Carte postale de l’île Vassilievski par Pistounette. « C’est sur l’île Vassilievski, la plus grande île du delta de la Neva, que Pierre le Grand voulait installer le siège du pouvoir de sa nouvelle capitale.
Inondations, difficultés d’accès… : il dut renoncer, et la ville se développa de l’autre côté du fleuve, autour de l’Amirauté.
Le plan de Jean-Baptiste Leblond prévoyait de quadriller l’île par un entrelacs de canaux mais le projet ne put être mené à bien car l’île est isolée pendant l’embâcle, la débâcle et les inondations.
Aujourd’hui partagée entre zones industrielles et quartiers d’habitation, l’île conserve de magnifiques édifices, sièges d’institutions académiques et de beaux musées.
Le quartier, un temps abandonné au profit du continent, reprend sa croissance au milieu du 19è siècle. Fidèles à la conception centripète du pouvoir en Russie, les plus belles et anciennes demeures se trouvent sur la pointe orientale de l’île, la Strelka.
La Strelka (la flèche) forme la partie orientale de l’île, là où le fleuve se sépare en deux bras, la Petite et la Grande Neva. Elle est bordée de bâtiments qui rappellent son ancienne vocation commerciale, comme la Bourse (au premier plan sur la photo, entre les colonnes rostrales) et les bâtiments des douanes.
Deux colonnes rostrales, constructions de granit rouge hautes de 32m, dominent la place. Erigées en 1810 par l’architecte français Jean-François Thomas de Thormon, elles éclairaient autrefois l’entrée du port, servant de phare. L’été une flamme y brûle encore
Sur les piédestaux sont sculptées des figures allégoriques des quatre grands fleuves russes : Neva, Volga, Dniepr et Volkhov.
L’endroit offre un point de vue admirable sur le Palais d’Hiver et la forteresse Pierre-et-Paul.
Le Musée de Zoologie, où tous les animaux de la création semblent s’être donné rendez-vous dans cet ancien entrepôt des douanes.
Considérée comme une des plus importantes au monde, la collection compte plus de 100.000 pièces. Regroupés par famille, les spécimens sont souvent présentés dans leur milieu naturel : nids d’aigles dans les montagnes du Caucase, ours polaires sur la banquise, loups, élans et autres habitants de la taïga à différentes saisons
Il compte plusieurs squelettes de mammouths aux dimensions impressionnantes. Mais l’un d’entre eux tient la vedette : découvert en 1990 en Yakoutie, il aurait 45000 ans. Il serait mort pris au piège après être tombé en arrière dans un trou…
La Cathédrale Saint-André, beauté baroque achevée en 1786, embellit le paysage urbain de l’île. Elle est la dernière cathédrale baroque construite à Saint-Pétersbourg.
La cathédrale a été conçue à l’époque de Pierre le Grand comme l’église capitulaire du premier ordre chevaleresque de Russie, l’ordre de Saint-André. L’architecte le plus célèbre des pays nordiques, Nicodème Tessin le Jeune, a été appelé à concevoir une église ressemblant à la basilique Saint-Pierre de Rome.
Musée d’anthropologie et d’ethnographie
Ce bâtiment baroque, turquoise et blanc, abrite les collections du musée le plus ancien du pays. Il a pour origine le Kunstkamera, cabinet de curiosités de Pierre le Grand,fondé en 1714. Il est surtout célèbre pour les « préparations » anatomiques rassemblées par le tsar : siamois, mouton à deux têtes et autres foetus anormaux conservés dans du formol… mais aussi instruments astronomiques, cartes et livres rares
Ce musée est aussi consacré à la vie quotidienne des peuples du monde.
Depuis le 2è niveau, on accède au musée Lomonossov : on y voit notamment une reconstitution du cabinet de travail du grand savant amoureux des sciences.
Sur le quai de l’Université, la Statue de Lomonossov, en homme pensif.
Mikhaïl Lomonossov (1711-1765), fils d’un modeste pêcheur, que rien ne prédestinait à devenir un précurseur dans de nombreux domaines du savoir. Chimiste, physicien, géologue, linguiste, poète, historien, il fut par exemple le premier à observer l’atmosphère de Vénus lors de son passage près du Soleil, à codifier la grammaire russe ou à rédiger une histoire de son pays.
