Maître Ader, commissaire-priseur à Paris, va vendre aux enchères le 15 décembre prochain une peinture d’après Alexandre Menjaud (1773-1832) représentant les derniers moments du Duc de Berry dans le foyer de la salle de l’Opéra à Paris.
Cette scène représente un événement malheureux qui s’est produit le 13 février 1820. Ce soir-là en sortant de l’Opéra rue de Richelieu, un ouvrier bonapartiste nommé Louvel donne un coup de poignard au Duc de Berry, le second fils du futur Charles X.
Le jeune Prince, espoir de la monarchie, est transporté dans le foyer de l’Opéra de Paris où son chirurgien Bougon tente de le soigner.
A 6 h du matin, après 7 heures d’agonie, le Duc de Berry rend son dernier souffle en présence de la famille royale. C’est ce moment que le peintre choisit d’immortaliser. On reconnaît autour du Prince, Louis XVIII, le Duc d’Orléans, le Prince de Condé et la jeune Duchesse de Berry agenouillée au pied du lit qui lui présente sa fille. Le château de Versailles et de Chambord conservent des versions de cette scène. (Merci à Charles -Photo Étude Ader)
Damien B.
2 décembre 2017 @ 06:10
Le duc de Berry a eu la force d’extraire lui-même la lame qui l’avait transpercé avant de tomber dans le coma. Ce détail m’a toujours frappé.
Margaux ?
2 décembre 2017 @ 09:03
C’est effectivement frappant mais certains actes, réalisés au seuil de la mort, sont impressionnants.
Muscate-Valeska de Lisabé
2 décembre 2017 @ 16:22
Je suis comme vous,Damien.Il faut beaucoup de cran pour avoir ce geste…sûrement la douleur était-elle si dense et insupportable que ce geste était désespéré,pour tenter de l’atténuer et de se soulager. ..
Cette toile est belle et de bonne facture.
Pierre-Yves
3 décembre 2017 @ 13:56
Ah Damien, on voit que vous ne vous êtes jamais oté une écharde que vous aviez dans le pied ! :)
Muscate-Valeska de Lisabé
4 décembre 2017 @ 17:50
Ni une épine de rosiers dans le mollet! ;-)
ciboulette
3 décembre 2017 @ 18:25
Je l’ignorais .Mais il me semble que ce geste était à proscrire , car il a hâté ou relancé l’hémorragie .
Corsica
3 décembre 2017 @ 20:10
Mais ce n’est pas du tout une bonne idée ! Quand on est poignardé, voire empalé ou transpercé par un objet, il vaut mieux laisser l’objet en place afin d’éviter une hémorragie cataclysmique. À l’époque du duc de Berry cela n’aurait probablement rien changé mais à l’époque actuelle, cela peut faire la différence entre la mort et la vie. Il vaut donc mieux que l’ablation de l’objet soit pratiquée en milieu hospitalier où sutures vasculaires et autres interventions nécessaires peuvent être faites.
Muscate-Valeska de Lisabé
4 décembre 2017 @ 17:48
On y pensera pour la prochaine fois, chère Corsica! ;-))
clement
2 décembre 2017 @ 09:25
Ambiance pas très intime pour une agonie …..dans la réalité il y avait peut-être moins de monde !
gone
2 décembre 2017 @ 11:13
Deviner ce qui se serait passé si quelques mois plus tard au lieu d’accoucher d’un garçon la duchesse de Berry avait accouché d’une fille ?
Cette question intéresse-t-elle N&R ?
Gérard
3 décembre 2017 @ 14:48
Louis-Philippe aurait succédé à Louis XIX à la mort de celui-ci sauf accident de l’histoire.
Philippe Gain d'Enquin
2 décembre 2017 @ 12:09
La froideur dans le foyer, n’y aurait-il pas là une anomalie ? A vos raides, feu : partez…
Teddy
2 décembre 2017 @ 12:56
Dans la réalité ce sont ses deux filles naturelles qui étaient près du lit mortuaire
Teddy
2 décembre 2017 @ 12:57
En réalité ce fut ses deux filles naturelles qui furent a ses côtés
Teddy
2 décembre 2017 @ 12:59
Ses feux filles naturelles etaient presente
teddy
2 décembre 2017 @ 13:02
Ses deux filles naturelles étaient presentes
teddy
2 décembre 2017 @ 13:03
Il y avait un bug réseau j ai mis le message plusieurs fois
Muscate-Valeska de Lisabé
4 décembre 2017 @ 17:51
Comme ça,Teddy,on le sait et on vous crois! ;-))
Gérard
2 décembre 2017 @ 13:42
Merci Régine et Charles de nous rappeler ce tableau.
