Maria de las Mercedes, Francisca de Asis, Antonia, Luisa, Fernanda, Infante d’Espagne voit le jour à Madrid le 24 juin 1860. L’Infante est le sixième enfant de l’Infante Luisa Fernanda, fille du roi Fernando VII et la reine Maria Cristina d’Espagne, née princesse de Bourbon-Deux-Siciles, et du prince Antoine d’Orléans, duc de Montpensier. Maria de las Mercedes a 8 frères et soeurs : Maria Isabel (1848-1919) qui épousera le prince Philippe d’Orléans, comte de Paris; Maria Amelia (1851-1870), Maria Cristina (1852-1879), Maria de la Regla (1856-1861), Fernando (1859-1873), Felipe (1862-1864), Antonio, duc de Galliera (1866-1930) qui épousera l’Infante Eulalie et Luis (1867-1874).
L’infante passe son enfance à Séville et au Palais de Villamanrique où ses parents ont choisi de s’établir loin de la Cour de Madrid. Son père le duc de Montpensier titré infant d’Espagne y a développé ses affaires avec succès dans le domaine agricole.
On situe aux alentours de 1872 la première rencontre entre la jeune infante et son cousin Alphonse (futur roi Alphonse XII) lors d’une visite que le jeune homme et sa mère la reine Isabelle II (soeur de l’Infante Luisa Fernanda et donc tante de Maria de las Mercedes) font à la famille du duc de Montpensier en France lors de l’exil qui a débuté en 1868. On raconte que le futur roi Alphonse XII est subjugué par Maria de las Mercedes. Il explique ensuite à sa mère la reine Isabelle II qu’il a vu en Maria de las Mercedes l’image parfaite du bonheur et de la vertu.
Alphonse XII devient roi d’Espagne le 29 décembre 1874. Bien qu’il vive désormais à nouveau à Madrid, les jeunes gens se revoient quelques fois par an notamment pour des promenades au Bois de Boulogne, chaperonnés respectivement par un aide de camp et une dame de compagnie.
C’est à cette époque qu’à proximité de la résidence familiale de Sanlucar, une gitane prédit à l’infante une vie où elle la voit porter une couronnne de reine, ainsi qu’un roi et un peuple se mettant à ses genoux, avant d’arrêter sa phrase et de partir en panique, laissant la jeune fille perplexe.
Le jeune souverain a réussi le pari en l’espace de quelques mois d’être adulé par ses concitoyens. Bientôt, la question de son mariage commence à se poser. Le chef du gouvernement Canovas del Castillo s’en fait écho au roi. Ce dernier lui répond d’emblée “Jamais, je ne cèderai dans ma liberté personnelle à l’heure de choisir une épouse” et d’ajouter “Choix que j’ai déjà fait il y a longtemps”.
Le politique digère mal la réponse du roi car il avait l’ambitieux projet de voir se sceller un mariage entre le roi Alphonse XII et la princesse Béatrice, fille cadette de la reine Victoria et du prince Albert. A noter les revirements de l’Histoire puisqu’à la génération suivante, le roi Alphonse XIII, fils du roi Alphonse XII épousera la princesse Victoria Eugénie de Battenberg, fille de la princesse Béatrice…
Lorsque le monarque lui révèle le nom de l’heureuse élue, s’en est trop pour Canovas del Castillo qui n’y voit aucun avantage politique ou stratégique, pire il se méfie du duc de Montpensier, père de l’infante qu’il estime être un manipulateur et un intrigant. Le roi Alphonse XII n’en démord pas et peu lui importe les projets politiques imaginés par son entourage. Le chef du gouvernement, conscient que la mère du roi Alphonse XII, l’ex-reine Isabelle II ne voit pas cette idylle d’un bon oeil, tente de porter le débat jusque devant le parlement. Dans la rue, la population a vent de cet amour du roi pour l’infante Maria de las Mercedes et des embûches que l’on veut mettre sur leur chemin du bonheur. La popularité du roi grandit encore et la légende qui va auréoler Maria de las Mercedes voit le jour.
Lors de débats aux Cortès (Parlement espagnol), Claudio Moyano déclare qu’il n’entre pas dans ses intentions de parler de Son Altesse Royale l’Infante Maria de las Mercedes. Le silence se fait dans l’assemblée. Le choix d’une épouse pour le roi est maintenant ouvertement évoqué devant les parlementaires et le gouvernement. Claudio Moyano poursuit en précisant qu’il ne parlera pas de l’infante car on ne parle pas des anges. Un tonnerre d’applaudissement succède à cette déclaration et vaut pour consentement.
Les fiançailles officielles sont annoncées le 16 novembre 1877. Les fiancés passent les fêtes de fin d’année en Andalousie dans la famille du duc de Montpensier et de l’Infante Luisa Fernanda.
