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La porte royale est construite en 1691 par Charles Daviler, l’architecte du roi, et élève de Mansart. Elle se dresse à l’entrée de la ville, à l’extrémité d’une place royale dessinée en même temps, mais terminée au XVIIIe siècle. Elle se présente sous l’aspect d’un arc de triomphe qui n’est pas sans rappeler l’arc de Titus à Rome et quelques similitudes avec les portes royales de Paris. Bien que plus petite que la porte Saint-Denis dont elle s’inspire pour son architecture, elle mesure tout de même 15 mètres de haut et 18 mètres de large. Les 2 faces du monument sont ornées de bossages vermiculés à l’image de la porte Saint-Martin.

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Construit sur un des points les plus hauts de la ville à l’altitude de 52 mètres, elle donnait accès au Puy d’Arquinel, le lieu « pierreux » appelé Peyrou. Il a fallu pour sa construction l’extraction de plus de 120 m3 de pierres, pour la plupart venant des garrigues, notamment les carrières, des environs de Montpellier comme celles de Pignan et Saint-Jean-de-Védas.

Auparavant, un pont-levis permettait de franchir un fossé qui délimitait les remparts de la « commune clôture ». Il y aujourd’hui un pont de pierre de 28 mètres de large remplaçant cet ouvrage.

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Du fait de sa construction sur le point le plus haut de la ville, elle en est le monument le plus élevé. Les constructions environnantes devaient impérativement -et doivent l’être toujours- plus basses, à l’exception de l’église, maison de Dieu. La taille du monument symbolise la place occupée par Louis XIV: il est au-dessus de ses sujets, juste en dessous de Dieu. Sa devise: « Nec pluribus impar », « Au-dessus de tous » est tout un symbole.

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L’ornementation de cet arc de triomphe est très soignée et présente une polychromie que ne possèdent pas ses grandes sœurs parisiennes. Mais elle est tout aussi fournie en détails rappelant l’auguste personnage auquel elle est dédiée : la frise qui sépare l’arche de l’attique est ornée de beaux soleils rayonnants, un astre qui éclaire le monde de sa lumière, comme Louis XIV voulait le faire sur l’Europe.

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La frise se divise à la manière antique entre triglyphes et métopes sur lesquels sont sculptées les initiales royales, deux « L » entrelacés, en alternance avec le soleil et des attributs guerriers.

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Juste au dessous de la frise, au centre de l’arc, trône le blason du roi: d’azur aux 3 fleurs de lys d’or, autour duquel on reconnaît le grand cordon de l’ordre du Saint-Esprit. Il est surmonté de la couronne royale.

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Quatre bas-reliefs rappellent les grandes réalisations du règne et sont surmontés de trophées militaires. Ils ont été réalisés par le montpelliérain Philippe Bertrand. Ceux de la face ouest sont consacrés aux faits d’armes de Louis XIV en Europe. L’un nous présente une femme assise sur un trône et tenant le soleil dans sa main. Elle prend les clés tendues par une femme et foule un lion de son pied. Cette scène allégorique symbolise la France tenant l’emblème de Louis XIV et prenant les clés des villes de Mons et de Namur, conquises par le roi en 1692.

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De l’autre côté de l’arche centrale, on voit Hercule couronné par la Victoire, terrassant un lion et un soldat vaincu: il symbolise Louis XIV vainqueur de l’Angleterre et de l’Autriche.

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La face tournée vers la ville est identique par sa composition, à celle tournée vers l’extérieur. La porte est surmontée d’un attique portant la dédicace en latin : « Louis le Grand, dont le règne dura soixante-douze ans, a apporté la paix sur terre et sur mer après avoir séparé, contenu et s’être attaché des peuples alliés dans une guerre de quarante années ».

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Les bas-reliefs tournés vers la ville rappellent les réalisations de Louis XIV à l’intérieur du pays et en faveur du Languedoc. Ainsi peut-on admirer l’allégorie de la France sous les traits d’une femme richement vêtue, assise sur un trône, en train d’ordonner par un geste de bras à l’Océan (un vieillard appuyé sur une plante d’où s’échappent des coquillages, des perles et une branche de corail) de rejoindre la belle Méditerranée symbolisée par une jeune nymphe nue et alanguie sur un triton.

Il s’agit bien de rappeler ici la grande réalisation du règne, la jonction des deux mers (Méditerranée et Atlantique) par le canal du Languedoc (canal du Midi) creusé par Paul Ricquet en 1666. L’inscription « junctis Oceano et Mediterraneo mari » signifie « l’Océan et la mer Méditerranée sont joints et montre la volonté de Louis XIV de commander aussi à la nature.

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Le dernier bas-relief, rappelle un épisode tragique et très douloureux tant sur le plan local que national. Il se veut ici un rappel à destination des Languedociens : une femme symbolisant la Foi catholique, foule au pied un vieillard couché au sol symbolisant l’Hérésie et qui tient un masque de comédie. La Foi porte haut un calice (aujourd’hui disparu) qu’une femme vénère à genoux.

Cette scène montre l’hérésie vaincue: le triomphe de la religion catholique sur les protestants suite à la Révocation de l’Édit de Nantes (1685) voulue par Louis XIV au nom du principe que la religion du roi doit être celle de ses sujets. L’inscription « Extincta hoeresi » signifie « l’Hérésie a été vaincue » fut effacée sous la révolution.

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La ville de Montpellier s’étend au pied de la porte royale et depuis le sommet, on comprend mieux la place de Louis XIV : au-dessus de ses sujets et au-dessous de Dieu. Dans cette province du Languedoc si éloignée de Versailles, elle incarnait à elle seule la domination du roi.

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Par sa situation et sa signification, la porte royale du Peyrou est un véritable instrument de propagande à l’égard de tous ceux qui la franchissent. Elle symbolise le pouvoir absolu de Louis XIV, un roi qui domine l’Europe de sa puissance, qui domine ses sujets par ses volontés et qui domine la nature par ses réalisation. (merci à Francky pour ce reportage)