Lors du Salon « Ecrire l’Histoire », l’auteur Jean des Cars a présenté son ouvrage « Siècle des sacres » de la reine Victoria en 1838 à celui du roi Felipe VI d’Espagne en 2014. Un ouvrage qui comporte un très riche iconographie.
« Siècle des sacres », Jean des Cars, Perrin, 2016, 256 p.
Zeugma
20 novembre 2016 @ 10:39
Il me semble que les rois d’Espagne ne sont ni sacrés ni couronnés. Ils sont intronisés.
Bon, je laisse les spécialistes – nombreux sur « Noblesse & royautés » – s’exprimer éventuellement sur le sujet.
Régine
20 novembre 2016 @ 10:55
C’est le titre de l’ouvrage mais cela varie évidemment selon les pays (couronnement, prestation de serment,…)
aubert
20 novembre 2016 @ 11:19
Etonnant que Jean des Cars, auteur distingué, qui appartient à une ancienne famille de la noblesse française parvenue (ou presque) au duché, utilise un terme pas tout à fait approprié.
CLAIRE
20 novembre 2016 @ 13:11
Je suis d’accord avec votre remarque aubert même si à l’intérieur, il différencie peut-être (et je l’espère…) les différentes royautés.
Actarus
20 novembre 2016 @ 17:00
Le titre ducal n’est que de courtoisie car, comme nous l’apprend une recherche ‘internautique’, « Les Pérusse des Cars sont faits comte-pair en 1817 puis ducs-pairs le 30 mai 1825. Pour ce dernier titre les lettres patentes n’ont pas été scellées en raison de la révolution de 1830. La transmission en est donc irrégulière. »
Il est néanmoins permis de se demander pourquoi, en l’espace de cinq ans et trois mois, l’administration de Charles X n’a pas trouvé le temps de rédiger les lettres patentes idoines. Un titre ducal octroyé sans validation par les LP, est un peu comme une loi républicaine votée mais dont le décret d’application n’aurait pas été pris. ;-)
Seule la Reine a été sacrée. Haakon VII de Norvège a été couronné (j’en ai parlé ici même) mais la pratique a été abandonnée dès l’accession d’Olaf V. Les magistrats sont assermentés. La prestation de serment d’un monarque constitutionnel n’a pas la même valeur qu’une onction sacramentelle. Mais je conçois que pour des raisons de marketing, le comte Jean de Pérusse des Cars, dit le « duc de Cars », ait choisi un titre plus vendeur. ;-)
Gérard
22 novembre 2016 @ 17:04
Jean-François de Pérusse né en 1747, lieutenant général, premier maître d’hôtel du roi Louis XVIII, fut créé duc des Cars à titre personnel (à brevet) le 8 mars 1816 (lettres patentes du 29 décembre 1817) et le titre s’éteignit donc avec lui en 1822.
Un deuxième titre de duc personnel fut créé le 30 mai 1825 pour Amédée François Régis (1790-1868), comte des Cars, qui avait hérité en 1822 du titre de comte et de la pairie de son père François Nicolas Louis René (1759-1822), comte des Cars, lieutenant général, créé pair de France les 17 et 19 août 1815.
Amédée François Régis fut fait ensuite duc pair héréditaire les 11 et 14 avril 1830 mais les lettres patentes qui avaient été préparées en juillet 1830 ne purent être scellées et comme le titulaire refusa le serment à Louis-Philippe, il retira sa demande de lettres patentes, avant de devenir le représentant du comte de Chambord en France. Comme l’écrivait Guy des Cars « Le manteau de duc qu’ils allaient revêtir leur glissa des épaules en 1830 ».
Les successeurs d’Amédée François portèrent cependant le titre de duc des Cars, même s’ils n’eurent pas le manteau de pair « En ont-ils vraiment besoin eux qui sont si ancien, illustres et grands ? Ils portent toutefois le titre aujourd’hui et ils l’ont toujours fait, fondant sans doute la légitimité de leur titulature sur leur fidélité aux Bourbon et, si le Juge d’armes ne peut les reconnaître, le célèbre Almanach de Gotha toujours aussi les a inclus dans les maisons ducales » (Étienne de Séreville et Fernand de Saint-Simon, Dictionnaire de la noblesse française, 1975).