Les Derniers Moments du duc de Berry dans le foyer de la salle de l’Opéra de Paris ou Les Derniers Moments du duc de Berry dans la salle de l’ancien Opéra, c’est le titre de cette toile au réalisme saisissant, de 43,5 sur 59,5 cm d’après Alexandre Menjaud (1773-1832) et il s’agit de la reproduction du tableau conservé à Versailles (1,30 x 1,76 m, soit 4 pieds 6 pouces sur 5 pieds 6 pouces) qui fut exposé au Salon de 1824 et dont on connaît d’autres compositions dont une a été acquise par le château de Chambord en 1992.
L’original a été composé à la demande du futur Charles X pour le musée du Luxembourg.
Le duc de Berry est donc assassiné dans la nuit du dimanche 13 février 1820, dernier dimanche avant le carême, en sortant de l’opéra qui se situait rue de Richelieu à Paris (c’est à la suite de cet assassinat que cet opéra fut détruit), il est poignardé au moment où il raccompagne son épouse lasse à sa voiture (elle ignore encore qu’elle est enceinte), vers onze heures du soir – dans la rue Rameau où une sortie permet d’accéder directement à la loge royale – par l’ouvrier bonapartiste ou républicain Louis-Pierre Louvel, et transporté dans le foyer de l’opéra où son chirurgien Charles Bougon (1779-1851) tente de le sauver mais il va agoniser en ce lieu pendant sept heures faisant montre du plus grand courage et demandant la grâce de l’assassin et regrettant de mourir de la main d’un Français. Berry expire à six heures du matin.
Le roi Louis XVIII s’est déplacé contrairement à la tradition qui voulait que les souverains français n’assistent pas à des agonies, le roi se tient la poitrine barrée du cordon du Saint-Esprit devant son neveu et il a sa droite le prince de Condé et à sa gauche le duc d’Orléans. Agenouillée au pied du lit la duchesse de Berry, ses longs cheveux défaits, lui présente leur fille à laquelle le prince dit : « Pauvre enfant, je souhaite que tu sois moins malheureuse que ceux de ta famille. »
Le duc de Berry repose donc sur un lit de fortune dans cette pièce éclairée d’une seule lumière en sorte que tout est dans la pénombre à l’exception du lit du prince. Bougon prend le pouls de Charles Ferdinand. Louis XVIII le bénit. Le comte d’Artois est agenouillé. Le duc d’Angoulême est également agenouillé mais de dos en face de son père et au côté de sa belle-sœur. Puis la duchesse d’Angoulême venue en cheveux, les mains jointes, et, derrière elle, penchées, la duchesse d’Orléans et sa belle-sœur Adélaïde, Mlle d’Orléans. Toute la famille royale est donc réunie, ravagée par la tristesse mais marquée de la plus profonde dignité dans l’espérance chrétienne. Derrière à droite se trouve Élie Decazes, président du Conseil et ministre de l’intérieur qui va démissionner après cet assassinat qu’il n’a pu empêcher, à ses côtés Chateaubriand et derrière des gardes royaux.
Derrière le mourant et à gauche du tableau les prêtres dont Monseigneur de Latil, évêque élu de Chartres, qui se tient derrière l’agonisant ayant à ses côtés l’abbé Mardruel, curé de Saint-Roch tenant le crucifix.
Les conservateurs et naturellement l’entourage de Monsieur accusèrent donc Decazes d’avoir été directement ou indirectement le complice du crime par sa bienveillance envers les libéraux. Ne voulant pas mettre le roi en difficulté il offrit sa démission et Louis XVIII dans un premier temps la refusa lui disant : « Ils attaqueront non votre système, mon cher fils, mais le mien ». Finalement Decazes sera contraint à la démission en février 1820, élevé au rang de duc et nommé ambassadeur en Grande-Bretagne.
Comme les historiens de l’art le font remarquer Menjaud présente un mourant héroïque mais en même temps d’une manière anecdotique et familière, propre à toucher le spectateur et éloignée de l’héroïsme viril cher aux artistes de la fin du XVIIIe siècle (Pascal Torrès, L’assassinat du duc de Berry, Histoire par l’image [en ligne]).