En 1722, à la demande de Pierre le Grand, Domenico Trezzini construisit, de 1722 à 1742, cet ensemble d’édifices baroques rouge et blanc identiques, aussi connu sous le nom de « Douze Collèges« .
Les bâtiments abritèrent les organes du gouvernement -le Sénat, le Saint-Synode et les dix ministères (collèges)- jusqu’à leur déménagement sur l’autre rive et furent donnés en 1835 à l’Université, fondée quelques années auparavant. L’université abrite le musée Mendeleïev.
Le Palais Menchikov, premier palais construit en pierre à Saint-Pétersbourg en 1720.
La demeure baroque d’Alexandre Menchikov, ami d’enfance de Pierre le Grand et premier gouverneur de la nouvelle capitale, a fait l’objet d’un sujet détaillé le 23 février 2021.
Fondée en 1757, l’Académie Russe des Beaux-Arts a été le centre artistique le plus important de Russie aux 18è et 19è siècles.
A partir de 1741, sous le règne de l’impératrice Elisabeth, fille préférée de Pierre le Grand, Saint-Pétersbourg a opéré une véritable percée dans l’art occidental. La nouvelle génération des aristocrates prit l’habitude de voyager en Europe, y commandant à prix d’or des collections entières d’oeuvres d’art pour décorer leurs magnifiques palais. Et, dans les années 1750-1760, la culture française devint à la mode sur les bords de la Neva.
C’est dans ce contexte que l’Académie impériale des beaux-arts fut fondée, sous l’appellation d’Académie des trois arts nobles » (peinture, sculpture, architecture) par un décret du Sénat publié le 6 septembre 1757.
L’architecte français Jean-Baptiste Vallin de la Mothe devint le concepteur du bâtiment néoclassique, dont il fit les plans en 1763 tandis que la décoration intérieure fut proposée par l’architecte Constantin Thon. Construite entre 1764 et 1788, pendant le règne de Catherine II, elle formait les artistes commissionnés par l’état et censurait les oeuvres jugées subversives.
Depuis 1767, les diplômés couronnés des médailles d’or de l’excellence étaient systématiquement envoyés en Italie et en France.. Les enfants y entraient à 6 ans et sortaient diplômés à 21 ans, en quête d’un riche mécène.. Le travail des (plus de 1000) étudiants d’aujourd’hui est exposé chaque année en septembre dans le grand hall de parade.
Le musée expose au 3è étage une superbe collection de maquettes géantes des principaux monuments de la ville.
Voisin de l’Institut des Mines, le Brise-Glace Krasin entame aujourd’hui une nouvelle carrière.
Conçu en 1916 sur les chantiers navals de Newcastle pour Nicolas II, Après la Révolution, l’Angleterre le confisqua, jusqu’à ce que Krasin, le commissaire du peuple, le récupère en 1921 contre rémunération.
Il a participé à de nombreux voyages dans les eaux glacées de l’Arctique : en 1928, il porta secours aux survivants de l’aviateur Nobile, dont le dirigeable s’abîma au retour du pôle. Pendant la Seconde Guerre mondiale, il fut le seul bâtiment soviétique à faire face aux sous-marins allemands pour défendre le port de Mourmansk. Il réceptionna aussi Gagarine lors de son amerrissage.
Le Musée Erarta d’art contemporain est un musée privé, le seul aussi moderne et de cette taille à Saint-Pétersbourg, si ce n’est en Russie.
Il occupe un bâtiment stalinien néoclassique ingénieusement réaménagé. Cinq étages de galeries exposent l’art contemporain russe, rimant avec réalisme, figuratif et expressionnisme. Il innove avec ses U space, des espaces thématiques clos, mêlant installation, bruitage et lumière
Il a ouvert ses portes en 2010 et présente quelque 2300 oeuvres de la 2è moitié du 20è siècle et du 21è siècle (peintures, dessins, sculptures, objets…)
Il est l’un des rares musées qui offre une reconnaissance aux artistes actuels mais crée également ses propres projets artistiques. Il fait une large place aux courants underground de la fin de l’ère soviétique.
L’ajout fréquent d’objets représentés dans les tableaux – par ex une coupe de pommes posée devant la toile intitulée « La cueillette des pommes » (Camille Pissarro) apporte une touche intéressante.