Actarus
20 novembre 2016 @ 17:07
Bon, erreur de ma part, ce n’est pas lui le « duc » de la famille. Je suis cependant curieux de savoir de quelle façon il présente les « sacres » démocratiques de nos chères têtes autrefois couronnées. ;-)
Gérard
21 novembre 2016 @ 21:09
Oui son père Guy des Cars le romancier était fils de duc, frère de duc et oncle de duc.
Corsica
20 novembre 2016 @ 18:05
Peut-être parce que « sacres » est plus vendeur auprès du petit peuple qu’intronisations ou prestations de serment.
aubert
20 novembre 2016 @ 11:13
Tout croyant comprend qu’il y a une énorme différence entre un sacre et un couronnement et tout démocrate une subtile différence entre un couronnement et une prestation de serment.
Hélène
20 novembre 2016 @ 10:39
Un très beau cadeau pour Noel
ciboulette
20 novembre 2016 @ 16:15
C’est justement ce à quoi je pensais , Hélène !
Gérard
20 novembre 2016 @ 12:35
Effectivement les sacres ne sont plus très nombreux et les couronnements non plus mais j’imagine que c’est plus vendeur.
Parella
20 novembre 2016 @ 14:08
Comment Jean des Cars, dont la famille s’illustra tant au cours de ce que les républicains appellent avec mépris » l’Ancien Régime « , peut-il ignorer que SEUL LE ROI DE FRANCE était sacré ? Comme disait ma concierge, » Tout foul’camp, ma pov dame » !
aubert
21 novembre 2016 @ 17:04
Vous semblez croire que Dieu est catholique et seulement catholique.
Les anglicans pensent qu’il est anglican !
Gérard
22 novembre 2016 @ 17:14
Le roi de Tonga est également sacré qui n’est pas catholique mais qui est chrétien.
Quant à Dieu bien sûr il est au-dessus de tout, et il pourrait en effet être catholique au sens universel du terme puisqu’il est maître du temps et de l’espace.
aubert
23 novembre 2016 @ 15:31
Il me semble Gérard que votre réponse est plutôt destinée à Parella.
Actarus
24 novembre 2016 @ 14:51
Gérard aime la paella ? Moi qui le croyais plutôt amateur de boeuf bourguignon, avec un soupçon d’armagnac. ;-)
AnneLise
21 novembre 2016 @ 21:31
Curieux titre, certes surtout si l’on termine la série par Felipe VI qui n’a pas été couronné et à plus forte raison sacré !
Parella, effectivement les Rois de France étaient sacrés, Napoléon 1er a reçu l’onction du Pape et s’est couronné puis a couronné Joséphine.
Toutefois en Europe et en ce siècle il y eut plusieurs Monarques britanniques qui reçurent l’onction Edouard VII, Georges V, Georges VI et Elizabeth II, on peut donc les considérer comme ayant été sacrés.
Il n’en n’est pas de même pour les autres monarques européens qui prêtent serment ou sont intronisés.
N’ayant pas lu l’ouvrage je ne saurais dire comment Jean des Cars a traité le sujet.
Gérard
22 novembre 2016 @ 23:39
Comme les rois bibliques les empereurs du Saint-Empire étaient sacrés, les rois d’Angleterre, autrefois ceux de Castille, de Russie, de Portugal, de Pologne, de Danemark, de Suède, et d’autres rois. Les reines de France aussi et souvent à Saint-Denis et la dernière fut Marie de Médicis le 13 mai 1610. Joséphine aussi fut sacrée le 2 décembre 1804.
Charles et Zita furent sacrés à l’église Matthias de Budapest le 30 décembre 1916.