Le 23 janvier 1878, le roi Alphonse XII d’Espagne épouse l’élue de son coeur l’infante Maria de las Mercedes en la basilique d’Atocha à Madrid. Pour l’occasion, la capitale s’est parée de lumières avec des illuminations novatrices sur les grandes artères du centre-ville. La population est en liesse avec ce mariage d’amour. Les réjouissances durent cinq jours et ouvrent une nouvelle ère au sein de l’austère Cour royale avec ces jeunes souverains.
Mais le bonheur va être de très courte durée. Quelques semaines après les noces, la rumeur se propage dans Madrid. La jeune reine souffrirait de nausées et de vomissements répétés. Dans un premier temps, on pense à l’attente d’un heureux événement mais sa santé ne cesse de décliner avec des hémorragies, et de fortes fièvres. Les médecins de la Cour craignent que la reine ne souffre de tuberculose, maladie qui a emporté plusieurs membres de sa famille. Des collectes sont faites dans plusieurs villes du pays pour faire des offrandes dans les églises et l’on prie avec ferveur pour que la jeune femme se remette au plus vite. Mais les bulletins de santé sont de plus en plus inquiétants. Une fiève typhoïde emporte la reine Maria de las Mercedes le 26 juin 1878. Son époux depuis seulement 5 mois le roi Alphonse XII n’a pas quitté un seul instant son chevet malgré les recommandations des médecins. Il pleure agenouillé durant de longues heures avant que son entourage ne lui rappelle de devoir se montrer digne de son rang. Il s’enferme alors dans sa chambre. Le population défile pendant deux jours devant la dépouille de la reine qui avait eu 18 ans deux jours avant son décès.
Le cortège funèbre quitte le Palais d’Orient vers la gare du Nord de Madrid en direction de l’Escorial. La reine y est inhumée dans le panthéon des infants, car n’ayant pas eu de descendance. Sur sa tombe à la demande du roi est gravé “Maria de las Mercedes du roi Alphonse XII, la très douce épouse”.
Après une première période de deuil vécue loin de tous, le roi prend goût à la vie madrilène et aux aventures sans lendemain. Mais la raison d’Etat sera la plus forte. Il faut donner une descendance à la dynastie. Malgré ses refus répétés de se remarier, le roi prend conscience de ses obligations dynastiques. Il épouse le 29 novembre 1879 l’archiduchesse Maria Cristina d’Autriche. Leur premier enfant naît le 11 septembre 1880 et est baptisée à la demande de la nouvelle reine du prénom de Maria de las Mercedes…
Le roi Alphonse XII décède le 25 novembre 1885, 7 ans après la reine Maria de las Mercedes. Sa veuve la reine Maria Cristina est enceinte du future roi Alphonse XIII. Pour le peuple espagnol qui n’a pas encore accepté la reine Maria Cristina, leur roi tant aimé a rejoint pour l’éternité celle qui était son premier amour Maria de las Mercedes. Un amour populaire sincère envers une jeune reine décédée alors qu’elle n’avait que 18 ans qui a aureolé à jamais cette jeune femme qui n’avait régné aux côtés de son époux que l’espace de 5 mois. Aujourd’hui, la reine Maria de las Mercedes repose dans la cathédrale de l’Almudena de Madrid, juste à côté du Palais royal.(Citations de ce portrait “ Reinas de Espana” de José Antonio Vidal Sales, Edition Mitre, 1984, 220 p. – Copyright photos : DR – Article dédié à Patricio)
patricio
30 août 2012 @ 08:43
Merci Régine pour ce magnifique portrait et pour votre dédicace, qui me fait énormement plaisir.
N’hésitez pas à me solliciter
amitiés
patricio
Tatami
30 août 2012 @ 09:04
Petites coquilles, Régine !
Roi d’Espagne en 1874 et fiançailles en 1877…
et merci pour cet intéressant portrait d’une reine que je connaissais peu.
Agathe
30 août 2012 @ 09:23
« Alphonse XII devient roi d’Espagne le 29 décembre 1974 » au lieu de 1874
« Les fiançailles officielles sont annoncées le 16 novembre 1977 » au lieu de 1877
2 erreurs de date, il me semble !!!
Régine
30 août 2012 @ 12:40
oui en effet, merci
OURSE/DOMI
1 septembre 2012 @ 09:16
Agathe et Régine,
1974 et 1977 ???!!!
Voici les dates (source Wikipédia)
Mariage et descendance[modifier]
Alphonse XII et la reine Marie-Christine.
Alphonse XII épousa en premières noces sa cousine, l’infante d’Espagne Mercedes d’Orléans (1860-1878), fille d’Antoine d’Orléans, duc de Montpensier, et de l’infante Louise Fernande de Bourbon ; sa mort à 18 ans, d’une maladie (tuberculose ou typhus) qui provoqua une fausse couche fatale, fit de cette jeune reine très populaire une héroïne romantique.
