Voici une toile de James Tissot « Le Cercle de la Rue Royale » qui date de 1868. On peut la voir à l’exposition « Spectaculaire Second Empire » au musée d’Orsay à Paris. On y distingue entre autres le prince Edmond-Melchior de Polignac, le comte Alfred de la Tour-Maubourg, le comte Etienne de Ganay et le baron Hottinguer.
Zeugma
17 décembre 2016 @ 09:47
Merci à « Noblesse & royautés » de donner un coup de projecteur sur ce tableau qui est sans doute parmi les plus intéressants de l’exposition.
Les hommes sont réunis sur la terrasse d’un cercle élégant qui donne sur la place de la Concorde. Comme dans les clubs anglais, il s’agit d’être entre-soi, entre personnes qui se sont cooptées. Quitte à s’ennuyer quelque peu …
Les personnages sont élégamment habillés dans une attitude à la fois figée et décontractée.
Comme le signale l’article de présentation, chacun est bien identifié.
Un mot sur le baron Hottinguer.
Cette très vieille famille d’origine Suisse fut anoblie en France sous le premier empire et admise à l’association de la noblesse française (ANF) le 25 mai 1946.
Elle occupe une demie colonne dans mon vieux Bottin et reste présente dans le métier de la banque sur la place de Paris.
Un autre tableau de James Tissot (1836-1902) voisine « Le Cercle de la Rue Royale ».
Il s’agit du fascinant portrait de la famille Miramon.
Le marquis, sa femme – somptueusement habillée – et ses enfants posent en compagnie de leur chien sur la terrasse de leur maison de campagne.
Antoine
17 décembre 2016 @ 10:59
On y voit aussi l’élégant Charles Haas, modèle de Swann, dans l’encadrement de la porte-fenêtre. James Tissot est un excellent peintre qui semble sortir d’un purgatoire où il était injustement relégué par ceux qui n’aiment pas la peinture académique. En Angleterre et aux Etats-Unis, il est considéré comme un artiste de premier plan. En France, il est de bon ton de tordre le nez devant le talent d’un compatriote.
Pierre-Yves
18 décembre 2016 @ 14:49
Vous semblez oublier que Delacroix, Ingres, Courbet, Manet, Monet, Cézanne, Pissaro, Bonnnard, Marquet, Matisse, Nicolas de Stael et des quantités d’autres sont extrêmement appréciés en France.
Antoine
19 décembre 2016 @ 15:13
La liste des peintres de talent (ceux de l’école lyonnaise, en particulier) qui n’ont pas bénéficié des suffrages des bobos parisiens de toutes les époques est bien plus longue !
Jean Pierre
19 décembre 2016 @ 17:59
Bien dit.
Et paradoxe des paradoxes, voilà que sur ce site on défend la mémoire du communard Tissot, et pourquoi pas Louise Michel aussi ! Cher PY, comment faire comprendre que l’on ne peut pas pleurer le saccage des Tuileries et encenser ceux qui les détruisent.
framboiz 07
17 décembre 2016 @ 13:49
Intéressante fiche Wikipédia sur Edmond Melchior de Polignac.
A Reims, le Prince Alain de Polignac a contribué à la naissance de la cuvée Louise de chez Pommery .
Dans le Parc Pommery , que Mme Pommery et son petit-fils Melchior avaient créé pour ses ouvriers ,on trouve encore un buste de Melchior(de Polignac ,ami de Coubertin) .Celui-ci, aidé par Georges Hébert, adepte de gymnastique naturelle , créa en 1912, un collège d’athlètes .C’est dans l’esprit de la période 1870-1914 , où l’on prépare les jeunes à une guerre de revanche, contre l’Allemagne…
Reims est à 120 km de Sedan , où Napoléon III connut la défaite en 1870 .Elle sera la ville la plus détruite de la guerre 14-18 , notamment la cathédrale, qui fut reconstruite grâce aux Rockefeller. Sa bibliothèque fut payée par Carnegie , le magnat de l’acier (Allez la visiter gratuitement et regardez son entrée , la salle de lecture !).Une fondation américaine offrit un Hôpital américain pour enfants , toujours en fonction .
Le parc s’appelle maintenant Parc de Champagne, il est géré par la ville .Le Champagne Pommery est devenu Vranken , les caves y offrent de belles expositions d’art contemporain .En bas du Parc ,on peut visiter la Villa Louise , art déco , sublime !
