A l’occasion de la parution des mémoires de Sa Majesté le Roi Siméon de Bulgarie aux éditions Flammarion, et qui a déjà fait l’objet d’un article détaillé, Noblesse et Royautés a eu le privilège de pouvoir poser quelques questions au souverain. Comme dans son ouvrage, on ressent toujours cette même modestie, ce sens du devoir qui ne l’a jamais quitté, son immense attachement à sa patrie qu’il a dû abandonner enfant et ce poids de l’Histoire qui a définitivement façonné la vie d’un homme aujourd’hui heureux -malgré parfois les aléas- de vivre chez lui. Toujours aussi cette même pudeur mêlée d’une énorme reconnaissane et amour envers sa mère la reine Giovanna et son épouse la reine Margarita, sa fidèle compagne de vie.
Noblesse et Royautés : Sire, comment est venue l’idée de rédiger vos mémoires ?
Sa Majesté Roi Siméon : Il y a longtemps déjà que mes enfants et des amis trouvaient que ma vie est plutôt insolite.
Noblesse et Royautés : Sire, vous n’aviez que 6 ans lorsque votre père le roi Boris est décédé dans des circonstances qui ont toujours suscité des questionnements. Vous êtes devenu le roi de votre pays. Conservez-vous des souvenirs de cette période ?
Sa Majesté Roi Siméon : Bien entendu car la mort de mon père fut un tel choc que par la suite je me souvins très bien comme s’il s’agissait d’un film.
Noblesse et Royautés : Sire, pouvez-vous évoquer votre mère la reine Giovanna qui vous a élevé avec votre sœur la princesse Marie Louise ?
Sa Majesté Roi Siméon : Ceci est très difficile à résumer en quelques mots. Notre mère a été un ensemble de mère, reine, roi, éducatrice tous à la fois et pour laquelle ma sœur et moi nous avions toujours eu une énorme admiration.
Noblesse et Royautés : Sire, vous souvenez-vous du moment de votre départ en exil ?
Sa Majesté Roi Siméon : Effectivement, j’avais neuf ans et les événements m’avaient déjà suffisamment éprouvé pour que je puisse me rendre compte de ce qui nous arrivait. Je crois que je le décris dans le livre.
Noblesse et Royautés : Vous fréquentiez avec votre mère la reine Giovanna et votre sœur la princesse Marie Louise d’autres familles royales en exil. Avec laquelle étiez-vous le plus proche ?
Sa Majesté Roi Siméon : Il est difficile de préciser car il faut distinguer entre les liens directs de famille et les liens d’amitié. A Alexandrie étaient mes grand-parents d’Italie et une partie de la famille Savoie il y avait aussi le roi d’Albanie en exil. Lorsque nous sommes rentrés en Europe au début des années 50, nous avons peu à peu retrouvé nos autres parents et comme vous savez ; nous sommes apparentés avec pratiquement toutes les familles royales européennes. Etant donné que j’ai vécu en Espagne j’ai un lien d’affection particulier avec le roi Juan Carlos et toute sa famille royale d’Espagne.
Noblesse et Royautés : Pensiez-vous lorsque vous étiez installé avec votre famille à Madrid que vous reverriez un jour la Bulgarie ?
Sa Majesté Roi Siméon : Honnêtement pas. Le régime soviétique paraissait tellement solide que je doutais même que mes enfants puissent un jour voir la Bulgarie. Et voilà que je me suis trompé comme bien de Kremlinogues chevronnées aussi…
Noblesse et Royautés : Aviez-vous des contacts pendant toute ces années de joug communiste avec vos compatriotes restés au pays ?
Sa Majesté Roi Siméon : Nous avions un réseau de contacts avec le bulgares à l’étranger et donc indirectement avec des compatriotes à l’intérieur. J’avais de très nombreux contacts avec des diplomates de plusieurs pays, certains avait au poste à Sofia. Finalement les contacts directs étaient bien- entendu rares et il fallait faire très attention pour ne pas nuire aux bulgares dans le pays. Je maintenais aussi de bonnes est intéressantes relations avec les services de quelques pais occidentaux.
Noblesse et Royautés : Qu’avez-vous ressenti lors de votre retour en Bulgarie avec un accueil des plus enthousiastes ?
Sa Majesté Roi Siméon : Une émotion indescriptible et inoubliable. (Le roi Siméon revient très longuement sur ce grand moment d’émotion dans ses mémoires)
Noblesse et Royautés : Qu’est-ce qui a ensuite motivé votre décision de vous présenter aux élections qui vous portèrent au pouvoir en 2001 en tant que Premier Ministre ?