Voir aussi : https://histoiresensaga.wordpress.com/2015/02/26/histoires-en-toiles-6-les-derniers-moments-du-duc-de-berry-a-lopera/du jeune William Donnart.
Le sujet a été également traité dans un mode plus intimiste, par Alexandre-Évariste Fragonard, le fils de Jean-Honoré, Les Derniers Moments du duc de Berry, à Bayonne, musée Bonnat-Helleu, ou par François-Barthélémy Cibot (1799-1877), sur une toile conservée au Musée Carnavalet, et bien entendu on se souvient des écrits de Victor Hugo et de Chateaubriand sur la mort du duc de Berry.
Observons (Joseph Marche, Monseigneur de Latil sous la Restauration, Revue d’histoire de l’Église de France, année 1962, volume 48, numéro 145) que le duc éprouvait pour Mgr de Latil, futur archevêque de Reims, depuis longtemps une aversion qu’il s’expliquait mal ; « lorsque se sentant blessé à mort, il voulut se confesser, M. de Clermont-Lodève ne trouva dans le voisinage de l’Opéra, sis à cette époque à l’angle des rues de Louvois et de Richelieu, que Mgr de Latil. C’est à lui qu’il fit le pénible aveu de son mariage secret avec l’anglaise Amy Brown dont il avait eu deux filles ; peut-être encouragea-t-il le mourant à révéler à la duchesse cette paternité, car peu après avoir reçu l’absolution le duc fit à son épouse cette révélation qu’elle accueillit avec magnanimité. Quand on apprit, quelques jours après, la fermeture de l’Opéra, le bruit courut que le prélat l’avait exigée avant de se rendre au théâtre : le précepteur du duc d’Aumale, Cuvillier-Fleury, qui vivait dans un milieu hostile aux légitimistes, s’est fait dans un passage (écrit en 1829) de son journal intime, l’écho de ce bruit. Nous n’avons pu en trouver la moindre preuve. A priori nul prêtre appelé au chevet d’un mourant ne pose de telles conditions ; et Mgr de Latil n’ignorait pas que le transfert de l’Opéra ne pouvait être décidé sans un débat législatif. Il est bien plus probable que la décision du gouvernement résulte d’un motif plus admissible : comme l’écrivait en 1824 l’abbé Marduel, curé de Saint-Roch, « un bâtiment qui a été le théâtre de l’horrible assassinat… ne pouvait plus procurer au public ni divertissement, ni plaisirs. » Aussi sa reconstruction fut-elle décidée rue le Pelletier et un crédit de 1.800.000 francs fut demandé aux Chambres. L’exposé des motifs n’allègue que la raison de convenance : « il ne pouvait plus être permis de rouvrir les jeux de la scène dans un lieu qui rappelle de si tristes souvenirs ». Déjà un monument expiatoire s’érigeait place Louvois, selon le vœu des royalistes. »
DEB
3 décembre 2017 @ 14:09
Merci de partager ce récit avec nous Gérard.
Gérard
4 décembre 2017 @ 19:06
C’est moi qui vous remercie DEB.
Le duc de Berry était populaire, il avait tout naturellement un côté peuple, un langage de soudard et chacun savait qu’il courtisait toutes les actrices, il n’était ni très savant ni très distingué, mais il n’était pas fier, parlait à tout le monde et finalement vivait presque comme tout le monde et se promenait sans escorte, se rendait dans les boutiques.
Et cela tout le monde le savait et c’était pourquoi il était vulnérable, on ne peut pas dire que Louvel le détestait mais Louvel voulait mettre un terme à la branche aînée des Bourbons qu’il haïssait.
Ce soir-là qui était donc le dimanche gras deux soirées mondaines marquaient la vie parisienne, l’une chez le maréchal Suchet duc d’Albuféra, à laquelle les Orléans étaient conviés mais où ils n’allèrent pas pour se rendre à l’opéra, et l’autre, costumée chez Madame de La Briche, la riche Adélaïde Prévost.
À l’opéra on donnait l’opéra Le Rossignol qui fut créé en 1816 sur une musique de Louis-Sébastien Lebrun avec un livret de Charles-Guillaume Étienne, un opéra-comique en un acte qui fut suivi de deux ballets : Le Carnaval de Venise créé lui aussi en 1816 sur une chorégraphie de Louis Milon avec une musique de Louis de Persuis et de Rodolphe Kreutzer, et Les Noces de Gamache de Louis Milon créé en 1801 sur une musique de François-Charlemagne Lefebvre, et librement adapté du Don Quichotte de Cervantès.
