La princesse Sophie, Dorothea, Ulrike, Alice de Prusse voit le jour le 14 juin 1870 au Neues Palais de Potsdam. Elle est le septième enfant de l’empereur Frederic III d’Allemagne et de l’impératrice Victoria, née princesse de Grande-Bretagne. La princesse Sophie est l’une des nombreuses petites-filles de la reine Victoria. Sa naissance arrive à un moment délicat à savoir la guerre franco-allemande de 1870 avec les célèbres batailles de Woerth et Sedan. Son père y prend part et gagne l’admiration de ses troupes.

Quelques jours avant son baptême, la présence de son père à la cérémonie était totalement incertaine. Il arrive finalement quelques heures avant la cérémonie qui se déroule le 24 juillet 1870. Sa mère la princesse Victoria écrivait à ce sujet à sa propre mère la reine Victoria :  » Le baptême s’est bien passé mais l’ambiance était lourde et mélancolique. Les visages des invités étaient inquiets et leurs yeux en larmes. Comme si un malheur mettait de l’ombre à la cérémonie alors qu’elle aurait dû être gaie et bénie« . Le futur empereur Frederic III était en effet parti pour le front à l’aube sans prévenir sa femme et embrasser ses enfants, voulant leur éviter des scènes d’émotion. Les conditions de son baptême étaient un premier signe de sa future vie, ponctuée de tragédies et d’amertume.

Sophie a 7 frères et sœurs : Frederic Guillaume (futur empereur d’Allemagne et dernier empereur), Victoria dite Charlotte (1860-1919), Albert dit Heinrich (1862-1929), Franz dit Sigismund (1864-1866), Friedrieke dite Victoria (1866-1929), Joachim dit Waldemar (1868-1879) et Margrete (1872-1954)

La princesse grandit dans une ambiance familiale très tournée vers l’Angleterre. Sa mère, fille de la reine Victoria souhaite que ses enfants vivent dans la même atmosphère chaleureuse qui régnait au sein de la famille formée par la reine Victoria et le prince Albert et met un point d’honneur à mener une vie très « british », ce qui lui sera toujours reproché par le son fils aîné, le futur (et dernier) empereur d’Allemagne. Sophie dont le surnom est « Sossy » est très proche de ses sœurs Margarete et Victoria. Son père est plus proche des aînés.

Sophie est considérée comme une élève douée et très motivée. Son programme d’éducation était très stricte sans qu’aucune négligence ne soit permise. La princesse était dotée d’une mémoire, dit-on, impressionnante, ce qui l’aidera beaucoup plus tard dans ses devoirs de reine. La princesse séjourne régulièrement auprès de sa grand-mère maternelle en Angleterre et parfois pendant plusieurs semaines. Lorsqu’elle est en Allemagne, Sophie vit auprès de ses parents au Neues Palais de Potsdam ou au Palais du prince héritier à Berlin sur la célèbre artère Unter den Linden.

A l’occasion duJubilé de la reine Victoria en 1887, Sophie et les siens assistent à de nombreuses festivités organisées pour commémorer l’événement. La princesse reste d’ailleurs plus de temps auprès de sa grand-mère et fait la rencontre du prince Constantin de Grèce, fils aîné du roi George I et de la reine Olga de Grèce, née grande-duchesse de Russie. Il est de 2 ans son aîné. La même année, le prince héritier Constantin arrive à Berlin pour y suivre les cours de l’école de Guerre ainsi que des cours en Sciences politiques. A la Cour de Berlin, il retrouve la princesse Sophie de Prusse. Ils apprennent à mieux se connaître et leur relation évolue progressivement

Le père de Sophie devient empereur d’Allemagne le 9 mars 1888 après avoir été 27 ans prince héritier. On le dit animé d’idées plus libérales et souhaitant réformer les institutions de son pays mais Frederic III est gravement malade depuis de longs mois. Il souffre d’un cancer très avancé du larynx. Ses médecins ont des avis divergents sur le traitement. Certains évoquent une ablation du larynx, d’autres des opérations plus ciblées et d’autres encore une simple cure au bon air.

