Dix ans après le décès de la princesse Lilian de Réthy, un ouvrage réalisé par la princesse Esmeralda de Belgique et le chroniqueur royal Patrick Weber « Lilian, une princesse entre ombre et lumière » vient de paraître aux Editions Racine. A cette occasion, Noblesse et Royautés a souhaité poser quelques questions à Patrick Weber.
N&R : Avez-vous connu la princesse Lilian ?
Patrick Weber : Pas de manière personnelle. Mais ce n’était pas un handicap à mes yeux. De cette manière, j’abordais le sujet de manière beaucoup plus neutre. Lilian est un personnage qui a toujours cristallisé les passions.
N&R : Aviez-vous déjà eu des contacts avec la princesse Esmeralda de Belgique avant cette collaboration ?
Patrick Weber : Oui, j’avais tourné une émission entière avec Son Altesse Royale quand je travaillais pour la RTBF. Je l’ai aussi invitée dans mon émission Palais Royal sur Bel RTL.
N&R : Comment est née l’idée du projet de réalisation de cet ouvrage ?
Patrick Weber : A la suite d’une discussion à bâtons rompus, lors d’un déjeuner! Je ne vous cache rien! Il y avait un souhait de la part de la princesse et une envie de mon côté. Nous en avons reparlé et cela nous a poussé à proposer ce projet aux éditions Racine. Il fallait aussi compter avec la date anniversaire des dix ans de la mort de Lilian pour publier le livre.
N&R : Quelles sont les moments de la vie, les réalisations de la princesse qui sont évoqués dans le livre ?
Patrick Weber : Il ne s’agit pas d’une biographie. C’est un portrait à travers le regard de la princesse Esmeralda, la fille de la princesse de Réthy et de Léopold III. Notre idée était de raconter sa vie à travers de grands épisodes: la jeunesse, la rencontre avec le Roi, le mariage secret, l’exil, le retour en Belgique, les années où elle fut presque reine, la vie à Argenteuil, les voyages, la disparition du Roi… Lilian a vécu une vie très riche. Mais son destin a toujours oscillé entre ombres et lumières, comme le dit le sous-titre du livre.
N&R : La princesse Esmeralda avait déjà publié un ouvrage qui sélectionnait des photos prises par son père le roi Léopold III au cours de ses explorations. Connaissant la passion du roi Léopold III et de la famille royale belge pour la photographie, on ne peut qu’imaginer le travail qu’a dû représenter le tri des photos pour ce livre. Avez-vous participé au choix des photos avec la princesse Esmeralda ? Qu’est ce qui a déterminé le choix des photos ?
Patrick Weber : Oui! Ce fut la plus grande partie du travail! Des milliers de documents que nous avons sélectionnés, commentés, re-sélectionnés, décrits… Ce fut vraiment passionnant et aussi terriblement frustrant. Les documents étaient d’une grande qualité et j’aurais voulu en publier beaucoup plus encore. Par ailleurs, Madame m’a donné accès à des documents très personnels, loin des portraits de cour posés. Ce fut à la fois un grand honneur et aussi une grande joie. Bien sûr, ce fut aussi très inspirant pour l’écriture de l’ouvrage.
N&R : Après avoir collaboré à la réalisation de cet ouvrage « Lilian, une princesse entre ombre et lumière », est-ce que votre perception de la princesse Lilian a changé ?
Patrick Weber : C’est vrai… Peu de femmes ont fait l’objet d’un portrait aussi caricatural. Lilian n’était pas un ange mais elle était loin d’être un démon! J’ai découvert une femme très séduisante, d’une grande curiosité intellectuelle et surtout, d’une fidélité rare. Elle était aussi en avance sur son temps. Sur de nombreux points, elle a anticipé les princesses d’aujourd’hui. Je pense notamment à l’élégance, à l’implication sociale… En revanche, elle a souffert d’être une mauvaise communicante. Son histoire personnelle la rendait méfiante par rapport aux médias.
N&R : La princesse Lilian reste encore aujourd’hui une personnalité qui divise entre détracteurs et admirateurs. Pensez-vous que cet ouvrage la fera connaître sous un autre angle aux yeux du grand public en Belgique ?