Veuf à 21 ans, très affecté par ce deuil, le roi se fiança à l’infante Marie-Christine, 26 ans, sœur de sa défunte épouse mais celle-ci mourut avant la célébration des noces.
Il épousa en deuxièmes noces l’archiduchesse d’Autriche Marie-Christine d’Autriche (1858-1929), dont il eut trois enfants :
la princesse Marie de Bourbon, princesse des Asturies (1880-1904) qui épouse en 1901 Charles de Bourbon-Siciles (1870-1949) créé infant d’Espagne ;
l’infante Marie-Thérèse de Bourbon (1882-1912), qui épouse en 1906 Ferdinand-Marie de Bavière créé infant d’Espagne (1884 – 1958)
Alphonse XIII (1886-1941), enfant posthume et roi dès sa naissance le 17 mai 1886, sous la régence de sa mère jusqu’en 1902.
Alphonse XII eut au moins deux fils illégitimes avec l’actrice Elena Sanz. Ces deux enfants ne possédaient aucun droit au trône espagnol :
Alfonso (né en 1880).
Fernando (né en 1881).
sonia
30 août 2012 @ 09:41
Un grand merci pour l’histoire de cette reine méconnue, qu’elle tristesse pour ses parents de perdre si jeunes bon nombre d’enfants…C’est très agréable d’apprendre l’histoire grâce à ces articles dans N&R.
corentine
30 août 2012 @ 09:43
superbe, merci Régine
c’est triste et touchant
la comtesse de Barcelonne et son arrière petite-fille (petite-fille de l’infante Pilar) se nomment aussi Maria de las Mercedes
jul
30 août 2012 @ 10:01
Oh très joli portrait ! merci Régine !
Sophie
30 août 2012 @ 10:03
Merci Régine pour ce très beau portrait. Lorsque j’ai visité Madrid il y a quelques années, nous nous sommes promenés avec un guide près du Palais royal et il nous avait en effet expliqué que la reine Maria de las Mercedes en raison de sa disparition si jeune et à peine quelques mois après son mariage, avait été idolâtrée par la population espagnole.
MoniqueDN
30 août 2012 @ 10:11
Un très beau portrait de cette jeune reine au destin tragique. Merci Régine !
Anaïs
30 août 2012 @ 11:38
Merci pour ce beau portrait d’une jeune reine qui a visiblement marqué son époque.
Mayg
30 août 2012 @ 12:59
Merci à Régine pour ce beau portrait.
Quel tragique destin pour cette infante décédée seulement 5 mois après son mariage…
Kalistéa
30 août 2012 @ 13:48
La touchante et ephémère reine Mercedes était une Orléans avec tous leurs célèbres attribut de beauté robuste,malgré une bonne constitution il était difficile de lutter à son époque contre la thyphoide.
Sur la photo n° 3 surtout on peut voir la grande ressemblance de cette jeune reine avec la princesse Anne de Bourbon Sicile née Orléans et fille de France (fille de feu Henri,comte de Paris descendant direct du dernier roi a avoir longuement règné en France).
Nemausus
30 août 2012 @ 14:15
Le corps de la reine a été inhumé à l’Escurial et maintenant il est à l’Almudena ? pourquoi cette translation et avoir enlevé le tombeau de la reine du panthéon des infants ? c’est surprenant….
agnes
30 août 2012 @ 14:23
Article passionnant et bien écrit, merci beaucoup.
Jean I
30 août 2012 @ 15:13
Portrait très intéressant aussi d’un point de vue des liens qui se créèrent entre la population et le roi Alphonse XII, qui reste encore aujourd’hui l’un des rois les plus aimés de l’Histoire d’Espagne. On pourra peut-être me le confirmer mais je pense que la reine Maria de las Mercedes a été inhumée ces dernières années à la cathédrale de l’Almudena car c’est elle qui a permis que son édification sur un terrain à proximité immédiate du palais royal. J’ignorais que les reines n’ayant pas eu d’enfant, étaient enterrées à part
C.G.
30 août 2012 @ 15:21
Très joli portrait. Merci
Mélusine
30 août 2012 @ 15:44
Maria de las Mercédès, décédée cinq mois après ses noces, quelle malchance pour cette infante au nom de voiture.
Kalistéa
31 août 2012 @ 11:58
Bonjour notre chère fée.
Pardonnez-moi cette petite mise au point,ce n’est pas parceque j’ai la prétention de tout savoir:
ce ne sont pas les prénommées Mercedes (« nuestra senora de las mercedes » autrement dit:ND des gràces.) qui portent un nom de voiture mais à l’inverse c’est le prénom de l’épouse d’un industriel allemand qui est à l’origine du nom de la firme Mercedes.