Il était enchanté des fiançailles de sa fille Sophie avec le prince héritier Constantin et les convia à son chevet pour leur présenter tous ses vœux de bonheur. Un mois avant son accession au trône, une opération visant à lui pratiquer une sorte de trachéotomie se passe mal et prive le futur empereur de la parole. Un voyage en Italie avec son épouse n’améliore pas sa santé précaire.

Il ne règne que 99 jours, miné par la maladie mais soutenu jusqu’au bout par son épouse l’impératrice Victoria. L’anniversaire de la princesse Sophie est célébré dans l’intimité familiale le 14 juin 1888. Le lendemain, l’empereur s’éteint à l’âge de 56 ans. C’est le frère aîné de Sophie qui lui succède et qui entend directement imprimer sa marque, à l’opposé de celle amorcée par son père et influencée par sa mère jugée trop britannique. L’impératrice veuve Victoria s’appuie beaucoup sur ses filles les princesses Sophie, Margrete et Victoria pour surmonter son deuil.

L’annonce de leurs fiançailles officielles est retardée de quelques mois suite aux décès des empereurs Guillaume et Frederic. Entre temps, la princesse Sophie se prépare pour ses nouvelles obligations. Elle commence à apprendre le grec, s’informe à propos des coutumes, du folklore,… du peuple grec. Le jour de son arrivée sur le sol grec, la jeune princesse souhaite montrer ses connaissances linguistiques à sa nouvelle patrie et s’adresse à son fiancé en parlant le grec ancien à la surprise générale. Son professeur en Allemagne estimait que le grec ancien était la vraie langue du pays…

Le mariage de Sophie et Constantin était le premier d’un prince héritier ou roi à avoir lieu en Grèce. En effet, le premier roi Othon s’était marié en Bavière et le roi George I en Russie. Comme il n’y avait pas la place suffisante au palais pour héberger les nombreux invités nobles, le roi George demanda l’aide des riches Athéniens qui possédaient de grandes maisons. Ceux-ci mirent donc des chambres de leurs résidences à disposition des invités de marque ainsi que leurs calèches. 

Des tous les invités présents au mariage, l’empereur Guillaume II, frère de Sophie, laisse une très mauvaise impression au peuple mais aussi aux autres invités. Il est arrogant avec une mine autoritaire et un regard hostile. Il montre clairement que rien ne lui plaît dans la capitale grecque sauf les soldats de la garde royale ! Lors de son arrivée le 14 octobre avec son épouse, il est accompagné de 10 bateaux de guerre pour souligner la puissance de son pays… 

Le 15 octobre (ou le 27 selon que l’on prenne le calendrier grégorien ou julien) 1889 à Athènes, la princesse Sophie de Prusse épouse le prince héritier Constantin de Grèce. La cérémonie se déroule en deux temps : une célébration publique selon le rite orthodoxe et une deuxième privée en l’église du Palais royal d’Athènes selon le rite protestant. Le roi George I était en effet resté protestant, raison pour laquelle cette église avait été érigée au sein du palais.

La mariée a choisi de se convertir à la religion orthodoxe un an après son mariage, ce qui lui vaut les foudres de son frère l’empereur. Les Athéniens furent très impressionnés par les feux d’artifices qui illuminèrent pour l’événement le ciel de la capitale.

 

Dans son ouvrage « Mémoires insolites », le prince Michel de Grèce explique l’historique des carrosses de la famille royale grecque. Ceux-ci ont été achetés à la France qui souhaitait se débarrasser d’un carrosse commandé pour l’entrée solennelle du roi Henri V (comte de Chambord) à Paris. Le roi George I de Grèce le racheta. « Sur les portières, on peignit ses armoiries au-dessus de celles de la Maison de France et désormais le carrosse servit lors de tous les mariages de la famille royale grecque à amener la mariée à la cathédrale d’Athènes ». Le carrosse qui conduisit la princesse Sophie de Prusse appartenait donc au comte de Chambord. Le même fut utilisé par la princesse Frederika de Hanovre lors de son mariage avec le prince Paul de Grèce, par la princesse Sophie de Grèce lors de son mariage en 1962 avec Juan Carlos d’Espagne, puis par Anne-Marie de Danemark lors de son union avec le roi Constantin. Aujourd’hui, ce véhicule historique est abandonné dans un dépôt du domaine de Tatoi sans que l’on ait la permission d’y accéder.

