Le centre de recherche du château de Versailles organise une journée d’études ayant pour sujet « La singularité chez le duc de Saint Simon » le 9 mars 2013. Voici quelques détails : « Grand défenseur des rangs et de l’ordre monarchique, pourfendeur de toutes les usurpations, Saint-Simon semble vouer une passion paradoxale et peu commune à la singularité. Dérogeant à toute loi ou à toute norme, la singularité recouvre des vocables aussi variés que le curieux, le particulier, le rare, l’excellent, l’unique mais aussi le marginal, le capricieux, le bizarre voire le scandaleux. Elle touche au plus près le récit historique et l’écriture de soi comme un élément invraisemblable, irrationnel, ou simplement caractérisant, motif suffisant de la narration. Elle concerne encore les portraits, caractères, fortunes, corps, habitudes de vie, mœurs et renvoie à l’indicible variété des êtres et des événements. Entre passion pour l’extravagance et répulsion pour l’irréductible, la singularité fascine autant qu’elle interroge. » L’inscription préalable via le site du château de Versailles est nécessaire. (Copyright photo et source : site du château de Versailles)
Zeugma
19 février 2013 @ 11:04
Saint-Simon fait partie de ces écrivains qu’on a l’intention de lire, un jour, et qu’en définitive on ne lit presque jamais.
Beaucoup ont lu des extraits (surtout dans le fameux « Lagarde et Michard » des lycées français) mais la lecture de l’œuvre intégrale est généralement reportée à plus tard, c’est-à-dire à jamais.
C’est un peu la même chose pour Proust, Chateaubriand, Tolstoï ou d’autres génies de la littérature.
En juin dernier, je me suis quand même attaqué aux deux gros volumes (en livre de poche) de « Guerre et Paix » et les ai terminés en décembre, tout en lisant autre chose durant la même période, sans compter la consultation de « Noblesse et royauté », très chronophage.
« Guerre et paix » : quel chef d’œuvre !
Trouverai-je le courage de lire Saint-Simon, après les « Mémoires » de Chateaubriand alors, qu’en ce moment, je lis le merveilleux « Au plaisir de Dieu » de Jean d’Ormesson ?
La présentation du colloque ne donne pas très envie.
Le début de l’exposé est intéressant (« Grand défenseur des rangs …. ») mais le style devient très rapidement abscons, pour ne pas dire amphigourique, bien loin de la clarté du 18e siècle.
Cela n’empêchera pas le public cultivé de Versailles de s’y précipiter.
Pierre-Yves
19 février 2013 @ 13:41
Les mémoires de St Simon peuvent ne pas être lues en continu. Un peu comme les lettres de Mme de Sévigné ou celles de la Princesse Palatine, ou le Journal de l’Abbé Mugnier. C’est agréable d’y revenir de temps en temps.
Mais pour St Simon, ce ne sera pas, vous avez raison, grâce à cette présentation à laquelle on ne comprend rien.
Zeugma
19 février 2013 @ 18:12
Saint Simon a mis en lumière une question de fond – jamais résolue – sur la monarchie.
Cette question est : qui conseille le roi ?
Qui a la légitimité pour cela.
S’il y a unanimité de la société pour reconnaître au roi son statut de lieutenant de dieu sur terre, il y a de profondes divergences sur la nature de la monarchie et le pouvoir du roi.
Pour les uns, le roi est, en quelque sorte au-dessus des lois. Ce pouvoir « absolu » ne se conçoit évidemment que dans le cadre extrêmement complexe des « lois fondamentales du royaumes » et des statuts ou privilèges divers, notamment fiscaux, des villes, des provinces, des métiers … Tout cela sera balayé d’un seul coup par la révolution.
Selon cette conception, le roi choisit qui il veut pour le conseiller.