Patrick Weber : Je l’espère! Mais je le répète, à mes yeux, il n’était pas question de la réhabiliter. Plutôt de brosser un portrait conforme au regard d’une fille pour sa mère. Découvrir une autre Lilian, loin des clichés colportés depuis plus de septante ans.
N&R : De l’avis de tous ceux qui ont eu l’occasion de rencontrer la princesse Lilian, la princesse était une femme d’une grande élégance, d’un raffinement exquis, une parfaite maîtresse de maison dotée d’une fine intelligence, comment définiriez-vous la princesse ?
Patrick Weber : Elégante est le mot qui lui convient le mieux! Lilian aimait recevoir et elle accordait une grande valeur à l’amitié. Paradoxalement, elle n’était pas de naissance princière mais elle fut peut-être la plus royale des princesses de la dynastie belge.
N&R : Avez-vous le sentiment que la princesse Lilian était une femme dont la personnalité a été mal comprise à une époque donnée ? Peu de Belges, me semble-t-il, étaient au courant de son inlassable travail par le biais de sa fondation de cardiologie.
Patrick Weber : Comme je vous le disais, elle ne voulait pas communiquer. Et chaque fois qu’elle a voulu prendre la parole pour défendre son époux, le Roi l’a dissuadée de le faire. Lilian était consciente du péché originel qui était attaché à son couple. Elle l’a répété à plusieurs reprises: « dès le début, tout était joué ». L’idée du mariage en pleine guerre était maladroite. Mais Léopold et Lilian étaient amoureux et comme tous les amoureux, ils se sont sentis seuls au monde. Une histoire d’amour qui a duré quarante-deux ans!
N&R : Si vous deviez retenir une image de la princesse figurant dans le livre, quelle serait-elle ?
Patrick Weber : J’aime le côté « Janus » de cette femme. Décontractée, les cheveux au vent sur la couverture. Ou alors, en pleine majesté, éclatante d’élégance à Laeken. Ces deux visages apparemment très différents appartenaient à la même femme. Il faut éviter de coller des étiquettes aux personnages de notre histoire. Lilian a eu le malheur de s’en voir coller une particulièrement tenace et de ne jamais réussir à s’en défaire…
« Lilian, une princesse entre ombre et lumière », Esmeralda de Belgique et Patrick Weber, Editions Racine, 2012, 176 p.
chicarde
14 juin 2012 @ 06:44
Un très intéressant entretien, Régine, merci bien ! Et, en effet, comme vous l’écrivez, la Princesse était « une femme d’une grande élégance, d’un raffinement exquis » ! Toutes les photos en ont font preuve !
Pierre-Yves
14 juin 2012 @ 09:36
N’étant pas Belge moi-même, je ne suis pas en mesure de comprendre le rejet du peuple belge vis-à-vis de la princesse Lilian.
Cela ne me semble reposer que (ou principalement) sur des motifs irrationnels. La reine Astrid était la reine Astrid, mythifiée par une mort prématurée, mais elle morte, je ne vois pas où était la faute du roi Léopold de se remarier plusieurs années après. Ce n’est pas comme si Lilian était déjà présente dans la vie du roi du vivant d’Astrid, comme cela s’est vu à la cour d’Angleterre dans les années 80 et 90.
Pourquoi les Belges ont-ils été incapables d’accepter le remariage du roi, et, par voie de conséquence, sa seconde épouse, cela dépasse l’entendement.
Je peux donc comprendre que la princesse Lilina ait pu dire bvac un certain désenchantement que »dès le départ, tout était joué ».
Je sais aussi que c’était la guerre et que le peuple belge souffrait beaucoup. Raison de plus pour se réjouir d’une heureuse nouvelle privée.
Puet-être me manque t-il des éléments pour mieux comprendre cette affaire, à mes yeux un malenetendu absurde.
Pierre-Yves
14 juin 2012 @ 09:37
Pardonnez-moi, je ne me suis pas relu et ai laissé passer des fautes.
