Voici une toile de Jean-Louis Demarne « La Procession de la Fête-Dieu dans un village » qui vient de retrouver sa « maison » à savoir La Malmaison. L’impératrice Joséphine en fit l’acquisition en 1808 avec une autre toile « La foire de village ». A son décès, « La Procession de la Fête-Dieu dans un village » a été hérité par sa fille la reine Hortense, l’autre par son fils le prince Eugène. Le tableau suivit la reine Hortense dans son exil à Constance avant d’être vendu à une date indéterminée.
Cheveyre
3 juin 2017 @ 07:45
ce que j’aime bien dans de tels cas, c’est de connaître les différents propriétaires jusqu’à nos jours !!!
Muscate-Valeska de Lisabé
3 juin 2017 @ 08:36
Ça c’est émouvant. Rose-Joséphine doit sourire de nostalgie là où elle est. ..à moins que ce délicat fantôme ne soit déjà réincarné…♡♡♡
Antoine
3 juin 2017 @ 10:13
Que de souvenirs me rappelle cette toile ! C’était le temps où mon village vellave avait encore un curé… Toutes les maisons sur le parcours de la procession étaient tendues de draps et de nappes blanches incrustés des plus précieuses dentelles (et en Velay les armoires en regorgent). Mon arrière-grand-mère puis ma grand-mère érigeaient un reposoir devant la maison. Tous les vases étaient monopilisés, le jardin pillé, et des statues très saint-sulpiciennes descendues du grenier faisaient leur sortie annuelle… Mes cousins et moi, fiers comme Artaban, jetions des pétales de roses et des fleurs de genêts devant le dais d’un geste qui n’avait certainement rien d’auguste mais qui nous réjouissait fort. Les cantiques, braillés avec un fort accent patoisant, n’avaient rien de maitrisien, mais quelle ferveur ! Tout s’achevait au presbytère où la bonne moustachue de notre pasteur (le terme d’aide aux prêtres n’existait pas encore) nous régalait d’un quatre-quart arrosé d’une limonade maison délicieuse dont je n’ai jamais retrouvé le goût. Le bonheur vous dis-je !
DEB
3 juin 2017 @ 14:31
Ah Antoine, je suis née en Wallonie et j’ai les mêmes souvenirs des processions de mon enfance!
Ma grand-mère garnissait aussi l’avant de sa maison et j’étais ravie de garnir les vases avec les roses du jardin.
Je ne me souviens plus quand cette tradition a pris fin.
l'Alsacienne
3 juin 2017 @ 16:48
Antoine, votre récit me rappelle les processions de la Fête-Dieu qui se déroulaient en Alsace. Quelle ferveur et quelle fierté de participer à un tel évènement.
Pétales de roses et de pivoines, drapeaux, petits moutons (en peluche) portés sur un coussin, reposoirs garnis de bouquets, de bougeoirs et de statues.
Gérard
4 juin 2017 @ 14:19
En Provence les processions de la Fête-Dieu étaient les plus impressionnantes. Toutes les villes étaient en fête, toutes les classes sociales réunies.
Anna1
4 juin 2017 @ 09:00
Merci de nous avoir rappelé vos beaux souvenirs qui rejoignent les miens et un grand brin de nostalgie
Marcel
3 juin 2017 @ 11:45
Qu’est devenue la toile La foire de village héritée par le prince Eugène
gone
3 juin 2017 @ 13:46
Il sera bien à sa place à la Malmaison. Les simples particuliers désireux de voir accrochée dans leur salon la procession du Saint-Sacrement ne doivent pas être très nombreux, Gérard peut-être ?
Sa cote fait de ce peintre un artiste abordable à moins que la provenance de cette toile la valorise.
