Inauguration de l’exposition « D’or et d’argent, décorations des princes de Condé et du duc d’Aumale »

Inauguration de la nouvelle exposition du Musée Condé, D’or et d’argent, décorations des princes de Condé et du duc d’Aumale.  Installée dans la fameuse Galerie de Psyché du château de Chantilly et organisée en collaboration avec le Musée de la Légion d’honneur, la nouvelle exposition du Musée Condé « D’or et d’argent » présente un exceptionnel ensemble presque complet d’ordres de chevalerie et de décorations personnelles ayant appartenu aux derniers propriétaires du château.

Qu’elles soient en or, en émail ou en argent, qu’elles soient un signe d’appartenance à la famille royale ou bien un signe de bravoure sur le champ de bataille, ces décorations aux allures de bijoux sont de véritables trésors et sont exposées au public pour la première fois, certaines après restauration. L’exposition suit un ordre chronologique et se compose également de tableaux, d’uniformes, de miniatures et de sculptures figurant les illustres princes de Chantilly arborant ces décorations.

Les quatre grands protagonistes sont Louis-Joseph de Bourbon, prince de Condé (1736-1818), qui accueillit à Chantilly de nombreuses têtes couronnées et se distingua pendant la Guerre de Sept Ans à Grüningen et Johannisberg en 1762 avant de partir pour l’exil après la prise de la Bastille et de prendre la tête de l’armée de Condé luttant contre la Révolution française.

Son fils Louis-Henri Joseph de Bourbon, prince de Condé, dit le duc de Bourbon (1756-1830), colonel de plusieurs régiments qui servit au siège de Gibraltar en 1782 et qui connut deux fois l’exil en 1795 et 1814 avant de mourir dans de mystérieuses circonstances dans son château de Saint-Leu-Tavergny.

Louis-Antoine-Henri de Bourbon, duc d’Enghien (1772-1804), fils du duc de Bourbon et soldat valeureux au sein de l’armée de Condé avant d’être arrêté à Ettenheim par les troupes de Bonaparte qui l’accuse de complot contre le Premier Consul et le fusillent dans les fossés du château de Vincennes après un semblant de procès militaire.

Henri d’Orléans, duc d’Aumale (1827-1897), fils du roi Louis-Philippe et héritier de son grand-oncle et parrain le dernier prince de Condé, vainqueur d’Abd el-Kader en 1843 et gouverneur d’Algérie en 1847. Exilé vingt-trois ans en Angleterre, il convertit la fortune des Condé en une extraordinaire collection d’œuvres d’art et restaure à partir de 1871 le château hérité des Condé, avant de léguer son Domaine de Chantilly à l’Institut de France en 1884.

L’exposition présente les ordres des derniers princes de Condé, du duc d’Aumale, puis l’ordre de Saint-Michel.  L’ordre du Saint-Esprit est le plus prestigieux ordre de chevalerie de la monarchie. Le cordon bleu était un signe permettant de reconnaître le roi, les fils de France et les princes du sang mais aussi une façon d’associer les chevaliers commandeurs à la Maison de France. Depuis Henri II de Bourbon (1588-1646), premier prince du sang, reçu chevalier du Saint-Esprit au lendemain du sacre de Louis XIII, tous les membres de la famille de Condé ont été décorés des Ordres du roi.

Ci-dessus, le pommeau de l’épée du duc d’Aumale. Pommeau de l’épée de général de division (trois étoiles sur la garde) du duc d’Aumale avec sa Légion d’honneur (1840) et sa médaille coloniale (1895).

L’ordre de Saint-Louis, institué par Louis XIV en 1693, est un ordre de mérite et de récompense militaire. Les trois derniers princes de Condé l’ont tous reçu pour leur bravoure au combat : le prince Louis-Joseph en 1758 et le duc de Bourbon en 1782 au siège de Gibraltar. Le duc d’Enghien la reçoit de son grand père en 1793, alors qu’il revient de Berstheim, l’uniforme percé de coups de baïonnettes : « Voilà des boutonnières qui appellent une croix de Saint-Louis » s’écria le prince de Condé.

L’ordre de Saint-André de Russie est le premier ordre de chevalerie russe. Le prince de Condé reçut le collier de cet ordre du tsar Paul Ier qui hébergea l’armée de Condé en Russie, en souvenir du bon accueil qui lui avait été réservé à Chantilly en 1782. L’ordre de Malte (de Saint Jean de Jérusalem) a également été octroyé au prince de Condé par le tsar Paul Ier. Le duc de Bourbon et le duc d’Enghien l’ont également reçu.