Sa Majesté Roi Siméon : J’ai trouvé que la situation requerrait ma présence et la suite est connu et décrite dans le souvenir qu’on vient de publier. Le fait de devenir Premier ministre de la République fut le résultat direct de la victoire électorale.
Noblesse et Royautés : Pendant la durée de votre mandat qui a permis l’entrée de votre pays dans l’Union européenne et l’OTAN, pensez-vous que vous étiez perçu comme le roi ou comme un homme politique ?
Sa Majesté Roi Siméon : Ce ne pas à moi de juger. Pour ma part j’ai taché de faire de mon mieux, comme tous dirigeants et responsables politiques. Dans les deux cas, de roi et d’un politique on peut et on doit contribuer au bien-être de pays.
Noblesse et Royautés : Sire, vous avez à présent tourné la page de votre vie politique mais vous continuez à résider en Bulgarie ?
Sa Majesté Roi Siméon : En effet en raison de tant d’années d’exil, vous comprenez qu’il est très agréable de revenir au pays et retrouver ses racines.
Noblesse et Royautés : Comment sont aujourd’hui vos relations avec le pouvoir bulgare ?
Sa Majesté Roi Siméon : Bonnes et tout à fait normales vu les circonstances. Grâce à mon âge je représente en quelque sorte un lien historique entre la Bulgarie avant la période soviétique et l’ère post communiste, démocratique.
Noblesse et Royautés : Sire, pouvez-vous nous parler de votre épouse la reine Margarita qui est votre fidèle appui depuis touts ces années ?
Sa Majesté Roi Siméon : Voilà une question difficile, car plus de demi-siècle de vie conjugale ne peut pas être résumé en deux mots. En plus de nombreux d’autres il y a aussi les cinq enfantes qu’elle nous a donné et donc nous sommes tous les deux fières. Une autre qualité certaine est sa patience puisqu’elle me supporte depuis 53 ans.
Noblesse et Royautés : Sire, vous êtes proche ami du roi Juan Carlos d’Espagne. Avez-vous été surpris par son abdication ?
Sa Majesté Roi Siméon : Nous sommes effectivement de bons amis, c’est pourquoi le Roi m’avait prévenu de sa décision.
Noblesse et Royautés : Sire, vous êtes cousin avec le roi Albert II des Belges qui s’est rendu à quelques reprises en Bulgarie à votre invitation. Pouvez-vous nous en parler ?
Sa Majesté Roi Siméon : En effet sa Majesté est venu en visite officielle à l’invitation du président Parvanov quand j’étais Premier ministre et plus tard la Reine et moi nous avons eu la joie de revoir le roi Albert et la reine Paola en visite privée chez nous. Inutile d’ajouter qu’outre les liens Saxe-Cobourg nous partagions une amitié que avait commencé avec le Roi Leopold III en passant par le Roi Baudouin et je suis heureux de dire que ce lien continue au niveau de nos enfants.
Noblesse et Royautés : Sire, vous êtes grand-père de 11 petits-enfants, avez-vous évoqué avec eux votre projet de mémoires ? Viennent-ils souvent en Bulgarie ?
Sa Majesté Roi Siméon : Pas vraiment car mes petits-enfants plus grands sont dans les universités à l’étranger. Quant aux autres petits-enfants je ne les vois malheureusement pas souvent. Y il a la distance et aussi les programmes de vacances pour chaque famille …..
« Un destin singulier », Siméon II de Bulgarie, Editions Flammarion, 2014, 384 p. (Merci à Madame Fanny Plan pour son entremise – Copyright photos : getty images, novonite & DR)
Corentine
13 novembre 2014 @ 12:46
merci beaucoup Régine et merci à sa Majesté Siméon II de Bulgarie, j’ai déjà achté ce livre
Corentine
13 novembre 2014 @ 12:47
merci beaucoup Régine et merci à sa Majesté Siméon II de Bulgarie, j’ai déjà acheté ce livre
Jean Pierre
13 novembre 2014 @ 13:00
Merci Régine.
Je vais quand même l’écrire, il manque une question sur l’état de santé de son fils.
patricio
13 novembre 2014 @ 13:12
Je suis en train de lire les mémoires du roi Siméon II, il est vrai que la vie de ce monarque a tout d »‘extra- ordinaire » .
Le récit est parfois très émouvant surtout lorsque le roi parle de ses parents.
J’ ai eu la chance de me recueillir sur la tombe du roi Boris III, au monastère de Rila en 2006.
