Les fournisseurs de la Cour royale britannique

Monarchie anglaise oblige, ils sont des gages de qualité. C’est un réseau sur lequel s’appuient les Windsor pour conserver une qualité de vie made in Engand… or in Scotland !

À l’époque de la reine Victoria, on comptait un certain nombre de détenteurs de mandats royaux pittoresques, tels que le Household Spider (Araignée domestique), le Rat Catcher (Attrapeur de rats) et le Official Cobweb Cleaner (Nettoyeur officiel de toile d’araignée), et des marchands de charbon royaux étaient nommés dans chaque résidence royale d’Angleterre et d’Écosse. Ils ont aujourd’hui quasiment disparu, remplacés par des chauffagistes, des mécaniciens de climatisation et des fournisseurs d’équipements d’aspiration industrielle.

Alors que pour la plupart des nominations à la résidence royale, il faut attendre d’être sollicité, cela ne s’applique pas à une entreprise ou à un individu qui souhaite que sa candidature soit prise en considération pour un mandat royal.

Il existe des règles strictes, avant et après l’adhésion, mais la condition de base requise est d’avoir fourni des biens ou des services de manière satisfaisante pendant au moins cinq ans.

Une fois cet objectif atteint, le mandat est généralement attribué. Les détenteurs de warrants bénéficient alors d’un traitement préférentiel au moment de répondre aux appels d’offres. Ils doivent encore être compétitifs – le Garde des Sceaux y veille toujours – mais toutes choses égales par ailleurs, un titulaire de mandat sera choisi pour effectuer le travail.

Un simple coup d’œil au livret énumérant les noms et les métiers détenteurs de mandats royaux montre à quel point ils sont éclectiques, et tous ne sont pas les noms familiers que l’on associe habituellement à la High Street.

Il y a 60 ans, la société Temple and Cook Ltd, la seule quincaillerie de Belgravia, est venue à la rescousse de la maison royale lorsqu’elle a réussi à trouver dans son stock un couple de vieilles clés adaptées à une ancienne serrure du palais de Buckingham.

Ils ont fini par obtenir un mandat royal et leur relation avec la royauté est sans doute unique : le ferronnier de quartier amical de la Reine et de sa famille.

 La ville qui compte le plus grand nombre de détenteurs de mandats royaux est sans aucun doute Ballater, la ville la plus proche de Balmoral.

Presque toutes les boutiques arborent les armoiries royales et la mention « By Appointment… » (Sur rendez-vous) Les fleuristes, les bouchers, les épiciers et les marchands de gibier ont tous des raisons d’être reconnaissants envers les membres de la famille royale qui décernent des mandats, et envers ceux qui ne le font pas, mais qui y font quand même leurs achats.

Le mécénat royal n’est jamais aussi évident qu’à Ballater et il y a un avantage commercial très réel, puisque les milliers de touristes qui visitent la région chaque année affluent pour acheter dans les boutiques utilisées par la Reine et sa famille.

Un magasin se trouve littéralement à l’extérieur des portes du château de Balmoral, dans le petit village de Crathie. Il appartient à George Strachan, qui possède un magasin principal à Arboyne – où il prétend avoir la plus grande sélection de whiskies écossais au monde – 400 marques différentes – et d’autres magasins à Ballater et Braemar. Strachan’s peut faire valoir son statut d’entreprise la plus proche de toute résidence royale et détentrice d’un mandat royal.

Les femmes sont autorisées à détenir des mandats royaux depuis des siècles, mais ce n’est qu’au début du vingtième siècle qu’elles ont été autorisées à assister aux réunions de la Royal Warrant Holders Association. Jusqu’à cette date, depuis sa création en 1840, une femme ou une société détenue par une femme était autorisée à « désigner un homme pour la représenter » lors de ses fonctions.

Au dix-neuvième siècle, le nom de l’association était l’encombrant « The Royal Tradesmen’s Association for the Annual Celebration of Her Majesty’s Birthday » (Association royale des commerçants pour la célébration annuelle de l’anniversaire de Sa Majesté) et les célébrations ont pris la forme de banquets où l’on buvait beaucoup et où l’on portait de nombreux toasts loyaux aux différents membres de la famille royale.

Les Neaverson n’ont pas beaucoup profité de la présence d’un client royal ; ils vendaient déjà tout ce qu’ils pouvaient produire avant que la Reine ne leur achète.

Les garden-parties au palais de Buckingham représentent une bonne affaire pour un certain nombre d’entreprises, et pas seulement pour celles qui fournissent les gâteaux et le thé.

Depuis l’époque de la Reine Victoria, Black & Edgington, de Tower Bridge à Londres, fournit et monte les tentes et les chapiteaux sur les pelouses. Leur entreprise est énorme, et leur stock compte des milliers de tentes de toutes formes et de toutes tailles. Ils peuvent tout organiser, de l’organisation d’un goûter pour les enfants dans votre jardin aux tentes d’accueil des entreprises à Wimbledon.

Et, en qualité de fabricants de drapeaux de la Reine, ils vous vendront également un drapeau à accrocher au sommet de la tente.

Les mandats royaux sont normalement accordés pour une période de dix ans, mais à moins qu’il n’y ait eu un problème grave – le fournisseur a été mis en liquidation judiciaire ou la personne qui a accordé le mandat n’a pas utilisé ses services pendant trois ans ou plus – le mandat est généralement renouvelé.

Ces dernières années, le retrait le plus médiatisé d’un mandat royal a eu lieu lorsque le duc d’Édimbourg a décidé de ne pas renouveler le mandat qu’il avait accordé à Harrods. La raison officielle est le fait qu’il n’achetait plus rien chez eux ; officieusement, on suppose qu’une allégation de M. Al Fayed, le propriétaire du magasin, selon laquelle le prince Philip aurait été responsable de la mort de son fils Dodi (tué dans l’accident de voiture qui a également tué Diana, princesse de Galles, en 1997) est à l’origine de cette rupture.

Harrods possédait des mandats royaux des quatre membres de la famille royale qui, à l’époque, décernaient des mandats ; et les quatre armoiries étaient l’une des expositions les plus distinctives de Knightsbridge. Mais sur les ordres de M. Al Fayed, Harrod’s a cédé ceux de la Reine, de la Reine mère et du prince de Galles lorsque le duc a retiré son soutien.

Un aspect particulier du système est que, quelle que soit la taille de l’entreprise qui fournit les biens ou les services, le mandat royal est toujours attribué à un individu : soit un associé de l’entreprise, soit un directeur, qui doit résider dans le pays.

Des règles strictes visant à « préserver la dignité du mandat et à empêcher sa commercialisation » régissent à la fois l’affichage des armoiries royales et la conduite des fournisseurs.

Cependant, il ne fait aucun doute que toute entreprise capable de montrer qu’elle fournit la famille royale bénéficie d’énormes avantages. La publicité peut être ultra-discrète, mais les clients savent parfaitement que le service de table qu’ils achètent, ou l’aspirateur ou les bouteilles de champagne sont les mêmes que ceux dont bénéficient les membres de la royauté. Et c’est un sentiment que beaucoup de gens sont prêts à payer cher pour en profiter. (Merci à Bertrand Meyer)