Le sapin de Noël est aujourd’hui l’emblème de la fête dans la plupart des pays. Mais il ne le fut pas toujours. La fête de Noël elle-même a connu de curieuses étapes au cours de son évolution.
L’arbre ne s’y est introduit que fort tard, et savez-vous que c’est en Alsace qu’il est né. Comme quoi, la ferveur des marché de Noël là-bas s’explique.et y puise ses racines.
Les documents nous attestent que la première fête de Noël n’a été célébrée à Rome qu’en 354, le 25 décembre. Avant cette date, la naissance du Christ figurait dans le calendrier au 6 janvier, pour la fête de l’Épiphanie. Il faut admettre que les coutumes du solstice d’hiver ont contribué à fixer au 25 décembre et la fête de Noël et le début de l’année ecclésiastique.
Ce jour marque la première fête et la célébration de » douze nuits saintes « , en 379 à Constantinople, en 380 à Antioche, en 432 en Égypte, en 634 seulement en Palestine.
En Alsace la première grande solennité de Noël, sous la forme d’une fête pour les enfants, fut célébrée en 776, à Sélestat, par Charlemagne, avant que celui-ci, quatre ans plus tard, n’allât se faire couronner à Rome, une nuit de Noël.
Au Moyen Age, chaque pays, chaque région célébrait Noël avec son caractère et ses coutumes, Provence, Bourgogne, Bretagne, Alsace. L’Église ne s’est jamais opposée, au contraire, à ce que sa liturgie inspire des réjouissances populaires comme la représentation de la crèche dans l’étable.
C’est l’origine des jeux de la Nativité qui furent d’abord représentés à l’intérieur des églises et dont on trouve les premiers textes en Alsace avec les variantes régionales. A leur tour les jeux ont donné naissance à la tradition de l’arbre de Noël tel que nous le connaissons aujourd’hui.
La fête de l’arbre de Noël prit dès l’origine, en Alsace, un caractère hautement religieux dont témoigne d’une part le mysticisme d’un Jean Tauler, prédicateur à la cathédrale de Strasbourg, au quatorzième siècle, d’autre part la coutume assez courante, tout le long des quinzième et seizième siècles, d’arborer dans les lieux de réunion des corporations, à Sélestat, à Colmar et à Strasbourg, des branchages fleuris pour la fête de Saint-Martin ou des branches de sapins des Vosges, à la mi-décembre.
Quand, pour les Jeux du Paradis, représentés très tôt en Alsace le long du Rhin, on avait besoin d’un arbre pour symboliser l’arbre du Paradis (ces jeux avaient lieu le jour d’Adam et d’Eve, c’est-à-dire le 24 décembre), on prit le seul arbre qui reste vert en cette saison et on y attacha des pommes, celles qui devaient être arrachées par Eve au cours du » jeu « .
L’arbre de Noël était né en même temps que la coutume de le garnir de pommes le soir du 24 décembre. Les premiers documents écrits de cette coutume datent de 1605. Un voyageur anonyme traversant l’Alsace en cette même année a été frappé par la » coutume particulièrement alsacienne de dresser dans les maisons des sapins ornés de pommes, de sucreries et d’images dorées « . En 1642, un prédicateur de la cathédrale, J.-C. Dannhauer, immigré à Strasbourg, proteste contre cette façon d’adorer des » poupées sur des sapins ornés, au lieu d’adorer le seul Christ « , etc.
Dès le siècle suivant la coutume de dresser un arbre de Noël le 24 décembre se répand rapidement en Europe et dans le monde. C’est la princesse palatine Charlotte, belle-sœur de Louis XIV, qui essaie de l’introduire à la cour de France, comme en fait foi une lettre datée de 1711.
Cet essai échoue : l’arbre ne sera dressé aux Tuileries qu’au début du dix-neuvième siècle et constituera une sorte de symbole romantique en France. Goethe, qui avait célébré Noël en Alsace en 1770, introduisit l’arbre de Noël à la cour ducale de Weimar en 1772. Un peu plus tard nous le trouvons utilisé par la famille royale d’Angleterre.
