Parution dans quelques jours en espagnol du livre « Juan Carlos I. El hombre que pudo reinar » par Fernando Onega. Il s’agit d’un livre retraçant le parcours de Juan Carlos de son long chemin jusqu’à son accession au trône et à la restauration de la monarchie en passant par le coup d’Etat du 23 février 1981 puis jusqu’à la décision de son abdication. Le roi Juan Carlos se confie d’ailleurs pour la première fois à ce sujet.
On apprend que les sondages commandés par le Palais de La Zarzuela après l’épisode désastreux de sa chasse à l’éléphant au Botswana (où il se cassa le col du fémur) minaient beaucoup le roi qui voyait sa popularité s’effondrer.
A cela, des problèmes de santé récurrents dont l’opinion publique ne mesura pas l’ampleur. Ainsi, après son opération du col du fémur, le souverain éprouvait d’énormes difficultés à se mouvoir et de très vives douleurs qu’ils devaient gérer alors qu’on exigeait de lui des exercices de rééducation. Finalement, les médecins s’aperçurent d’une très grave infection qui était en passe de se transformer en septicémie. La nouvelle opération qui consistait à placer une prothèse temporaire visant à enlever l’infection (avant de placer la bonne nouvelle prothèse) fut donc déterminante et beaucoup plus délicate que ce qui avait été annoncé officiellement.
Au cours de l’année 2013, le roi Juan Carlos demanda au chef de la Maison Royale Javier Spottorno de se renseigner sur les conditions constitutionnelles pour pouvoir abdiquer en faveur de son fils Felipe. Tout fut mené dans le plus grand secret.
Lorsque le roi eut ses apaisements sur la possibilité de le faire et la manière dont les choses se passeraient, il attendit le moment, son moment. Janvier 21014 lors de son discours de voeux à l’armée au Palais royal de Madrid, il s’embrouille dans le texte. La veille, il a longuement répondu personnellement au courrier qui lui été adressé pour les fêtes de fin d’année. Il a peu dormi et est déjà accablé par sa hanche qui ne se remet pas bien. Le manque de clarté dans la salle du Palais n’aide pas non plus. Juan Carlos en est mortifié. Sa décision est prise. Il faut maintenant choisir le bon moment pour l’annoncer.
Mais se sachant déjà libéré à terme de ce qui est devenu un poids, il entame une série de visites dans le Golfe Persique ce que tous interprètent comme un regain de vitalité à mille lieues donc d’une abdication.
Après les funérailles de l’ancien Premier Ministre Adolfo Suarez, le roi Juan Carlos s’entretient avec le Premier Ministre Mariano Rajoy et lui fait part de sa décision. Le chef de l’opposition socialiste est aussi informé deux jours plus tard. Le roi veut s’assurer que le Parlement votera bien la loi permettant d’abdiquer.
Un petit noyau est désormais informé mais deux autres personnes l’apprennent, l’annonce est avancée d’une semaine. L’entourage du roi ne veut pas laisser le temps aux spéculations qui pourraient mettre sur le tapis le début sur la monarchie ou la république au vu du contexte économique délicat et de la grogne dans la rue.
Le prince Felipe revient d’une visite en Amérique du Sud et la reine Sophie est à New York mais l’annonce a lieu, prenant tout le monde par surprise.
Qu’a ressenti Juan Carlos au moment d‘abdiquer ? « Le mot émotion est probablement un peu restreint. Ce sont des sentiments contradictoires : la satisfaction du devoir accompli et la douleur de l’aurevoir ; la peine de pense que je me retirais et la fierté d’un père de voir que son fils était désormais là » confie-t-il.
Dans cet ouvrage, Juan Carlos aujourd’hui beaucoup plus apaisé et se sentant mieux au niveau de sa santé, revient aussi sur le moment où il apprit de la bouche du Général Franco qu’il serait son successeur au détriment de son père le comte de Barcelone. Un choix cornélien mais qui n’en était pas réellement un puisque c’était la seule chance de rétablir la monarchie.
Juan Carlos évoque aussi le coup d’état militaire du 23 février 1981 dont il ne connaît toujours pas à ce jour toute la trame. Il a des propos de gratitude envers le leader du parti communiste Santiago Carillo même si cela ne plaît pas à tout le monde précise-t-il. Il lui est reconnaissant d’avoir attendu et de lui avoir fait confiance. Le roi lui avait promis que le parti communiste serait légalisé mais qu’il fallait attendre le bon moment. Sinon, cela aurait pu être le chaos dans le pays redoute encore Juan Carlos.