Le lendemain, le roi George I de Grèce invita les 400 maires du pays pour un dîner en l’ honneur des jeunes mariés. Certains étaient complètement illettrés et incapables de comprendre ce que le protocole attendait d’eux. Mais le roi George les mit tous très rapidement à l’aise et la cérémonie vira vite à la fête populaire. On raconte l’anecdote suivante au cours de ce dîner en l’honneur de Sophie et Constantin. Le roi George reconnut un ancien cuisinier du palais, devenu maire de son petit village. L’ex-employé du palais tend timidement la main au souverain qui le félicite. « Bravo Jean » lui dit le roi, « je te souhaite de devenir député ». « Merci Votre Majesté, j’ai pu progresser dans la vie ». Et le roi ironique de rétorquer « Je vois, Jean, seulement moi je n’ai pas progressé. Roi tu m’as laissé et roi tu me retrouves ! »

 

Apres son installation à Athènes, Sophie envisage avec beaucoup d’appréhension le début sa nouvelle vie. Dans un premier temps, le jeune couple princier loue la grande maison d’un riche habitant d’ Athènes. Leur palais mit en effet 10 ans avant d’être construit. La mère de Sophie, l’impératrice douairière lui prodigue de nombreux conseils. Femme très cultivée, Victoria connaissait bien l’histoire de la Grèce. Elle conseilla à sa fille de se concentrer sur ses propres œuvres caritatives en marge de celle de la reine Olga. Mère et fille ont échangé une vaste correspondance de plus de 2000 lettres entre 1889 et 1901. Dans l’une de ses lettres, Sophie de Grèce se lamente et explique à sa mère que sa résidence n’est pourvue d’aucun luxe. La réponse de Victoria ne tarde pas et elle tance sa fille en lui faisant remarquer que sa baignoire est faite en marbre de Pendeli (une montagne près d’Athènes) considéré comme le marbre le plus blanc et trop onéreux que pour être acheté en Allemagne… 

Sophie donne naissance à son premier enfant prénommé George le 19 juillet 1890 au domaine de Tatoi. Constantin et Sophie de Grèce auront cinq autres enfants : Alexandre né en 1893 à Tatoi (il sera le futur roi Alexandre, époux d’Aspasie Manos et décèdera des suites d’une morsure de singe), Hélène née à Athènes en 1896 (futur épouse du roi Carol de Roumanie et mère du roi Michel de Roumanie), Paul (futur roi de Grèce et père de l’actuel roi Constantin) né en 1901, Irène (future épouse du prince Aimone de Savoie-Aoste et mère de l’actuel duc d’Aoste) née en 1904 et Katherine (future lady Brandam) née en 1913.

Le prince héritier George a pu être sauvé à sa naissance grâce à l’ intervention de la sage- femme que l’impératrice douairière Victoria d’Allemagne avait envoyée à Athènes. Le bébé avait le cordon ombilical autour du cou. Lors des autres naissances, le gynécologue Konstadinos Louros était présent. Sophie a risqué de perdre la vie lors de la naissance du prince Alexandre. Des années plus tard, le même gynécologue assistait à la naissance de l’enfant du roi Alexandre, la princesse Alexandra. Il assista aussi la princesse Hélène lors de la naissance de son fils unique le futur roi Michel de Roumanie.

La princesse Sophie était considérée comme étant une manique de la propreté et veillant à ce que les poussières soient faites plusieurs fois par jour. Les petites rues d’Athènes étaient souvent très poussiéreuses au passage des calèches, ce qui incommodait Sophie. La chaleur estivale à Athènes lui était insupportable, raison pour laquelle elle partait à cette période soit chez sa mère, soit chez sa sœur Margrete avec qui elle restera toujours très intimement liée. Elle appréciait aussi les séjours dans sa chère Angleterre. Très influencée de la culture anglo-saxone depuis sa naissance, Sophie en fera la première langue parlée avec ses enfants même si sa maîtrise du grec fut très rapide et parfaite. Au début de son mariage, au cours d’une audience, deux dames grecques s’adressèrent à la princesse en allemand en signe de respect. Sophie leur répondit en grec…

Ici, Sophie de Grèce en 1897 lors de la guerre greco- turque. La princesse héritière avait l’habitude de se rendre au chevet des soldats blessés et admis dans un hôpital organisé par ses oins. A ses côtés, sa dame d’honneur Angeliki Kondostavlou qui est restée fidèlement auprès de Sophie jusqu’ a la fin de sa vie.

