A deux pas de Giverny, niché dans un parc de 22 hectares arboré et fleuri, le château de Bonnemare est un joyau de l’architecture Renaissance. Le château (à l’exclusion de l’aile nord), le châtelet et la chapelle sont de la fin du 16e siècle. L’ensemble des communs date des 17e et 18e siècles.
Un manoir médiéval aurait été habité par Raoul de Bonnemare dont la légende hante encore les vieilles pierres du domaine.
On raconte que, au XIIe siècle, Marie de France, jeune poétesse française résidant à la Cour d’Angleterre, commence à rédiger des poèmes en vieux français.
En lisant le «lai des deux Amants » nous découvrons l’histoire d’un jeune homme appelé Raoul de Bonnemare qui aurait résidé au château du même nom, avec sa mère Alix de Bonnemare.
À quelques kilomètres de ce château vivait le terrifiant seigneur de Cantelou, sa femme et sa fille Mathilde. Messire Robert, baron de Cantelou, prenait un malin plaisir à tourmenter moralement et physiquement ses vassaux et toutes personnes qui l’approchaient. Alors qu’il était parti en croisade au côté de Richard Cœur-de-Lion, sa femme meurt et laisse Mathilde seule au château. Alix de Bonnemare la recueille et l’élève alors comme sa fille.
Deux ans passent et les liens qui n’étaient qu’amitié entre Raoul et Mathilde se transforment très vite en liens amoureux. Au retour du Baron de Cantelou, Raoul demande la main de Mathilde. Le cruel Messire Robert accepte, à une seule condition, et pas des moindres.
Raoul doit porter Mathilde de la base d’un pic escarpé à la pointe, et en courant ! Sans hésitation et par amour pour sa bien-aimée, Raoul accepte et réussit à accéder au sommet, mais meurt d’épuisement à l’arrivée. Pour la première fois, attendri par ce drame, le Baron de Cantelou aurait fondé, en souvenir de cet amour, le Prieuré des Deux-Amants et pris l’habit en pénitence qu’il porta jusqu’à sa mort.
Une tradition locale raconte que Bonnemare aurait hébergé les rois Charles VII et Charles IX qui aimaient chasser dans cette région.
En 1555, Nicolas Leconte, marquis de Draqueville , Président du Parlement de Normandie et propriétaire du domaine, fit construire le château actuel, à l’emplacement de l’ancien manoir médiéval. Inspiré par les débuts du classicisme français, l’édifice alterne chaînes de pierres ornées de pilastres et briques polychromes à motif losangé.
La forme particulière des toitures des tourelles, qui encadrent le logis, est obtenue grâce à une charpente dite à la Philibert Delorme, Architecte du Roy” en 1548. Cette charpente du XVIe siècle est extrêmement rare dans un tel état de conservation tout en étant d’origine.
Les charpentes « à la Philibert Delorme » d’époque et encore en état sont très rares. Bonnemare a eu la chance d’en avoir conservé sur les deux tourelles ainsi que sur la voûte du Boudoir de la Chambre de Parade. Au moment de la construction, il devait y en avoir aussi sur le corps central du château, ainsi qu’en témoignent des traces à l’intérieur du grenier.
Les charpentes construites selon le système décrit par Philibert Delorme dans son « Traité sur la manière de bien bâtir à petits frais » (1561) se composent de simples arbalétriers courbes constitués par des cours de planches mises de champ dont les joints alternent et qui sont serrés l’une contre l’autre par des clés en bois et des chevilles. Ces clés, posées sur des liernes faites de planches qui traversent les arbalétriers et parfois, également, les enserrent, entrent à force dans deux mortaises creusées de part et d’autre de chacun de ces arbalétriers.
Ce procédé de construction a été appliqué aussi bien aux toitures à deux ou quatre pentes qu’aux dômes simples ou à impériale. Il présente l’avantage de mettre en œuvre des éléments de petite dimension (la longueur moyenne des planches donnée par Philibert Delorme est de 1,30 m environ).
Par contre, il a l’inconvénient de poser au couvreur des problèmes difficilement solubles car les ardoises ou les tuiles plates adhèrent mal à la courbure des surfaces, et le charpentier doit, par des aménagements judicieux, apporter à cette courbure des modifications qui lui permettent de recevoir la couverture dans de bonnes conditions. (Extrait de « Charpentes d’assemblage », vol. 1, du Centre de Recherches sur les Monuments Historiques).
Vers 1637, le domaine de Bonnemar fut acheté par Etienne de Fieux à qui l’on doit en grande partie la chambre de parade accessible à tous depuis bientôt 400 ans.
Au cours du XVIIIème siècle, deux familles se succèdent sur les terres de Bonnemare : Les Cromelin, de Villette et la famille de Charles Leblond.
Au cours de la révolution française afin de préserver leur château et tenter de conserver leurs têtes, les propriétaires décidèrent de procéder au burinage des pierres afin de masquer leurs armoiries et leur fidélité au roi.
