Fadi El Hage, docteur en Histoire, est l’auteur de précédents ouvrages remarqués dont une « Histoire de maréchaux de France » (Prix d’histoire militaire 2011) et « La Guerre de Succession d’Autriche ». Dans « Le sabordage de la noblesse », il s’interroge sur l’état de la noblesse au 18ème siècle. A Versailles, le roi Louis XVI, perçu comme un despote, est entouré de courtisans.
C’est le roi Louis XIV qui fit venir la noblesse à la Cour. Ne pas y être, signifiait se priver des faveurs du roi. La bourgeoisie y était aussi présente. Pour rester dans les bonnes grâces du roi, la tentation pour un noble était forte de faire des entorses au service attendu.
La question posée est la suivante : la noblesse a-t-elle provoqué sa propre chute ? « Rongée par les dissensions internes, minée par les rumeurs et les scandales, contestée dans sa légitimité à revendiquer une supériorité sociale, la noblesse paraissait au plus grand nombre indigne de sa vocation à servir le royaume ».
L’abolition de la noblesse héréditaire le 19 juin 1790 au cours d’une séance nocturne en l’absence de beaucoup députés de la droite, se fit souligne l’auteur avec des protestations mais sans provoquer de résistance particulière.
« L’abolition de la noblesse était-elle en fait une tentative ratée de retour aux sources ? Les jeunes nobles avaient-ils suffisamment confiance en leurs mérites pour rebondir et retrouver la vertu, qui, à défaut d’être purement héréditaire, aurait été attestée par leurs propres actions pour la patrie ? Acter le sabordage de la noblesse, était-ce autant une volonté politique égalitaire que le défi aventureux de certains gentilshommes qui pensaient avoir perdu par leurs jouissances et privilèges la substance de ce qui avait fait l’identité de leurs familles ? »
Et l’auteur de revenir sur l’arrivée au pouvoir de Bonaparte. « La révolution avait ainsi concrétisé l’idéal du mérite revendiqué par l’ancienne petite noblesse. Ne restait alors plus qu’à attendre le retour à un ordre politique plus stable, dessein majeur d’une révolution, pour consacrer de nouvelles élites, amalgament l’ancienne et la nouvelle France. Pour consolider son pouvoir, Bonaparte l’avait parfaitement saisi ».
« Le sabordage de la noblesse. Mythe et réalité d’une décadence », Fadi El Hage, Editions Passés composés, 2019, 252 p.
Karabakh
15 avril 2019 @ 16:23
La plupart des descendants de nobles français, actuellement installés en Belgique pourraient répondre à la première question. Du point-de-vue même de « noble » étranger (tenant cela d’un autre pouvoir souverain), cette question est solvable. Il est clair que la noblesse française s’est sabordée seule, par l’abus de ses (trop) nombreux privilèges et l’appesantissement sur les gloires de ses pères et aïeux. Le proverbe dit qu’à vaincre sans péril, on triomphe sans gloire mais il devrait ajouter qu’à ne pas combattre soi-même et vivre sur les acquis de ceux qui nous ont précédé, on chute indifféremment. C’est exactement ce qui s’est passé mais, à juger sur certaines preuves fournis par les « nobles » actuels, la leçon n’est pas si bien passée, à l’encontre des espérances des révolutionnaires.
Aujourd’hui, la noblesse française est une idée aussi morte que la monarchie, c’est-à-dire, quasiment éteinte. La plupart de ses descendants en est conscient et, avec une grande intelligence, ne revendiquent plus rien. C’est bien ainsi.
Je lirai ce livre.
Clara
15 avril 2019 @ 21:39
…’ faire des entorses au service attendu » ????
Caroline
15 avril 2019 @ 21:56
J’ aimerais lire les réactions des nobles à la suite de la parution de ce nouveau livre !
Baboula
16 avril 2019 @ 17:53
Je suis déçue par le peu de réactivité de nos nobles lecteurs. Le sujet pouvait permettre un beau débat.
Karabakh
18 avril 2019 @ 22:51
Regardez donc le premier commentaire.
Je n’en ai pas l’air mais bon…
HRC
16 avril 2019 @ 11:41
de servir par les armes, principalement, la raison d’être initiale de la noblesse.
Guy Coquille
17 avril 2019 @ 05:04
Au moment de la révolution, la quasi totalité des esprits en a intériorisé les idées depuis longtemps. L’Ancien Régime est un corps sans volonté ni conscience. Y compris en ce qui concerne les trois ordres. C’est une fois la révolution accomplie et l’ordre social millénaire englouti que la pensée va mobiliser la volonté et mettre en doute le bien fondé des faits survenus. Nous en sommes toujours là aujourd’hui.