Pour la duchesse d’Orléans c’était en quelque sorte une sortie de relevailles parce qu’elle avait accouché le mois précédent du duc de Penthièvre, c’était sa première sortie.
Les Orléans étaient accompagnés de Mademoiselle d’Orléans et du jeune duc de Chartres. Peu après le duc et la duchesse de Berry arrivèrent dans la loge d’en face. Les Orléans allèrent les saluer. À l’entracte, le duc et la duchesse de Berry leur rendirent leur visite dans leur loge et le duc de Berry caressa longuement les cheveux blonds du duc de Chartres. La foule du parterre et des loges en voyant le tableau applaudit frénétiquement la famille royale et la réunion des deux branches.
Puis le duc raccompagna à sa voiture son épouse qu’il savait enceinte, avant de regagner l’opéra. Sans doute y retournait-il pour voir Virginia Oreille car cette danseuse était sa maîtresse.
Avant que la voiture ne s’ébranle il dit à sa femme : « Adieu, Caroline, nous nous reverrons bientôt. »
C’est à ce moment-là qu’il fut poignardé et qu’il retira lui-même l’alêne longue de 25 centimètres (qui est toujours conservée aux Archives nationales) de son côté. Il dit à son entourage « Un prêtre » et à Caroline « Venez, ma femme, que je meure dans vos bras. »
Le duc réclama ensuite sa fille qu’on alla chercher à l’Élysée et pour le prêtre ce fut donc Monseigneur de Latil, premier aumônier de Monsieur, évêque in partibus d’Amyclées près de Sparte mais qu’il n’aimait pas et qu’on trouva au pavillon de Marsan.
Le comte d’Artois arriva très vite bientôt suivi par le duc et la duchesse d’Angoulême.
Au cours de cette nuit tragique Marie-Caroline cria beaucoup et sa douleur faisait peine à voir. Le blessé lui dit de se ménager pour l’enfant et c’est ainsi que beaucoup apprirent qu’elle serait bientôt à nouveau mère, mais elle avait déjà perdu deux enfants Louise et Louis qui vécurent quelques heures.
Néanmoins la mort du duc de Berry devait laisser les Ultras désespérés car le comte d’Artois qui était veuf refusa outré l’idée de certains qui était qu’il se remarie passé la soixantaine, et dès lors la couronne pourrait aller au fils du régicide.
Il y eut une certaine agitation du côté des loges de l’opéra et une ouvreuse crut bon de frapper à la porte des Orléans pour le leur signaler, elle frappa et manifesta son inquiétude auprès du baron Atthalin, l’aide de camp du duc. Le duc et la duchesse et leur sœur se précipitèrent vers la loge du duc et de la duchesse de Berry.
Dans son premier temps on installa le duc dans l’antichambre de sa loge sur quatre chaises mais comme il fallait l’étendre et ce n’était pas assez grand, on le transporta dans le bureau du directeur où l’on put installer un lit de sangles sans utiliser les couchages que le secrétaire général Grandsire avait fait apporter un peu tard, ce bureau était plus vaste, car dès l’abord le blessé parut intransportable du fait de la profondeur du coup.
Les médecins de service ne furent pas trouvés et l’on fit monter le docteur Drogart qui passait dans la rue, puis le docteur Blancheton qui habitait rue de Lulli à côté et le docteur Lacroix-Lacombe rue Rameau.
Berry demanda aussi qu’on aille chercher les deux filles qu’il avait eues d’Amy Brown.
Ce soir-là Decazes avait laissé son épouse aller au bal Suchet et se trouvait chez lui avec le ministre des Affaires étrangères Pasquier et le duc de Richelieu lorsqu’arriva l’officier de paix Joly qui était en charge de la surveillance discrète du duc de Berry. Surveillance d’autant plus discrète que ce soir-là Joly au lieu de surveiller le duc buvait au café voisin. Joly avait été valet de pied chez la reine Hortense chez qui Decazes servit aussi et dont Joly devint l’intendant. Decazes fit avertir par lettre le roi et se précipita à l’opéra. Il trouva Artois qui l’embrassa et lui demanda d’aller prévenir son frère.