Jean I
14 juin 2012 @ 09:51
La princesse Lilian qu’on l’apprécie ou non, était une femme absolument éblouissante. Toujours élégante en toute circonstance, bref la classe totale.
Je pense aussi que la perception à son égard aurait été différente si cela avait été à une autre époque. Les temps, les mentalités changent et la perception populaire de la princesse aurait été différente.
J’apprécie beaucoup la princesse Esmeralda qui a mis à l’honneur ses parents ces dernières années. Cela a permis de mieux les connaître et de les découvrir sous d’autres angles (les missions du roi Léopold III en tant qu’explorateur).
corentine
14 juin 2012 @ 10:29
merci beaucoup Régine et merci à Patrick Weber
c’est vraiment très interressant
la princesse Lilian était vraiment une très jolie femme
je retiens des propos ci-dessus que le roi Leopold et la princesse Lilian étaient très amoureux.
Il me semble que les belges n’ont pas pardonné cela à leur roi : comment pouvait-il aimé une autre femme après la reine Astrid ?
mais en Belgique, on a déîfié la reine Astrid, on en a fait une déesse. Pourtant il ne me semble pas que son mariage avec Leopold III était un mariage d’amour ? En plus, elle était bien moins jolie que la princesse Lilian.
En fait c’est sa mort tragique et prématurée qui lui a valu ce culte et qui a valu à la princesse Lilian d’être ainsi rejetée.
Ghislaine des USA
14 juin 2012 @ 16:24
Bien au contraire, l’union entre Léopold III et Astrid fut un grand mariage d’amour comme en font foi plusieurs documents et témoignages.
Astrid était très aimée du peuple à cause de sa grande bonté et son empathie envers les autres.
Ma grand-mère belge avait gardé un souvenir impérissable de la reine Astrid lorsqu’elle l’a vue en public.
Il est vrai que sa mort prématurée lui a valu ce culte comme vous le dites très bien.
Sophie
14 juin 2012 @ 11:23
Merci à Patrick Weber pour cet entretien. le livre semble très intéressant. Et comme il dit si bien, la princesse Lilian était la plus royale de toute la famille royale, une classe folle. Quel dommage que l’opinion publique ne lui ait pas donné sa chance. Elle aurait été une merveilleuse ambassadrice de la Belgique
Anais
14 juin 2012 @ 11:52
Entièrement d’accord avec les propos de Patrick Weber. La princesse Lilian était une femme en avance sur son temps. C’est une très bonne initiative de la princesse Esmeralda que d’ « exhumer » des albums de famille des photos de ses parents. J’avais beaucoup aimé l’ouvrage consacré aux expéditions scientifiques du roi Léopold III
Caroline
14 juin 2012 @ 12:35
Ayant lu par Google la courte biographie de Patrick Weber encore assez jeune,c’est plutot normal pour son point de vue ‘conciliateur’! J’ignore s’il a consulté les ‘Sages’ de vieille souche belge pour écrire son livre!Une non-belge[bien que j’ai quelques ancetres belges qui ont fui l’Alsace envahie par les Allemands!].
marguerite
14 juin 2012 @ 14:28
ma grand mere qui l’avait vue me disait que c’etait un enchantement par sa beaute;Aucune femme
ne l’egalait en beaute.les belges n’ont pas aime que pendant la guerre ou le pays etait decime,le cardinal annonce pendant la messe le mariage du roi.Ils vivaient ensemble et les belges se sont sentis trahis.pendant que l’europe etait a feu et a sang,le roi vivait sa passion sans aucun egard pour les Belges.Il aurait du annoncer son mariage a la fin de la guerre
Jean Pierre
14 juin 2012 @ 21:36
Au fond elle a eu une belle vie. Pas commune. Brillante. Un peu une vie de star. C’est pas de la Mathilde tout ça !
Les belges ne l’aimaient pas….la belle affaire….aimait elle les belges ?
erwan
14 juin 2012 @ 22:41
Merci Régine pour cet entretien avec l’un des auteurs.
