Ce sont près de 9 milliards de pièces allemandes en euros qui véhiculent l’image de la Porte de Brandebourg, que Frédéric-Guillaume II de Prusse a fait construire à Berlin en 1788. Le monument figurera également sur les pièces commémoratives que l’Allemagne et le Vatican ont annoncées pour fin 2014 / début 2015.
Sous le règne de Frédéric le Grand (1712 – 1786), Berlin était une ville de quelque 100.000 habitants entourée de barrières en bois percées de 14 portes. Les guerres successives et surtout les invasions russe et autrichienne ont eu raison de ces barrières. Le successeur de Frédéric le Grand, Frédéric-Guillaume II, a fait reconstruire des remparts autour de la ville, dont l’un des accès est la Porte de Brandebourg. Le monument le plus emblématique de l’Allemagne a donc été édifié par l’ascendant direct du Prince Georg Friedrich de Prusse.
2 rangées de 6 colonnes doriques, 5 passages , 26 mètres de hauteur, 66 mètres de largeur et 11 mètres de profondeur ont fait de cet édifice le symbole du pouvoir (du temps du Kaiser), le symbole de la division de la ville (du temps de la République démocratique allemande) et le symbole de l’unité du pays (depuis la chute du Mur).
Le classicisme du bâtiment a trouvé un traitement à sa mesure dans le dessin des pièces allemandes courantes de 10 c, 20 c et 50 c : au sol, quatre lignes parallèles qui se rejoignent à l’infini ou, plus exactement, sur une ligne horizontale qui semble avoir le double rôle de marquer l’horizon et d’accentuer le parallélisme des colonnes. En matière de composition, cette pièce est l’une des plus symétriques de la zone euro.
La Porte de Brandebourg figurera sous peu sur deux pièces commémoratives : l’Allemagne célébrera sans surprise les 25 ans de la réunification du pays et le Vatican célébrera sans surprise les 25 ans de la chute du Mur de Berlin.
La pièce allemande reprend le motif d’un projet qui avait reçu en 2009 le 2e prix à un concours pour la commémoration des 20 ans de l’unité allemande, projet destiné à une pièce de collection de 10 euros. Hans-Dietrich Genscher faisait partie du jury : le sujet était donc d’importance.
Ce projet qui n’avait pas été édité vient d’être adapté pour la future pièce commémorative. Elle représente de façon stylisée un peuple en liesse devant la Porte de Brandebourg, avec la mention « 25 Jahre Deutsche Einheit 2015 » à gauche et trois fois la mention « Wir sind ein Volk » à droite.
J’aime assez le dépouillement graphique des personnages, qui donne une dimension intemporelle et très esthétique aux scènes dont nous avons été les témoins fin 89, mais je trouve la pièce à l’extrême limite de la surcharge. Entre autres raisons, pourquoi écrire trois fois « Wir sind ein Volk » alors qu’il n’y avait me semble-t-il que deux Allemagnes ? Cela m’intrigue d’autant plus que la mention qui est à l’intérieur de l’arc de cercle n’arrive pas au bout de la citation, doit sacrifier le « k » et la moitié du « l » et figure donc comme « Wir sind ein Voı », ce qui me laisse perplexe.
Sur la pièce du Vatican aussi, la Porte de Brandebourg se trouve à l’arrière-plan, vue dans une faille du Mur de Berlin qui porte la légende « XXV anniversario del crollo del Muro di Berlino ». Cette pièce rappelle, sans doute involontairement, que Frédéric-Guillaume II de Prusse voulait que la Porte de Brandebourg prenne pour modèle l’Acropole. Son vœu est ici exaucé : avec la vue du monument en contreplongée et la branche d’olivier à l’avant-plan, on se croirait presque à Athènes.
La Porte de Brandebourg est très puissante, symboliquement et graphiquement. Une pièce qui la place au second plan et ne la traite que comme un décor risque de se condamner à la surcharge –c’est d’extrême justesse que cet écueil a été évité sur les deux pièces commémoratives. Je ne suis pas loin de leur préférer la simplicité, la franchise et la lumière de la pièce courante. (Merci à Sedna pour cet article)
Claudia
28 juillet 2014 @ 06:59
C’est tout de même curieux que la porte de Brandebourg ait symbolisé d’abord la division de l’Allemagne et ensuite sa réunification !
Francine du Canada
28 juillet 2014 @ 10:17
Merci Régine et Selma pour ce passionnant reportage. J’aime bien celle des 25 ans de la chute du mur de Berlin; c’etait un grand moment historique. Quant à la répétition du « Wir sind ein Volk » (Nous sommes un seul peuple), c’est ce que les gens criait en traversant le mur; c’était un cri de libération! FdC
Michèle
28 juillet 2014 @ 11:43
25 Jahre deutsche Einheit 2015- Wir sind eine Volke
25 ans de l´Unification allemande : Nous sommes un peuple
Pourquoi trois fois » Wir sind eine Volke ».
Il s´agit du slogan Wir sind das Volk.
A Liepzig en novembre 1989, des dizaines de milliers d´Hommes ont pris la route et avaient défié les forces de sécurité commandées par les cris de «Nous sommes le peuple» et « Pas de violence » . Cela a conduit une révolution pacifique en RDA.
C’est en effet le 13 novembre 1989, à Lepzig qu’apparait le slogan, tiré d’un strophe de l’hymne national de la RDA, «Allemagne, patrie unie. » (Deutschland einig Vaterland).
Elle est reprise et modifiée par les dirigeants de la CDU (Union chrétienne-démocrate d’Allemagne – Christlich Demokratische Union Deutschlands) en « Nous sommes un peuple » (Wir sind Ein Volk) qui se substitue en « Nous sommes le peuple » (Wir sind Das volk).
Histoire d´Allemagne
Michèle
DEB
28 juillet 2014 @ 11:46
Très intéressant.
Merci pour ces explications.
Severina
28 juillet 2014 @ 12:14
Merci Régine et Sedna, les articles numismatiques sont toujours très intéressants, car ils parlent des monnaies que tout le monde a dans ses poches et que l’on peut regarder avec plus d’attention et même expliquer aux enfants. J’aime beaucoup.
Michèle
28 juillet 2014 @ 16:33
La conception vient de l’artiste Bernd Wendhut, Bernkastel-Kues. Les personnes debout au premier plan représentent un nouveau départ; elles sont en face de la porte de Brandebourg, le symbole de l’unité allemande. Votre déclaration d’intention « Nous sommes un peuple » représente la voie à la réunification allemande.
Bundesministerium der Finanzen
Le fait que l´inscription ne soit pas complète ne veut rien dire.
Nous sommes un peuple est le slogan lors des manifestations qui ont suivi l´ouverture du mur en novembre 1989, je m´en souviens très bien.
L’unité allemande est l’incarnation de la réunification allemande le 3 Octobre 1990.
Michèle
HRC
28 juillet 2014 @ 19:10
« wir sind ein Volk », c’était le cri des manifestants le jour de la chute, pour ceux qui sortaient et ceux qui les attendaient. Ils sont d’ailleurs représentés, les uns les bras en l’air, les autres bras tendus.
cela m’émeut, moi, ce souvenir (devant mon écran seulement)
HRC
28 juillet 2014 @ 19:12
même si la barrière entre Ossis et Wessis n’a pas disparu par enchantement ce jour-là !!
Caroline
28 juillet 2014 @ 22:30
Sedna,un grand merci pour votre article ‘minutieux’ jusqu’au moindre détail!