapidement si chaude, que je ne savais plus comment la tenir sans me brûler…
Plus tard, nous avons émigré de la plage du Tréport à celle de Mers, moins poluleuse. Mais nous avions toujours la même cabine de bains, une cabine sur roue qui passait tout l’hiver dans les écuries du château. Dès le printemps, on la réinstallait sur le haut des galets près de la promenade de la plage. Cette cabine, qui nous a abrités durant toute notre enfance, avait servi un jour à abriter la reine Victoria. lors d’une des premières visites de la reine au roi Louis-Philippe à Eu, les marins anglais manquèrent la marée haute et on dut faire débarquer la reine Victoria dans une chaloupe, qui l’amena sur la plage. Pendant que des rameurs et des pêcheurs gardent l’embarcation en équilibre, des chevaux traînent la cabine montée sur roue dans les dernières vagues. On hisse ensuite Sa Majesté britannique et ses énormes jupes dans l’étroit réduit qui reprend la route jusqu’au sommet de la montagne de galets, vers l’esplanade, où l’attend Louis-Philippe. Je conserve une belle esquisse d’Isabey, qui représente cette scène. C’est tout ce qui nous reste de la « cabine de la reine Victoria », comme nous l’appelions, car durant la guerre de 1940, elle a disparu.
Une après-midi, pendant la guerre de 1914, nous revenions du Tréport avec notre petit attelage. En arrivant à Eu par la route qui longe le parc et qui descend sur la place Carnot, Pedro et moi-même avons eu la stupide idée de chanter à tue-tête pour entendre nos voix chevroter aux trépidations de la voiture. Nous devions hurler vraiment fort, car les poneys se sont emballés dans la descente et en arrivant sur la grand-place devant l’église, notre bonne a manqué son virage. Nous avons versé, et pêle-mêle, nous nous sommes tous retrouvés par terre, au pied de l’estrade dressée au milieu de la place noire de monde. Un orchestre militaire y donnait justement un concert. Tous les soldats qui étaient là, en spectateurs, les Belges, les Anglais et tous les autres, se sont précipités pour nous ramasser et maintenir les poneys au bout du timon cassé. Ebahis par cette pelleté d’enfants projetés à leurs pieds, les gens restèrent d’abord tout saisis. Puis ils se montrèrent compatissants et nous cajolèrent longuement en nous bourrant de friandises. Nous avions eu heureusement plus de peur que de mal, sauf notre bonne, dont la jambe était profondément entaillée. Ma soeur Françoise, qui était encore très petite, continuait à pleure à chaudes larmes. Un gentil anglais l’a prise dans ses bras pour la ramener au château avec nous tous. Pour la consoler, il lui donna un sou. Accepter de l’argent d’un étranger et sans la moindre hésitation! Pedro et moi-même en avons été profondément scandalisés.
La guerre de 1914 m’a appris beaucoup de choses. Tout d’abord j’ai appris à lire avec une institutrice que nous appelions la « demoiselle sans âge » . C’était une réfugiée belge comme il y en avait beaucoup dans notre petite ville et elle s’appelait en fait Melle Richard, elle portait tout le temps un châle vieillot sur les épaules et j’ignore si elle avait des jambes car je n’ai jamais vu que son buste. Soit à la fenêtre lorsqu’elle m’attendait, ou alors posé sur la table dont il semblait faire partie avec la nappe de feutre violine, le gros encrier rond, l’essuie-plume, et un cochon en métal nanti d’une crête de poils sur le dos. Melle Richard a disparu de ma vie un peu comme une vieille fée; sans doute a-t-elle dû s’envoler un beau jour par la fenêtre. A la même époque, j’ai appris aussi à aimer la beauté.