Le roi fut prévenu de l’attentat vers minuit. Plus tard lorsqu’on lui porta le second bulletin médical il voulut aller sur place. C’est à cinq heures du matin que Louis XVIII se rendit donc à l’opéra pour voir son neveu. On le monta avec difficulté sur son fauteuil dans le petit escalier qui permettait d’accéder au bureau dans lequel on avait pu poser le matelas.
Le duc attendait avec impatience son oncle. « Ah ! Le Roi n’arrivera pas ; je ne pourrai pas lui demander la grâce de l’homme. » Puis s’adressant tour à tour à Monsieur et au duc d’Angoulême il leur dit « Promettez-moi, mon père, promettez-moi, mon frère, que vous demanderez au Roi la grâce de la vie de l’homme. »
Dès que Charles-Ferdinand vit son oncle il insista pour obtenir la grâce du meurtrier. Le roi manifestement ne voulait pas la donner et il éluda la question : « Mon neveu, vous n’êtes pas aussi mal que vous le pensez ; nous en reparlerons. »
Berry ajouta « Ah ! Le roi ne dit pas oui. La grâce de l’homme eût pourtant adouci mes derniers moments. »
Il dit plus tard : « Ô mon père, Ô mon roi ! Grâce pour l’homme qui m’a
frappé ! »
L’extrême-onction avait été donnée lorsqu’arrivèrent les deux premières filles qu’il avait eues. Marie-Caroline embrassa les deux enfants et dit à époux :
« Charles, j’ai trois enfants à présent. » Elle ajouta pour le roi qu’elle les adopterait et le roi répondit : « Je donnerai le nom de comtesse de Vierzon à l’une, et de comtesse d’Issoudun à l’autre ». Le duc parla un peu à ses filles en anglais.
Peu avant la mort du duc de Berry Louis XVIII dit au duc et à la duchesse d’Orléans qu’ils devaient être fatigués depuis le début de cette longue attente. Madame Adélaïde évanouie avait dû être reconduite chez elle. Certes Louis-Philippe et Marie-Amélie devaient être fatigués mais plusieurs témoins pensèrent que c’était une nouvelle avanie que le roi faisait aux Orléans. Le duc et la duchesse prirent donc congé.
Louis XVIII se pencha vers Dupuytren et lui dit en latin qu’il aimait à pratiquer même en ces circonstances : « Superest spes aliqua salutis ? » C’est-à-dire bien sûr « Reste-t-il quelque espoir ? »
Et pendant que le chirurgien cherchait une réponse latine au fond de sa mémoire au cours de cette épuisante nuit, son second, Dubois, répondit négativement. Ils étaient parmi les meilleurs chirurgiens de Paris.
Sentant qu’il allait mourir après cette longue agonie le duc de Berry fit un dernier effort pour dire à voix haute : « Grâce, grâce pour l’homme ! » et il rendit l’âme.
Le roi dit en prenant la main du dernier espoir des Bourbons : « Que la volonté de Dieu s’accomplisse ! », Dupuytren réclama un miroir. Le roi lui tendit sa tabatière que le médecin plaça contre les lèvres du malheureux et elle n’en fut point ternie. Louis XVIII alors reprit : « Je ne crains pas le spectacle de la mort, j’ai un dernier devoir à rendre à mon neveu. » S’appuyant alors sur le bras de Dupuytren il ferma les yeux et la bouche de Charles, lui baisa la main et se retira.
Il était six heures trente-cinq.
Actarus
2 décembre 2017 @ 15:09
Pour nos amis belges, et les gens des HdF (Hauts de France lol), sachez que le les viscères (c’est pas sexy, je sais) du duc de Berry sont conservés dans un monument de l’église Saint-Maurice à Lille.