 

Photo prise l’ époque des fiançailles de la princesse Marie de Grèce, fille du roi George I et de la reine Olga avec le grand duc George Mikhailovich de Russie. Depuis la gauche, le prince Christophe (assis), le grand-duc Michael Nikolaevich ( père du grand-duc George, futur époux de la Princesse Marie ), la reine Olga de Grèce, le roi George I de Grèce, le grand-duc George Mikhailovich ( futur époux de la princesse Marie). L’enfant assis devant eux avec les pieds croisés est le prince Alexandre de Grèce. Derrière, depuis la gauche, le prince Nicholas de Grèce, la princesse héritière Sophie, le prince héritier Constantin, le prince André ( père du duc d’ Edimbourg) et la future mariée, la princesse Marie.

L’année 1901 est une année douloureuse pour Sophie de Grèce puisque sa grand-mère la reine Victoria décède le 22 janvier et sa mère l’impératrice veuve Victoria décède à Friedrichshof. Ci-dessus, l’une des dernières photos avec sa mère et ses frères.

Mère stricte et exigente, elle mettait un point d’honneur à ce que tous ses enfants, se réunissent quotidiennement à 17 heures pour prendre le thé. Le prince Alexandre arrivé en retard, se fit sermonner malgré l’intervention de son père le prince héritier Constantin.

La princesse était habituée à se promener seule dans les rues d’Athènes et se rendait en visite dans des régions plus reculées et plus pauvres du pays. Après ses visites sur le terrain, elle décida de fonder un hospital pour enfants qui porte son nom et existe encore aujourd’hui. De nombreux petits Grecs eurent la chance de pouvoir bénéficier des soins dispensés dans cet établissement médical.

Sophie de Grèce est aussi à la base du projet de plantation d’arbres à Athènes et dans le reste du pays. A cette époque, la capitale et ses alentours ne possédaient aucune verdure.

 

Le 18 mars 1913, le roi George I est assassiné à Salonique. Son fils Constantin lui succède. Sophie devient reine de Grèce. L’avènement du prince héritier Constantin et de son épouse Sophie est très bien accueilli par les Grecs. Une prophétie disait que lorsque Constantin et Sophie (prénoms des derniers souverains de Constantinople avant la prise de la ville par les Turcs) règneraient, la ville redeviendrait chrétienne…

 La Première Guerre Mondiale met la reine Sophie dans une position délicate. On lui reproche sa trop grande promiscuité avec son frère l’empereur d’Allemagne.

La nouvelle reine n’était pas en bons termes avec sa belle-mère la reine Olga. Elle lui demanda d’ailleurs de quitter le palais. La reine Olga retourna dans son pays natal la Russie avant de devoir s’exiler lors de la révolution russe. Sophie n’appréciait guère les dames de la haute société grecque. Elle avait d’autres affinités et souhaita même un temps faire anoblir certaines personnes mais cela ne se concrétisa pas.

En août 1913, la reine Sophie avec les princesses Hélène et Irène ainsi que le prince Paul accueillent le roi Constantin à son retour en vainqueur des guerres balkaniques.

Un violent incendie éclate en 1916 au domaine royal de Tatoi. La reine a juste le temps de sauver sa plus jeune fille Katherine des flammes. On évoquait déjà à l’époque l’hypothèse très probable d’un attentat. Jusqu’à son départ en exil, la reine Sophie s’est impliquée dans l’organisation des hôpitaux du pays, dont certains étaient dotés de matériel sanitaire à la pointe.

En 1917, le roi Constantin abdique pour lui et son fils aîné George. La famille royale part en exil en Suisse. Le deuxième fils de la reine Sophie monte sur le trône mais le roi Alexandre décède le 25 octobre 1920 des suites d’une morsure de singe. Il était marié depuis moins d’un an avec Aspasie Manos. Mariage morganatique dont naîtra la princesse Alexandra, future reine de Yougoslavie.

