Avant la découverte du pétrole, les perles étaient les plus grandes sources de revenus du Golfe, dont les eaux chaudes et peu profondes ont produit les perles les plus raffinées. Grâce à la prévoyance et à la générosité d’Ali Bin Abdullah Al Owais, grand négociant en perles des années 1940 et 1950, et de son fils, le sultan Al Owais, on peut admirer nombre de ces merveilles de la nature exposées à l’Emirates NBD Pearl Museum également appelé Dubai Pearl Museum.
Des experts ont suggéré que les perles étaient échangées avec la Mésopotamie contre des céramiques et d’autres marchandises, ou portées comme des bijoux. Des récits proches du conte relatent le goût de Cléopâtre pour ce produit du Golfe, la fascination de l’empereur Caligula ou encore la passion de Catherine de Médicis pour ces mystérieux objets. Les perles du Golfe ont en conséquence connu une très précoce mondialisation, via de complexes flux de commerce : une route des perles .
En effet, les perles constituent pendant de nombreuses années l’un des seuls produits exportables et véritablement lucratifs pour les Etats du Golfe. L’élevage des chameaux, des chèvres et des moutons et l’agriculture avec la culture des dattes, définissent la production des émirats mais c’est principalement de la mer que les populations tirent de plus grands profits.
Bahreïn, le Koweït, Oman et les Etats de la Trêve (les Emirats arabes unis actuels) et le Qatar pratiquent tous la pêche de la perle depuis l’Antiquité. C’est cependant seulement à partir du XVIIème siècle que les perles du Golfe commencent à être connues des Européens, renforçant le caractère stratégique de la région. Trois espèces d’huitres perlières forment d’importants bancs à différentes profondeurs au large de la côte et assurent un certain revenu aux populations des ports.
De 1870 à 1910, le Golfe s’inscrit dans une nouvelle temporalité en raison d’une accélération quantitative du processus de mondialisation. En effet, après 1880 et l’effondrement des pêcheries de Ceylan et de la mer Rouge, les perles du Golfe dominent le marché mondial. La demande ne cesse de s’accroître, les sociétés industrialisées occidentales manifestant un goût certain pour les perles. Dès lors, les Britanniques sont confrontés dans le Golfe à de multiples tentatives de pénétration de la part de sociétés étrangères, européennes, russes ou américaines.
On compte alors environ 3 000 bateaux destinés à l’industrie de la perle dans l’ensemble des ports du Koweït, de Bahreïn et des Etats de la Trêve au XIXème siècle. Le port d’Abu Dhabi, par exemple, en comptait à lui seul 350, celui de Dubaï 300 et ceux de Sharjah et de Ras al-Khaimah 350. Dans les années 1900, 22 000 hommes étaient employés dans le secteur
L’industrie perlière a prospéré dans le Golfe jusqu’aux années 1930, date des premières découvertes de pétrole et de l’apparition des perles de culture.
Le musée nous raconte comment, une fois les embarcations amarrées, les plongeurs travaillaient toute la journée, ne s’arrêtant que pour la prière et le café. Ils plongeaient environ soixante fois par jour.
Aidés d’une grosse pierre pour accélérer leur descente, les plongeurs étaient ramenés à la surface par une corde tirée par un haleur lorsqu’ils venaient à manquer d’air. Ils restaient entre une minute et une minute trente sous l’eau, le temps de ramasser, à l’aide de gants en cuir, des huitres qu’ils entassaient dans un panier accroché à la taille.
Leur équipement se résumait à une pince en os afin de boucher le nez et à de la cire pour protéger les oreilles. Les huitres étaient ensuite ouvertes le lendemain matin (les huitres étant plus faciles à ouvrir après une nuit passée à l’air libre) et les perles sont triées sous la surveillance du capitaine. Ce travail, très éprouvant, laissait le plongeur à la merci des méduses, des requins et des raies susceptibles de le blesser avec leurs queues tranchantes
Des détails très divers sont donnés sur les temps d’apnée des plongeurs, sur les protections dont ils peuvent disposer, sur les dommages physiques causés par des immersions fréquentes dans des eaux parfois très profondes.
En plus d’exposer de sublimes pièces de joaillerie, le musée rend hommage aux vies des plongeurs et des marins grâce à des vitrines exposant les instruments et les outils qu’ils utilisaient pour récolter et transporter cette précieuse cargaison.
Les « outils » des pêcheurs sont ainsi exposés, comme leur pince-nez, le sac de tissu, porté sur le ventre, qu’ils remplissent d’huîtres, les gants utilisés pour ne pas se blesser sur les fonds marins, le couteau, véritable « faucille » des mers, qui sert à « couper », à « détacher » les huîtres des coraux auxquels elles sont fixées, puis enfin à ouvrir ces dernières, afin de recueillir la perle.