https://fr.wikipedia.org/wiki/%C3%89glise_Saint-Maurice_de_Lille#/media/File:Lille_St_maurice_CF_d%27Artois.JPG
Actarus
2 décembre 2017 @ 15:11
le les… j’en bafouille d’émotion. ^^
Philippe Gain d'Enquin
3 décembre 2017 @ 19:03
Monument attestant que le prince est mort en martyr et monté ainsi qu’il sied en semblable circonstance, au Ciel, à la droite de Dieu. L’on en pense ce que l’on veut, mais puisque vous semblez le connaître, savez vous le pourquoi de son érection(sans lol) ? Le duc de Berry fut le 1er des Bourbons restaurés à entrer dans Lille à la chute de Napoléon, imprudemment il prononça s’adressant aux sujets frondeurs de son oncle Louis XVIII (révolutionnaires, puis républicains, puis bonapartistes et quoi qu’il en soit d’un opportunisme pitoyablement exemplaire) tant l’accueil ménagé par le populaire et les édiles locaux l’avait touché : « Entre vous et moi, c’est à la vie et à la mort » Si fait une clause de son testament précisait que ses viscères fussent transférées à Lille, aux dernières » Louvel », ce fut fait… Je conclue en précisant que le legs princier est « sous » le monument et non « dans », mais votre enthousiasme vous aura distrait… Cordialement à vous, Pge
Actarus
4 décembre 2017 @ 13:51
Merci de vos précisions. Comme je viens de le signaler par ailleurs à Olivier d’Abington sous la publication des 16 ans de la princesse Aiko, je n’ai pas de manqué de distractions en fin de semaine…
Gérard
5 décembre 2017 @ 18:18
Le cœur du duc de Berry avait été frappé à l’oreillette droite ce qui n’entraînait pas une mort immédiate. La mort fut hâtée quand le duc qui souffrait énormément demanda à être un peu tourné.
Ce cœur a été placé à la demande de la duchesse en la chapelle de l’hospice Saint-Charles de Rosny-sur-Seine qu’elle fonda en 1824. La chapelle est due à l’architecte Joseph-Antoine Froelicher. Le transfert du cœur depuis Saint-Denis où les obsèques avaient été conduites par le duc d’Orléans désigné par le roi, eut lieu le lundi 29 mars 1824 et commença aux premières heures du jour. Derrière l’autel de Rosny fut placé un mausolée de marbre blanc renfermant le cœur. La garde nationale de Mantes et une compagnie des gardes du corps de Monsieur restèrent près du monument funèbre toute une nuit et au matin l’absoute fut donnée par Mgr de Chabon, évêque d’Amiens, en présence de nombreuses personnalités. L’urne fut enlevée en 1830 par crainte des profanations, elle fut conservée par le marquis de Rosanbo. Cette urne fut retrouvée en 1889 et remise à sa place. Lors de la Seconde Guerre mondiale les Allemands pillèrent le château et l’hospice mais un soldat SS déroba l’urne funéraire et l’enterra sous un chêne à Coux en Charente-Maritime où elle fut retrouvée par hasard en 1966 et transportée à Saint-Denis par les soins du prince Xavier de Bourbon-Parme qui était le propriétaire de l’hospice Saint-Charles.
Lors du dépôt du cœur une médaille à l’effigie à gauche de la duchesse et du duc surmontée d’une petite étoile fut frappée par la Monnaie de Paris. Au revers il est écrit : « Dans cet asile sacré au milieu des orphelins et des pauvres qu’il a toujours secourus repose le cœur magnanime de Ch. F. duc de Berry. Sa veuve inconsolable a marqué sa place auprès de lui 4 novembre 1820 ».
La duchesse avait également fait placer à Rosny dans un coffre de chêne doublé de plomb les vêtements ensanglantés de son époux.
Rappelons que le château de Rosny fut acheté par le duc de Berry le 14 août 1818 au négociant Mourraux qui l’avait acquis peu avant des Talleyrand-Périgord.
Comme l’ont dit nos amis Actarus et Philippe le duc se plaçant dans les pas d’Henri IV, avait émis le vœu que son cœur reposât à Lille mais ce furent ses entrailles qui y furent envoyées. Le monument de Lille est dû au dessin de Victor Leplus (1798-1851) et a été exécuté par le sculpteur parisien Edme Étienne Gois (1765-1836), il est en marbre blanc avec à gauche la ville de Lille assise éplorée, entourant de son bras gauche l’urne funéraire et à droite la Religion tenant une grande croix et désignant le portrait du prince qui aujourd’hui a disparu et se trouvait sur la pyramide qui sert de toile de fond. Le monument a été démonté en 1831 mais fut reconstitué peu à peu dès 1844 et en 1913 et 1980.
Le cercueil du duc de Berry lui est resté sur des tréteaux dans la chapelle des princes de Saint-Denis.
