Dominant la Moskova, à deux pas du Kremlin, l’imposante cathédrale du Christ-Sauveur est visible de loin. Elle est le siège du patriarcat. Le culte orthodoxe y est pratiqué tous les dimanches et jours de fêtes. Les messes quotidiennes et les mariages ont lieu dans l’autre église située au sous-sol. C’est de cette cathédrale que sont diffusées les images des fêtes de Noël (7 janvier) et Pâques orthodoxes célébrées par sa Béatitude Cyrille, le Patriarche de Moscou et de toute la Russie depuis 2009.
Consacrée en 2000, cette cathédrale est une « résurrection » de la cathédrale d’origine. Reconstruite entre 1995 et 1999 à l’identique de l’ancienne cathédrale détruite par Staline, elle symbolise le renouveau de l’orthodoxie muselée par 70 ans de pouvoir soviet, un pouvoir qui a fait détruire le tiers des édifices religieux de Moscou, 350 églises et monastères.
C’est en mémoire de la victoire de la Russie sur la Grande Armée de Napoléon 1er que le tsar Alexandre 1er voulut faire bâtir une cathédrale. D’autres tsars avaient fêté leurs victoires de la même façon, notamment le tsar Yvan IV le Terrible avait fait bâtir l’emblématique cathédrale Basile-le-Bienheureux pour fêter la prise de la ville de Kazan par les russes.
Le dernier soldat de Napoléon ayant quitté le territoire russe, le tsar Alexandre 1er ordonna, le 25 décembre 1812, la construction d’une cathédrale pour remercier Dieu d’avoir sauvé sa couronne et son peuple. En 1812, le calendrier julien était encore en vigueur dans l’église orthodoxe russe, le 25 décembre était donc bien le jour de Noël. C’est pourquoi la cathédrale est dédiée au Christ-Sauveur, et la nativité est largement représentée sur différentes fresques ou icônes de la cathédrale.
En 1817, le tsar Alexandre 1er choisit le jeune architecte Vitberg car il était séduit par son ambitieux projet d’un édifice religieux style néo-classique de 3 étages. Le 12 octobre 1817, la première pierre fut posée sur la colline des Moineaux. Mais l’architecte inexpérimenté ne parvenait pas à faire face aux pillages sur le chantier. De plus, le sol était instable à cause des ruisseaux souterrains. Juste après la mort d’Alexandre 1er, survenue le 1er décembre 1825, l’architecte Vitberg fut exilé dans l’Oural et le chantier abandonné.
En 1830, le tsar Nicolas 1er voulut poursuivre projet de son frère mais il choisit l’emplacement du couvent Saint Alexis datant du XIV ème siècle, sur la petite colline Alexeïevski près du Kremlin. Il lança un nouveau concours auprès des architectes. Le tsar choisit l’architecte Constantin Thon qui avait déjà réalisé le palais du Kremlin et le palais des Armures, pour son projet classique d’une cathédrale de style russe byzantin.
En 1837, le couvent Saint Alexis fut transféré à Krasnoïe Selo (moniales, autels et icônes) et les murs rasés. Le premier jour de la démolition du couvent, l’ouvrier chargé de démonter la croix de l’Eglise tomba et se tua : un nouveau mauvais présage après l’échec coûteux de la colline des Moineaux.
Le 10 septembre 1839, c’est la pose de la première pierre à l’occasion des 25 ans de la fin de la guerre patriotique.
La construction de ce monument grandiose dura 44 ans, dont 25 ans pour les décorations intérieures et extérieures par les plus grands peintres et sculpteurs russes. A l’intérieur, 12 portes de bronze massif, 3 000 chandeliers illuminaient une immense iconostase d’or et d’émeraudes, 177 plaques de marbre rappelant les victoires de l’armée russe sur les soldats de Napoléon, et des centaines de tableaux peints sur enduit, à l’ancienne.
La cathédrale du Christ-Sauveur a été consacrée le 26 mai 1883 par le métropolite Ioanniki, le jour du couronnement d’Alexandre III, qui présida la cérémonie. C’est dans cette cathédrale qu’ont été fêtés de grands évènements comme le centenaire de la Guerre de 1812, le 300ème anniversaire de la Maison Roumanov et le choix du dernier patriarche de la Russie tsariste, Saint Tikhon, le 5 novembre 1917.