Le musée apporte aux populations du monde entier des informations et un apprentissage des traditions ancestrales des Etats du Golfe, avant l’arrivée du pétrole.
Depuis quelques années, plusieurs pays du Golfe font revivre cette pêche traditionnelle. Le Qatar célèbre cette tradition durant la semaine culturelle qu’il organise chaque année. Le Koweït a, quant à lui, créé le comité du patrimoine maritime chargé de reproduire le parcours traditionnel des pêcheurs de perles. Et le Bahreïn a interdit l’importation de perles de culture et a déposé sa candidature pour inscrire la pêche des perles sur la liste du patrimoine mondial de l’Unesco. (merci à Guizmo)
Régine ⋅ Actualité 2020, Dubai, Expositions, Joyaux 29 Comments
Nuage Pâle
29 avril 2020 @ 07:43
Les larmes d’Aphrodite. Sorties des ondes comme elle ,pures et de beauté naturelle .
Guizmo,vous êtes…. une perle .
Menthe
29 avril 2020 @ 09:57
Je n’ose imaginer le nombre de plongeurs qui ont dû y laisser leur vie 😞
Caroline
29 avril 2020 @ 22:46
Tres intéressant !
N’ y- a- t-il pas une grande concurrence avec le Japon célèbre pour la culture de ses perles?
Nuage Pâle
30 avril 2020 @ 10:58
On ne parle pas de la même chose, aucune concurrence,les perles fines sont devenues rarissimes,surexploitation,pollution .Certains États du Golfe avait interdit l’importation de perles de culture ce qui ne les empêche pas d’en vendre lorsqu’elles sont sur les bijoux de grands et moins grands joailliers. On ne trouve plus guère de perles fines que dans des ventes aux enchères . Les émirs ,et sultans en possèdent tous ,bien plus qu’une collection ,des stocks dans lesquels ils plongent voluptueusement les mains . Je n’ai pas retrouvé la vidéo qui montre un monsieur jouant avec ses perles . Mais les professionnels disent que les perles de culture ont plus de brillance ,alors tant mieux ,seule leur beauté compte pour une femme ,ce sont les hommes qui préfèrent leur valeur . Et c’est nous que l’on dit vénales !
Nuage Pâle
29 avril 2020 @ 10:11
Pour connaître un peu plus les pêcheurs de perle .
https://median.hypotheses.org/1958
Charlotte (de Brie)
29 avril 2020 @ 11:32
Ca ne donne pas envie d’acheter des perles, et pourtant je les aime !
aubert
29 avril 2020 @ 11:42
Léonor ne manquera pas de nous proposer Bizet
Jean Pierre
29 avril 2020 @ 12:53
Non taisez-vous Leonor va nous trouver un enregistrement des Pêcheurs de perles, et là elle aura beau faire ce sera sans moi. Qu’est ce que je me suis ennuyé à assister à une version concertante de ce pensum !
Leonor
30 avril 2020 @ 10:17
Aubert, Jean Pierre ,:-)) Ben voilà , z’avez gagné, c’était bien les Pêcheurs de Perles, forcément !
Va donc falloir que je dégotte aut’ chose. ;-)
Mais je vous accorde bien volontiers que, à part tel ou tel air de virtuosité ,c’est un opéra rasant.
Je ne peux quand même pas vous mettre du Guillaume de Machaut à tous les coups. Pour le coup( !), ça raserait tout le monde, sauf quelques fadas comme vous et moi.
Tiens, on va essayer ça :
https://www.youtube.com/watch?v=wEmbFSiJzEQ
Itzhak Perlman , Sarasate, Zigeunerweisen
Après tout, » Perlman »,ça signifie bien « L’homme aux perles », n’est-ce pas ? *
Bon, fallait bien que je trouve quelq’ chose… ;-)
Zigeunerweisen = Airs à la tzigane
Salut les copains, et ravie qu’on soit quelques musico-fadas.
Alinéas
29 avril 2020 @ 10:12
Merci beaucoup Guizmo pour ces quelques détaillées accompagnées d’images ; cela me fait rêver !
Alinéas
29 avril 2020 @ 10:13
Pardon.. lignes
Danielle
29 avril 2020 @ 11:11
Un musée qui me plairait.
Merci Guizmo pour cet article intéressant.
Leonor
29 avril 2020 @ 12:18
Merveilles…. Merveilles….Merveilles …
Leonor
29 avril 2020 @ 12:41
Pas d’hésitation, la Musique du Jour s’impose :
Les Pêcheurs de Perles, opéra de Bizet, l’Air de Nadir,
» Je crois entendre encore, sous les palmiers … »
C’est un défi pour ténor, un véritable exercice de technique vocale
https://www.youtube.com/watch?v=TQaySQQONXs
Ici, Roberto Alagna
Mais je crois que je préfère de loin cette version, Alain Vanzo, dont la voix s’y prête plus naturellement :
https://www.youtube.com/watch?v=5MjnIcxCz8c
En plus, sur la partition,vous pourrez suivre le texte -même ceux d’entre vous qui ne lisent pas la musique, bien sûr.