Je crois que le parrain du Prince Albert de Monaco est un Polignac , Alain peut-être ??
Après Melchior et les Hottinguer , qui nous parlera des deux , qui restent ?
Voilà, un tableau , qui permet de se cultiver et de ne pas critiquer les tenues ! (Ce que je fais aussi, d’ailleurs !)
Bon dimanche à toutes & tous !
Jean Pierre
18 décembre 2016 @ 11:34
Il y a actuellement un spot sur le Pommery chez les cavistes N****, je conseille à tout le monde de faire ses réserves.
Gérard
19 décembre 2016 @ 16:36
Le parrain du prince Albert était le prince Louis de Polignac (1909-1996) qui a toujours été très proche du prince Rainier, comme d’ailleurs de la princesse Grace. Le prince Louis était l’oncle du prince Alain, fils d’Edmond. Louis n’eut pas d’enfant de son bref mariage avec Claire Clémence de Maillé de La Tour-Landry.
Muscate-Valeska de Lisabé
17 décembre 2016 @ 15:35
Une réunion de francs-maçons? ;-)
Gérard
19 décembre 2016 @ 09:27
Le tableau fut peint par Tissot en 1868. Ses dimensions sont 175/281 centimètres. Tissot né à Nantes en 1836 mourut en 1902 à Chenecey-Buillon, Doubs.
L’œuvre a été financée par chacun des participants pour la somme de 1 000 francs ce qui représente environ 25 000 €.
À la suite d’un tirage au sort Hottinguer en est demeuré le propriétaire et le tableau a été vendu par ses descendants en 2011 au Musée d’Orsay pour environ 4 millions d’euros.
Une douzaine d’années auparavant Tissot pour 30 ou 40 francs peignait des visages de servantes ou de concierges d’hôtel.
Voir : https://thehammocknovel.wordpress.com/2013/05/06/a-spotlight-on-tissot-at-the-mets-impressionism-fashion-and-modernity/
La scène représente la terrasse du premier étage de l’hôtel de Coislin, siège du Cercle de la Rue Royale fondé en 1852 et qui a fusionné en 1916 avec le Cercle de l’Union devenu Nouveau Cercle de l’Union.
On remarque à travers les balustres donnant sur la place de la Concorde la circulation hippomobile.
Sur le tableau on voit, outre un chien, de gauche à droite :
1/ Alfred de Faÿ, comte puis en 1886 marquis de La Tour-Maubourg (1834-1891), fils de Charles Armand Septime de Faÿ, comte de La Tour-Maubourg, ambassadeur, et d’Octavie Daru. Il a 34 ans, est assis sur la balustrade, un seul bouton de son veston est fermé, celui du haut, à l’anglaise, en Richmond Style. Il fut attaché d’ambassade, demeura célibataire et fut le dernier de sa lignée.
2/ Alfred (Thérèse Armand), marquis du Lau d’Allemans (1833-1919), ancien officier, qu’on retrouvera chez Proust sous le nom du Lau d’Ollemans. Il a 35 ans.
Il est fils de Pierre Marie François Auguste Alfred et de Françoise Mathilde Legrand de Boislanry. Il avait succédé à son grand-père comme chef de famille en 1864. Il demeurera célibataire.
3/ Étienne, comte de Ganay (1833-1903), conseiller général de Saône-et-Loire. Sur le tableau il a 35 ans. Fils du 8.
4/ Le capitaine Coleraine Robert Vansittart, Esquire, des Light Dragons (1833-1886). 35 ans, il a aussi adopté le style Richmond.
5/ René de Cassagne de Beaufort, marquis de Miramon (1835-1914), époux de
Thérèse Feuillant (1836-1912). 33 ans, assis sur le sofa.
Le marquis et la marquise ont également été peints en 1865 par Tissot avec leurs deux enfants aînés Léon (1861-1884) et Geneviève (1863-1924), et avec leur chien, sur la terrasse de leur château de Paulhac, Haute-Loire, et ce tableau fut vendu par la famille au Musée d’Orsay.
Tissot a également peint la marquise en 1866 et le tableau a été vendu par la famille en 2007 au J Paul Getty Museum à Los Angeles.