Cette option est en totale contradiction avec une autre vision du gouvernement, celui des princes du sang et des grands nobles, dont les ancêtres ont rendus des services éminents à la couronne, qui estiment – quant à eux – qu’ils ont un droit historique naturel à conseiller le roi et, par conséquent, à exercer une grande influence dans les affaires du royaume de France.
Saint Simon est fasciné par Louis XIV mais il lui reproche de s’être entouré de bourgeois (et d’avoir ignoré son immense talent).
Louis XIV avait mis fin au système du « ministériat », mis en place par ses ancêtres Bourbon. Henri IV et Louis XIII avaient conscience que la complexité du monde moderne exigeait que le monarque s’appuyât sur un homme en qui ils avaient toute confiance : Sully, Richelieu et Mazarin.
Louis XIV n’a plus voulu de premier ministre à la mort de Mazarin mais il ne pouvait pas se passer de conseillers.
Sain Simon regrette que la haute noblesse ait été écartée du pouvoir.
Lui-même tenait son titre ducal de son père, qui l’avait reçu de Louis XIII pour des raisons assez ridicules.
A la mort du roi, le régent instaura le système de la polysynodie qui répondait aux aspirations de Saint Simon.
Cela n’a pas marché !
(PS :
j’ai lu les « mémoires » de l’abbé Mugnier d’un trait. J’aime beaucoup l’anecdote d’un dîner en ville – dans le Faubourg – où l’on sert un dessert qu’il qualifie de « païen » : des pêches à la sultane (dont j’ai trouvé la recette avec grande difficulté.)
aubert
19 février 2013 @ 12:56
Dieu merci le duc de Saint-Simon nous a épargné dans ses textes le charabia de cette présentation.
Kalistéa
19 février 2013 @ 18:44
Personnellement,je me demnde ce que le vidame de chartres aurait pensé de nos nouvelles princesses héritières!
De quoi exciter sa verve et son inimitable esprit critique!
aubert
21 février 2013 @ 15:50
Chère Kalistéa …un portrait de votre chérie espagnole par Monsieur de Saint-Simon…vous le liriez, le reliriez à voix haute jusqu’à l’extinction.(Ici certains vont rêver!!!)
Exemplaire Monsieur de Saint-Simon dans l’amour de sa femme jusqu’à faire enchaîner leurs cercueils.
N’est-ce pas son fils qui portait le titre de Vidame de Chartres ?
Kalistéa
21 février 2013 @ 22:56
Cher Aubert,j’ignorais ce détail des cercueils enchainés.
Le titre devait être héréditaire et se transmettait de père en fils ,mais j’avoue que je ne suis pas très forte en « saint-simon ».
La culture étant d’après Herriot « ce qui reste quand on a tout oublié » ,il me reste des bribes d’appréciations du critique et sévère duc…telle cette remarque où on sent le mépris du manant ,sur Voltaire: »Arouet, fils d’un notaire, qui le fut de mon père et de moi… »
Pendant ce temps Voltaire disait au duc de Rohan: »il vaut mieux se faire un nom ,que de trainer le sien… »
c’était pour bavarder un peu.B A V . K
HRC
19 février 2013 @ 21:13
je fais partie des gens qui ont étudié Saint-Simon au lycée, mais ne l’ont pas lu : j’avoue, chère Zeugma.
Epinay
19 février 2013 @ 21:14
La première des singulatités de Saint Simon était sa très petite taille, tout juste un peu plus d’1m50, qui nourissait chez lui un fort complexe. D’aucuns prétendent que cette petitesse aurait été à l’origine de son caractère et donc de ses écrits. En tout cas, il possédait un magnifique château, dévasté à la Révolution, mais dont les ruines conservent une majestueuse allure: le chateau de la Ferté-Vidame, dans le département de l’Eure-et-Loir. Voir les photos sur Google.
Caroline
19 février 2013 @ 23:18
Zeugma,j’ai apprécié vos commentaires fort instructifs sur le duc de St Simon!
Zeugma
20 février 2013 @ 10:42
Caroline, vous êtes gentille.