Après la révolution, Staline choisit de bâtir le « Palais des Soviets » à la place de la cathédrale du Christ-Sauveur. C’était un projet pharaonique; le palais des soviets devait avoir une forme pyramidale d’une hauteur de 400 mètres et être surplombé d’une statue de Lénine de 100 mètres de haut. Le bâtiment devait être plus important que l’Empire State Building. » Dépasser les Etats-Unis » était l’obsession des soviets.
La cathédrale du Christ-Sauveur fut vidée de ses innombrables trésors : or, argent, diamants, icônes, chasubles en or, qui allèrent dans les coffres du Kremlin. Le marbre fut démonté et utilisé ensuite dans la décoration de stations de métro de Moscou. Notamment, les somptueux bancs de la station de métro Novokuznetskaya (ligne 2) ont été sculptés dans le marbre de la cathédrale du Christ-Sauveur. La cathédrale fut dynamitée le 5 décembre 1931.
En 1937, lancement du chantier du Palais des Soviets, mais il fut stoppé en 1941 en raison de la seconde guerre mondiale. Les poutrelles métalliques déjà montées furent utilisées pour construire des armes anti-chars. Après guerre, Il ne restait plus que le trou béant des fondations, et un pays ruiné.
En 1960, le trou fut transformé en une gigantesque piscine circulaire chauffée, de 130 mètres de diamètre. Cette piscine à ciel ouvert était la plus grande piscine du monde. Elle pouvait contenir jusqu’à 2000 personnes, et était ouverte toute l’année.
Pendant plus de 30 ans, les effluves de chlore altérèrent les façades des bâtiments voisins dont celle du Musée Pouchkine situé en face. Les oeuvres exposées en auraient également souffert d’après les employés du Musée. L’ancienne cathédrale était effacée de l’histoire; les livres et guides touristiques russes ne précisaient pas que la piscine remplaçait la cathédrale la plus importante de Russie.
La piscine a été fermée puis démontée au début des années 90. Le Saint Synode adressa une requête au gouvernement pour rebâtir la cathédrale à son endroit d’origine. Le 7 janvier 1995, jour du Noël orthodoxe, le patriarche Alexis II posa la première pierre de la nouvelle cathédrale sur les fondations de la première cathédrale.
3000 ouvriers et artistes ont travaillé sans relâche; la nouvelle cathédrale a été bâtie en un temps record de 5 ans. Les mécènes, particuliers et grandes entreprises ont financé les 650 millions de dollars nécessaires à ce projet.
D’une hauteur de 103 mètres, sa coupole d’un diamètre de 30 mètres est l’une des 10 plus grandes coupoles au monde. L’édifice religieux peut accueillir jusqu’à 10 000 fidèles.
Un vaste sous-sol contient l’église basse de la Transfiguration du Seigneur, la bibliothèque du Patriarche, un musée, des salles de réunions et une salle de conférence où a été élu le dernier Patriarche en 2009.
Dans la cathédrale, une loge discrète est réservée aux chefs de l’Etat et, à droite, la loge et les trônes des tsars ont été reconstitués à l’identique.
Une grande icône récente représente les nombreux saints russes du 20ème siècle, entourés de leurs bourreaux : principalement des prêtes, des Romanov et les 7 membres de la famille du tsar Nicolas II (tous canonisés le 14 août 2000). (Merci à Agnès pour ce premier reportage depuis Moscou)
June
6 octobre 2014 @ 06:15
Merci Agnès, déjà au travail, bravo !
Aliénor
6 octobre 2014 @ 07:25
Merci pour cette belle visite, très intéressante.
Après le Danemark nous allons visiter Moscou. C’est un vrai plaisir.
neoclassique
6 octobre 2014 @ 07:52
Un immense bravo pour cet article précis, complet et remarquablement documenté!
j’ai appris des tas de choses que j’ignorais totalement sur cette extraordinaire, à tous points de vues, cathédrale votive.
J’ai hâte de lire, j’espère très vite, la suite en visitant l’intérieur de cet insigne sanctuaire
Baia
6 octobre 2014 @ 08:10
Reportage passionnant ! Merci Agnès.
1315jeann
6 octobre 2014 @ 08:33
Article passionnant et très bien documenté. Enfin un projet positif dans un monde souvent triste et sans âme !!!
Danielle
6 octobre 2014 @ 08:56
Merci Agnès.
Que de sort pour cette cathédrale, heureusement que ce lieu a retrouvé ses origines !
Je suis stupéfaite par tous les aléas que ce site a connu et j’espère qu’il revit les splendeurs qu’il avait perdues.