Je n’ai jamais compris le rejet dont a souffert cette très belle femme, tellement discrète, qui a si bien accompagné le roi Leopold III. Ce dernier mériterait également d’être redécouvert en le plaçant honnêtement dans l’époque.
Il y a le culte voué à la reine Astrid transformée malheureusement par certains en idole. Ses enfants ont pourtant été heureux avec la princesse Lilian.
Il me semble qu’un tel rejet populaire, politique, aristocratique ressemble à une manipulation dans un pays dont la démocratie était frêle quand les communautés s’affrontaient déjà.
rejean bergeron
15 juin 2012 @ 01:36
pourquoi la princesse lilianne n’a pas le titre de reine étant la femme du roi
Saowyn
16 juin 2012 @ 01:02
Le trio Leopold-Astrid-Llianne semble avoir susciter les mêmes réactions que celles suscitées par le trio britannique: Charles-Diane-Camilla
erwan
16 juin 2012 @ 21:08
Celà n’a rien à voir. Il est inutile de comparer pour affirmer.
La duchesse de Cornouailles semble avoir rencontré la sympathie de tout un peuple.
Je regrette l’absence de réactions belges sur ce sujet. C’est surprenant.
Mélusine
17 juin 2012 @ 12:42
Peut-être était-elle trop belle pour être aimée (sauf par l’élu de son coeur, bien sûr).
Marine
19 juin 2012 @ 21:47
Je suis belge et je confirme, ici Lilian est mal aimée.
A tord j’en ai bien conscience, mais cela persiste, c’est incroyable, et la parallèle avec Camilla (qui était détestée et que tout le monde semble apprécier maintenant) est intéressant, je n’avais jamais fait le rapprochement.
Quand on y réfléchit, quand il arrive un malheur à un couple dans la fleur de l’âge, avec déjà 3 beaux enfants et avec encore toute la vie devant eux, c’est intolérable. Le peuple a eu du chagrin avec son roi. Et le peuple s’est senti abandonné par son roi dans le double chagrin qu’il vivait (mort d’Astrid + guerre ensuite)
Au lieu de se réjouir pour son roi et pour les enfants (qui retrouvaient une présence féminine, si petits ce n’était pas négligeable), le peuple a choisi de détester Lilian.
Je pense que la Belgique aurait presque préféré avoir un roi seul et triste jusqu’au bout plutôt que de voir que le roi était simplement humain, et que lui aussi pouvait refaire sa vie (les gens ont je pense cru que c’était au sens propre un « conte de fées » avec Astrid, un vrai mariage d’amour comme c’était rare à l’époque et que ce n’était certainement pas la mort qui pouvait mettre un terme à cela !
De plus, cela ne s’est pas arrêté là, parce que la descendance de Lilian et Léopold est comme « rayée de la carte » ici en Belgique, pour les non-initiés. En effet, il n’est vraiment pas rare de croiser des personnes qui ignorent complètement l’existence des 3 derniers enfants de Léopold (Alexandre, Marie-Christine et Marie-Esméralda) Pour beaucoup de gens, Léopold a 3 enfants, et sa femme est morte très jeune, fin de l’histoire. Depuis quelques années pour les plus initiés il y a bien Esméralda qui passe de temps en temps à la télévision (toujours pour faire revivre le souvenir de ses parents) mais le prince Alexandre était rarement abordé de son vivant (depuis qu’il est décédé, sa veuve la princesse Léa est apparue souvent avec la famille royale par contre) et pour parler de la princesse Marie-Christine, carrément absente mais je pense que c’est volontaire de sa part.
C’est l’analyse que j’en ai, vu d’ici…
Et une petite chose bête à laquelle je viens de penser en terminant ce commentaire, c’est qu’ici, il y a beaucoup de petites Louise, Joséphine, Charlotte, ASTRID, Paola mais jamais je n’ai croisé de petite Lilian (pas de Fabiola non plus vous me direz, et celle-ci n’est pas détestée pourtant)
Un petit Belge
12 janvier 2016 @ 20:54
Plus d’infos sur ce livre : http://familleroyalebelge.blogspot.be/2013/06/lilian-une-princesse-entre-ombre-et.html