Gérard
3 juin 2017 @ 16:36
Ah il y avait sous l’Empire malgré les affres de la Révolution moins de mécréants qu’aujourd’hui…
La Procession de la Fête-Dieu dans un village qui a donc été préemptée pour la Malmaison pour 12 500 €, aurait été peinte vers 1804 par Jean-Louis Demarne. C’est une huile sur panneau parqueté d’une hauteur de 47 cm et d’une largeur de 68 cm qui fut exposée au Salon de l’art et de l’industrie de 1804 puis au Salon de 1808, sous le numéro 168, où elle a été acquise par l’impératrice Joséphine avec son pendant la Foire de village pour être envoyés à la Malmaison. Les deux tableaux sont mentionnés dans le Catalogue de la collection de l’impératrice imprimé en 1811 ainsi que dans son inventaire après décès de 1814. Le prince Eugène a donc reçu la Foire de village (qui comportait « au milieu un tombeau gothique ») dont la trace est aujourd’hui perdue. La Procession, elle, partit donc en 1818 avec la reine Hortense dans son exil au château d’Arenenberg sur le lac de Constance et fut vendue à une date indéterminée. En tout cas elle ne faisait pas partie des collections de son fils Napoléon III.
Le sujet rappelle que le Concordat a ramené la paix religieuse en France. Le prêtre, sans doute le curé du village, ayant revêtu le voile huméral, porte l’hostie consacrée dans un ostensoir, c’est la procession du Saint-Sacrement. L’évêque du lieu semble suivre le dais, habillé de violet il a une calotte amarante. Bourgeois et paysans se mêlent à la procession protégée en tant que de besoin par des soldats en armes tandis que des chasseurs se sont arrêtés par respect au bord de la route. Des reposoirs, qui sont donc des autels provisoires dressés en plein air, sont prévus comme autant de stations. On en voit un à gauche au pied de la statue d’un saint évêque, probablement saint Nicolas. Sous le reposoir se trouve une copie de la Vierge à la chaise de Raphaël, ce qui témoigne de la grande popularité de Raphaël au début du XIXe siècle. Mais rappelons que cette merveille qui était au palais Pitti de Florence depuis le XVIIIe siècle avait été emportée à Paris par les troupes napoléoniennes en 1799 et ne retournera à Florence qu’en 1815. La statue d’évêque figure dans une niche de style gothique ce qui montre le regain d’intérêt de l’époque pour le Moyen Âge.
Une statue est portée par des diacres, c’est peut-être une statue de la Vierge Marie, des enfants costumés ont pris l’apparence de saint Jean-Baptiste et sont entourés d’agneaux symboles de l’agneau mystique, du sacrifice à venir du Christ traditionnellement représenté sur des devants d’autels ou les portes des tabernacles.
Une réplique de la Procession a été exposée au Salon de 1812 sous le numéro 277 sous le titre Une Procession. Il semble que la première version, explique le Catalogue de la vente, ait été légèrement plus petite dans les inventaires de la Malmaison (41 x 62 cm), ce qui a incité Alain Pougetoux dans son livre sur les collections de peintures de l’impératrice Joséphine à considérer que le tableau vendu en 2016 est la seconde version, la première ayant disparu (La collection de peintures de l’impératrice Joséphine, notes et documents des musées de France, Paris, 2003, page 117). Jacques Watelin (Le peintre J.-L. De Marne, La Bibliothèque des Arts, Paris-Lausanne 1962, page 191, numéro 882) n’ayant créé qu’une seule entrée pour les deux panneaux différents cite sept ventes aux enchères du XIXe et du XXe siècle où un tableau sur ce thème est passé, mais sans distinguer laquelle des deux versions il s’agit.
L’œuvre qui retourne à la Malmaison a été présentée probablement donc au Salon de 1812 sous le numéro 277, à la basilique de Montréal, Canada, pour l’exposition Les trésors de Napoléon de mai à septembre 2014.
La Fête-Dieu ou fête du Saint-Sacrement ou Corpus Domini ou Corpus Christi qui rappelle la présence réelle du Christ dans l’Eucharistie est célébrée le jeudi qui suit la Trinité et solennisée le deuxième dimanche après la Pentecôte juste après la célébration de la Trinité, sous le vocable actuel de Solennité du corps et du sang du Christ.
Demarne a représenté souvent des foires inspirées par les maîtres hollandais du XVIIe siècle et le Louvre en conserve deux exemples.