Gérard
22 novembre 2016 @ 23:56
En ce qui concerne Joséphine, après le sacre de Napoléon et la triple onction, l’une à la tête, les autres dans les deux mains par le pape récitant l’oraison avec les évêques qui avaient leur mitre sur la tête, « Sa Sainteté a fait ensuite les mêmes oraisons à l’Impératrice, en récitant avec les évêques l’oraison suivante : « Que Dieu le Père, auteur et source de toute gloire, soit votre soutien ; que le Tout-Puissant vous bénisse ; qu’il exauce vos vœux et vos prières ; qu’il prolonge le nombre et la durée de vos jours précieux ; qu’il répande sur vous les trésors de sa grâce, et vous conserve à jamais avec tout le peuple français ; qu’il couvre de confusion vos ennemis ; qu’avec cette huile sainte répondue sur votre front, la grâce sanctifiante de Jésus-Christ pénètre votre cœur, afin que celui qui vous fait régner sur la terre, vous couronne un jour dans le Ciel avec les Anges. Soyez à jamais comblée des bénédictions que nous a méritées pour la vie éternelle, Jésus-Christ notre Seigneur, qui vit et règne dans les siècles des siècles. Ainsi soit-il. »
aubert
23 novembre 2016 @ 15:42
Gérard, votre commentaire ne semble concerner que Joséphine puisque à l’avant dernière ligne vous écrivez – comblée – au féminin.
La triple onction a-t-elle aussi été donnée à Napoléon ? On nous raconte depuis toujours que l’empereur s’empara de la couronne pour se couronner lui-même, mais le Saint-Père l’avait-il oint auparavant ? Dans l’affirmative le titre du fameux tableau de David est bien exact et les propos désobligeants sur la – figuration – du pape ne sont que propagande athée et républicaine.
Gérard
25 novembre 2016 @ 18:50
Oui Napoléon a été sacré Aubert.
Gérard
26 novembre 2016 @ 13:03
Dans son introduction à son ouvrage Le Sacre et le couronnement de Napoléon (Paris, Albin Michel, 1925) Frédéric Masson écrivait : « Parce qu’il avait été sacré par le Pape, Napoléon a considéré qu’il était revêtu d’un caractère ineffaçable, qu’il était devenu un souverain égal à tous les souverains, qu’il ne pouvait point être discuté comme tel, qu’il était l’oint du Seigneur, et que, si son empire n’avait point reçu une institution divine, il s’en fallait de peu. On ne saurait dire qu’il le crût mais il prétendait au moins le faire croire, et, en vérité, des illusions qu’on donne à celles qu’on prend, le pas est si vite franchi qu’on peut se demander si ici il ne l’a pas été. »
Dans l’ouvrage l’académicien insiste sur la longueur de la cérémonie, le froid que le l’on ressentait en ce dimanche 2 décembre. « Selon l’étiquette adoptée, si longuement discutée, la cérémonie se déroule ; aucun recueillement ; on a froid, on a faim, quoiqu’il se soit glissé dans l’église des marchands avec des petits pains et de la charcuterie ; sauf des tribunes, dans le chœur, encore celles du rez-de-chaussée et du premier étage, on ne voit rien de la cérémonie qui s’accomplit dans le chœur. Heureusement a-t-on la musique, la messe et le Te Deum à double dessin, composé tout exprès par Païsiello, où Lesueur a intercalé des morceaux de sa façon : l’Uxerunt Salomonem, l’Accingere Gladio, le Judicabit, le Veni Sancte Spiritus et l’abbé Rose son Vivat déjà fameux. Que de musique ! Pour les parties d’orchestre, on a copié et on exécute 17 738 pages de musique !
Ainsi que l’a voulu Napoléon, la première partie de la cérémonie n’est vue dans ses détails que « par des prêtres ou par des hommes qui, par la supériorité de leur raison, ont autant de foi que dans le VIIIe siècle ». Ainsi, le serment, les onctions, la bénédiction et la tradition des ornements passent inaperçus. À peine si l’on a distingué l’Empereur, lorsque montant à l’autel et se tournant vers l’assistance, il s’est couronné lui-même ; il a disparu lorsque, descendant les degrés il est venu couronner l’Impératrice. La marche vers le grand trône pour l’intronisation produit de l’effet : l’Impératrice gravit les cinq premiers degrés, et, alors, le poids du manteau qui n’est plus soutenu par les princesses, restées en bas des marches, la fait chanceler, manque l’entraîner et la précipiter en arrière. Elle doit pour se redresser et continuer l’ascension faire appel à tous ses nerfs. Les porteuses de queue ont-elles médité cette vengeance ? On l’a cru ; ce qui les innocente, c’est que pareille aventure arrive à l’Empereur ; il chancelle, lui aussi, on le voit faire un léger mouvement en arrière ; mais, par un élan vigoureux, il se reprend et lestement gravit les degrés.