L’ordre de la Légion d’honneur a été créé par Bonaparte en 1802. C’est à l’origine un ordre de mérite. Le prince de Condé et le duc de Bourbon furent promus grand-croix en 1816. La remise de cette décoration aux princes de la maison de Bourbon ne relevait pas d’une logique de reconnaissance des mérites mais bien de considérations dynastiques.

L’ordre de la Toison d’Or, fondé en 1430 par le duc de Bourgogne Philippe le Bon, est un des ordres de chevaleries les plus prestigieux. A partir du règne de Louis XV, les deux ordres du Saint-Esprit et de la Toison d’Or sont considérés comme des ordres de famille portés par les fils de France et les Infants d’Espagne. Ci-dessus, l’Ordre de la Toison d’Or reçu par le duc de Bourbon en 1789, or, émail.

L’ordre de Charles III d’Espagne a été fondé par ce roi en 1771. C’est un ordre de mérite inspiré du Saint-Esprit. Le duc de Bourbon le portait sous la Restauration.

Sous la Monarchie de Juillet, la Légion d’honneur est le signe d’une reconnaissance nationale mais aussi un insigne de distinction pour les membres de la dynastie. Le duc d’Aumale a été fait chevalier de la Légion d’honneur en 1840 pour ses faits d’armes militaires en Algérie. La décoration est portée sur le pommeau de l’épée du prince que l’on peut admirer dans l’exposition, non sans émotion. Il a reçu l’ordre du Nichan Iftikhar de Tunisie en 1846 lorsqu’il était gouverneur général de l’Algérie. Il a également reçu de nombreux ordres étrangers, presque tous conservés au Musée Condé, en raison de la politique étrangère du roi Louis-Philippe en faveur de la paix sur le continent et des alliances matrimoniales de ses enfants.

Ci-dessus, l’habit d’académicien de duc d’Aumale avec bicorne et plaque de Grand-croix de la Légion d’honneur de la IIIeme République, 1871. (c) Alexandre Cousin

Ainsi, le duc d’Aumale a reçu la grand-croix de l’ordre belge de Léopold en 1842, ordre de mérite créé dix ans plus tôt par son beau-frère le roi des Belges Léopold Ier ; la grand-croix de la Tour et de l’Epée, ordre de mérite portugais, en 1845 à l’occasion du mariage de sa sœur Clémentine d’Orléans avec Auguste de Saxe-Cobourg, frère du roi consort de Portugal ; la grand-croix de l’ordre brésilien de la Croix du Sud après le mariage en 1843 de son frère le prince de Joinville avec la princesse Francisca Carolina, fille de l’Empereur du Brésil Pierre Ier ; la grand-croix de l’ordre de Saint-Ferdinand et du Mérite en 1844, à l’occasion de son mariage avec sa cousine germaine Marie-Caroline de Bourbon-Sicile ; l’ordre de la Toison d’Or en 1846, à la suite du mariage de son frère Antoine duc de Montpensier avec une infante d’Espagne ; et enfin la grand-croix de l’ordre de la maison grand-ducale de Mecklembourg-Schwerin en 1896 : son frère Ferdinand duc d’Orléans avait épousé la princesse Hélène de Mecklembourg-Schwerin soixante ans plus tôt.

Enfin, l’exposition aborde l’ordre de Saint-Michel et Chantilly. En effet, le musée Condé conserve de cet ordre créé par Louis XI en 1469 des témoignages iconographiques très intéressants comme un Portrait de Jean de Taix peint par Corneille de Lyon et un vitrail de la galerie Duban figurant les armes des Montmorency entourées du collier de Saint-Michel se rapportant au connétable Anne de Montmorency, premier propriétaire de Chantilly.

Cette exposition, dont le propos n’est pas de traiter de l’histoire des ordres de chevalerie mais d’établir des liens entre ces décorations personnelles et leurs propriétaires, révèle une facette inconnue et inédite des formidables collections du duc d’Aumale.

D’or et d’argent, décorations des princes de Condé et du duc d’Aumale – Du 6 avril au 29 septembre 2014 –  Le commissariat de l’exposition est assuré par Nicole Garnier, conservateur général du patrimoine du Musée Condé et Patrick Spilliaert, secrétaire général de la société des Amis du Musée de la Légion d’honneur. Nous soulignons enfin la très grande qualité des reproductions iconographiques du catalogue d’exposition rédigé par les commissaires (Editions Monelle Hayot, 120 pages, 200 illustrations). (Un grand merci à Alexandre Cousin pour cert article – Copyright photos : Amis du Musée Condé et A.Cousin)