Melle Crabe était une jeune fille belge réfugiée à Eu avec ses parents. Elle pouvait avoir dix-sept ans, mais je n’en suis pas sûre car je n’ai jamais pu donner un âge à qui que ce soit. C’était une bien gracieuse personne aux magnifiques cheveux blonds, liés dans la nuque par un gros noeud noir à coque, presqu’aussi grand que celui d’une alsacienne. Sa taille était fort mince et ses jupes demi-longues laissaient voir des petits pieds pris dans des bottines noires à mille boutons. A quoi donc rapporter son charme inextricable? Je l’ignore, mais je pense que ses traits, sa voix, sa silhouette même, dont je n’ai plus un souvenir très précis, me fascinaient tant, parce que, au delà de son apparence physique, il émanait d’elle une sagesse douce et discrète. Elle y joignait aussi la gentillesse : pour ma première communion, elle m’a fait cadeau d’un bénitier en bois peint décoré d’un ange de Murillo. Ces réfugiés belge m’ont été décidément d’une grande aide pour mon éducation. parmi eux, il y avait la famille Tilleule, forte de sept garçons, dont trois avaient à peu près mon âge. L’aîné m’a appris à monter à bcicyclette, et un auttre à danser la valse. Un été, les régiments cantonnés dans la région organisent dans les champs, au dessus des falaises de Mers, une kermesse de charité. C’est une belle et chaude journée tempérée par la brise de mer. Entre les tentes, les baraques et les comptoirs, les grandes personne s’affairent. Il y a là les officiers, les infirmiers et toutes les personnalités civiles de la ville. Au centre de cette fête, on a monté une estrade en bois, sur laquelle un orchestre militaire joue sans jamais s’interrompre. Livrés à eux-même les enfants batifolent au milieu de cette grande foule, où il y a les Anglais, des Canadiens et même des Australiens, avec leur grand chapeau kaki plié du côté droit. Entièrement accaparées par leurs occupations, les grandes personnes n’ont pas eu l’idée de danser. Est-ce l’herbe verte, ou une entraînante musique à trois temps? C’est en tout cas là que j’ai appris à valser. me saisissant soudain par la main, un des petit Tilleule m’entraîne. D’abord très intimidée, je suis vite prise par le rythme et je valse, valse, avec ravissement sur le gazon odorant.
Ce n’est qu’au bout d’un bon moment que je vois Maman et ses amies cachées parmi la foule qui nous regardent en souriant. C’était dans l’été de 1917.
En regardant une tasse sordide dans des lieux perdus qui ne sont certes ni l’hôtel Ritz ni le palais de mes parents au Brésil, il arrive parfois que cette tasse exhale pour moi une odeur de café si subtile qu’elle me fait ressouvenir de mes sept ans. C’est un bon parfum, c’est un bon café, mais c’est le type de bon café que l’on ne fait qu’en France : il est peut-être considéré par les experts et les étrangers comme exécrable, mais je l’aime ainsi. Pourtant je suis amateur de grand café et j’en apprécie souvent d’excellent, au parfum évocateur et si consolant.
Milena K
22 septembre 2015 @ 20:42
Il suffirait que ceux qui le souhaitent achètent le livre…
Claude-Patricia
23 septembre 2015 @ 09:16
Bonjour Miléna K
Je le fais pour ceux à qui cela convient, et encore, ce n’est pas tous les jours…Cela me permet aussi d’avoir, avec mes autres lectures, un peu de distraction et un petit travail afin de ne pas me sentir inutile. Parce qu’il m’arrive souvent d’avoir le cafard, en tant que personne handicapée, de me sentir être un poids pour ma famille et la société. Et j’ai décidé de me battre aussi pour les autres handicapés, en ce qui concerne les assurances qui confondent les personnes qui ont mon type de handicap avec l’handicap mental complet. J’ai souscrit des assurances et j’ai peur de ne pouvoir en fait bénéficier de rien, ni ma famille. Voilà, j’ai interpellé mon médecin (bac plus quinze) à ce sujet, pour le cas où il s’ennuierait à la retraite!!
Milena K
23 septembre 2015 @ 17:38
Bonjour Claude-Patricia
Je comprends mieux.
Bon courage à vous.
Francine du Canada
23 septembre 2015 @ 22:39
Claude-Patricia, merci beaucoup; j’ai lu avec attention et beaucoup apprécié! FdC
Charles
24 septembre 2015 @ 11:35
Claude-Patricia
Continuez à nous divertir avec ces passages des mémoires de Madame la Comtesse de Paris.
Cela est un bonheur pour moi et pour bien d’autres.
Bien amicalement,
Charles
bianca
27 septembre 2015 @ 16:27
Un très grand merci à vous Claude Patricia, grâce à vous ce sont de purs moments de bonheur que vous nous donnez là !…et quelle leçon de courage aussi ! Très cordialement, Bianca !
Mary
30 septembre 2015 @ 10:07
Vous avez beaucoup de courage Claude-Patricia et bien raison de faire ce qui vous intéresse !
Baia
23 septembre 2015 @ 07:43
Je le pense également !
Arielle
23 septembre 2015 @ 16:11
Je ne sais pas pourquoi, mais le comte et la comtesse de Paris m’ont toujours été très antipathiques, sans doute parce qu’ils ont loupé l’éducation de leurs enfants.