Chose inhabituelle : on trouve ici des galeries où les oeuvres exposées sont en vente.
Le cimetière orthodoxe de Smolensk, où a été bâtie de 1786 à 1790 (architecte Ivanov) l’Eglise de l’Icône de la Mère de Dieu..
Enfouies sous une végétation exubérante, les tombes reposent à l’ombre des bouleaux, l’arbre national au tronc blanc et aux feuilles argentées.
Monument (1880) en mémoire des victimes de l’attentat contre Alexandre III (qui fut blessé) par Khaltourine le 5 février 1880. «
🇨🇦 Mer Limpide 🌊
30 juillet 2021 @ 03:43
Ça donne envie d’y aller .💖
miloumilou m
30 juillet 2021 @ 06:00
Vraiment un grand merci Pistounette pour vos reportages!
Voilà une île que j’ai juste traversée et que grâce à vous je découvre mieux!
Merci!
Aldona
30 juillet 2021 @ 06:41
Magnifique et passionnant reportage, et ces colonnes rostrales sont uniques
Benoît-Henri
30 juillet 2021 @ 10:22
Merci Pistounette pour votre très belle carte postale. Vous avez pris soin de nommer l’architecte de la Bourse et des colonnes rostrales, le Français J.-F. Thomas de Thomon. Le paysage monumental de Saint-Pétersbourg doit beaucoup à ce personnage qui débarqua sur les bords de la Neva avec une quantité de plans et de dessins dans ses bagages. De quoi séduire de prestigieux maîtres d’ouvrage. Nous savons aujourd’hui que ce riche matériel fut « emprunté » (doux euphémisme) à l’Académie d’architecture de Paris par son ancien élève peu scrupuleux qui s’en appropria la paternité. On reproche parfois à l’architecture pétersbourgeoise son caractère académique (heureusement tempéré par la beauté du paysage et la palette des façades) : voici un début d’explication !
Ciboulette
30 juillet 2021 @ 17:01
Merci , Pistounette , mon coeur bat quand je revois Saint -Petersbourg , les colonnes rostrales visibles de loin . . .Je ne connais pas tous les monuments récents ( le musée d’art moderne ) , mais Lomonossov a donné son nom à l’Université de Moscou , bâtie sur les monts Lénine , et de plus pur style . . .stalinien , qui n’est pas beau du tout …
HRC
30 juillet 2021 @ 21:05
J’ai ri… Et je vous joins à Pistounette pour mes remerciements !
Beque
30 juillet 2021 @ 10:29
Pistounette, après Rastrelli et Montferrand, j’ai « étudié » l’oeuvre des architectes français Leblond et Vallin de La Mothe.
Jean-Baptiste Leblond (1679-1719) fut invité à Saint Petersbourg par Pierre le Grand, en 1716. Il proposa de donner à la ville un plan ovale mais son plan ne fut pas accepté. Il construisit le premier château de Peterhof (en 1717) avec Braunstein et Michetti, puis le palais Apraxine entre 1717 et 1718 et dessina les plans du Jardin d’été. En France, on lui l’hôtel de Vendôme, boulevard Saint Michel (qui abrite l’Ecole des Mines) et l’hôtel de Clermont, rue de Varenne, siège de ministères successifs à Paris. Ainsi que le palais épiscopal d’Auch (devenu préfecture du Gers).
Jean-Baptiste-Michel Vallin de La Mothe (1728-1800). Recommandé par son cousin Leblond, il enseigne l’architecture à l’Académie des Beaux-arts de Saint Petersbourg. Il fait construire, entre 1761 et 1767, la galerie des marchands sur la Perspective Nevski, l’église catholique Sainte Catherine (où est enterré le Général Moreau et qui a été rouverte au culte en 1992), le Petit Ermitage et le château d’Alexandrino. Il fit le plan du nouveau bâtiment de l’Académie des Beaux-Arts sur l’île Vassilievski.
Danielle
30 juillet 2021 @ 15:08
Merci Pistounette pour ce beau reportage, que de souvenirs !!
Guizmo
30 juillet 2021 @ 18:06
Merci beaucoup pour ce reportage et les belles photos. Votre article me rappelle un cours d’histoire de l’art russe que j’ai suivi il y a 3 ans.