Trianon
6 octobre 2014 @ 10:01
mille mercis pour ce beau reportage, ça donne envie d’y aller:)
septentrion
6 octobre 2014 @ 11:26
Bonjour,
Merci pour ce beau reportage.
Ce soir, France 3 diffuse » l’ombre d’un doute », émission consacrée à Napoléon.
Cdt,
Francine du Canada
6 octobre 2014 @ 11:33
Merci Agnès pour ce premier reportage; cette cathédrale est un bel édifice. Triste cette histoire de destruction des édifices religieux et espérons que plus jamais un chef d’état ne s’abaissera à détruire un patrimoine historique. Bonne journée, FdC
Pierre-Yves
6 octobre 2014 @ 11:48
Passer d’un petit pays à un énorme pays, d’une démocratie à une autocratie, ne vous a pas fait perdre, comme on peut le voir ici, le goût des reportages.
Merci pour celui-ci, très intéressant !
M. chris
2 janvier 2015 @ 20:33
Vous non plus, avec vos réflexions acerbes.
Gwendy
6 octobre 2014 @ 11:56
Merci Agnès, très heureuse de revoir vos reportages sur ce site, à très bien bientôt pour d’autres merveilles.
Severina
6 octobre 2014 @ 12:48
Merci Agnès, c’est beau de vous retrouver si tôt avec vôtres belles photos et vôtres reportages bien documentés.
domilys
6 octobre 2014 @ 12:54
Agnès,
Merci pour ce beau reportage que j’ai trouvé très intéressant.Cela me permet de découvrir différente ville.
JE
6 octobre 2014 @ 12:54
Félicitations Agnès pour ce premier reportage depuis Moscou.
J’ai hâte de lire les prochains.
FrançoiseA
6 octobre 2014 @ 14:05
ouahhhhhhhhhhhh j’ignorais cette histoire de la cathédrale! c’est super ce reportage merci Agnès!!! pouvez vous nous dire svp s’il existe des blogs russes qui intéressent aux royaux européens ???? si je pose cette question c’est que j’ai lue une information sur un blog merci d’avance
Philippe gain d'enquin
6 octobre 2014 @ 14:10
Quelle chance pour nous que vous soyez à présent dans une ville aussi riche, belle, et intéressante, ce type « d’exil », sans doute temporaire, a donc du bon. Mille fois merci de nous en faire bénéficier. Cordialement vôtre, PGE
Chantal 76
6 octobre 2014 @ 15:57
Je suis ravie de retrouver Agnès et ses sublimes photos. Nous allons donc visiter
Moscou grâce à elle et je m’en réjouis. Elle nous a fait vivre de passionnants moments au Danemark et je lui dis un grand MERCI.
Sauternes
6 octobre 2014 @ 16:31
Une courte video permettant de voir la destruction, le projet abandonné, la piscine et la reconstruction de la cathédrale :
http://www.youtube.com/watch?v=CRx6JPXCJvE
COLETTE C.
6 octobre 2014 @ 17:39
Merci, Agnès, on reconnaît là vos compétences !
Claudia
6 octobre 2014 @ 18:04
Prochain épisode l’intérieur ?? mais ce que les « révolutionnaires » de tous bords ont pu faire de c…. que ce soit en ex Union Soviétique ou ailleurs ! Les révolutionnaires français n’ont pas fait mieux, comment peut-on détruire ces merveilles au seul motif que leur destination est d’ordre religieux ! Rien dans le crâne ces gens.
laure2
6 octobre 2014 @ 19:06
Merci c’est très interessant .
Les bancs du metro sont impressionnants, la propreté aussi d’ailleurs . ;)
Damien B.
6 octobre 2014 @ 19:26
Je suis ravi de retrouver votre premier reportage russe Agnès.
Les bancs en marbre du métro sont dignes de vrais palaces !
Vassili
7 octobre 2014 @ 04:48
Merci Agnes, c’est magnifique votre reportage. V
Corsica
7 octobre 2014 @ 05:25
Entre un architecte envoyé au goulag et une piscine, on n’a pas le temps de s’ennuyer dans votre reportage … Comme d’habitude, j’ai appris des choses . Merci Agnès et bonne continuation .
agnes
7 octobre 2014 @ 05:29
Les photos ne sont pas autorisées à l’intérieur (plus tard, je tenterai de trouver un interlocuteur pour obtenir des autorisations).
Beaucoup d’églises ont été détruites mais des hommes influents, dont un architecte dont j’ai déjà oublié le nom, se sont battus pour éviter cette catastrophe. Sans eux le désastre aurait été pire.