C’est un simple avis personnel, qui n’est pas destiné à susciter la polémique.
jo de st vic
24 septembre 2015 @ 12:08
La vente « Marie Antoinette » qui regroupe des objets provenant de la collection de L. de Rotchild est d’une autre importance que celle « Orléans » par la qualité des objets présentés….la vente « Orléans » beneficiera certainement d’une plus-value « nostalgique » comme cela a été lors de la précédente vente
Claude-Patricia
24 septembre 2015 @ 17:22
Bonjour à tous,
Je continue donc avec vos encouragements qui me sont allés droit au coeur!
Je souhaiterai tous vous réunir au cours d’une fête, vers chez moi, sous l’égide du roi Henri IV, je réfléchis à quelque chose de sympathique, qui pourrait nous rassembler et parler de nos têtes couronnées préférées!!
Suite des mémoires de Madame.
…Ce café-là, toutefois, à l’arôme très spécial qui soudain me transporte si loin dans mes souvenirs, ne m’est servi chez les uns et les autres, ou encore à l’auberge, que très rarement.
Tout au long de notre enfance, nous avons eu une kyrielle d’institutrices. Entre autres, une certaine Melle Dubois, petite, mince, trottinante, bien prise dans sa jupe grise avec ses corsages à manchettes empesées. Elle me faisait penser à Miss Alice dans le livre où j’apprenais l’anglais. Melle Dubois était très pâle, sa coiffure était haute, blondasse et poussiéreuse, elle n’avait pas de voix et la parole plutôt rare. Elle m’aimait beaucoup, mais je la considérais dans ma sagesse d’enfant comme une personne bizarre, et je n’étais absolument pas été impressionnée lorsqu’elle me disait notamment que j’allais mourir à quinze ans! Elle m’assurait en effet que j’avais tous les symptômes de la phtisie galopante…je trouvais cette maladie tout à fait ravissante, et je me voyais finir mes jours galopant à vive allure sur un poney blanc. Parfois Melle Dubois changeait le nom de ma maladie, et la baptisait « poitrinaire ». Là, je m’imaginais que je deviendrais un peu comme une chambre à air de pneumatique, comme le bonhomme michelin qui figurait déjà dans des guides automobiles.
Je pense que melle Dubois était vraiment folle, mais cela ne me gênait pas, car considérant mes jours comptés, elle me gâtait beaucoup. Seule chose désagréable, elle me couvrait comme un oignon avec deux ou trois paires de culottes superposées. J’avais toujours trop chaud et j’allais les enlever subrepticement pour les cacher dans les bahuts à bois. Nous étions en effet de robustes enfants campagnards et nous étonnions d’être traités comme de petits citadins douillets. Elle prétendait aussi que nous devions nous promener avec un parapluie les jours de trombes d’eau. Pour son anniversaire, le 19 février, Pedro en reçut un grand. Beaucoup moins joli que le mien, mais détail essentiel, il avait un manche recourbé. Ces promenades dans le parc avec un parapluie nous assommaient tellement, qu’il a bien fallu inventer un jeu pour nous distraire. Nous fixions donc nos parapluies ouvert bien calés à même nos têtes, avec le manche enfilé dans le décolleté du manteau, le tout ligoté par nos ceintures. Ainsi nous avions nos mains libres et pendant toute la promenade nous pouvions laver nos mouchoirs aux gouttes de pluies qui dégoulinaient de nos pépins.
Pedro avait l’avantage de pouvoir accrocher au manche de son parapluie une casserole de poupée qui lui servait à recueillir l’eau , tandis que le mien, qui était terminé par une ravissante petite tête de perruche en argent, ne pouvait servir à rien…
A cette époque, mes grands-parents étaient encore en vie, et habitaient le château. Nous logions donc en face, dans le « Pavillon des ministres », qui donnait sur la cour d’honneur du château et comprenait les appartements de mes parents, les chambres des bébés, les salons et le bureau de mon père, enfin les services. Château, écuries et Pavillon dominent la ville basse et les collines lointaines.