J’ai adoré la Bulgarie
amitiés
patricio
Francine du Canada
13 novembre 2014 @ 16:27
Merci Régine; le roi Siméon de Bulgarie est toujours aussi humble… et vraiment très agréable. Bonne journée à tous, FdC
Claude-Patricia
13 novembre 2014 @ 16:29
Un grand merci à Sa Majesté, merci Régine.
Pierre-Yves
13 novembre 2014 @ 17:23
Les réponses que donne ici le roi demeurent assez succinctes.
J’ai feuilleté rapidement son livre à la Fnac il y a quelques jours et je dois dire que je n’ai pas été spontanément tenté de l’acheter. Peut-être est-ce dû à l’impression d’une vie un peu trop survolée.
Le livre de mémoires de l’Impératrice Farah ne m’avait pas donné cette impression. Je me souviens que quand je l’ai eu en main et que je l’ai feuilleté, je me suis dit qu’il devait être riche et que je ne m’ennuierais pas. Pour Siméon de Bulgarie, j’avoue que j’ai un doute.
Milena K
14 novembre 2014 @ 07:18
Je partage un peu votre sentiment à la lecture de cette itw qui ne m’a pas vraiment donné envie de lire ce livre,sans remettre en cause le professionnalisme de son auteur.
Palatine
14 novembre 2014 @ 11:49
Helas, Pierre Yves, je vous comprends. Plus un personnage est important, plus longue sera la langue de bois. Parfois je me demande si ces gens ne devraient pas faire des mémoires posthumes pour dire tout, la vérité crue et parfois dérangeante. Vous avez bien fait de feuilleter (ce n est pas toujours possible ) le livre à la Fnac car vous avez vu un ton de trop bonne compagnie, et dans les memoires il vaut mieux être vrai.
Je ne lis plus les memoires de gens importants, pour cela. Evidemment il faut les comprendre, Simenon en ecrivant « Pedigree » a eu des procès et les a tous perdus.
Dans les mémoires, les passages les plus intéressants sont ceux de l’enfance. Là, les gens trichent rarement. Un truc amusant ds les recits d’enfance, ce sont les avanies subies par les parents qui confient leur rejeton aux nounous à demeure. Marquerite Yourcenar, bébé, qui va finir dans des maisons de rendez-vousoù sa bonne passe des après-midi galants. Les enfants de Malraux qui ont aussi un problème. Et ne parlons meme pas du second fils de Louis XV qui fut finalement » tué » par sa gouvernante qui lui fit manger de l’argile
Palatine
14 novembre 2014 @ 18:15
Cher Pierre-Yves, il y a une chose qui m’agace toujours quand je lis une autobio d’un personnage célèbre, dans quelque secteur que ce soit. C’est un peu « tout le monde il est beau tout le monde il est gentil ». Le narrateur parle d’un homme ou d’une femme importants, que vu son statut, il fréquente, et c’est toujours quelqu’un d’exquis. De charmant. D’adorable. Jamais le moindre bémol, et cette douche de sirop mutuel me fatigue et je prefere garder mon argent. Sur ces sommets, tout le monde se lance des fleurs.
Dans ma jeunesse, j’avais lu une autobio d’Edith Piaf, et on aurait dit qu’une enfant de Marie nous expliquait son parcours chanceux, d’ailleurs l’opus s’appelait « le bal de la chance ». C’était un ouvrage à mettre toutes les mains, et la dame avait rôti le balai, pourtant.
La reine Noor nous explique dans son livre, que son défunt mari Hussein n’a jamais eu la moindre envie de divorcer d’elle, avant qu’il ne tombe gravement malade. J’ai acheté un livre d’Hilary Clinton, trouvant la femme intéressante, et je me suis ennuyée, car elle parlait de tout sauf d’elle. Evidemment, elle voulait garder un langue de bois.
Rose
15 novembre 2014 @ 12:08
Bonjour,
J’ai lu le livre. Ce qui m’a frappée c’est l’extrême mesure du ton, des propos et une impression de très vive intelligence (l’atavisme saxe-coburg?). Intelligence des situations bien sûr mais des analyses dans des périodes tourmentées et hostiles pour lui. Un témoignage historique intéressant car honnêtement qui connaissait le rôle du roi Simeon dans l’arrimage de la Bulgarie à l’OTAN et son rôle dans l’adhésion à l’Europe, même après son mandat de premier ministre. Sa réussite en tant qu’homme d’affaires perce également à travers les pages et révèle une étonnante capacité à rebondir après avoir occupé un trône.
