Voici la carte postale du monastère royal de Brou par Guizmo. « Édifié au début du XVIe siècle par Marguerite d’Autriche, duchesse de Savoie, le monastère royal de Brou, situé sur la commune de Bourg-en-Bresse, constitue un chef-d’œuvre de l’art gothique flamboyant.
Il était une fois une princesse très amoureuse de son prince, qui devient inconsolable lorsque qu’il meurt d’un accident de chasse.
Veuve à 24 ans de Philibert le Beau (1480-1504), Marguerite d’Autriche décide alors de bâtir aux portes de Bourg-en-Bresse le monastère royal de Brou pour abriter trois somptueux tombeaux (ceux de Philibert le Beau et de sa mère, et le sien). Ce triste conte est l’histoire de Marguerite d’Autriche et de Philibert le Beau, duc de Savoie.
Marguerite d’Autriche est la fille de l’empereur du Saint Empire romain germanique Maximilien Ier de Habsbourg et petite-fille, par sa mère, de Charles le Téméraire, dernier des grands ducs de Bourgogne. D’abord élevée à la Cour de France comme une future reine – elle devait épouser Charles VIII, futur roi de France – Marguerite est ensuite répudiée.
Après cette répudiation elle épouse Don Juan, infant d’Espagne qui meurt rapidement. La jeune Marguerite d’Autriche épouse alors, à 21 ans, celui qu’elle a connu à la cour de France enfant. Elle en garde un souvenir doux et ému. Elle le retrouve très bel homme. Nous sommes alors en 1501, Ils vivent trois ans d’absolu bonheur.
En 1506, peu de temps après la pose de la première pierre du monastère, elle est nommée Régente des Pays-Bas par son père Maximilien (et assurera un peu plus tard l’éducation de ses neveux et nièces, dont celle du futur Charles Quint). Elle réside alors à Malines et continue à suivre le chantier de loin avec une grande attention.
Celui-ci prend une ampleur considérable lorsqu’elle décide en 1509 d’être elle-même enterrée à Brou et donc d’en faire un édifice à la hauteur de son rang : tout à la fois nécropole, monastère et lieu de résidence princière (elle avait prévu d’y installer ses appartements).
Elle y envoie les meilleurs artistes et artisans venus de toute l’Europe afin de faire de Brou un vrai chef-d’œuvre, construit en moins de 30 ans (1505-1532). Elle ne voit cependant pas Brou terminé car elle meurt en 1530, deux ans avant la fin des travaux.
Le monastère est desservi par des moines Augustins (en souvenir de la mort de Philibert, Marguerite exige en effet que l’église soit placée sous le vocable de saint Nicolas de Tolentin, moine augustin, dont la fête tombe le jour anniversaire de la mort de Philibert). Ces Augustins de Lombardie puis les Augustins déchaussés français occupent le monastère jusqu’en 1790.
Alors même que le bâtiment risque d’être vendu comme bien national, le 13 mars 1791, le député Thomas Riboud obtient de l’Assemblée constituante que Brou soit rangé au nombre des monuments nationaux à conserver aux frais de la Nation. Le monastère est alors converti en prison pour les prêtres réfractaires avant de devenir, en 1800, une caserne de cavalerie puis, à partir de 1810, un dépôt de mendicité et un hospice d’aliénés. Le grand séminaire diocésain s’y installe en 1823 et quitte les lieux en 1905, après la séparation des Églises et de l’État.
En 1922, la Ville de Bourg-en-Bresse installe son musée dans une partie des bâtiments conventuels (le réfectoire et le dortoir). L’église, désaffectée, devient alors un monument historique ouvert à la visite à part entière. Dans les années 1950, des campagnes de travaux tentent de restituer leur état ancien aux bâtiments ; mais il faut attendre 1998 pour que Brou retrouve sa toiture d’origine.
Bâtie de 1513 à 1532 selon un plan traditionnel en croix latine à transept saillant, l’église présente une nef avec une élévation à deux niveaux voûtée d’ogives, flanquée de bas-côtés et de chapelles.