La plupart des édifices ont été démolis car ils étaient sur le passage des larges voies d’accès créées par Staline.
Les routes sont très larges à Moscou intra-muros, souvent 6 à 8 voies (d’où l’obligation de traverser par un passage souterrain). Ces larges avenues ont été créées au pris de la démolitions d’édifices religieux ou de maison anciennes.
Donc, sans vouloir défendre les soviets, il me semble que beaucoup d’édifices n’ont pas été démolis totalement « gratuitement », mais pour faire place à une route ou à un immeuble.
Francine du Canada
7 octobre 2014 @ 13:48
Merci pour les précisions de votre dernier paragraphe Agnès; ça prend de la maturité pour mettre des bémols ou remettre les pendules à l’heure quelquefois… à quoi servirait d’attiser la haine des occidentaux? La vérité est toujours préférable aux suppositions, hypothèses ou supputations. Bonne journée, FdC
Danielle
7 octobre 2014 @ 16:51
Agnès, fort dommage que ces églises aient été détruites pour des immeubles ou routes !!
ambre
7 octobre 2014 @ 10:09
Merci, passionnant.
Comme vous le dites par ailleurs, il est parfois nécessaire de casser l’ancien pour améliorer les conditions de vie au présent. Si certains bâtiments sont détruits et ne le méritent pas (en fonction du contexte politique du moment), il serait quand même absurde de se priver d’aménagements pour faciliter la vie des habitants. Sinon, dans quoi les habitants des grandes villes qui ont une longue histoire vivraient-ils aujourd’hui ? Des villes anciennes certes, mais probablement délabrées (parce que tout n’est pas rénovable sans fin), et qui ne répondraient pas à leurs besoins aujourd’hui.
Jean-Pierre VDS
8 octobre 2014 @ 12:07
Très beau reportage et photos de cette cathédrale que j’ai visitée il y a quelques années. Une petite remarque sur le calendrier: vous écrivez « En 1812, le calendrier julien était encore en vigueur dans l’église orthodoxe russe, le 25 décembre était donc bien le jour de Noël ». Vous vouliez dire encore en vigueur dans l’empire russe car ce calendrier julien est toujours en vigueur dans l’Eglise russe mais fut supprimé et remplacé par notre calendrier grégorien par Lénine. Le calendrier julien a 13 jours de retard, voilà pourquoi Noël le 25 décembre tombe le 7 janvier de l’année civile (25+13). Merci..
agnes
9 octobre 2014 @ 14:16
merci, j Ȏtais pas au clair apparemment sur les calendriers.
donc en 1812, c’était le calendrier grégorien pour que le 25/12 soit bien noël pour le russes.
flabemont8
8 octobre 2014 @ 16:41
Bonjour, Agnès, je suis très heureuse de vous lire à nouveau ! Et vous nous faites cadeau d’un bien beau reportage ! Lors de mes séjours à Moscou, avant 1990, j’avais vu la piscine , mais pas la cathédrale , et pour cause !
Merci encore, bonne installation et au plaisir de vous lire en privé, si vous en avez le temps ! Toutes mes amitiés .
Claude-Patricia
8 octobre 2014 @ 17:41
Bonjour à tous,
Agnès, bravo! Votre détermination s’avère payante une fois de plus!! Quelle joie de vous retrouver, cette fois-ci en Russie.
Alors, l’Illustration va se joindre à vous pour conter ici l’histoire du
Tricentenaire des Romanov (15 mars 1913)
Il y a encore, en Russie, du loyalisme pour le trône, un loyalisme ardent et mystique, un loyalisme populaire des faubourgs des villes et des immensités rurales, qui a donné ces derniers jours, à l’occasion du tricentenaire des Romanov, à côté du loyalisme officiel, militaire, aristocratique ou bourgeois, sa mesure éloquente et profonde.
Les fêtes de ce Jubilé exceptionnel ont commencé le 6 mars au milieu de l’enthousiasme national et dans une sorte d’extase religieuse, car, seul maintenant en Europe où le sultan ne compte plus guère, le monarque russe, chef d’église, à la fois empereur et pape, conserve un caractère sacré.
Le 6 mars, donc, il y a eu exactement trois cents ans que le Zemski-Sobor, ou assemblée nationale russe, offrit, après une longue période d’anarchie, la couronne à Michel Féodorovich Romanov, fondateur de la dynastie qui s’est perpétuée sur le trône et dont certains membres, illustres parmi les illustres, ont assuré la grandeur de l’empire et la magnifique expansion de la puissance russe.
