Dédiée à Sainte-Foy, vierge martyrisée à Agen vers 290, la Chapelle des Pénitents blancs fut bâtie à la fin du XIIe siècle, sur le chemin de Saint-Jacques-de-Compostelle. Elle est sans doute la plus ancienne église encore existante en ces murs d’origine au centre de la ville.
Le nom exact est » Dévote et respectable Confrérie des Pénitents blancs de Montpellier « , Conservatrice des Croix publiques de la ville.
Oculus de la chapelle – Wikipedia
Elle est une première fois remaniée au XIVe siècle et la Confrérie s’y installe en 1518 : elle est vouée au Saint-Esprit et sous la protection de la Vierge-Marie.
En 1528 un chanoine fait construire un pontet enjambant la rue et reliant directement son domicile à la chapelle (à l’époque église Sainte Croix).
Il contourne ainsi une interdiction de Jacques d’Aragon, seigneur de Montpellier : au début du XIIIe siècle, ce dernier interdit des passages entre les maisons, souvent construits pour agrandir la surface habitable. Mais ces arcs assombrissent les ruelles, déjà fort étroites.
Il existe encore trois arcs de ce type dans le centre historique de la cité. Le plus ancien est un beau passage couvert d’une voûte gothique qui enjambe la rue du Bras-de-Fer. Le troisième est l’arc Voltaire (aussi appelé arc de Coulondres), qui fait communiquer la rue de l’Ancien-Courrier et le quartier Saint-Roch : il a été construit au XVIIe siècle pour Pierre de Grefeuille, qui a aussi reçu une dérogation « pour aménager sa demeure selon son bon plaisir ».
En 1568, la chapelle est détruite par les protestants et le terrain est utilisé comme cimetière.
En 1622, Louis XIII fait le siège de Montpellier.
Le 26 septembre 1623, une ordonnance de Mgr de Fenouillet, évêque de Montpellier, rend les ruines de Sainte-Foy à la Confrérie qui, symboliquement, dresse une croix contre sa façade.
La reconstruction débute immédiatement et elle est consacrée la nuit de Noël 1624. Elle est agrandie en 1633 et 1647, puis rehaussée en 1685.
En 1626, après sa reconstruction, la chapelle fut qualifiée de hangar vulgaire, remarqué pour la blancheur de ses murs et la nudité de ses charpentes.
On sait qu’en 1632, lors de leur passage dans la ville, Louis XIII et Anne d’Autriche s’arrêtent à la chapelle pour y entendre une messe, le premier dimanche d’octobre.
Interdite durant la Révolution et vendue comme bien national en 1793 : elle devient entrepôt, magasin à fourrage… Rachetée par la Confrérie le 10 prairial an XII (1804), elle est rendue au culte par décret impérial en 1805, grâce à l’intervention de Jean-Jacques-Régis de Cambacérès, archichancelier de l’Empire et ancien Prieur de la Confrérie en 1790.
Photo : Fondation du Patrimoine
La richesse de sa décoration intérieure a été réalisée entre 1641 et 1706. Le Pénitent devait se sentir enveloppé par des œuvres portant à la prière. Elle contraste avec l’austérité de l’entrée.
Ces décors seront restaurés et complétés au XIXe siècle.
Plafond baroque à compartiments du XVIIe siècle, principalement dû aux peintres montpelliérains Paul Pezet et Simon Raoux, à partir de 1671 : on y admire le cycle inachevé des Evangélistes, celui de la Passion …
A la fin du XIXe siècle, les Pénitents furent contraints de murer les fenêtres sud, plongeant la chapelle dans l’obscurité.
Saint-Jean-Baptiste, copie d’un tableau de Vien, à la gauche de la chaire
Des lambris muraux en bois dorés réalisés entre 1698 et 1706 et conçus par Augustin-Charles Daviler, créateur entre autres de l’arc de triomphe du Peyrou.
Une Crucifixion (XVIIe siècle) dans la chaire
Saint Joseph
Un ensemble de sculptures en bois doré du XVIIe siècle habille le maître-autel, ainsi que les cariatides porte-flambeaux.
Sur le tabernacle du maître-autel, un palmier forme un ciborium. Il symbolise le saint sacrifice le la Croix et la gloire de la résurrection.