En Bohême il apparaît en 1863, en Amérique en 1861, où il fut introduit par des familles alsaciennes émigrées de Strasbourg. Ce n’est que vers le milieu du dix-neuvième siècle que ce symbole de la Nativité se montre en Suède, en Norvège, enfin à Saint-Pétersbourg et à Moscou.
A l’origine notre sapin de Noël ne porte pas encore les petites bougies qui achèveront le symbole. Il est vrai qu’au treizième siècle un poème français, le Roman de Perceval, de Durmars le Gallois, parle d’un arbre » qui porte des lumières, leurs flammes dirigées vers le haut symbolisant les hommes vertueux, les flammes dirigées vers le bas symbolisant les méchants « .
Pourquoi n’admettrions-nous pas que les lumières de notre sapin de Noël ont emprunté leur lueur à l’arbre symbolique de Perceval ? Ce n’est cependant que vers la fin du dix-septième siècle dans des documents alsaciens, puis dans les lettres de la princesse Palatine, que nous trouvons les bougies attachées au sapin.
Relativement récente, cette coutume s’est donc introduite avec une rapidité sans égale, dans la série des fêtes populaires. L’idée de l’arbre, décor d’un » Jeu du Paradis « , puis symbole de fidélité et de constance, s’est adaptée à des milieux très différents. Peu à peu le symbole a été perdu de rue. Mais l’histoire connaît maints exemples de transformations de ce genre. (Merci à Bertrand Meyer)
framboiz 07
21 décembre 2023 @ 02:13
Merci, Bertrand ,mais le vrai symbole de Noël, c’est la crèche ! Le sapin, héritier de l’Irminsul de Widukind que Charlemagne déracina ,pour mieux convertir les Saxons?
Alix du A
21 décembre 2023 @ 05:16
Un article riche d explications sur cette tendre tradition, très intéressant, merci.
milou
21 décembre 2023 @ 06:04
Merci beaucoup Bertrand Meyer, pour ce très intéressant et instructif commentaire sur le sapin de Nowel!
🎄🎄🎄
anakim
21 décembre 2023 @ 07:04
Merci M. Meyer pour cet article complet et instructif !
J’ajouterais que si la naissance du Christ a été fixée vers ces dates (6 janvier puis 24 décembre), c’était pour faire coïncider le calendrier chrétien avec le calendrier festif romain. Cette période correspondait aux Saturnales, fêtes durant lesquelles, entre autres choses, on s’offrait des cadeaux et décorait la maison avec des branchages de houx. C’était le fête la plus populaire chez les Romains, et une des plus anciennes et respectées. Si cela vous intéresse, je vous recommande ce lien : https://youtu.be/CnPmvXfCVQM?si=jehBooiNpagxjuNh
Passez de belles fêtes de fin d’année.
Guizmo
21 décembre 2023 @ 07:55
Merci pour cette agréable lecture du matin
Baboula.
21 décembre 2023 @ 08:48
On ne parle plus du rôle du prince Albert époux de la reine Victoria.
Menthe
22 décembre 2023 @ 18:46
Parce que ce n’est pas juste.
Aristocrate
23 décembre 2023 @ 11:00
En quoi est-ce faux ? Il a bien joué un rôle dans l’histoire du sapin de Noël en popularisant la tradition outre-manche et dans le monde anglo-saxon. Quelques décennies plus tôt ce fut la reine Charlotte, elle-aussi d’origine germanique, qui la première l’introduisit à la cour britannique et fut bientôt imitée par toute l’aristocratie. Mais ce n’est qu’à l’ère victorienne, avec la publication dans les périodiques d’images représentant la famille royale autour du sapin, que la pratique se démocratisa dans les autres couches de la société et se diffusa outre-atlantique.
Alice
21 décembre 2023 @ 09:50
Merci pour cet article tout à fait de saison.
Et la crèche fête son huitième centenaire cette année ! Cela fait exactement 800 ans, Noël 1223, que Saint François d’Assise organisait la première crèche en Italie, dans les montagnes de Greccio.
Fleur
21 décembre 2023 @ 09:55
Le sapin de Noël est né à Sélestat, à une trentaine de km de chez moi.