Au XIXème siècle, d’autres propriétaires se succèdent : Louis Alexandre, banquier à Rouen, puis Louis Cavelan et enfin en 1888 Gustave Gatine notaire à Paris et aïeul des propriétaires actuels. Depuis cette date le château de Bonnemare est la propriété de la même famille.
La découverte du château de Bonnemare débute par-delà les bois par une longue allée qui mène au châtelet d’entrée, une arche flanquée de deux tourelles. Cette allée était plantée de peupliers
Malheureusement, le peuplier est un arbre qui vit en moyenne 60 ans et ils étaient arrivés en fin de vie. Après que plusieurs d’entre eux soient tombés sur la route, il a été décidé de les retirer et de replanter pour retrouver à terme une allée remarquable ainsi que la biodiversité́qu’abritait cet alignement.
Les pressoirs servaient à tout le hameau, chaque maison venait faire son cidre moyennant des « banalités ». Tout est donc prévu pour que les accès soient possibles par le grenier.
La cidrerie de Bonnemare est complète : elle comporte un grand grenier pour trier et faire mûrir les pommes auquel on accède par l’escalier extérieur.
L’usage du cidre en Haute Normandie date du milieu du XVIème siècle. Auparavant, les Normands buvaient de la bière qui était fabriquée sur place.
A Bonnemare une première presse à pommes fut réalisée par la famille Leconte de Dracqueville vers 1570. La cidrerie fut complétée un siècle plus tard par Edmond de Fieux avec un agrandissement du cellier et l’installation d’un deuxième pressoir, particulièrement imposant, celui que nous voyons actuellement.
La cuisine, au rez-de-chaussée du château, est une grande pièce chaleureuse datant de la fin du XVIème. Le sol en est dallé de pierres d’origine, posées directement sur le sol. La cheminée, typiquement renaissance, prend toute la largeur de la maison en trois arcades. Au centre, le foyer avec ses trois modes de cuisson : tournebroche , potence et four à pâtisserie de part et d’autre les fumoirs.
La chapelle est située à l’extrémité ouest du château constitué d’un grand corps de logis. Elle est orientée au sud. La chapelle date de la fin du XVIe siècle. Elle remplace une ancienne chapelle dédiée à Saint-Christophe datant du XIIIe siècle. La chapelle est construite en brique et en pierre selon un plan centré circulaire. Elle présente quatre bras en saillie percés d’un oculus.
Aujourd’hui Sylvie, Alain et Aloïs Vandecandelaere font vivre le château de Bonnemare grâce aux chambres d’hôtes, mariages, séminaires et événements. Le petit déjeuner est servi dans la cuisine du château au coin de sa cheminée monumentale.
Le château de Bonnemare est une propriété classée des Monuments historiques. (Merci à Guizmo)
tristan
18 janvier 2023 @ 04:05
Encore un superbe reportage, merci Guizmo, c’est un grand plaisir de vous lire.
😀Pistounette
18 janvier 2023 @ 07:35
Merci Guizmo pour cette belle visite
Prendre le petit déjeuner dans la cuisine du château au coin de la cheminée doit être très agréable…
Philippe H.
18 janvier 2023 @ 08:39
Merci, Guismo, pour ce très intéressant reportage détaillé.
Vieillebranche
18 janvier 2023 @ 09:02
Décidément que des merveilles aujourd’ hui ..merci !
Perlaine
18 janvier 2023 @ 09:21
Bravo Guizmo – Merci
Caroline
18 janvier 2023 @ 10:22
Merci à Guizmo !
Jamais entendu parler de ce beau château normand !
mousseline
18 janvier 2023 @ 10:29
merci Guizmo pour cette jolie visite bien commentée
Brigitte - Anne
18 janvier 2023 @ 10:40
Superbe château. Merci Guizmo.
Jean Pierre
18 janvier 2023 @ 11:47
Encore un château que je ne connaissais pas.
Merci pour la visite Guizmo.
Axelle
18 janvier 2023 @ 12:08
Un château qui m’était inconnu mais vraiment très beau, surtout les différentes pièces et le mobilier.
Pierre-Yves
18 janvier 2023 @ 13:30
Franchement charmant.
Guizmo a le chic pour dénicher et nous faire découvrir des sites que l’on connait peu, ou pas. Merci à lui !
Brigitte Anne
19 janvier 2023 @ 16:01
Pierre Yves , il me semble que Guizmo est une femme !
Calliopé
18 janvier 2023 @ 13:34
Il doit être bien agréable d’y passer un week-end en chambre d’hôtes ! Merci pour cette jolie découverte 😊
Vittoria
18 janvier 2023 @ 15:00
Très beau ! Merci.
Muscate-Valeska de Lisabé
18 janvier 2023 @ 18:30
On reconnaît la merveilleuse patoune de notre Guizmo…
C’est magnifique.
J’adore ce petit château sur la première photos où on voit les tourelles .