Jean-Louis de Marne ou Demarne est né à Bruxelles vraisemblablement en 1752 et mort aux Batignolles près Paris le 24 mars 1829. Son père était officier au service autrichien en poste à Bruxelles à un moment de sa vie. Jean Joseph de Marne avait épousé la baronne Anne-Ernestine-Christine de Ausechutz, lui-même vécut l’essentiel de sa vie à Paris où il arriva à 12 ans après la mort de son père et où il se mariera à Saint-Eustache avec une dieppoise Olive Le Grand dont il aura trois enfants. Il s’inspira beaucoup des peintres hollandais pour ses peintures de paysages mais il fut également un chroniqueur de son temps avec par exemple le choix que fit l’empereur de lui demander de peindre l’Entrevue de Napoléon et de Pie VII dans la forêt de Fontainebleau, le 24 novembre 1804, qui est au château de Fontainebleau. Il fut membre associé de l’Académie royale et reçut la Légion d’honneur de Charles X.
Comme il représenta souvent les mêmes sujets Maurice Goutard dans Le Journal de l’Empire du 18 janvier 1813 écrivait « De ses tableaux, quelques-uns, non pas tous, sont fort jolis ; mais cela ne suffit pas. L’ennui naquit un jour de l’uniformité. Il y a, comme on vient de le voir, déjà quelques années que ce jour est passé ; l’ennui commence à se faire grand… ». Il est néanmoins bien représenté dans nombreux musées français mais aussi à Bruxelles, à la Wallace Collection à Londres, à Saint-Pétersbourg, à Moscou…
DEB
5 juin 2017 @ 16:05
Merci Gérard.
Récit très complet et agréable à lire.
Gérard
5 juin 2017 @ 16:31
Dans les collections du prince Eugène on trouvait par Jean-Louis de
Marne : Marché aux bestiaux avec beaucoup de personnages, qui est répertorié depuis 1826 comme conservé à la Galerie Leuchtenberg alors ouverte au public au palais Leuchtenberg de Munich (voir Johann David Passavant, The Leuchtenberg Gallery, 1855, sous le numéro 242). Mais ce n’est peut-être pas le tableau recherché.
La galerie Leuchtenberg était l’une des plus belles collections privées au XIXe siècle et elle était très documentée puisqu’elle possédait un catalogue en anglais et illustré depuis 1852. Elle avait été cataloguée dès 1825 en français et en allemand avec une révision en allemand en 1841. Elle contenait beaucoup d’œuvres qui avaient été acquises par l’impératrice Joséphine et elle avait été continuée par son fils le prince Eugène et par ses descendants.
En 1810 Eugène Napoléon avait acheté une partie de la collection, vendue par ses héritiers, du général comte Giovanni Francesco Arese (1642-1721) qui contenait au moins un Rubens. La galerie était installée au palais Leuchtenberg qui fut construit pour le prince Eugène par Leo von Klenze entre 1817 et 1821.
Mais après la mort du duc Maximilien en 1852 la galerie fut fermée et les peintures et sculptures réparties entre ses enfants. Le palais fut vendu au prince régent de Bavière Luitpold. Une partie de la collection fut transférée en 1854 à Saint-Pétersbourg et installée par le prince Nicolas au palais Mariinsky en 1863 puis prêtée à partir de 1870 à l’Académie impériale des arts, tandis que le reste de la collection fut transférée par Eugène Maximilianovitch, duc de Leuchtenberg, fils cadet du prince Eugène, en 1863 de Munich à Saint-Pétersbourg.
La collection était presque complète en 1841 mais elle fut accrue par des achats dans les années 1860 par la grande duchesse Maria Nikolaïevna de Russie, veuve du prince Eugène Maximilianovitch. Toutefois certaines œuvres furent vendues à la fin du XIXe siècle. On peut dire cependant que la collection resta à peu près complète jusqu’à la révolution russe en 1917. Le prince Nicolas Nikolaïevitch Romanovsky (1868-1928) fils et héritier du prince Nicolas vendit un certain nombre d’œuvres – il est le grand-père de l’actuel duc de Leuchtenberg qui porte le même nom que lui.