Elle est d’une sobriété voulue, avec des verrières incolores, pour mieux contraster avec l’extrême richesse du chœur. Surmontée d’un toit de tuiles vernissées polychromes, c’est un véritable mausolée princier, elle renferme en son chœur les tombeaux de Philibert II de Savoie, de Marguerite d’Autriche et de Marguerite de Bourbon.
Le style est gothique flamboyant, on est donc saisi par la hauteur, la lumière mais surtout la finesse de la pierre taillée comme en dentelle et les motifs délicats qui couvrent la façade de l’église, comme le jubé et les tombeaux même de Marguerite et Philibert.
La visite du Monastère royal de Brou comprend l’église bien sûr mais aussi le monastère attenant, avec ses 3 paisibles cloîtres, qui abrite aujourd’hui un musée des beaux-arts. Chaque cloître répondait à un besoin particulier : le premier est en quelque sorte une transition entre le monde extérieur et la communauté des moines. Il devait initialement abriter les appartements de Marguerite d’Autriche ; le deuxième remplit la fonction de lieu de méditation et de promenade pour les moines ; le troisième est dédié aux fonctions domestiques.
La collection est riche de peintures françaises, flamandes et italiennes du XVe au XXe siècle de sculptures du XIIe au XVIIe siècle, de sculptures religieuses anciennes, mobilier Renaissance et bressan, mais aussi des faïences de Meillonnas.
Le Monastère Royal de Brou propose un programme dense de visites thématiques, ateliers pour enfants, et accueille des concert en été.
Régine ⋅ Actualité 2021, Cartes postales, Eglises, France 23 Comments
Pistounette
27 juillet 2021 @ 05:20
Très belle carte postale, très bien documentée, riche de détails … comme d’hab !
Merci Guizmo
Ludovina
27 juillet 2021 @ 06:43
L’archiduc Robert d’Autriche-Este (1915-1996) et la princesse Margherita de Savoie-Aoste née le 07/04/1930 se sont mariés en ce lieu le 29/12/1953.
Rose
27 juillet 2021 @ 07:17
De ce lieu, je ne connaissais qu’une légende en bas de la photo du mariage de l’archiduc Robert d’Autriche et Margherita d’Aoste…
Je comprends mieux le choix de ce lieu en lisant votre récit.
Marguerite d’Autriche est une personnalité marquante de la dynastie des Habsbourgs et ce lieu semble à la hauteur de sa renommée!
Merci pour ce nouvel article encore très intéressant!
Belle journée
Rose
Val
27 juillet 2021 @ 07:28
Très chère Marguerite et la Paix des dames avec Louise de Savoie !
Ciboulette
28 juillet 2021 @ 16:03
Mais oui , Val , vous avez raison de le rappeler !
aubépine
27 juillet 2021 @ 08:42
C’est dans ce lieu que se marièrent l’Archiduc Robert d’Autriche Este et Margharita de Savoie les parents de Lorenz de Habsbourg mari d’Astrid de Belgique !
Magnifique construction toute en finesse !
Merci pour ce beau documentaire !
Beque
27 juillet 2021 @ 09:04
Magnifique récit et magnifique monastère de Brou, qu’on ne se lasse de visiter, merci Guizmo.
Marguerite d’Autriche, pour inhumer Philibert, abandonne l’abbaye de Hautecombe, traditionnelle nécropole savoyarde, et reprend une promesse non accomplie de sa belle-mère, Marguerite de Bourbon, qui avait fait vœu pour assurer la guérison de son mari d’édifier un « grand monastère » sur l’emplacement du vieux prieuré bénédictin de Brou.
Le tombeau de Phillibert le Beau, au milieu de chœur, est à double étage. Couché sur la dalle le duc est représenté « au vif », les yeux ouverts, revêtu de son armure d’apparat, le collier de l’Annonciade au cou, un lion à ses pieds. Il est entouré sur les quatre côtés par des « putti » à la manière florentine qui portent des écus, tiennent le casque et les gants. Au-dessous, le duc est représenté mort. Marguerite d’Autriche a également une double effigie en marbre de Carrare, vivante en costume de cérémonie, morte enveloppée d’une robe de bure.
Ciboulette
27 juillet 2021 @ 10:11
Merci , Guizmo , pour ces photos et l’explication . J’ai visité ce site il y a plusieurs années et il m’a fait grande impression .