La reine Sophie avait une faiblesse de cœur pour son fils Alexandre. Alors qu’il était en visite à Paris et qu’elle était en exil, elle essaya de le revoir au cours de se séjour mais cela ne se concrétisa pas. Son grand malheur fut de ne pas pouvoir le revoir avant sa mort. La reine reporta toute sa tendresse sur la princesse Alexandra, fille de son défunt fils Alexandre. Dans ses mémoires la princesse Alexandra de Grèce, devenue plus tard reine de Yougoslavie écrivait « Je menais une vie merveille avec Amama (la reine Sophie) qui m’adorait et me gâtait outrageusement. De tous ses petits-enfants, j’étais la préférée. Amama était grande, mince et très élégante. Elle portait toujours le deuil du roi Constantin. Le noir, le mauve pâle ou le gris argent de ses habits de veuve lui seyaient particulièrement. »

 

Le roi Constantin et la reine Sophie rentrent alors en Grèce et règnent jusqu’à une nouvelle abdication en 1922.

Pendant ce nouvel et bref règne, les mariages des enfants de la reine Sophie et du roi Constantin se succèdent : leur fils aîné George qui règne de 1922 à 1925 épouse à Bucarest la princesse Elisabeth de Roumanie. Mariage sans descendance qui se soldera par un divorce. Sa fille aînée la princesse Hélène épouse le 10 mars 1921 le futur roi Carol de Roumanie. Mariage malheureux dont est issu le roi Michel de Roumanie.

La reine Sophie n’était pas enthousiaste à l’idée du mariage de sa fille Hélène surnommée Sitta avec le prince héritier de Roumanie. Elle estimait que les futurs mariés avaient de trop grandes différences de caractère et avaient grandi avec une éducation fort distincte. La séparation d’avec sa fille était d’autant plus pénible, qu’elle s’était beaucoup appuyée sur elle après la mort de son fils le roi Alexandre. Lors de la cérémonie de mariage à Athènes, Sophie de Grèce constata la distance de certains membres du Gotha à son égard, attitude qui se répètera plus tard lors du nouvel exil.

 

Le professeur K.Louros écrit dans ses mémoires que pendant la maladie du roi Constantin, la reine restait jour et nuit a son chevet, essayant d’apaiser sa souffrance. Le roi ne la reconnaissait plus et dans ses délires demandait sa présence. Le médecin raconte que la souveraine avait alors fait place à une femme dévouée à son époux, aimante jusqu’au bout. Les souverains grecs donnaient l’image d’un couple uni mais il n’en fut pas toujours ainsi. Le roi Constantin entretint longtemps et ce jusqu’à son décès une relation que les Historiens qualifient toutefois de platonique et épistolaire avec la comtesse Paola d’Ostheim. On raconte que Sophie était allée se confier à son beau-père à propos des écarts de conduite de son époux. Le roi George lui conseilla de s’entretenir à ce sujet avec sa belle-mère la reine Olga… La reine Sophie perd son époux le roi Constantin qui décède le 11 janvier 1923 à Palerme en Sicile.

En exil, Sophie de Grèce a habité la villa Spoletti à Florence. La porte de sa maison était, dit-on, toujours ouverte aux Grecs qui souhaitaient lui rendre visite. Un jour, une boîte avec l’inscription « A notre chère reine, deux Grecs » lui fut apportée. A l’intérieur se trouvait de la terre de Grèce. La reine expliqua alors « Ils me l’ont apporté comme cadeau de Noël. Je ne désire rien d’autre que cela… »

Ci-dessus, une photo rare où l’on peut distinguer la reine Sophie de Grèce qui se trouve à côté de la princesse Frederika de Hanovre (future épouse de son fils le prince Paul et future reine de Grèce). De gauche à droite, au premier rang, la princesse Katherine de Grèce , la princesse Frederika de Hanovre, la reine Sophie de Grèce, la princesse Victoria – Louise de Hanovre, née princesse de Prusse (mère de Frederika ), la princesse Margrete de Prusse (sœur « préférée » de la reine Sophie), les frères de la princesse Frederika. Au deuxième rang, de gauche à droite, la princesse Irène de Grèce (fille de la reine Sophie, future épouse du duc d’Aoste) , le prince George de Hanovre, le prince Paul de Grèce (futur époux de la princesse Frederika de Grèce) et Ernst-August III de Hanovre (père de la princesse Frederika)