Derrière le maître-autel a été aménagé le chœur-chapelle du Saint-Sacrement, avec notamment les colonnes et pilastres supportant l’arc au-dessus du maître-autel.
Les statues de Saint Jean-Baptiste et Sainte Marie-Madeleine et deux bas-reliefs sous les deux fenêtres complètent la décoration de cette chapelle des Pénitents.
Dans la chapelle de la Vierge, sur le côté nord, l’autel réalisé en 1804 a été restauré en 2015.
C’est là que se tient habituellement la crèche des santons de Noël.
Sur la Tribune ouest de l’église sont déposés plusieurs bannières, vêtements de procession.
Telle que définie par le pénitent qui a fait la visite de la chapelle, une Confrérie de pénitents était une association catholique pour faire des œuvres de charité, « de miséricorde » :
- Donner à manger aux gens
- Soigner les malades
- Accompagner les gens en fin de vie
- Accompagner les condamnés et leur donner une sépulture digne
Au XVIIe siècle, la Confrérie a lutté contre les sociétés esclavagistes et, en 1860 elle a créé la première mutuelle de Montpellier qui a perduré jusqu’en 1960.
Leur habit est une tunique appelée saq ceinturée d’une corde et une cagoule par esprit d’humilité et d’anonymat, et la leur est blanche pour symboliser la lumière du Saint-Esprit.
Tous les Pénitents sont frères, et les sœurs portent une mantille.
Un grand projet de restauration est en cours. Grâce à la générosité, la mise hors d’eau et hors d’air de l’édifice a été menée à bien entre 2012 et 2019.
Aujourd’hui est lancée celle des décors intérieurs, en commençant par la partie haute. Une étude menée en 2021 et 2022 a entraîné la dépose du tableau de la Fuite en Egypte : la restauration a commencé en avril 2022. Puis cela devrait se poursuivre par les trois premiers tableaux de nord-ouest du plafond, et par les boiseries et les médaillons à l’aplomb jusqu’à la base des arcades de la galerie. Le montant total des travaux est établi à 51 506 €… et une collecte est lancée, avec pour objectif 20 000 €.
La Chapelle des Pénitents Blancs a été classée Monument Historique le 17 février 1995. (Merci à Pistounette)
Simone
3 février 2023 @ 05:00
Merci pour cet article extrêmement intéressant et fort détaillé.
DEB
3 février 2023 @ 06:45
Le palmier a été ajouté dans les années 70 ou il est d’origine ?
Guizmo
3 février 2023 @ 07:19
Ma lecture culturelle du matin. Merci beaucoup pistounette pour cette page d’histoire. Bonne journée
Caroline
3 février 2023 @ 09:37
Magnifique reportage- photos !
Toujours merci à Pistounette !
Opaline
3 février 2023 @ 09:40
La prochaine fois que j’irai en ville, j’y ferai une viste.☺️
JAusten
3 février 2023 @ 09:40
Depuis qu’ils l’ont restaurée, cela reste toujours un peu sombre, néanmoins elle fait moins « lugubre » et on voit mieux les pièces « exposées », mais je l’aime cette petite chapelle.
Erato deux
3 février 2023 @ 09:55
Merci beaucoup, magnifique visite guidée » virtuelle ».
Envie de voir l’ original.
Passiflore
3 février 2023 @ 10:14
Merci, Pistounette, pour cette nouvelle visite de Montpellier.
Je me suis intéressée aux frères Cambaceres.
Jean-Jacques-Régis Cambaceres, né à Montpellier, le 18 octobre 1753, et son frère, Étienne-Hubert, né en 1756, sont très proches de leur oncle et précepteur, l’abbé Étienne-François de Cambacérès, archidiacre de la cathédrale de Montpellier. En 1786, Jean-Jacques Régis est député des loges maçonniques montpelliéraines lors du convent des loges du Grand Orient et, comme son frère, membre de la Confrérie des Pénitents blancs de Montpellier.