Lorsque, après l’intronisation, le Pape, baisant l’Empereur sur la joue, prononce le Vivat Imperator in æternum, on comprend peu et l’on ne crie guère ; d’ailleurs, les deux orchestres attaquent le Vivat dont on dit merveille […]
Je poursuis avec le Procès-verbal de la cérémonie du Sacre et du couronnement de Napoléon, présentation et notes de Jean Tulard, Imprimerie nationale Éditions, Paris 1993 :
[…] Ces oraisons étant finies, le souverain Pontife s’est assis sur son faldistoire devant l’autel, ayant la mitre sur la tête ; S.E. Mgr le Cardinal Fesch, grand Aumônier de France, et S.E. Mgr le Cardinal de Belloy, le premier des Cardinaux français Archevêques, M. de Rohan, premier Aumônier de l’Impératrice, le plus ancien Archevêque, et M. de Beaumont, Évêque de Gand, le plus ancien Évêque français, averti par le grand Maître des cérémonies et par M. l’abbé de Pradt, Aumônier ordinaire de l’Empereur, nommé par S. M. Maître des cérémonies du clergé pour la cérémonie du couronnement, se sont rendus auprès de LL. MM., leur ont fait une inclination profonde, et les ont conduites au pied de l’autel pour y recevoir l’onction sacrée. Personne n’a suivi LL. MM. dans cette marche.
LL. MM. se sont mises à genoux, au pied de l’autel, sur des carreaux.
S. S. a fait à l’Empereur une triple onction, l’une sur la tête, les autres dans les deux mains, en récitant les prières suivantes avec les Évêques, qui avaient leur mitre sur la tête : […].
(Je donne ici la traduction française du latin) ORAISON.
Que notre Seigneur Jésus-Christ, Fils de Dieu, qui a été sacré par son Père d’une huile de joie et de triomphe, d’une manière plus excellente que tous ceux qui participent à sa gloire, répande sur votre tête, par l’effusion de cette huile sainte, la bénédiction du Saint-Esprit, et qu’il en pénètre votre cœur ; afin que, par ce don visible et sensible, vous méritiez d’avoir part aux invisibles, et qu’après avoir gouverné avec une juste modération un Empire temporel, vous méritiez de régner avec celui qui, seul, Roi des Rois, et sans péché, vit et est glorifié avec Dieu le Père dans l’unité du même Esprit, dans tous les siècles des siècles.
Ainsi soit-il.
ORAISON.
Dieu tout-puissant et éternel, qui avez établi Hazaël pour gouverner la Syrie, et Jéhu roi d’Israël, en manifestant vos volontés par l’organe du prophète Élie ; qui avez également répondu l’onction sainte des Rois sur la tête de Saül et de David, par le ministère du prophète Samuel, répandez, par nos mains, les trésors de vos grâces et de vos bénédictions sur votre serviteur NAPOLÉON, que, malgré notre indignité personnelle, nous consacrons aujourd’hui Empereur, en votre nom. Rendez-le, Seigneur, le dépositaire et l’organe de votre puissance ; faites qu’il gouverne cet Empire et ce peuple chéri en esprit de force, de justice, de fidélité, de prévoyance, de courage et de persévérance ; qu’il soit la terreur des infidèles, le distributeur impartial de la justice, le rémunérateur de ceux qui font le bien, le fléau de ceux qui s’abandonnent au mal, le défenseur de votre sainte Église, et le protecteur de la foi chrétienne pour la gloire de votre nom. Par Jésus Christ notre Seigneur, &c.
Ainsi soit-il.
