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Situé dans les Yvelines à proximité de Rambouillet, le château de la Celle-les-Bordes (inscrit à l’ISMH château et parc), vieux de plus de quatre cents ans, est l’un des plus anciens d’Ile-de-France encore conservés. Monsieur Thierry Gobet, qui aime à se définir comme conservateur privé, offre aux lecteurs de Noblesse & Royautés une visite inédite de sa demeure qu’il restaure et embellit avec le plus grand soin.

C’est dans un château porteur d’une longue histoire que nous accueille Thierry Gobet. Historien passionné par les vieilles pierres, ce grand amateur d’art a choisi depuis maintenant plus de dix ans de vivre la vie de château et de redonner tout son lustre à sa propriété : un véritable défi aujourd’hui, au XXIe siècle.

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On ne peut évoquer l’apport de Thierry Gobet au château de la Celle sans évoquer son passé prestigieux. La Celle-les-Bordes devint le fief de la famille de Harville vers 1363. Claude de Harville (vers 1555-1636), comte de Harville et marquis de Palaiseau, compagnon d’Henri IV, fut gouverneur de Compiègne. Il épousa Catherine Jouvenel des Ursins, descendante d’une très grande lignée, en 1579 et entrepris la construction de l’actuel château de la Celle entre 1607-1614 soit vingt ans environ avant celle du pavillon de chasse de Louis XIII à Versailles et soixante ans avant celle du château de Dampierre. Vers 1717, une aile reliée au corps de logis fut construite.

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Ce bas-relief de pierre commandé et installé par Thierry Gobet au dessus de l’entrée principale conserve le souvenir du constructeur. Dans des écus soutenus à gauche par un griffon et à droite par un ourson s’inscrivent respectivement les armes de la famille de Claude de Harville et de Catherine Jouvenel des Ursins. Il est l’œuvre des ateliers Saint-Jacques de Saint-Rémy-lès-Chevreuse, notamment à l’origine de nombreuses restaurations dans le parc du Château de Versailles (fonderie de Coubertin).

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Dans la salle à manger du château, un portrait de Claude de Harville peint au XVIIIe siècle orne la cheminée pour laquelle il a été commandé.

Au cœur de la giboyeuse forêt d’Yveline où il est voisin du château du Marais, propriété du grand ministre d’Henri IV Sully puis du fameux Boni de Castellane, ami de la duchesse d’Uzès ; de l’ancien château de Saint-Hubert, rendez-vous de chasse de Louis XV, et du château de Rambouillet, propriété royale en 1783, le château de la Celle reçut la visite de tous les rois de France jusqu’à la Révolution. La reine Marie-Antoinette y prit le souper après une journée de chasse.

A partir de la seconde moitié du XVIIIe siècle, au gré des héritages, des ventes et des achats, plusieurs familles habitèrent le château. En 1870, il fut acheté aux enchères par Emmanuel de Crussol d’Uzès (1840-1878). Également propriétaire dès 1872 du château de Bonnelles, le duc de Crussol fonda cette même année l’équipage de chasse à courre Rallye Bonnelles.

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A la mort du duc de Crussol en 1878, son épouse la duchesse d’Uzès (1847-1933), née Anne de Rochechouart de Mortemart hérita du château. A nouveau, la Celle connut de grandes heures avec l’activité de vénerie que lui consacra sa propriétaire. La meute du Rallye Bonnelles fut installée dans l’aile en retour. Une société brillante se réunissait au château de la Celle. Parmi les invités de marque, la reine Amélie de Portugal y séjourna avant 1914. Ce portrait réalisé en 1882 représente la duchesse d’Uzès à l’âge de trente-cinq ans.

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Un départ de chasse de l’équipage Bonnelles dans l’entre-deux-guerres. Au premier plan, la duchesse d’Uzès. Elle monta à cheval, en amazone, jusqu’à la veille de sa mort à l’âge de quatre-vingt-six ans.

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Son petit-fils Pierre de Cossé-Brissac (1900-1993), 12e duc de Brissac, hérita du château en 1936. A gauche, il est représenté devant le portrait de la duchesse d’Uzès. A droite, la visite de la Reine mère, Elizabeth Bowes-Lyon, au château en 1986. Elle est entourée du duc de Brissac et de son épouse, May née Schneider (1902-1999). Les héritiers se séparèrent du château que la famille de Thierry Gobet acquit en 2004.

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Depuis plus d’un siècle, le château est réputé pour sa collection de près de deux mille quatre cents massacres de cerf, la première de France, ornant chacun des murs et des plafonds des salles de réception du rez-de-chaussée, jusque dans les escaliers et sur les façades extérieures. Voici une vue du Grand Salon. Tous les cerfs ont été chassés à courre en forêt de Rambouillet. Sur chaque massacre sont inscrits la date, le lieu et les circonstances de la prise de l’animal. Pour certains, l’intérêt est d’autant plus grand que les lieux n’existent plus aujourd’hui. Ces massacres, numérotés, ont été pour la majorité installés à l’époque de la duchesse d’Uzès.