Des propos aussi très affectueux pour Felipe Gonzalez, chef du gouvernement socialiste avec qui il a conservé une grande amitié. Enfin, Juan Carlos explique que ce qui le minait était le fait que la peine de mort était en vigueur au début de son règne. Il dut attendre l’adoption d‘une nouvelle constitution pour que celle-ci puisse être abolie.
L’auteur explique qu’aujourd’hui Juan Carlos d’Espagne est serein mais est un homme fort seul : son mariage est brisé depuis longtemps, sa fille chérie Cristina est embourbée dans les affaires judiciaires et vit à Genève, l’infante Elena a sa propre vie, il garde un contact affectueux avec le roi Felipe mais les relations ont parfois été juste cordiales (depuis son mariage avec Letizia) et puis beaucoup d’amis lui ont tourné le dos au fil du temps, des amis mal choisis selon l’auteur.
« Juan Carlos I. El hombre que pudo reinar », Fernando Onega, Editions Plaza Janes, 2015, 360 p.
ARAMIS
30 décembre 2014 @ 09:41
Il fut et reste un très grand roi, le seul qui aux yeux du monde a pu prouver qu’on peut être roi et authentiquement démocrate, car le seul qui a du, su et pu protéger son royaume contre un coup d’Etat militaire.
Un safari malencontreux de quelques jours en fin de parcours doit il faire oublier quarante ans d’un règne qui conforta la démocratie en Espagne et put accompagner une évolution de la société au regard de laquelle la France fait figure de pays totalement crispé, incapable d’évoluer sans heurt, à l’image des déclarations publiques de ses prétendants, fussent-ils aînés ou cadets ?
Des infidélités ? C’est commun chez les rois…à qui on ne demande pas d’abord des vertus domestiques, mais l’autorité et le sens de l’Etat.
Ce qui m’attriste, c’est de voir un roi aussi beau, sportif et dynamique être devenu aussi handicapé à un âge où beaucoup de ses contemporains ont la chance de pouvoir poursuivre des activités nombreuses de toute nature.
Vive l’euro qui nous permet d’utiliser quotidiennement des pièces sur lesquelles figure un fils de Louis XIV dont le sang est intimement mêlé au sang des Orléans.
Et pour finir…Viva el rey !
marie.françois
30 décembre 2014 @ 14:43
Eh, oui, Aramis, les peuples sont ingrats !
Cosmo
30 décembre 2014 @ 17:11
Cher Aramis,
Il y a fort à parier que le souvenir que laissera Juan Carlos ne sera fait que de gloire et de grandeur. Oubliée la chasse à l’éléphant et autres « palombes » ! Peccadilles comparées à ce que fut son vrai rôle aux yeux de l’Histoire !
Un grand roi d’un grand pays !
On l’imagine mal, si l’Histoire avait placé Louis de Bourbon sur le trône d’Espagne, louchant sur le trône de France. Ayant prêté serment à l’Espagne, il n’aurait certainement pas fait une double allégeance.
Amicalement
Cosmo
bl-r
30 décembre 2014 @ 22:35
Viva el Rey!
patricio
30 décembre 2014 @ 13:15
Un grand roi que don Juan Carlos.
Un roi qui a su se défaire du pouvoir absolu du début du règne pour devenir un monarque parlementaire et démocrate!.
L ‘Espagne lui doit tout, pour moi c’est le plus grand roi que nous ayons eu depuis longtemps.
Son fils , notre roi don Felipe VI, sera aussi un grand, car très bien formé par son père.
les espagnols sont ,d’après un dernier sondage, satisfait à plus de 70 % de notre nouveau roi pour le début du règne.
Nous avons toute confiance envers don Felipe, et son message de Noel a été unanimement salué par les differents partis politiques , mais aussi par la grande majorité des espagnols, et surtout par les jeunes.
Amitiés
patricio
Milena K
2 janvier 2015 @ 02:35
Je pense que la reine Sofia a aussi joué un grand role dans l’éducation et la formation de Felipe VI.
Jean Pierre
30 décembre 2014 @ 13:31
Le livre sur Juan Carlos reste encore à écrire visiblement.
Mayg
30 décembre 2014 @ 14:01
Ce qui est le plus frappant, c’est le dernier paragraphe où l’on parle d’un homme seul.
Pour ce qui concerne son mariage brisé, il ne peut s’en prendre qu’a lui même. Par contre les relations avec ses enfants, surtout celles avec son fils unique depuis son mariage avec Letizia laissent sans voix…
Caroline
30 décembre 2014 @ 23:11
Mayg,
Comme vous,j’ai été assez peinée d’avoir lu le dernier paragraphe sur la solitude d’un ex-roi!