S. S. a fait ensuite les mêmes onctions à l’Impératrice […]
Dans sa présentation Jean Tulard est plus critique sur le sacre : « En dehors d’un faste qui fit impression sur les spectateurs peu habitués à ce type de cérémonies depuis la Révolution, le sacre manqua son but. Il n’imposa pas une nouvelle dynastie dans l’opinion. Peut-être parce qu’il n’y avait pas de prince héritier mais même après la naissance du roi de Rome, l’affaire Malet montra, en 1812, que Napoléon n’était toujours considéré que comme un dictateur de salut public et non comme un souverain héréditaire. Napoléon avait cru impressionner l’Europe ? Celle-ci resta indifférente sinon sarcastique. L’ère des monarques chrétiens était révolue : le XVIIIe siècle avait été celui des despotes éclairés. Le sacre ne faisait pas de Napoléon un souverain comme les autres. La rupture était consommée avec l’Angleterre dont les caricatures tournèrent en dérision la cérémonie. L’Autriche se préparait à entrer dans une nouvelle coalition. Réaliste, l’Europe ne reconnaissait à Napoléon qu’une seule légitimité : ses victoires. Pour le Pape aussi le sacre était un échec. Pie VII espérait en venant à Paris faire fléchir Napoléon sur les articles organiques ; il repartit les mains vides. Il s’attira de surcroît l’hostilité des royalistes qui avaient le sentiment d’être trahis. Joseph de Maistre eut des mots très durs pour Pie VII : « Les forfaits d’Alexandre Borgia constatait-il, sont moins révoltants que cette hideuse apostasie de son faible successeur. » « Pie se tache », tel est le jeu de mots qui court au faubourg Saint-Germain.
Certes Pie VII a gagné une grande popularité en France mais le conflit du Pape et de l’Empereur paraît inéluctable. De ce point de vue le sacre a peut-être aggravé les choses.
Il ne faut pas oublier que c’est Napoléon qui a souhaité le sacre alors que beaucoup dans son entourage envisageaient seulement une prestation de serment et un couronnement et une messe avec Te Deum. Mais il se souvenait de Pépin sacré par le pape Étienne III venu implorer sa protection contre les Lombards, de Charlemagne couronné à Rome par Léon III et il avait à Auxonne commenté Mably (l’abbé Gabriel Bonnot de Mably, né à Grenoble le 14 mars 1709 et mort à Paris le 2 avril 1785, philosophe et historien) : « Le Pontife qui sacra aussi les fils de Pépin, ne manqua point de les appeler, ainsi que leur père, les oints du Seigneur. […] Étienne compara la dignité de Pépin à la royauté de David qui était une sorte de sacerdoce et contre laquelle les Juifs ne pouvaient pas tenter sans sacrilège. […] » Frédéric Masson écrivait encore : « S’il n’y a point une foi entière pour lui-même [Napoléon], sans doute s’y fie-t-il pour ses sujets, du moins pour une partie d’entre eux. Sa politique y est intéressée, d’une façon qu’il peut croire essentielle. Il n’admet point que son couronnement s’accomplisse sans des prières et des cérémonies rituelles. Il ne peut utilement requérir l’institution d’un des archevêques qu’il a nommés. La Sainte Ampoulée est brisée ; l’archevêque de Reims, dont le siège a été renversé par le Concordat, reste fidèle en exil à ses maîtres proscrits. La tradition capétienne rompue ne peut être renouvelée au profit de la dynastie nouvelle. Mais que Pie VII vienne en France sacrer Napoléon, comme ont fait Étienne II pour Pépin le Bref, Étienne IV pour Louis le Débonnaire ; que le vicaire de Jésus-Christ affirme ainsi la rupture définitive entre l’Église dont il est le chef et les descendants des rois très chrétiens ; que, comme a fait Zacharie pour Childéric III, il substitue lui-même, aux fils de saint Louis, le chef élu par la nation, ne fournira-t-il pas à Napoléon l’espèce de légitimité que celui-ci a vainement espérée de l’abdication du Prétendant et qu’il ne trouve point dans l’élection populaire ?
Je renvoie à la lecture de tous ces ouvrages et aux doutes de leurs auteurs sur le succès de l’entreprise à l’époque de Napoléon.