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L’un des trophées les plus célèbres de la collection, mondialement connu des spécialistes, est celui des deux dix cors aux bois enchevêtrés dont la prise remonte à 1905. Les bêtes ont été trouvées dans cette posture, les bois ainsi coincés après une lutte qui avait déjà tué l’une d’elle.

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Le thème cynégétique se retrouve jusque dans le décor des bras de lumière, ici d’époque Louis XV.

Thierry Gobet repris la demeure vide, hormis la collection de massacres. Depuis, il entreprit d’importants travaux d’entretien et d’embellissement. A force de patience, de courage et d’ investissements, sans oublier la passion, le châtelain réussit à remeubler et faire revivre cette ancienne demeure. Aujourd’hui encore, travaux et acquisitions se poursuivent. Pour les rénovations et l’entretien du château et de son parc. une véritable équipe de spécialistes est nécessaire : il doit faire appel à différents artisans spécialisés traditionnels : ferronnerie, ébénisterie, marbrerie, restauration diverses.

Thierry Gobet est soucieux de la pérennisation de son œuvre. Il se définit comme le maillon entre le passé et le futur. Conseillé dans ses travaux par des spécialistes dont un conservateur du patrimoine, il accorde une place prépondérante au respect des traditions, des matériaux et des techniques. La recherche de l’authenticité, même dans le cas de créations, ne quitte jamais son esprit. Par exemple, à défaut de pouvoir retrouver une porte d’époque Renaissance à l’entrée du château – la porte d’origine n’existant plus – il fit exécuter, selon les techniques de l’époque, une nouvelle porte dans une pièce de bois vieille de quatre cent ans qu’il orne de panneaux décoratifs d’époque Renaissance.

En terme d’acquisitions, Thierry Gobet se concentre sur sa passion pour l’art de la Renaissance. Il ne néglige aucune piste pour dénicher la perle rare : il arpente salons et salles de ventes aussi bien en France qu’à l’étranger, noue d’étroites relations avec les antiquaires et peut compter sur ses nombreux contacts.

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Grand Salon du rez-de-chaussée. Ces deux fauteuils, dont le dossier est orné à gauche des armes des ducs d’Uzès et à droite des armes des ducs de Brissac, évoquent le souvenir des anciens propriétaires. Le duc de Brissac a dessiné les motifs du cerf et des trompes de chasse sur l’assise dans les années 1950.

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Grand Salon. Table à gibier Louis XIV sur laquelle repose un groupe animalier en bronze de Pierre-Jules Mène. La duchesse d’Uzès a possédé au château un bronze identique.

Si le château de la Celle-les-Bordes est privé, Thierry Gobet s’est vite pris au jeu de l’ouvrir aux amateurs. Un seul guide : le maître des lieux en personne. En effet, qui d’autre mieux que lui pourrait faire partager au public sa passion pour l’histoire du château et des objets ?

Le châtelain ne manque aucune occasion de laisser le public admirer ses collections. « Les belles choses appartiennent à ceux qui les aiment ! » est son dicton.

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Dans l’entrée, l’escalier Renaissance couvert d’une voûte en berceau et orné d’objets décoratifs du XVIe siècle conduit à la grande galerie du premier étage. Face à nous, une tapisserie d’Aubusson du XVIIe siècle représente Alexandre couronné par la Victoire, réplique d’époque de l’une des pièces de la tenture des Batailles d’Alexandre commandée par Louis XIV au château de Versailles.

La galerie de l’étage est un véritable musée de la Renaissance composé de pièces uniques dont nous avons pu, par souci de sécurité, reproduire les photos. Le visiteur peut y découvrir de rares vestiges architecturaux antiques, des tapisseries de Bruxelles, d’armoires d’époque dans la goût d’Hugues Sambin, des dressoirs et des consoles, des tableaux flamands, des colonnes de marbres, des sculptures, des bustes, des pièces de majoliques… un concentré de tout ce que les artistes des XVIe et XVIIe siècle, voire antérieurement, ont pu faire de meilleur.

Thierry Gobet a pris la plume pour faire partager son expérience. Je suis châtelain… Une aventure au XXIe siècle, édité chez Lettres du Monde en 2010 a été récompensé du Prix Renaissance en 2011. Historien et économiste, notre hôte a publié France : Les véritables enjeux aux éditions Jean Piccolec en 2013, récompensé par le Prix de l’Excellence économique. Dans cet essai stimulant où il dresse un bilan de la situation de la France, l’auteur émet plusieurs propositions pour que le pays retrouve sa « puissance » et sa souveraineté à la fois dans l’Europe et dans le monde.

Nous remercions chaleureusement Monsieur Thierry Gobet de nous avoir reçu au château de la Celle et fait découvrir ses collections. (Article et photos d’Alexandre Cousin – Photo de couverture : Thierry Gobet devant le château de la Celle-les-Bordes © D.R.)

Château de la Celle-les-Bordes – Monsieur Thierry Gobet – 78720 La Celle-les-Bordes – Contact : 01.34.85.22.02

Visites guidées de la propriété sur réservation à partir de 25 personnes. Durée : environ deux heures, hors visite du parc libre.