Et encore plus celle-ci, d’une grande délicatesse:
https://www.youtube.com/watch?v=luXkBdICQAc
Sheiley
29 avril 2020 @ 15:42
Le musée de la perle de Papeete, Tahiti Nui est merveilleux.
beji
29 avril 2020 @ 16:19
Les perles sont belles mais les bijoux sont moches.
ciboulette
29 avril 2020 @ 16:54
Merci , Guizmo , pour cet article intéressant .Ces perles sont merveilleuses .Mais l’autre face de cette splendeur est bien la vie des pêcheurs , constamment en danger .Merci également à Menthe .
Mer déchaînéead
29 avril 2020 @ 17:24
J aime les perles , seul ennuie ?
C’est qu’elles sont vivantes et se nourrissent sur la peau de l’être humain.
Tout au moins elles respirent !
Et prennent de l’oxygène sur nous .
Il faut les porter régulièrement, sinon elles ternissent. Elles meurent !😕 👀
Nuage Pâle
30 avril 2020 @ 10:35
Ne touchez pas aux perles ,perroquet ignorant .Elles ne sont pas vivantes puisqu’elles sont immortelles – ma logique m’appartient – Elles ont besoin d’humidité ,celle de notre peau leur suffit . De l’eau ,pas de l’oxygène. H2O ,vous y étiez presque . Il ne faut pas répéter sans savoir . Cependant celle qui sont dans les musées sur les couronnes et diadèmes ont l’air de bien se porter ;on veille à l’hygrométrie de leur environnement . 🙂
Philippe Gain d'Enquin
29 avril 2020 @ 17:45
Pour moi la perle du doux bai, ma muse amusée : c’est ma chérie…
Philippe Gain d'Enquin
29 avril 2020 @ 17:45
« BAIL » naturellement !!!
Ghislaine-Perrynn
1 mai 2020 @ 08:17
On est heureux pour vous PGE , votre muse amusée doit muser dans les allées de votre tendre et vous le musé de la muse amusée , médusé par tant de chance vous devez jouer une musette guillerette en son honneur .
Pascal🍓
29 avril 2020 @ 20:20
Très très bel et interesant article !
Merci Guizmo.
Le livre d’Albert Londres évoque cette période, il va falloir que je le lise .
Ciara
29 avril 2020 @ 22:41
l’Opéra éponyme devrait leur être dédié …
Corsica
29 avril 2020 @ 22:44
Merci Guizmo, pour cet article très intéressant, comme d’ailleurs le sont tous vos articles. Pour une fan des perles, j’aimerais avoir, comme les exécuteurs médiévaux des hautes œuvres de justice, un droit de havage qui me permettait de plonger ma main dans ce tas de perles et de repartir avec ce qu’elle pourrait contenir. 😁🤩😍
Je ne sais si certains parmi vous ont déjà lu « Dieu et nous seul pouvons » de Michel Folco, livre que j’ai adoré et qui raconte d’une façon haletante et hyper bien documentée la vie de ces hommes qui, du Moyen Âge au XX e siècle, ont accepté d’appliquer les peines de justice, notamment la mort. Tout ça au prix d’une ostracisation épouvantable ( enfants refusés à l’école, refus des commerçants de les servir d’où le droit de havage, obligation d’épouser une fille de bourreau sinon ils restaient célibataires etc.) alors que ceux qui prononçaient les sentences et le bon peuple qui réclamait à hauts cris la mort pour les délinquants, tout en se délectant des spectacles d’éxécution, rentraient tranquillement chez eux la conscience bien tranquille. Belle hypocrisie !
Mer déchaînéead
30 avril 2020 @ 11:56
Nuage Pâle , excalt.
J ai dis une absurdité ( pour l oxygène)
Puisque elles naissent et vivent dans l’eau ????
Merci , de rétablir la stricte vérité .
Nuage Pâle
30 avril 2020 @ 13:17
🌊 😘
Ghislaine-Perrynn
30 avril 2020 @ 15:58
Merci Guizmo , c’est un sujet que j’apprécie beaucoup.
Ghislaine-Perrynn
30 avril 2020 @ 20:03
Peut être Guizmo serez vous intéressée de savoir que dans les eaux du Blavet (56) fleuve qui coule du Nord au Sud se jetant à Lorient (56) il existe une variété de moules de très grand format environ 15 cms appelée la mulette perlière . Cette espèce est très intéressante car elle filtre l’eau et est en danger du fait de la qualité des perles qu’elle produit naturellement et le braconnage a été intense .
Elle est donc protégée et sa présence est un signe de qualité des eaux et de bonne reproduction des saumons .
Les perles sont très cotées.