Mais on trouve dans les souvenirs d’un conseiller d’État, Privat Joseph Claramond comte Pelet de la Lozère (1785-1871), (Opinions de Napoléon sur divers sujets de politique et d’administration recueillies par un membre de son Conseil d’État et récit de quelques événements de l’époque, Paris, Firmin-Didot Frères 1833) ces propos tenus par Napoléon à son entourage alors que le Conseil d’État s’interrogeait sur les détails du sacre à venir, après que Napoléon s’était interrogé sur l’opportunité que le sacre ait lieu à Paris dont il redoutait l’esprit frondeur : « On a songé au Champ-de-Mars par réminiscence de la fédération ; mais les temps sont bien changés. Le peuple alors était souverain ; tout devait se faire devant lui. Gardons-nous de lui donner à penser qu’il en est toujours ainsi. Le peuple aujourd’hui est représenté par les pouvoirs légaux. Je ne saurais voir, d’ailleurs, le peuple de Paris, encore moins le peuple français, dans vingt ou trente mille poissardes, ou autres gens de cette espèce, qui envahiraient le Champ-de-Mars, je n’y vois que la populace ignare et corrompue d’une grande ville. Le véritable peuple, en France, ce sont les présidents de canton et les présidents de collèges électoraux ; c’est l’armée, dans les rangs de laquelle sont les soldats de toutes les communes de France. […] On a parlé de l’église des Invalides : mais celle de Notre-Dame vaudra bien mieux. Elle est plus vaste ; elle a aussi ses souvenirs qui parlent davantage à l’imagination. Elle donnera à la solennité un caractère plus auguste ; elle est consacrée par la tradition pour cet usage. »
Zeugma
23 novembre 2016 @ 19:05
Gérard,
Je voudrais vous remercier pour vos contributions savantes et plus particulièrement sur celle qui concerne le titre ducal de la famille des Cars qui complète – ou plus exactement qui rectifie – ce qu’on peut lire sur « internet ».
Si je vous ai bien compris, cela s’est passé en deux temps, trois mouvements :
– attribution d’un titre de duc à brevet – donc viager – en 1816 puis en 1822,
– transformation en titre héréditaire en 1830 non enregistré, inachevé en quelque sorte.
Cela prouve – s’il en était besoin – que « internet » est une source d’information devenue irremplaçable mais qu’il faut prendre les informations qu’elle contient avec prudence et un certain scepticisme.
Gérard
25 novembre 2016 @ 18:54
Zeugma je vous remercie pour vos aimables appréciations, et vous avez raison à propos d’Internet mais il faut dire à la décharge de ceux qui écrivent sur Internet que plusieurs nobiliaires réputés ignorent le caractère personnel du titre de et sa conversion en 1830.
AnneLise
23 novembre 2016 @ 20:06
Merci Gérard, j’avoue que j’ignorais que l’Impératrice avait reçu l’onction.
Vous aurez remarqué que me référant au livre de Jean des Cars je parlais des monarques des XXè et XXIè siècle exception faite des Souverains de Grande Bretagne et des Souverains de Hongrie. Je ne crois pas qu’ils aient été sacrés en tant qu’Empereurs d’Autriche renseignez moi.
Bien sûr que dans le passé les Monarques recevaient leur couronne de Dieu.
Gérard
25 novembre 2016 @ 19:16
Effectivement les empereurs d’Autriche n’ont pas été sacrés ni même couronnés. Les empereurs du Saint-Empire l’étaient mais la création de l’empire d’Autriche est récente.
L’empereur Ferdinand qui régna jusqu’à la révolution de 1848 a été sacré une seule fois mais couronné trois fois puisqu’il l’a été comme roi de Hongrie, comme roi de Bohême et comme roi de Lombardie et de Vénétie, mais il n’a pas été couronné empereur d’Autriche. Il a successivement été sacré et couronné le 28 septembre 1830 en la cathédrale Saint-Martin de Presbourg (Bratislava) comme roi de Hongrie et de Croatie avec la couronne de saint Étienne, puis il a été couronné le 7 septembre 1836 en la cathédrale Saint-Guy de Prague comme roi de Bohême avec la couronne de saint Venceslas. Enfin il a été couronné le 6 septembre 1938 à Milan au dôme de la Nativité de la Sainte Vierge avec la couronne de fer comme roi de Lombardie et de Vénétie.