6/ Julien, comte de Rochechouart (1828-1897), fils de (Louis Victor Léon) Augustin, général comte de Rochechouart et d’Élisabeth Ouvrard. 40 ans, il est assis une cigarette à la main droite. Sa mise s’assortit au dalmatien.
Il semble qu’il s’agisse de lui aussi prénommé Louis Aimery Victurnien (capitaine d’infanterie, médaille militaire, officier de l’ordre de Pie IX, etc., époux de Marie du Vergier de La Rochejaquelein) plutôt que de son frère cadet Louis Jules Émilien (1830-1879), ministre plénipotentiaire à Haïti mort sans alliance.
7/ Rodolphe, baron Hottinguer, banquier, régent de la Banque de France, (1835-1920), fils de Jean-Henri Hottinguer et de Caroline Delessert. Il a 33 ans et est assis sur le sofa.
Il est le chef de la famille et le troisième baron depuis 1866 après son père Jean- Henri (1803-1866). Il est également vice-président de la société qu’on appellera PLM et en 1863 il a contribué à la fondation de la Banque impériale ottomane.
Aujourd’hui, Rodolphe son arrière arrière petit-fils, qui a succédé à Henri mort en 2015, est le septième baron. La famille a cependant dû subir des conflits familiaux et des difficultés économiques.
8/ Charles-Alexandre, marquis de Ganay, ministre plénipotentiaire, collectionneur, (1803-1881), époux d’une Pourtalès, père du 3.
Son profil n’évoque guère un homme de 65 ans. Mais en 1868 le marquis c’est bien lui.
9/ Gaston, baron de Saint-Maurice, (1831-1905), grand écuyer du khédive Ismaïl d’Égypte en 1868, collectionneur d’art islamique, il fit construire un bel hôtel au Caire, qui fut détruit en 1937.
Pour cet hôtel construit par Ambroise Baudry, il avait utilisé des matériaux anciens provenant de maisons en ruine détruites au Caire. Les décors furent remontés ensuite dans la nouvelle chancellerie de l’ambassade de France au Caire. Il a 37 ans sur cette peinture.
10/ Le prince Edmond de Polignac (1834-1901), compositeur, mécène, fils de Jules, prince de Polignac, président du Conseil sous Charles X, et de Mary Celeste Parkins, époux de Winnaretta Singer, fille d’Isaac Merritt Singer.
Lors de ce mariage la mère du peintre Jacques-Émile Blanche lui dit : « C’est le mariage de la machine à coudre avec la lyre. » À quoi Edmond répondit : « Non Madame, c’est le mariage du dollar avec le sou ! »
Il a en 1868 34 ans. Il tient à la main son étude sur Louis XVII.
Edmond se vêtait toujours chaudement. Proust dit de lui « La nature, qui continue les races et ne prévoit pas les individus lui avait donné un corps élancé, un visage énergique et fin d’homme de guerre et d’homme de cour ».
11/ Gaston, marquis de Galliffet, prince de Martigues, le célèbre général et qui fut ministre de la Guerre, (1831-1909), époux de Florence Georgina Laffitte, fille du comte Charles Laffitte. Il a alors 38 ans.
Dandy et massacreur des Communards il sera appelé pour ces deux raisons « le marquis aux talons rouges ».
12/ Charles Haas (né vers 1833, mort en 1902), l’un des modèles du Charles Swann de Proust, fils d’Antoine Haas, de Francfort, fondé de pouvoir chez Rothschild Frères, et de Sophie Lan, amant de Sarah Bernhardt, et père de Luisita, qu’il eut de la marquise d’Audiffret(-Pasquier), née Adélaïde Ramirez de Arellano.
Charles a alors 35 ans. Tissot, fils d’un drapier et chapelier, est très attentif à la mode. Haas est debout coiffé d’un chapeau de soie de chez Delion au passage Jouffroy.
Ghislain de Diesbach écrit à son sujet dans son Proust qu’il avait « réussi ce tour de force d’être l’ami de toutes les femmes sans jamais en épouser aucune, l’égal ou presque, d’un Rothschild sans en avoir la fortune, et enfin le commensal attitré de plusieurs grandes maisons du faubourg Saint-Germain malgré son origine israélite. »
Zeugma
19 décembre 2016 @ 18:55
Merci, Gérard, pour ce commentaire savant.