Brigitte Anne
27 juillet 2021 @ 10:40
Merci Guizmo . Pour l’avoir visité c’est effectivement superbe !
JAusten
27 juillet 2021 @ 11:20
Magnifique travail de la pierre !
Ghislaine
27 juillet 2021 @ 12:19
Guizmo votre commentaire est à la hauteur de l’édifice , un bijou.Grâce à vous j’ai refait un voyage qui m’avait tellement impressionné . Merci .
Danielle
27 juillet 2021 @ 12:34
Un lieu splendide que j’aimerais beaucoup connaître, merci Guizmo pour ce reportage.
aubert
27 juillet 2021 @ 12:57
A Brou tout est beau
JE
27 juillet 2021 @ 15:00
Grand merci pour ce reportage. Un bijou d’architecture.
marianne
27 juillet 2021 @ 17:06
Je garde un souvenir émerveillé de cette visite .
Teresa2424
27 juillet 2021 @ 18:25
Excelente,gracias Guizmo
HRC
27 juillet 2021 @ 20:02
Grand merci Guizmo, comme toujours.
Beque
27 juillet 2021 @ 22:05
Marguerite d’Autriche et Philibert de Savoie avaient été mariés par procuration à Dole mais furent mariés religieusement dans la nuit du 3 décembre 1501 au monastère de Romainmôtier (actuel temple protestant) par l’évêque de Maurienne, Louis de Gorrevod. Genève accueillit le jeune couple, logé au prieuré Saint-Victor, avec faste. Marguerite visita les bonnes villes de ses Etats mais c’est à Chambery, la capitale de la Savoie, que les festivités furent les plus longues. Philibert meurt en 1504, âgé de 24 ans, après un refroidissement attrapé durant une partie de chasse .
Corsica
27 juillet 2021 @ 22:42
Merci Guizmo pour cette carte postale d’un lieu que j’apprécie.
Caroline
27 juillet 2021 @ 23:05
Merci à Guizmo pour son article très bien documenté avec de belles photos ! 👏
Naucratis
28 juillet 2021 @ 13:41
Merci pour cet article.
Brou est une merveille ! Pourtant, je suis amateur d’art gothique et ne suis donc guère enthousiasmé par le gothique flamboyant (qu’on devrait plutôt qualifier de tardif, voire de déclinant).
Guy Coquille
31 juillet 2021 @ 07:39
Je conseille à tous les flamands attachés à leur culture de visiter ce lieu, car la plus grande partie des artisans et artistes qui bâtirent ce monument étaient des flamands.
Hervé J. VOLTO
2 août 2021 @ 17:31
En 15063, Marguerite d’Autriche, veuve prématurément de Philibert II de Savoie, dit le Beau, tant pour accomplir un vœu de Marguerite de Bourbon, sa belle-mère, que pour laisser à la postérité un témoignage de son immense douleur, acheta le prieuré de Brou et obtint du pape l’autorisation de fonder, sur son emplacement, une église dédiée à saint Nicolas de Tolentin, et un monastère propre à recevoir 12 religieux augustins.
Marguerite de Bourbon est la fille de Charles Ier, Duc de Bourbon et d’Auvergne, le Prince qui subtitua Charles VII à Chinon pour tenter de tromper Sainte Jeanne d’Arc, et d’Agnès de Bourgogne.
Elle épouse le 6 avril 1472 Philippe de Savoie, prince de Piémont (1461-1497), qui deviendra après sa disparition le 7e duc de Savoie en 1496, dont elle a :
1. Louise de Savoie (1476-1531), elle même mère de François Ier
2. Jérôme (mort jeune en 1478),
3. Philibert II (1480-1504), duc de Savoie épouse en 1496 Yolande-Louise de Savoie (1487-1499) puis en 1501 Marguerite d’Autriche (1480-1530).
Oui, il parait que c’est dans ce lieu que se marièrent l’Archiduc Robert d’Autriche Este et Margharita de Savoie, les parents de Lorenz de Habsbourg (l’époux d’Astrid de Belgique) !
Grand bel ensemble baroque.