A l’occasion de la sortie du nouveau livre du prince Michel de Grèce, co-écrit avec Stéphane Allix et ayant pour sujet Alexandre le Grand, Noblesse et Royautés aura le plaisir de vous proposer demain l’entretien que le prince nous a accordé.
« Les mystères d’Alexandre le Grand », Michel de Grèce & Stéphane Allix, Editions Flammarion, 2014, 240 p.
Francine du Canada
4 novembre 2014 @ 15:31
Oulala j’ai bien hâte de lire ça; merci Régine. Amitiés, FdC
Claude-Patricia
4 novembre 2014 @ 15:54
Bonjour à tous,
Très bien, merci Régine!
Claude-Patricia
4 novembre 2014 @ 17:31
Je n’avais pas pris mon livre et je n’ai donc pas pu écrire mon texte à temps sous les photos d’Agnès consacrées aux différentes cathédrales de Moscou, mais voici le début du texte consacré au couronnement de Nicolas II :
Le couronnement du Tsar (6 juin 1896).
La journée du sacre
pendant trois jours, les hérauts ont proclamé par la ville, sur les places publiques, aux carrefours, la date du couronnement et du sacre. Il pleuvait, et la boue mouchetait les chapeaux de couleur rouge, les pourpoints de drap d’or et les caparaçons brodés d’or des chevaux. La cour et la ville, la population de Moscou et les étrangers, désespéraient déjà, quand, la veille du jour fixé pour le couronnement, les lourds nuages sont partis vers les quatre coins de l’horizon. Le lendemain de l’entrée solennelle, les souverains s’étaient retirés au palais du jardin Neskoutchnoé sur la rive droite de la Moskowa : comme s’il n’y avait à Moscou de ciel serein et de soleil victorieux que pour eux, c’est le jour même de leur retour au Kremlin que le temps est redevenu propice.
La grande journée du sacre de Nicolas II a été éblouissante : on n’imagine pas les fêtes asiatiques de Babylone ou de Ninive, dans le mointain de l’Histoire, ni celles qui eurent pour cadre les palais des rajahs sur les bords du Gange ou de l’Hindus, baignées de plus de soleil. Il était sept heures du matin et quand l’air était léger, transparent et lumineux, quand le Kremlin s’est empli de foule, de soldats casqués et cuirassés, d’officiers en uniformes aussi variés que les toilettes féminines dans un bal, de diplomates, de fonctionnaires, de dames de tout rang levées à cinq heures pour s’habiller et se parer, d’orientaux en robes bariolées de soie et d’or, de gens du peuple en longue tunique sombre et casquette, et de curieux privilégiés en habit noir, cravatés de blanc. Déjà le canon tonnait et les cloches d’Ivan Veliki s’étaient mises en branle.
Bientôt, par l’Escalier Rouge, l’Escalier des Lions, descendent du palais du Kremlin sur la place des Cathédrales entre deux haies de gardes à cheval de haute stature, les envoyés extraordinaires et les ambassadeurs avec les ambassadrices dont les traines s’étalent et s’allongent sur les marches. Peu à peu, les salles Saint Georges, Saint-Vladimir, Sainte Catherine se vident et les tribunes de la cathédrale de l’Assomption se garnissent.
Des fanfares éclatent; l’hymne des cloches devient plus ardent : c’est l’impératrice mère, portant la couronne et le manteau impérial, qui va la première prendre place, sur un trône et sous un dais, dans la cathédrale. Le plus indifférent serait gagné par l’émotion à la vue de cette femme qui est dans l’obligation de revivre, minute par minute, toute la cérémonie identique qui se déroula, dans le même décor, exactement treize années auparavant. C’est ce jour-là qu’Alexandre III, époux et empereur posa sur sa tête la couronne que vient d’y replacer une demoiselle d’honneur pour la solennité d’aujourd’hui. Que de souvenirs, que de rapprochements douloureux, dix-huit mois après la mort prématurée de celui qui la fit impératrice et qui l’aimait tant!
Puis à son tour voici l’empereur, suivi de la jeune tsarine. Un cortège sans fin les précède, défile à travers l’église où une partie seulement des hauts dignitaires pourra trouver place. Derrière les souverains les portes se referment. Des salves de coups de canon, des sonneries de cloches, indiqueront seules, au dehors les phases successives des cérémonies qui vont se dérouler au dedans, devant un millier à peine de spectateurs, mais ceux-ci représentent toutes les Russies et toutes les nations des deux continents.