En contrebas, et en surplomb de la Bresle, il y avait un très grand bâtiment qui communiquait par un escalier avec le Pavillon. Tout cet ensemble servait jadis de logement aux ministres du roi Louis-Philippe, lorsque celui-ci passait l’été à Eu. D’où son nom de « Pavillon des ministres ». Les logements en contrebas se composaient de vingt-deux chambres, onze de part et d’autre d’un grand corridor. Chaque ministre avait sa chambre avec la vue noble sur la rivière, son domestique logeant en face. En dessous de ces vingt-deux chambres, se trouvait la grande salle du Conseil des ministres que mon père a louée à la ville pour y installer le cinéma, qui y est toujours. C’est du reste le seul de la ville. Après la mort de nos grands-parents, nous avons déménagé au grand château. Le samedi soir, nous allions au cinéma avec nos parents, et c’était une véritable expédition; nous nous y rendions en passant d’abord par les souterrains du château. Du temps de Louis-Philippe, ils servaient à transporter les repas qui étaient préparés dans d’immenses cuisines sous la salle du Conseil des ministres; celui-ci était de plein-pied avec une petite ferme et la ville basse. C’est par là que le public accède encore au cinéma. On parvenait dans ces souterrains aux murs de brique et pavés de pierre par les caves du château. Ils longeaient d’abord sur une centaine de mètre le parapet extérieur délimitant la cour d’honneur; -le jour pénétrait dans cette partie par des oeils-de-boeufs. Ensuite on risquait fort de se perdre car c’était tout un enchevêtrement d’escaliers et un dédale de couloirs dans toutes les directions. De telle sorte que la colline était creusée comme un gruyère. Papa, portant une lanterne, précédait notre cortège, et c’est finalement un très bel escalier de marbre qui nous conduisait devant une porte dont il avait la clé. Cette porte donnait sur un large corridor qui desservait la salle du Conseil des ministres transformée en cinéma. Nous y avions notre loge. La vendeuse de sucettes et de caramels, toujours si aimable était particulièrement ravie les jours de notre venue: elle repartait alors avec son panier presque vide.
Avant de vivre au grand château, mon frère et moi étions installés avec l’institutrice et la gouvernante dans le grans corridor aux vingt-deux chambres. Nous avions celles des ministres avec la belle vue sur la rivière. Ces chambres, en enfilade, communiquaient entre elles. La première était la salle d’études, donnant sur une tourelle où Jeanne d’Arc, prisonnière des Anglais, passa une nuit. Ensuite venait la chambre de l’institutrice, puis ma chambre et celle de mon frère, enfin, celle de la gouvernante. Toutes semblables, ces chambres étaient ravissantes avec leur papier peint orné de petits oiseaux et de bambous. Les rideaux, les dessus-de-lit, la toile recouvrant les chaises longues et les fauteuils étaient décorés des mêmes dessins que le papier du mur. Il y avait la chambre bleue, la chambre rouge, la chambre lilas et la chambre jaune, et cela recommençait ainsi jusqu’au bout du corridor. Ces chambres à alcôve, au charme désuet, étaient assez éloignées du pavillon principal où logeaient nos parents. Elles me donnaient pourtant un agréable sentiment de sécurité. De part et d’autre de leurs fenêtres, les murs étaient tapissé de papier. Longtemps, je me suis demandé qui chantait dans mes placards. J’ai compris à la fin que c’était le vent du nord qui se faufilait entre les pièces disjointes, et faisait vibrer le papier.
Mon père avait son atelier dans la chambre numéro 12, tout au bout de l’enfilade. Depuis son enfance, c’était un ébéniste très habile, car son grand-père, l’empereur Pedro II, tenait à ce que ses petits-fils connaissent un métier manuel. De temps en temps, le père Asselin, un menuisier que Papa appelait « Maître Asselin », qui avait son atelier en ville, venait travailler avec lui. nous avions quantité de meubles, de poupées et de petites boîtes en bois du Brésil, que Papa fabriquait. Il a même fait une bicyclette en bois pour mon frère Jean et qui roulait parfaitement. Les soirs d’hiver, après le goûter, lorsque nous étions au Pavillon à jouer à des jeux sages dans le bureau de papa, il m’envoyait parfois chercher des choses dans son atelier. C’était une très grande épreuve, car cet immense corridor sombre me faisait très peur.
Francine du Canada
25 septembre 2015 @ 16:58
Trop drôle cette Melle Dubois; merci et à bientôt Claude Patricia! FdC
Claude-Patricia
24 septembre 2015 @ 18:47
De ma vie, je n’ai jamais dit à personne que j’avais peur; quand j’étais une petite fille, cela m’arrivait souvent. Peut-être papa l’avait-il deviné et tait-ce pour m’aguerrir qu’il m’envoyait faire des commissions au loin, dans le noir. Je me revois encore toute petite dans cette longue enfilade faiblement éclairée. Tout au bout, il y avait une porte. La plaque de cuivre de la serrure émettait une lueur, qui me faisait croire à une tête de monstre. Ce grand couloir était garni de coffres à bois. Je courais de l’un à l’autre. Je soulevais le couvercle pour voir s’il n’y avais pas un voleur caché dedans, et je poursuivais, un peu rassurée de savoir qu’au moins aucun danger ne pouvait plus survenir par-derrière. Le retour vers la maison haute, pleine de lumière, où je retrouvais mes parents, me semblait être l’entrée du paradis.