Certains passages sont édulcorés mais d’autres sont étonnamment développés : ainsi son père n’est pas mort dans l’avion qui le ramenait de sa rencontre avec Hitler mais une semaine plus tard. Sa relation avec Hassan 2 est très longuement évoquée. Mais l’homme se livre peu. A peine effleure-t-il « une enfance sans tendresse »..Rien non sur la personnalité de ses enfants, dont certains ont fait de brillantes études.
Je recommanderais la lecture de ce livre pour le témoignage historique, la connaissance de l’homme politique. Ceux qui cherchent de l’intime ne le trouveront pas. Le roi Simeon fait connaître son bilan d’homme public, remarquable en tant qu’homme d’affaires ou de politicien. L’homme privé reste privé.
Dame Tartine
13 novembre 2014 @ 21:02
cet homme que je ne connais qu’en photo, plus je le vois et plus il me fait penser à une acteur dans un film d’espionnage, coté russe. Et super intelligent. Je voudrais savoir si d’autres ont cette impression.
il a vraiment un physique de cinema.
Severina
13 novembre 2014 @ 21:08
Un homme de devoir qui me rappel son oncle, le roi Umberto d’Italie, mais Il donne aussi un’impression de mélancolie bien que sereine. La mort de son père peut être empoisonné par Hitler, l’exécution de son oncle, le prince Dimitri, l’exil, les difficultés économiques de sa mère: une enfance et une jeunesse traversés par les plus sombres tragedie du XX siècle et maintenant les conséquences des blessures de son héritier, tout ça dans une seule vie! Il faut être bien stoïque pou porter tous ces poids sur ses épaules.
Eos
13 novembre 2014 @ 21:26
Merci beaucoup pour cet entretien !
Anais
14 novembre 2014 @ 07:02
Merci Régine pour cet entretien et pour le gros plan sur les mémoires du roi Siméon. J’ai acheté le livre et il me tarde d’être ce week-end pour commencer la lecture
Christian
14 novembre 2014 @ 15:29
J’ai beaucoup de respect pour le Roi Siméon II mais je n’achèterai pas ses mémoires. D’autant diront que c’est une affaire personnelle. C’est en partie vrai mais c’est surtout, comme l’ont pointé d’autres contributeurs, une question de justesse des faits rapportés par ces mémoires. Ici, je crains que ce soit édulcoré. C’est un sentiment qui m’est venu à l’annonce de la publication et qui se trouve renforcé par cette mini-interview. Dommage. Il y a beaucoup de choses à dire et le Roi en est la mémoire (encore) vivante, et celle qui se serait avéré la plus fidèle s’il en avait été décidé ainsi.
COLETTE C.
14 novembre 2014 @ 19:25
Je ne pense pas qu’il soit opportun de demander au Roi des nouvelles de son fils, ce qui doit être un sujet de grande douleur. D’où le silence qui entoure l’état de santé du prince.
Charles Z
20 novembre 2014 @ 10:45
Et ne voudrait il pas remonter sur le trône pour le bien de ses sujets ?
Cela me parait le premier de ses devoirs, il semble l’oublier. Se faire élire n’est pas vraiment son rôle…
Un petit Belge
6 février 2015 @ 18:57
Je viens de lire son livre, et je le trouve passionnant. Passionnant car il retrace toute l’histoire de la Bulgarie depuis son indépendance à la fin du 19ème siècle, et que bien souvent, on ne connaît pas grand chose sur ce pays. Passionnant car il permet de découvrir les trois rois de Bulgarie (Ferdinand, Boris et Siméon) et leurs épouses sur lesquels je ne pense pas qu’il existe d’autres ouvrages en français. Passionnant car le roi Siméon raconte sa vie publique en tant que roi, roi en exil, et premier ministre, et personnellement, beaucoup de choses m’étaient inconnues. Même s’il défend sa famille et sa politique, je le trouve assez objectif. C’est son témoignage pour l’Histoire qu’il livre, et qui sera une source intéressante pour les historiens à côté d’autres points de vue sur l’histoire de la Bulgarie.
Alors, par contre, si vous voulez découvrir la vie privée, les histoires de cœur ou les ragots de la famille royale bulgare, passez votre chemin car il n’en parle pas. C’est sa vie publique qu’il raconte, et il ne parle pas de sa vie d’époux, père, grand-père. Il dit d’ailleurs à plusieurs reprises qu’il est discret et pudique dans ses sentiments. Mais à plusieurs reprises, on ressent son amour à l’égard de ses parents et de son épouse, sa complicité avec sa sœur Marie-Louise, avec les rois d’Espagne et du Maroc.