En l’honneur de ces commémorations historiques, le tsar Nicolas (dont je conterai aussi le mariage et le couronnement), a d’abord publié un ukase d’amnistie impatiemment attendu, car le précédent décret de pardon datait de la naissance du prince héritier, c’est à dire de 1904.Un grand nombre de délits et particulièrement de délits politiques commis depuis cette époque, se sont donc trouvés effacés, et quelques nobles exilés pourront dès maintenant rentrer impunément dans leur patrie. Les condamnés à mort ont vu commuer leur peine en vingt ans de travaux forcés et les prisons de Saint-Pétersbourg ont, d’un coup, libéré trois cents détenus. Dix millions ont été accordés à la Finlande pour l’amélioration de ses établissements d’assistance et cinquante millions de roubles ont été donnés à la population rurale sur le produit de la vente des terres de l’empereur.
Toutes ces mesures, très heureuses, très opportunes, ont produit, sur les masses si profondément attachées d’ailleurs à la dynastie, la plus heureuse impression, et la communion entre le souverain et le peuple, au cours de ces grandioses journées, n’en a été que plus étroite.
Des Te Deum et des services d’actions de grâce ont été célébrées, le six mars, dans les cathédrales de Saint-Pétersbourg, de Moscou et de Kief, comme dans les plus humbles chapelles et dans toutes les églises de Russie à la même heure, pendant dans le service divin, fut lu un manifeste impérial faisant ressortir les efforts successifs des tsars et des plus éminents parmi leurs sujets pour réaliser la prospérité actuelle, économique, militaire et intellectuelle de l’empire russe.
A Saint-Pétersbourg, le tsar et le grand-duc héritier, qu’on était ému et joyeux de voir reparaître en public dans une voiture découverte, la tsarine, l’impératrice douairière et toute la famille impériale se rendent à la cathédrale, en grand gala, pour assister au service d’actions de grâces. Et ce fut sur le passage du cortège impérial, dans les rues où stationnait une foule énorme, un véritable délire populaire. La circulation des voitures était partout complètement interrompue. Les monuments étaient richement décorés et les ponts tellement transformés par leur parure qu’ils semblaient reconstruits. Aux fenêtres, aux balcons, c’étaient des milliers d’oriflammes aux couleurs nationales et impériales avec partout les blasons des Romanov. Des maisons disparaissaient entièrement sous les draperies. La perspective Newsky était tout entière décorée dans le style empire. Le soir, Saint-Pétersbourg s’illumina de millions de lampes électriques; des scènes d’histoire s’évoquèrent sur des transparents lumineux et des cortèges de patriotes parcoururent les avenues en chantant des hymnes nationaux et en portant des portraits de l’empereur.
Le lendemain, à 4 heures, il y eut au Palais d’hiver, autour duquel continuait de se presser la foule, une grande réception impériale dans la salle de Malachite. Là se trouvaient réunis tous les grands corps de l’Etat, avec de hauts dignitaires religieux d’Orient unis au tsar par le lien orthodoxe, le patriarche d’Antioche, le métropolite de Serbie. Là encore, on put voir, avec leur suite asiatique, des princes vassaux de la Russie, l’émir de Boukhara, le Khan de Khiva, et aussi des délégués mongols.
La famille impériale au grand complet vint recevoir tous ces hommages, le tsar et le tsarévitch portant l’uniforme des chasseurs de la garde avec le grand cordon de Saint-André. Et le président de la Douma, m. Rodsianko, lorsque ce fut son tour de haranguer le souverain, employa le tutoiement des heures historiques. Son discours débutait ainsi : « Puissant empereur, ta sollicitude pour le peuple est grande… »
Le 10 mars, les délégations de paysans ont été reçues au palais et le tsar leur fit un accueil émouvant, embrassant les chef de ces délégations qui furent retenues à dîner.
Cependant que, dans tout l’empire, l’affluence joyeuse et enthousiaste aux revues, aux illuminations, aux spectacles, témoignait que la fête de la dynastie demeurait bien la fête nationale, et que c’est encore et toujours Vie pour le Tsar qui se joue sur la grande scène populaire.
Francine du Canada
9 octobre 2014 @ 06:14
Merci Claude-Patricia; j’ai lu ce récit avec plaisir et j’attendrai vivement la suite. Amitiés, FdC
Gérard
11 octobre 2014 @ 20:56
Très joli reportage. Juste une petite remarque : on dit sa sainteté pour le patriarche de Moscou et non sa béatitude.