La journée est si belle que l’Assomption, éclairée pourtant par de très étroites fenêtres, est remplie de lumière. Partout des rayons jouent dans l’or, le vermeil et l’argent.
Dans l’église, bondée de comparses qui seraient ailleurs de grands premiers rôles-princes, généraux, ambassadeurs- la famille impériale et les métropolites attirent seuls les regards. L’empereur est pâle, digne, avec beaucoup de douceur dans les yeux. L’impératrice Alexandra Féodorovna, habillée de drap d’argent, parait plus blonde, l’émotion colorant un peu plus son visage. L’impératrice douairière a les yeux lourds de larmes. Grands-ducs et grandes-duchesses sont graves, attendris, recueillis.
Le cérémonial s’accomplit selon les rites traditionnellement observés. Les détails en sont étranges parfois, souvent grandioses et émouvants. Et dans tous les cas, leur adaptation, leur appropriation au milieu et à la circonstance sont telles que, pas un instant, ne vient à l’esprit l’idée d’une leçon apprise et répétée. Tout est réglé assurément : les trois génuflexions des souverains devant la porte sainte de l’iconostase, leurs prières devant la vierge de Vladimir, qui protégea Moscou contre les tartares et tous les autres préliminaires. Mais c’est le propre des cérémonies religieuses de n’évoquer jamais l’irrespectueuse pensée d’un spectacle théâtral.
Quand l’empereur et l’impératrice ont gravi les degrés de l’estrade et pris place sur le trône des tsars Michel Feodorovitch et Jean III, un chœur d’actions de grâce s’élève. Des chants admirables scanderont chaque phase du couronnement et du sacre.
L’empereur revêt le manteau impérial, puis incline la tête et le métropolite de Saint-Pétersbourg le bénit. L’heure est venue du couronnement. On ne couronne pas un tsar : il se couronne lui-même. Prenant la couronne impériale faite de 2400 diamants et surmontée d’une croix, des mains du métropolite, Nicolas II élevant les bras, la place sur sa tête dans un mouvement d’une belle simplicité. Il est tsar et 101 coups de canon l’apprennent à la vieille capitale. Des hourras éclatent dans l’enceinte du Kremlin et se répercutent jusqu’aux plus lointains quartiers de la ville, non pas frénétiques, mais pieusement répétés, comme des amen, par une multitude de fidèles.
Le couronnement de l’impératrice suit immédiatement celui de l’empereur. Devant le trône du souverain, un coussin de velours cramoisi est déposé à terre. Alexandra s’agenouille. Le tsar alors se lève, et comme si la couronne était trop lourde à son front, comme s’il voulait partager le fardeau à celle qui fut choisie par son père et par lui, il l’hôte un moment de sa propre tête et il en touche le front de l’impératrice, qui s’est inclinée avec tout l’orgueil de sa grâce. Il remet ensuite sa couronne, en prend une plus petite, une couronne de coiffure et cette fois, la place tendrement et délicatement, sur la tête de la tsarine. Il y a eu là, au milieu de toute la pompe environnante, un peu surhumaine, quelque chose de poignant et d’intime qui n’a échappé à aucun des assistants.
flabemont8
5 novembre 2014 @ 15:23
Merci, Claude-Patricia . Il me semblait qu’il y avait eu un présage funeste ( chute d’un collier ou d’une chaîne représentant un ordre ) , pouvez-vous me le confirmer ? Merci d’avance .
Claude-Patricia
6 novembre 2014 @ 11:16
Bonjour à tous,
Chère Flabemont8,
Je n’ai pas cette info là dans mon livre. J’irai voir sur Wikipédia, bien que les infos ne soient pas toujours exactes.
Francine du Canada
5 novembre 2014 @ 18:52
Merci Claude-Patricia pour ce superbe récit partagé. « … s’est inclinée avec tout l’orgueil de sa grâce » quelle étrange formulation? Bonne journée, FdC
Claude-Patricia
6 novembre 2014 @ 11:17
Chère Francine,
Je trouve ces formulations anciennes très poétiques!! Autrefois, on s’exprimait dans un style plein d’emphase!!
qiou
7 novembre 2014 @ 09:11
Je suis entièrement d’accord avec toi, une formulation plus « moderne » serait une d’hérésie dans ce contexte historique.
Bises
Zeugma
4 novembre 2014 @ 19:12
Ce livre lèvera-t-il le mystère – si c’est un mystère – sur les tendres relations d’Alexandre avec Héphaestion ?
qiou
7 novembre 2014 @ 09:13
Ah chère Zeugma, vous êtes une coqine pleine d’esprit ;-)