Espérons que les Espagnols n’ont pas la mémoire courte pour ne pas oublier le passé ‘royal’ de Juan Carlos d’Espagne!
Gérard
30 décembre 2014 @ 16:06
Cher Aramis, je ne partage pas vos sentiments sur les prétendants au trône de France dont les déclarations, quelle que soit leur manière, reflète leur pensée et la pensée d’une grande partie de l’opinion française, pensée que l’on peut voir d’une manière plus positive comme une déclaration d’amour pour la vie et pour la famille.
Néanmoins et surtout merci beaucoup pour cet hommage rendu au roi Juan Carlos, hommage mérité pour cet homme qui a été le plus grand roi d’Espagne depuis Charles III et qui demeurera comme un phare dans l’histoire de ce pays.
Je le dis d’autant plus volontiers que comme la plupart de mes contemporains je m’étais lourdement trompé sur son compte quand il a accepté la succession du général Franco et de prendre la place d’un père qu’il aimait tendrement.
Mais très vite aux yeux du monde et de l’Espagne il a su s’affirmer, secondé magnifiquement par la reine bien entendu, et les Espagnols, qui avaient peut-être choisi la monarchie par peur de l’avenir, ont clairement pendant des dizaines d’années plébiscité leur roi au point qu’on a pu dire qu’ils étaient devenus plus juancarlistes que royalistes.
aubert
31 décembre 2014 @ 15:01
Gérard je ne partage pas la première partie de votre commentaire même si je ne doute pas de l’honnêteté des positions prises par les princes quant au mariage pour tous.
La vérité est que lorsqu’on représente un principe basé sur la transmission héréditaire et naturelle il est difficile d’applaudir le mariage pour tous et la filiation qui peut en résulter.
Les princes s’ils voulaient parler ne pouvaient pas dire autre chose que ce qu’ils ont dit. S’ils ont un mérite il est ailleurs.
Gérard
31 décembre 2014 @ 20:01
Votre deuxième paragraphe Aubert vient d’une réflexion assez juste mais je ne crois pas que ce soit le fondement des prises de position des princes.
Gérard
30 décembre 2014 @ 16:07
reflètent et non reflète…
HRC
30 décembre 2014 @ 17:09
cher Aramis, j’admire.
COLETTE C.
30 décembre 2014 @ 20:24
Il ne faut pas oublier ce qu’il a fait de positif pour son pays. Reste que c’est un homme bien seul maintenant.
aggie
31 décembre 2014 @ 09:33
Vous avez raison de défendre le bilan du roi Juan Carlos qui a rétabli la démocratie en Espagne, ce que personne n’attendait de lui au départ ; dommage que sa fin de règne ait été gâchée ainsi. La monarchie doit énormément aussi à la reine Sofia qui a su, à l’image d’Elisabeth II, « never explain, never complain » et dieu sait que ça n’a pas du être facile.
Pour les relations relâchées entre le père et le fils après son mariage avec Letizia, il serait intéressant d’en connaître les causes.
france75
31 décembre 2014 @ 18:18
quel homme magnifique et quel grand roi son fils ne lui ressemble pas je lui souhaite de reussir mais 2015 avec les proces s annonce assez mal
Ontheroadagain
1 janvier 2015 @ 10:31
Un bon début de règne, mais un laisser-aller au fil du temps qui a entraîné une mauvaise fin de règne…
Francine du Canada
1 janvier 2015 @ 14:36
Je partage l’opinion de Cosmo et aussi celles de Patricio et de Gérard; Juan Carlos fut un très grand roi et les fautes commises dans sa vie personnelle et à la fin de son règne n’y changeront absolument rien car tous les humains commettent des erreurs. Un grand démocrate qui aura laissé sa marque dans l’histoire. FdC
Albane
1 janvier 2015 @ 20:28
On l’a beaucoup critiqué mais il a bien travaillé pour son pays et pour la monarchie espagnole après Franco.
Il est quand même resté longtemps sur le trône et c’est peut-être cela qui, vieillesse aidant, lui a fait commettre des erreurs. Il a souffert avec sa maladie et le poids du royaume et il y a eu des drames dans sa vie. Il ne faut pas oublier qu’étant jeune, il a tué accidentellement son frère. Imaginez l’horrible souffrance, le sentiment de culpabilité qui a du l’habiter !
C’était un grand roi qui ne sera pas oublié.
Maintenant, il vieillit très vite, je trouve.