Passiflore
3 février 2023 @ 10:19
Son frère, Etienne-Hubert Cambaceres, devient prêtre par vocation et est reçu Pénitent blanc de Montpellier en 1763, puis prieur de cette confrérie en 1804. Il est ordonné prêtre en 1780 à Montpellier. Il refuse de prêter serment à la Constitution civile du clergé. Grâce à son frère Jean-Jacques Régis, il échappe à la persécution et le rejoint, en 1801, à Paris. En 1802 il est sacré archevêque de Rouen par le cardinal Caprara, légat du Pape. En 1803, Pie VII le nomme cardinal-prêtre. Bonaparte l’impose à la chapelle des Tuileries. En 1804, il doit accompagner le Pape pour le couronnement. En 1810, il refuse d’assister au remariage de Napoléon, qui le nommera, cependant, le 2 juin, 1815, Pair de France. Il meurt à Rouen, le 25 octobre 1818, et est enterré dans la cathédrale.
Pelikan du Danube
5 février 2023 @ 07:09
Il a eu de la chance.
La présence du palmier m’intéresse mais c’est un peu long à expliquer.
Quelqu’un saurait-il me dire si c’est un ”motif” que l’on trouve dans d’autres églises ?
Perlaine
3 février 2023 @ 13:55
Merci pour cet intéressant reportage Pistounette .Dans ma région si cela continue la transmission de notre patrimoine va devenir une peau de chagrin , depuis quelques jours , dans la très belle cathédrale de Quimper (Finistère) deux reliques de saints bretons ont été volées . Le clergé minimisant (sans doute dans l’espoir qu’elles soient restituées) mais cette fois l’état s’est ému de la chose et plainte a été déposée par le Ministère de la Culture .
Passiflore
4 février 2023 @ 09:15
Perlaine, savez-vous quelles reliques ont été volées à la cathédrale de Quimper, qui est ma ville de naissance ? Celles de Saint Corentin (nom de la cathédrale) ou de Saint Jean Discalceat, « Santig Du » ou d’autres ?
Charlotte (de Brie)
4 février 2023 @ 23:15
Bien que cette question ne s’adresse pas à moi, voici un article.
https://www.christianophobie.fr/carte/en-france/nord-ouest/bretagne/quimper-des-reliques-de-saints-bretons-volees
Les reliques ne sont pas précisées.
Charlotte (de Brie)
4 février 2023 @ 23:28
Re… erreur de manip ! non ce n’est pas dans tous les cas les reliques de Saint Jean le Déchaussé qui ont été volées. Continue t-on à y déposer au pied de sa statue sur une tablette, du pain pour les défavorisés ? pratique remontant au XVè ? je ne sais pas.
Mais un très beau vitrail lui a été consacré en 1993
http://ndoduc.free.fr/vitraux/htm8/eg_StCorentin_12.htm
Passiflore
5 février 2023 @ 22:02
Merci, Charlotte, dans mon enfance on déposait du pain sous la statue de Santig Du mais j’imagine que cela ne se fait plus depuis longtemps. J’ai lu que les vitraux concernant le saint dataient de 1993 et étaient l’oeuvre d’une artiste hongroise mais j’avoue que je ne suis pas enthousiamée.
Perlaine
5 février 2023 @ 18:21
Passiflore , tout d’bord croyez bien que j’aurais préféré n’avoir pas à évoquer , encore une fois, les atteintes à nos chapelles, églises et cathédrales . Silence radio , le clergé est on ne peut plus discret mais je pense que pour ce qui est des fragments d’os , il est probable que St Corentin soit concerné .
beji
3 février 2023 @ 21:43
A Noël il y a une très belle et grande crèche.
beji
3 février 2023 @ 21:47
Pistounette,pas très loin de là,il y a la chapelle et la pharmacie de la Miséricorde.
Charlotte (de Brie)
4 février 2023 @ 08:12
« Pénitents blancs » c’est toute la Provence !
Prologue des « Lettres de mon Moulin »
« Acte fait à Pampérigouste en l’étude de Maître Honorat, en présence de Francis Mamaï, joueur de fifre et de Louiset, dit le Quique, porte-croix des Pénitents blancs »
CAMOMMILLE
4 février 2023 @ 16:08
Merci pour cette lecture intéressante complétée par des précisions des lectrices bien informées .
Nivolet ☘🦝🐈🐕🐇
5 février 2023 @ 17:53
Merci Pistounette très bel article.👏
Muscate-Valeska de Lisabé
7 février 2023 @ 19:08
C’est beau comme un reportage de Guizmo !!
Merci beaucoup, j’ai adoré 🕯❤