J’espère que vous avez passé un bon été et que nous aurons le plaisir de lire vos commentaires sensés et parfois d’un rafraichissant humour …ce qu’on ne saurait dire de tous!…
BAV K.
Michèle
31 août 2012 @ 16:05
Régine si vous me le permettez, car c´est un tout autre sujet.
Mercedes
prénom de la fille de Emil Jellinek. âgée de dix ans.
Emil Jellinek, était un diplomate et homme d’affaires autrichien.
Consul de l’Empire austro-hongrois, concessionnaire de voiture sur la côte d’Azur à Nice, il participait à de nombreuses compétitions automobiles. Exigeant quant à la vitesse, il avait commandé plusieurs modèles de voitures au constructeur allemand Daimler-Motoren-Gesellshaft.
Le commerçant et DMG signèrent bientôt une convention de vente pour des voitures équipées d’un nouveau moteur. Ce moteur fut baptisé du pseudonyme utilisé par Jellinek lors des courses, qui n’était autre que le prénom de sa jeune fille, Mercedes, signifiant “grâce” en espagnol.
Sources Diverses
Mélusine
31 août 2012 @ 17:26
Bien sûr, Kalistéa, l’infortunée infante étant née quarante années avant la fameuse automobile, il faut prendre ma petite blague pour ce qu’elle est.
Cependant, imaginez qu’au lieu de Mercédès le prénom de la fille aînée d’Emil Jellinek ait été « Prudence » ou pire encore « Dolorès » (douleur), ces gloires de l’industrie automobile allemande auraient circulé sous les noms de « Prudence Benz » (invitant fermement le conducteur à la sagesse) ou « Dolorès Benz » (proclamant sans ambiguité l’inconfort de l’auto).
Ouf, avec le Mercédès de mademoiselle Jellinek nous l’avons échappé belle !
Kalistéa
1 septembre 2012 @ 12:38
Bonjour notre fée, votre commentaire est savoureux comme je l’espérais et j’en profite pour remercier aussi MICHElE pour ses mises au point. Ainsi ,il s’agissait d’une petite fille et non d’une épouse…Je devais confondre avec la Micheline de Michelin!
Ce site devrait être instructif comme il l’est aujourd’hui.
BAV K.
agnes
30 août 2012 @ 16:04
La construction de la cathédrale la Almuneda a débuté peu aprés la mort de cette Reine. Le roi voulait qu´elle lui soit dédiée.
chaton
30 août 2012 @ 18:57
quelle triste fin pour cette reine maria
*gustave
30 août 2012 @ 22:59
Mais qu’est-ce qui a causé la mort prématurée de ses frères et soeurs: Amélie 20 ans, Christine 27 ans, Maria 5 ans, Ferdinand 14 ans, M.-Mercedes 18 ans, Philippe 2 ans, et Louis-Marie 7 ans ??
Régine
31 août 2012 @ 07:43
Pour certains, la tuberculose
timsit
31 août 2012 @ 08:15
encore un probleme sur le site pas moyen de lire les commentaires
aubert
31 août 2012 @ 13:30
Timsit vous devriez demander à Régine d’organiser des cours d’utilisation d’ordinateur.
Elle dispose en Némausus d’un professeur tout trouvé!!!
Michèle
31 août 2012 @ 16:28
Il m´est arrivé la même chose, mais j´ai pensé que cela provenait de mon ordinateur, ou de la tempête à Bâle, ce n´est pas grave tout fonctionne de nouveau.
Cosmo
31 août 2012 @ 15:41
Triste destin pour deux jeunes gens qui s’aimaient et furent aimés de la population espagnole.
Le sang de Philippe-Egalité faisait moins horreur aux familles royales (Naples, Belgique, Espagne, Bavière, Saxe-Cobourg…) qu’à certains ultras du site.
aubert
1 septembre 2012 @ 13:14
Peut-être parce que toutes un Philippe-Egalité dans leurs placards.
aubert
1 septembre 2012 @ 13:16
… »toutes ONT un «
Kalistéa
3 septembre 2012 @ 21:04
Quel encombrant squelette,Aubert!
Mais je pense qu’ils font tous très bien avec.
qu’en dites-vous?
BAV K.
RUIZ
14 juin 2016 @ 13:10
je suis à la recherche d’informations sur ma famille, mon arrière grand pére , JUAN INFANTE RODRIGUEZ, est mort en 1889 décembre, aux iles CHAFFARINAS, ou il était en prison avec sa femme, pour avoir participer à la guerre des CARLISTES, dans cette prison 4 enfants sont nés, l’ainé JOSE MARIA DE LOS MERCEDES INFANTE GAILLARDO étonnamment mort à 24 ans sans descendance, le 3 ème est mon grand père FRANCISCO EMILIO DE L’INCARNATION INFANTE GAILLARDO. Je cherche à avoir le plus de renseignements pour comprendre les origines de ma famille