De notre petit royaume des « vingt-deux chambres » comme nous disions, nous entendions jour et nuit le chant de la chute d’eau. Sur la colline, au loin, on apercevait la petite chapelle votive dédiée à sait Laurent O’Toole, archevêque de Dublin, mort à Eu en 1181 et patron de notre bonne ville. « Ici sera le lieu de mon repos jusqu’à la fin des temps », a dit le saint en arrivant en Normandie pour plaider la cause de son peuple auprès du roi d’Angleterre.
Dans ma famille, on me taquine depuis toujours à propos de mes dévotions à quantité de saints. mais il faut savoir que depuis ma plus tendre enfance, j’ai si souvent vécu en leur compagnie! Mes premières années ont été jalonnées de pèlerinages, de processions, de dévotions spéciales à plusieurs saints. Saint Laurent et sainte Jeanne à Eu tout d’abord, à Paris ensuite-sainte Geneviève, sa patronne. Le jour de sa fête, le 3 janvier, nous allions à Saint-Etienne-du-Mont prier sur sa tombe. J’avais atrocement froid aux pieds mais pour rien au monde, je n’aurais voulu rentrer sans un tour aux baraques foraines, installées sur l’esplanade du Panthéon…
Au Brésil, nous vénérons Saint Jean bosco; il apparaît que ce saint, lors d’une visite à mes grands parents, avait tenu mon père sur ses genoux. Grand voyageur, il s’était même rendu dans la région de l’actuelle Brasilia, qui n’était alors qu’une vaste savane. Il y prophétisa la fondation d’une très grande cité.
Je ne suis pas bigote, loin de là, mais je crois à la protection de ceux que j’aime, et qui sont arrivés déjà au bout de leur voyage. Je suis persuadée que certains personnages du passé, saints ou pas, et aussi mes ancêtres m’accordent leur protection quand je leur demande gentiment. C’est à cause de cette croyance que, toute petite déjà, je me sentais prise en faute, lorsqu’en absence de témoin je faisais une bêtise…sous le regard d’un de mes ancêtres accroché au mur.
Mais revenons à la tasse de café. Lorsque le soir, vers huit heures, j’étais bien installée dans mon lit, au fond de l’alcôve, que le poêle dit « canadien » ronflait dans la cheminée, commençait le « rite du café ». Melle Dubois avait en effet décidé en grand secret que le café m’était nécessaire avant de dormir! Alors, avec des gestes mystérieux, elle sortait du placard dissimulé dans le mur près de la cheminée tout un arsenal de cuisine et se mettait à faire le café sur le poêle chauffé à blanc; lorsque le breuvage était prêt, je sortais en grande pompe de mon lit, et emmitouflée dans un châle, me dirigeais solennellement vers ma petite vitrine aux trésors. J’allais choisir dans ma petite vaisselle de poupée une tasse différente tous les soirs et je m’installais dans un fauteuil près du poêle et Melle Dubois me servait du café très sucré dont le bon parfum s’élevait dans la chambre froide, en volutes, comme les images de contes de fées illustrées par Dulac. Toute cette petite mise en scène avait une allure tellement silencieuse, mimée et précieuse! J’allais ensuite laver ma tasse dans le broc d’eau froide préparé pour mon tub du lendemain matin. Je rangeais ma petite tasse, je refermais ma vitrine tout doucement et je retournais me faufiler dans mon joli lit au fond de mon alcôve pour sombrer enfin dans un sommeil sans histoire. Pauvre Melle Dubois! Elle disparut de mon horizon d’enfant aussi silencieusement que les volutes de son singulier café nocturne. J’ai su bien plus tard qu’elle était partie sur un coup de tête. Un matin, elle vien trouver mon père, tout excitée, en assurant que des grossiers personnages en avaient à sa vertu; devant l’air étonné de mon père, elle précise que sous ses fenêtres, dans le boulevard hélène, qui passe très en contrebas, elle entend chanter tous les soirs une abominable chanson. « Mais enfin, qu’elle sorte de chanson? » lui demande mon père. Offusquée, elle se met à déclamer : « viens Poupoule, viens Poupoule, viens.. » Papa éclate de rire, et la pauvre demoiselle, horrifiée, tourne les talons pour ne plus revenir. Peut-être ignora-t-elle toujours que cette chanson populaire, chantée par les joyeux lurons de la ville, ne lui était nullement destinée…