Au cours de l’été 1931, la reine sombre progressivement dans une grande mélancolie. Elle reste prostrée durant des heures dans ses pensées silencieuses. Ses proches lui conseillent alors d’accomplir un voyage en Angleterre. Mais à son retour en octobre 1931, sa santé ne présente aucune amélioration. Elle commence même à ressentir de vives douleurs au niveau de l’estomac. Elle voyage jusqu’à Francfort pour se faire examiner par des spécialistes. Lors de l’opération qui lui est pratiquée, les médecins constatent un cancer très avancé. Ils annoncent à ses enfants que la reine va mourir dans quelques jours voire au maximum quelques semaines. Toutefois après cette intervention chirurgicale, elle ne se plaint plus de douleurs. 

Avant son hospitalisation, elle avait écrit une lettre depuis son lieu d’exil : « Arrêtez les querelles intérieures. Notre patrie, ce beau pays, a besoin de se remettre des malheurs qu’ elle a traversés. Vous devez tous travailler avec toute votre force et avec prudence pour la prospérité de notre glorieuse mais si profondément traumatisée patrie. » Paroles toujours d’actualité 80 ans après sa mort… 

Quelques instants avant de mourir, la reine Sophie de Grèce appelle ses enfants auprès d’elle. « Vous êtes tous près de moi ?.Non, il manque un.. Alexandre (NDLR : décédé en 1920). Où est Alexandre? » Elle le cherche du regard puis appelle son défunt époux.

Souffrant d’un cancer pendant plusieurs années, la reine Sophie de Grèce, née princesse de Prusse, sœur du dernier empereur d’Allemagne, mère de 3 rois successifs de Grèce, grand-mère du roi Constantin de Grèce, du roi Michel de Roumanie, de la reine Alexandra de Yougoslavie et de la reine Sophie d’Espagne, s’est éteinte le 13 janvier 1932 à Francfort. Elle n’a pas connu la dernière restauration de la monarchie avec le règne de son fils le roi George II de 1935 à 1947, auquel succèdera son autre fils Paul (père du roi Constantin, de la princesse Irène et de la reine Sophie d’Espagne).

La reine Sophie d’Espagne raconte dans ses entretiens avec la journaliste Pilar Urbano que lors de sa naissance en 1938, la foule présente près du domicile de ses parents à Athènes ayant appris que le bébé était une fille, se mit à crier le prénom de « Sophie » en référence à sa grand-mère maternelle, raison pour laquelle la petite princesse fut finalement baptisée ainsi.

Une petite-fille de la reine Sophie de Grèce qui partage avec son aïeule d’étranges similitudes de vie : un père décédé des suites d’une longue maladie et elles ont toutes les deux perdu leur mère et grand-mère la même année à savoir la Victoria et l’impératrice Victoria d’Allemagne en 1901 pour la reine Sophie de Grèce et la princesse Victoria Luise de Hanovre et la reine Frederika de Grèce en 1981 pour la reine Sophie d’Espagne.

La dépouille de la reine Sophie de Grèce a été inhumée en 1936 sur le domaine de Tatoi auprès de celle de son époux. Ses dernières paroles n’avaient-elles pas été « Je pars mes enfants … Aimez la Grèce …. ». Un amour qui ne lui fut pourtant pas toujours réciproqué. (Un tout grand merci à Tepi pour son inestimable et si précieuse aide, ses recherches bibliographiques et d’archives ainsi que ses si nombreuses traductions –  Merci aussi à Vassilis Barkoulas por la photo de la tombe de la reine Sophie au domaine de Tatoi- Merci à Arthuro E.Beéche pour la photo de la reine Sophie avec la princesse Fredrika enfant –  Sources bibliographiques : « Sofia » d’Andreas Skandamis – « Pour l’amour de mon Roi » d’Alexandra de Yougoslavie – « Born to rule » de Julia P.Gelardi – « Les années passées « du Professeur Konstantin Louros – « Constantin I, roi des Héllènes » de Léon Maccas – « Mémoires par la Cour du roi George I » de Christini Kosti (dame d’honneur de la reine Olga de Grèce) – « Mémoires insolites » de Michel de Grèce)