La collection fut dès lors dispersée, un certain nombre de peintures vendues en Suède (je ne sais si c’est en raison de l’ascendance Beauharnais des rois de Suède depuis la reine Joséphine fille du prince Eugène). Beaucoup de sculptures et de peintures ont été acquises par l’Hermitage et par le musée Pouchkine tandis que d’autres ont été achetées par des musées du monde entier comme la Circoncision de Jésus de Parmigianino à l’Institut des arts de Détroit. D’autres œuvres sont dans des collections privées et un certain nombre ont eu une destination inconnue.
Certaines œuvres passent de temps en temps en vente publique.
Le palais Leuchtenberg qui abrita la collection au premier étage fut gravement endommagé par les raids aériens en 1943 et 1945. L’État libre de Bavière acheta les ruines à la famille royale et détruisit le bâtiment.
En 1963-1967 celui-ci fut reconstruit in situ à peu près à l’identique pour ce qui concerne les façades selon la technique actuellement utilisée au palais royal de Berlin. Certaines pièces ont été reconstituées au premier étage mais les décorations d’origine qui ont pu être sauvées sont conservées au palais de Nymphenburg.
L’huile sur panneau de chêne parqueté par Demarne signée en bas à gauche sur la malle : De Marne et mesurant 43,5 de haut sur 64,5 cm de large, vendue chez Rossini 15 000 € le 11 mai 2010, a été dans la collection du duc de Leuchtenberg dont un certain nombre de pièces passèrent dans la collection du président Charles d’Eucqueville à Paris qui fit l’objet d’une vente les 24 et 25 mars 1936 chez Étienne Ader. Le président Charles d’Eucqueville avait huit tableaux de De Marne dont la Fête sur le Main de la collection du duc de Leuchtenberg, La Fontaine gothique de la collection du maréchal Ney, prince de la Moskowa, et Le Marché sur le port, de la collection des ducs de Bavière. La Foire fut vendue une nouvelle fois chez Me Étienne Ader à Paris le 19 juin 1947 et une troisième fois à Paris au Palais Galliera le 16 juin 1967. Cette Foire vendue en 2010 pourrait être la Foire de Saint-Denis citée par Watelin (planche XXXVIII) avec la provenance complémentaire suivante : « Cabinet Dufresne, 20 décembre 1814, vente 7 février 1820 ». Mais notre tableau est resté chez l’impératrice Joséphine semble-t-il jusqu’à sa mort au mois de mai 1814 et on ne voit pas pourquoi il serait allé ensuite dans la collection du peintre Dufresne.
Et encore faudrait-il qu’il y ait un tombeau gothique dans cette foire de village. La Fondation Napoléon précise que l’impératrice Joséphine fit l’acquisition au Salon de 1804 d’Un Charlatan de village par Demarne et que l’inventaire des collections de Malmaison après le décès en 1814 mentionne trois tableaux de Demarne, cette Foire de village avec tombeau gothique (on connaît une représentation un peu semblable appelée Foire au bord d’une rivière), la Procession de la Fête-Dieu dans un village qui ont été toutes deux été exposées au Salon de 1808 mais aussi une Vue d’une grande route. Ce sont encore des variations par Demarne autour du thème de la route qui apparaissent dans les collections de Lucien Bonaparte dès 1804, dans celles de l’empereur Alexandre de Russie en 1806 ou dans les acquisitions de l’État au Salon de 1814.
Teresa 2424
3 juin 2017 @ 15:26
En fascina todo lo que es arte!! Preciosa obra: es una muy buena representacion de epoca
JAusten
3 juin 2017 @ 20:14
et bien je découvre ce peintre. je suis allée sur la toile pour prendre connaissance des siennes … précis, colorés .. j’aime beaucoup.
Alinéas
4 juin 2017 @ 08:58
Merci de m’avoir permis de découvrir ce peintre que je connaissais pas.