En 2010, un superbe lion héraldique a été frappé sur une pièce commémorative en Finlande. Un autre lion héraldique, mais millimétrique, a été frappé au Luxembourg. Et un troisième lion au Vatican, mais qui n’a rien d’héraldique et qui joue le mauvais rôle.
La pièce commémorative finlandaise a été émise pour célébrer les 150 ans du décret monétaire autorisant la Finlande à émettre des billets de banque et des pièces. Elle reprend en sa partie gauche la figure du lion héraldique qu’on trouve sur les pièces courantes de 1 c à 50 c, mais la représentation en est plus stylisée. Sur la partie droite apparaissent des chiffres, également très stylisés, qui symbolisent la valeur des pièces finlandaises.
Observons les pièces courantes en euros (et précédemment en markka) qui ont servi de base au graphisme de la pièce commémorative. On y voit un lion héraldique, une épée dans sa patte droite, qui est gantée, et un sabre à ses pieds. Historiquement, ce sabre écrasé représenterait la Russie, du temps où la Finlande était suédoise et faisait l’objet de convoitises de la part du tsar. Notons que le lion est coiffé de cet attribut royal par excellence qu’est la couronne, alors que rien n’oblige un lion héraldique à être couronné. Mais cela ne semble pas gêner les Finlandais : même sur la pièce commémorative qui ouvre ce billet, la couronne est reprise, un peu rognée, ce qui la rend d’après moi encore plus esthétique.
Il y a une différence de taille, littéralement, avec les lions de la pièce commémorative luxembourgeoise de la même année, qui met à l’honneur les armoiries du Grand-Duc. Le lion y est représenté quatre fois : deux fois sur un fond Luxembourg (1 et 4, burelé) et deux fois sur un fond Nassau (2 et 3, semé de billettes). Comme la loi luxembourgeoise le prévoit, le Grand-Duc Henri figure également sur la pièce.
La taille du lion luxembourgeois se mesure en millimètres, mais au moins un lion héraldique existe sur une pièce en euros d’une monarchie : c’est à ce jour le seul cas. Compte tenu des services que le lion héraldique a rendus à la visibilité et à la symbolique de la royauté au fil des siècles, sa présence sur cette pièce m’empêche, et j’en suis heureuse, de parler de totale ingratitude des monarchies à son égard.
Finalement, rien d’héraldique sur la pièce commémorative du Vatican frappée à l’occasion de l’année sacerdotale, qui représente un berger sauvant un agneau de la gueule d’un lion.
La symbolique est évidente, on s’attachera donc à décrire l’extrême violence qui la sous-tend du point de vue graphique : la tension des muscles du berger, l’expression de souffrance sur son visage, les griffes du lion sur sa jambe, la gueule ouverte du lion sur sa main droite. La dynamique entre les parallèles (bras et jambes du berger, tête, pattes et queue du lion) et les perpendiculaires (vêtement et dos du berger, torse du berger et corps du lion, tête du lion et corps de l’agneau) est caractéristique des pièces en euros que le sculpteur Guido Veroi, décédé l’année dernière, a dessinées entre autres pour le Vatican.
On peut aimer ou ne pas aimer ce type de graphisme – personnellement, je reste assez calme devant cette pièce – mais on est obligé d’admettre que l’équilibre de sa composition relève d’un classicisme parfaitement maîtrisé. (Merci à Sedna pour ce reportage)
Caroline
16 juin 2014 @ 06:54
Sedna,merci beaucoup pour votre article fort intéressant!
flabemont8
16 juin 2014 @ 11:47
Ma préférée est la deuxième . Je suis incapable de reconnaître un lion dans la première ! Merci , Sedna, ce sont des pièces que je ne connaissais pas , d’où l’intérêt de votre rubrique , nous faire connaître ce que nous ignorons .Bravo !
Gérard
16 juin 2014 @ 11:56
Oui merci beaucoup, c’est très intéressant.
Naucratis
16 juin 2014 @ 13:13
Merci à Sedna d’enrichir cette rubrique.
Juliette
16 juin 2014 @ 17:31
Encore une fois, un article de numismatique très intéressant.
Grâce à vous, j’ai une analyse d’une pièce de monnaie qui fait partie des objets du quotidien, la pièce de 50 centimes de Finlande (2e photo).
Les autres pièces m’étaient inconnues mais leur analyse reste néanmoins très intéressante.
Que symbolise généralement le lion en héraldique et en numismatique?
Livia
16 juin 2014 @ 17:37
@ Sedna : toujours aussi passionnante votre série…merci !
sedna
16 juin 2014 @ 18:26
Bonsoir Juliette,
Je ne suis malheureusement pas une virtuose de l’héraldique, mais je crois savoir que le lion est, avec l’aigle, l’animal le plus ancien à figurer sur des blasons, et qu’il y est en tous cas l’ornement le plus fréquent, devant l’aigle.
Il symboliserait la générosité et le courage, et par extrapolation, toutes les vertus qu’on peut associer : l’autorité, la puissance, la royauté, la justice, etc.
Bien cordialement
Sedna
Juliette
17 juin 2014 @ 10:33
Bonjour Sedna,
Merci de ces précisions.
Au plaisir de vous lire prochainement dans un autre article de numismatique.
Les autres pièces de Finlande sont aussi très belles. La faune et la flore du pays y est présentée. Des oiseaux sauvages sur la pièce d’un euro, des framboises arctiques/ mûres sauvages que l’on trouve en Laponie sur celle de deux euros.
Juliette.
Pivoine
17 juin 2014 @ 00:14
Article très enrichissant. Merci Sedna
agnes
18 juin 2014 @ 06:20
j’aime la facon de raconter et nous faire voir ce qu’on aurait pas vu.
sedna
18 juin 2014 @ 22:59
Bonsoir Agnes,
J’aime également beaucoup vos reportages. Du travail de professionnel !
Bien cordialement
Sedna
Claudia
18 juin 2014 @ 17:57
Je ne comprends pas bien la différence entre un lion héraldique et un lion tout court. Sur la pièce du Vatican le lion n’est pas « héraldique » ? Pourriez-vous m’expliquer ???
sedna
18 juin 2014 @ 22:15
Bonsoir Claudia,
Le lion représenté sur les pièces finlandaises est celui qui figure sur les armoiries du pays. Il est donc héraldique parce que représenté sur un blason. Même chose pour le lion qui figure sur la pièce luxembourgeoise : il est repris des armoiries du Grand-Duc.
Par contre, le lion de la pièce vaticane n’est pas repris des armoiries – le lion n’existe d’ailleurs pas sur les armoiries du Vatican. C’est une représentation artistique d’un lion réel, qui n’a aucun rapport avec le blason, et qui ne peut donc pas être qualifié d’héraldique.
Bien cordialement
Sedna