A l’origine, on le garnissait des fameuses pommes rouges de Noël qu’on appelle par chez nous « Christkindler » (le Christkind c’est l’enfant Jésus). Car ces pommes plutôt petites et acides, bonnes pour les compotes, (compotes roses je crois) sont mûres en décembre.
Dans mon enfance, on accrochait aussi des noix roulées dans du papier alu et des petits gâteaux en pain d’épice et glaçage de sucre, ou en massepain, troués au milieu, pour les accrocher. Et on illuminait avec de vraies bougies (une mode passée, en raison d’incendies).
On garnissait aussi de cheveux d’ange (en fine ouate), de « Sternespritzer » (les bougies d’anniversaire à étincelles) et de belles boules en verre qu’on fait toujours.
Et la crèche ne manquait jamais. Quand j’avais 6 ans maman achetait à prix d’or des santons chez le droguiste du coin et grand-père installa une lumière rouge dans l’étable pour mon plus grand bonheur.
Perlaine
21 décembre 2023 @ 10:00
Grand merci B. Meyer – Depuis hier soir je sais que ce que j’avais appris des anglais à savoir que c’était le digne époux de la reine Victoria qui avait introduit cette coutume du sapin de Noël – Pour une fois , il y avait un reportage magnifique sur la Nativité en Alsace , suivie d’un reportage de toute beauté sur la Norvège- s’avérait inexact ! Merci , Perceval ah évidemment je souscrit (sourire) Merci et bon Noël.
Antoine
21 décembre 2023 @ 10:22
Article intéressant, merci. L’année liturgique commence au premier dimanche de l’Avent (4 dimanches avant Noël). Cette année, le temps de l’Avent est considérablement écourté puisque Noël est un lundi. La quatrième semaine se réduit à quelques heures.
mousseline
21 décembre 2023 @ 11:09
Merci Bertrand pour cette rétrospective sur le sapin de Noël; j’ ai appris des choses que j’ ignorais
rubis
21 décembre 2023 @ 11:21
histoire très intéressante
Pascal Hervé
21 décembre 2023 @ 12:33
Il y a un complément à cette histoire :
La tradition était donc de décorer le sapin (ou l’épicéa) avec des pommes ,or une année il n’y eut pas de pommes pour ce faire et un souffleur de verre eut l’idée d’en fabriquer, de là viendrait l’origine des boules en verre de Meisenthal .
Boules de Noël dont je suis un fervent amateur mais comme nous avons trois chiens et beaucoup de meubles sans compter les chats les miennes sont sur les lustres .
Quelqu’un saurait-il si elles résistent au gel ?
Trianon
22 décembre 2023 @ 11:22
J’en ai aussi un certain nombre , je suis allée sur place les acheter à plusieurs reprises , on peut voir les souffleurs de verre travailler,c’est spectaculaire .
Je regrette l’Alsace …surtout à Noël
Passiflore
22 décembre 2023 @ 14:02
Trianon, je viens de voir les marchés de Noël de Colmar et de Kaysersberg : merveilleux !
Trianon
24 décembre 2023 @ 16:12
Magique !!
La plus belle région de France au moment de Noel !
Mayg
21 décembre 2023 @ 14:20
C’est toujours un plaisir chaque fin d’année de décorer le sapin de Noël.
Elisabeth-Louise
22 décembre 2023 @ 12:24
Bravo B. Meyer, d’avoir évoqué la Princesse Palatine qui tenta sans succès d’implanter la mode des arbres de Noël à Versailles !
On l’ignore ou l’oublie souvent…
Danielle
22 décembre 2023 @ 18:00
Merci Bertrand Meyer pour l’histoire du sapin de Noël.
Dans ma famille, le sapin et la crèche ont toujours été présents et encore maintenant.
danielle6883
22 décembre 2023 @ 18:27
Merci pour cet article si intéressant sur l’origine du sapin de Noël né en Alsace.
Pascal Hervé
22 décembre 2023 @ 19:01
Enfant j’avais un disque qui racontait l’histoire du sapin de H.C.Andersen ,un conte très triste comme beaucoup de ses œuvres.
Hervé J. VOLTO
25 décembre 2023 @ 13:02
Merci beaucoup pour ce très intéressant et instructif commentaire sur le sapin de Noel !
Joyeux Noel à toutes et à tous !