Un cénotaphe a également été installé en l’église Saint-Louis de Versailles, qui est la cathédrale. Ce monument dans la chapelle Saint-Charles-Borromée est dû à James Pradier, grand prix de Rome. La Religion drapée à l’antique soutient le mourant. Le monument fut retiré après la Révolution de 1830 et replacé-là en 1852. De même un bas-relief de James Pradier fut édifié en l’abbatiale Saint-Germain d’Auxerre.
Un monument funéraire à la place de l’opéra fut financé par une souscription, il aurait consisté en un obélisque avec une fontaine bouillonnante dont les eaux auraient lavé sans cesse le pavé ensanglanté, mais la duchesse de Berry préféra une chapelle expiatoire qui n’était pas achevée en 1830 et qui fut démolie et remplacée par une fontaine. De la chapelle il ne reste que trois bas-reliefs évoquant l’assassinat et conservés à Saint-Denis.
Isabelle d'Ottawa
2 décembre 2017 @ 17:23
La duchesse de Berry n’était-elle pas enceinte au moment de cet évènement?
Gérard
3 décembre 2017 @ 17:05
Oui mais personne ne le savait.
Philippe Gain d'Enquin
3 décembre 2017 @ 19:06
Mais si, du futur duc de Bordeaux et plus tardivement comte de Chambord, surnommé « L’Enfant du miracle »! Miracle qui consista grâce à lui à réduire à néant, en 1870, tout espoir de restauration de la monarchie en France.
Actarus
4 décembre 2017 @ 13:52
En fait, c’était en 1873, non ? ;-)
Philippe Gain d'Enquin
5 décembre 2017 @ 12:58
Vous n’êtes pas aussi submergé que cela, bravo, vous me/nous rassurez ! Cordialement, Pge
Roger
2 décembre 2017 @ 17:46
L’Opéra était a l’emplacement de l’actuel Square LOUVOIS,rue de Richelieu !L’archevèque de Paris avait accépté de venir dans le théatre ,lieu satanique (!!!) ,à condition qu’il ensuite démoli….ce qui fut fait !
marie francois
2 décembre 2017 @ 18:39
Il y a beaucoup d’hommes d’église mais peu de médecins et d’infirmieres ou de religieuses puisqu’elles remplissaient ce role à l’époque.
Son pere, le comte d’Artois n’est pas nommé. Etait il absent ?
Gérard
3 décembre 2017 @ 17:06
Monsieur est agenouillé au pied du lit.
Caroline
2 décembre 2017 @ 23:20
Qui voudrait acheter ce tableau macabre? Pas un particulier, mais un musée ?
clement
3 décembre 2017 @ 14:28
Si la duchesse de Berry avait été enceinte d’une fille au lieu du duc de Bordeaux ,cela n’aurait pas changé grand’chose puisque ce dernier titré alors comte de Chambord n’a pas régné et fut le dernier Bourbon dynaste de France ! L éventuelle princesse aurait épousé un quelconque prince européen !
framboiz07
4 décembre 2017 @ 00:06
Amy Brown avait deux filles :
Descendance Jean de Broglie, secrétaire d’Etat sous De Gaulle, assassiné en 1976 et Anne Aymone Giscard d’Estaing , par les Faucigny-Lucinge ,
deuxième fille ;Hervé de Charrette, ancien ministre sous Balladur .
Guy Coquille
4 décembre 2017 @ 15:12
Il semble que le Duc de Berry aurait survécu à son agression s’il n’avait pas retiré la lame de son flanc et surtout s’il n’avait pas été stupidement saigné longuement par un médecin malhabile. Decazes démissionna peu après, « son pied ayant glissé dans le sang », Bien que l’assassin n’eût rien à voir avec le ministre, il est vrai cependant que la politique de concessions continuelles et irréversibles aux ennemis de la monarchie, qu’il avait menée, conduisait la faction républicaine et bonapartiste à se croire tout permis. Berry était un prince bon vivant et aimable, se laissant peu impressionner. Un jour, alors qu’il passait en revue un bataillon de la garde, un concert de cris « vive l’empereur » se fit entendre. Sans se démonter, Berry leur fit face, et leur dit en souriant: » Avec des soldats tels que vous, quel mérite avait-il? » La répartie lui valut une salve de hourras et de « vive le duc! » Il quitta la revue sous les vivelerois.
Charles
20 décembre 2017 @ 11:48
Le tableau représentant l’agonie du Duc de Berry a été vendu 3.500€ frais compris.